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Embrillancements et turbulence dans la région de transition et la couronne

3. Prise en compte du refroidissement dans les boucles coronales et calcul de

4.2. Embrillancements et turbulence dans la région de transition et la couronne

Il reste des incertitudes du côté des données de physique atomique nécessaires pour calculer la densité à partir de la radiance (fonction de contribution G(T )) ou de l’opacité (coefficients de l’Éq.4.11). Ainsi, suite au travail deDupree(1972) sur les ions dont la structure électronique s’apparente à celle de l’atome de lithium (séquence iso-électronique du lithium), Judge et al.(1995) ont montré que l’analyse de mesure d’émission différentielle échoue sur les séquences iso-électroniques du lithium et du sodium. En particulier,Del Zanna et al. (2001) ont montré que les modèles de physique atomique sous-estiment la radiance de SVI

93.3 nm (qui appartient à la séquence iso-électronique du sodium) d’un facteur 3, ce qui veut dire que notre moyenne de 〈ne〉RMSest surestimée d’un facteurp3. Ceci ne va pas dans le bon sens pour rendre 〈ne〉RMScompatible avec 〈ne〉, mais comme l’origine du comportement anormal de la radiance des raies des ions de ces séquences iso-électroniques est inconnu, on peut imaginer qu’un effet similaire pourrait aboutir à une surestimation de la densité calculée à partir de la radiance.

Malgré les difficultés rencontrées, nous pensons qu’une meilleure modélisation de la structure fine de la région de transition (réseau chromosphérique et rugosité) devrait per-mettre d’obtenir de meilleures mesures d’opacité. Avec d’autres raies, qui seraient émises par des ions de différentes séquences iso-électroniques, ou avec de meilleures données de physique atomique, la combinaison de mesures de radiance et d’opacité permettrait alors d’obtenir un profil vertical de température et de densité dans la région de transition.

4.2. Embrillancements et turbulence dans la région de

transition et la couronne

Article (inclus p.108) :Buchlin et al.(2006)

Avant cette étude sur l’opacité de SVI93.3 nm, j’avais déjà utilisé les mêmes données du Soleil entier pour obtenir des propriétés de structures, interprétées comme des événements de chauffage (tels que modélisés dans le Chap.2), et de la turbulence dans la région de transition (Buchlin et al.,2006). Ces observations sont en effet idéales pour une telle étude, qui nécessite des données spectroscopiques sur de grands champs de vue et avec une bonne résolution spatiale.

4.2.1. Turbulence : spectres des champs observés

Plus précisément, il s’agit d’abord d’obtenir à partir de données observationnelles des spectres des champs observés, qui pourraient être comparés aux spectres des champs de vitesse et magnétique prévus par les modèles de turbulence (Chap.6).

Des spectres en loi de puissance de pente −2.5 à −2.7 par exemple ont déjà été obtenus à partir des radiances en rayons X parMartens et Gomez(1992);Gómez et al.(1993a);Benz et al.(1997) avec Yohkoh/SXT, en UV (raie du FeXII) parBerghmans et al.(1998), et dans le visible, avec une pente de l’ordre de −5/3 à l’échelle de la granulation photosphérique, par Espagnet et al.(1993). Bien que ces spectres de la radiance indiquent l’existence d’échelles différentes et leur importance relative, ils ne donnent pas d’indication directe sur les spectres

4. Observations de la structure de l’atmosphère solaire, des embrillancements et des flots

Radiance Décalage Doppler

FIGURE4.5. – Spectres de Fourier de cartes de la radiance spectrale et du décalage Doppler de SVI93.3 nm, sur un champ de vue au centre du Soleil, le 21 juillet 1996. Adapté de la Fig. 11 deBuchlin et al.(2006).

des champs de vitesse et magnétique5.

Il est donc intéressant d’obtenir directement des spectres de la vitesse et du champ magnétique. Pour le champ magnétique dans la photosphère (en projection sur la ligne de visée),Abramenko et al.(2001) par exemple trouvent des spectres en loi de puissance, d’indice −1.7 (proche d’une loi de Kolmogorov) dans une région active, et d’indice −1.3 dans une région calme.Abramenko et al.(2001) interprètent cette pente plus faible dans le Soleil calme comme l’effet d’une dynamo à petite échelle, locale dans la photosphère (comme dans les simulations deCattaneo,1999), provoquant une augmentation de l’énergie magnétique aux grands nombres d’onde.

L’utilisation des données spectroscopiques de SUMER permet d’accéder au champ de vitesse lui-même, et devrait donc permettre d’obtenir un spectre du champ de vitesse qui pourrait être comparé aux théories de turbulence. C’est ce que nous avons fait dansBuchlin et al.(2006), en intégrant le spectre de Fourier en deux dimension P2D(~k) sur des anneaux concentriques de rayon k, ce qui donne un spectre unidimensionnel P(k) (Fig.4.5à droite). Malheureusement, les données semblent trop bruitées pour cela (en raison des données elles-même et de la méthode de compression à bord), car le spectre du champ de vitesse est globalement plat (à droite dans la figure).

Le spectre du champ du pic de la radiance spectrale de S VI93.3 nm (à gauche dans la figure) est lui une loi de puissance d’indice −1.8, une pente intermédiaire entre celles trouvées précédemment en UV ou en X et en visible. La cassure du spectre vers les échelles plus grandes que celles de la supergranulation est par contre compatible avec ce qui avait été trouvé par ces auteurs.

4.2. Embrillancements et turbulence dans la région de transition et la couronne

FIGURE4.6. – Coefficient d’aplatissement du champ de décalage Doppler de SVI93.3 nm, à différentes dates (lignes fines), et leur moyenne (ligne épaisse). Extrait de la Fig. 13 deBuchlin et al.(2006).

4.2.2. Intermittence : fonctions de structure

La turbulence peut dans certains cas être intermittente, c’est-à-dire que le flux d’énergie dans l’intervalle inertiel du spectre de la turbulence n’est pas constant (voir Sec.1.4). L’in-termittence peut être caractérisée par les « fonctions de structure », définies en fonction de l’échelle`, pour un certain indice p et pour un certain champ a(~x), par6

Sp(`) ≡¯

¯a (~x + ~`) − a(~x)¯¯ ¯

pE

~x,k~`k=` (4.21)

S’il n’y a pas d’intermittence, les Sp(`) sont des lois de puissance en ` d’indice ζpdépendant linéairement de p (ζp= p/3 pourKolmogorov,1941), ce qui veut dire que les distributions des incréments normalisés du champ sont identiques quelque soit l’échelle` ayant servi à définir ces incréments. Au contraire, desζpdépendant non-linéairement de p sont une signature d’intermittence, traduisant le fait que les ailes non-gaussiennes des distributions des incréments normalisés du champ sont de plus en plus larges au fur à mesure que l’échelle décroît.

Dans la Fig.4.6, j’ai tracé plus spécifiquement le coefficient d’aplatissement (« flatness ») des incréments spatiaux de vitesse Doppler de SVI93.3 nm, c’est-à-dire F (`) ≡ S4(`)/(S2(`))2, ce qui correspond à la kurtosis7de la distribution des incréments du champ de vitesse Doppler dans le champ de vue de SUMER en fonction de l’échelle`. La fonction F (`) est plus plate que celle qui serait obtenue pour le champ d’intensité, mais le simple fait qu’elle n’est pas constante en fonction de` (ce qui serait le cas si S2(`) ∝ `ζ2et S4(`) ∝ `ζ4avecζ4= 2ζ2) indique que le champ de vitesse Doppler, dont le spectre de turbulence n’a pourtant pas pu

5. Bien queGómez et al.(1993b) donnent une relation entre les indices de lois de puissance pour les spectres du champ de radiance en rayons X, du champ de vitesse et du champ magnétique.

6. La fonction de structure d’indice p est simplement le moment d’ordre p de la distribution des incréments du champ, en fonction de l’échelle` ayant servi à définir ces incréments.

4. Observations de la structure de l’atmosphère solaire, des embrillancements et des flots

FIGURE4.7. – En haut : structures (pixels noirs) dépassant un seuil du maximum de la radiance spectrale de S VI 93.3 nm, sur une partie du champ central le 21 juillet 1996. En bas : distribution de probabilité de la radiance spectrale intégrée sur ces structures, et ajustement d’une loi de puissance. La ligne pointillée représente une structure par barre d’histogramme (celles-ci étant de largeur variable). Fig. 9 deBuchlin et al.(2006).

être mesuré, est intermittent. À ma connaissance c’est la première détection d’intermittence dans un champ de vitesse dans l’atmosphère solaire.

4.2.3. Événements de chauage : distributions d'embrillancements

Avec SoHO/SUMER. Comme déjà évoqué dans la Sec.1.3, la couronne est le siège d’évé-nements transitoires, et la distribution de leurs énergies est un élément important pour comprendre si les plus petits d’entre eux peuvent fournir une contribution significative au chauffage de la couronne. Des déterminations observationnelles de cette distribution permettent de tenter de répondre à cette question, et de tester les modèles comme ceux des Sec.2.2.2et2.3.2. Les distributions d’événements observés en EUV avec SoHO/EIT et TRACE (par exempleBerghmans et al.,1998;Krucker et Benz,1998;Parnell et Jupp,2000; Aschwan-den et al.,2000) semblent ainsi prolonger vers les petites échelles celles observées en rayons X (commeLin et al.,1984;Dennis,1985;Crosby et al.,1993), formant une distribution en loi de puissance de pente environ −1.8 sur près de 8 ordres de grandeur, de 1017J (nanoflares) à 1025J (flares) (Aschwanden et al.,2000).

Dans une partie deBuchlin et al.(2006), à partir des cartes du Soleil entier réalisées par SoHO/SUMER en SVI93.3 nm, j’ai ainsi défini une structure comme étant un ensemble connexe de pixels dont le maximum (dans la raie) de la radiance spectrale en SVI93.3 nm est au-dessus d’un certain seuil (l’évolution temporelle n’est pas disponible avec ces obser-vations, ce qui ne permet pas de définir des événements ayant une certaine durée). Pour éviter l’effet sur les résultats statistiques de régions actives particulières, nous avons exclu les régions actives. J’ai alors construit des distributions des radiances spectrales intégrées sur les structures, comme représenté à la Fig.4.2.3pour une observation donnée. Sur l’ensemble