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Partie I Un risque, des territoires, des réponses

Chapitre 3 : Répondre aux risques industriels majeurs La constitution de collectifs et la dimension de

1. Répondre à un risque Pour un prisme de lecture

1.1. Eléments de définition Première approche

Emilie Rioust, en citant les travaux de Christine Wamsler60, revient sur l’équation classique du risque à laquelle il serait possible d’y inclure la capacité (ou le manque de capacité) de réponse de la part d’un individu ou d’une organisation [RIOUST, 2012, p. 48]. Elle complètera d’ailleurs son propos en stipulant que deux conceptions de la gestion des risques peuvent s’affronter. D’une part, le risque pourrait être géré selon une conception « interventionniste » qui se traduirait par la construction de « politiques publiques qui se donnent pour objectif d’améliorer la cohabitation de tous les individus

avec les risques » [RIOUST, 2012, p. 48]. D’autre part, il pourrait être géré selon une conception plus

« libérale », cette dernière insistant sur « la responsabilité de chacun, de manière individuelle [Ibidem]. En conséquence, il appartiendrait à tout un chacun de réduire soi-même sa vulnérabilité. Nous remarquerons que les cas français et québécois peuvent s’inscrire simultanément dans l’une ou l’autre de ces deux conceptions.

Jean Viret distingue deux grandes familles de réponses complémentaires [VIRET, 2011, p.40] : celles qui vont diminuer le risque en amont et celles qui s’inscrivent post-accident (mais qui peuvent toutefois se préparer en amont). Ainsi, cet auteur spécifie quatre étapes dans une démarche de sécurité civile : la prévention, la prévision, la gestion opérationnelle et la gestion post-opérationnelle. Alors qu’il considère la prévention comme des normes techniques auxquelles les bâtiments doivent se fier, ou à des procédures de déclaration ou d’autorisation, la prévision consisterait à informer et à mettre en place des systèmes de surveillance, des dispositifs et des procédures d’alerte [VIRET, 2011, p. 46]. Les documents élaborés par les industriels présentant les mesures d’urgence sont des exemples de planification opérationnelle que cet auteur intègre dans la prévision. En effet, bien que ces mesures seront mises en œuvre en cas d’accident, elles font l’objet d’une préparation en amont. A noter qu’il prend en compte la dimension post-opérationnelle à comprendre comme la dimension du rétablissement, terme mobilisé, entre autres, par le Centre de sécurité civile de Montréal. Il s’agira de prendre en charge la population sinistrée, de mettre en place des mécanismes d’indemnisation, et des démarches de retour d’expérience [ibidem, p. 48]. Cette typologie se révèle intéressante dans le sens où elle opère un classement des réponses selon que l’on se situe en amont ou en aval de la concrétisation d’un risque.

60 WAMSLER (Christine), 2007, Managing urban disaster risk: analysis and adaptation frameworks for

integrated development programming for the urban poor, Housing Development Management (HDM), Lund University, 153 p.

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Jérémie Robert opère également une distinction entre les actions de prévention des risques et celles relatives à la préparation à la gestion de crise [ROBERT, 2012, p. 50]. Bien qu’il reconnaisse que ces champs se situent avant la concrétisation d’un risque, il nomme réponse les actions qui se mettront en place uniquement en cas de crise. Néanmoins, les autres actions de prévention ne peuvent-elles pas être vues comme des réponses participant à diminuer un risque en présence, en agissant notamment sur son équation (aléa, vulnérabilité, représentation) ?

Quelques années auparavant, l’ouvrage Les risques urbains distinguaient quatre familles de réponses [DUBOIS-MAURY & CHALINE, 2004, pp. 33-34] :

- ces dernières peuvent être techniques, relevant des sciences de l’ingénieur. En dépit du fait que le risque ne peut être éradiqué, il semble néanmoins possible d’en atténuer l’intensité ou la probabilité de survenance par des mesures de réduction du danger à la source, appelées mesures de mitigation au Québec. Le terme de mitigation veut en effet dire atténuer ou adoucir [IAURIF, 2003, p. 10]. Des ouvrages améliorant la qualité du bâti industriel, des bassins de rétentions, des matériaux d’isolations spécifiques, peuvent constituer des exemples pertinents de ce type de mesures.

- elles concernent ensuite les réponses de l’aménagement spatial consistant à « limiter la vulnérabilité

des territoires qui sont sous la menace éventuelle d’un danger ». Il peut s’agir par exemple de

dispositifs limitant l’urbanisation à proximité des installations à risque ou bien d’interventions sur les logements et les infrastructures afin de diminuer leur fragilité.

- l’intervention en situation d’urgence constitue la troisième famille de réponses. Bien que primordiale, elle n’en est pas moins dénuée de difficultés du fait des imprévus propres aux situations de crise qui amputent les capacités d’interventions. Malgré tout, il importe d’identifier les structures mobilisables en cas de crise, ainsi que de préparer les modalités de déplacement, d’aide aux personnes, de transmission d’informations, etc.

- la réponse dite assurantielle constitue la dernière famille. Initialement, l’assurance peut être vue comme un moyen d’indemniser les victimes d’un accident. Dubois-Maury et Chaline insistent sur la grande diversité des formes d’assurances corrélativement à la grande diversité des risques urbains. Il peut être intéressant de s’interroger sur le rôle de l’assureur dans le cas des risques industriels majeurs. Par la modulation de leurs primes en fonction du danger, par leurs exigences sur le plan technique, comme par exemple des normes de sécurité incendie, les assureurs ne participent-ils pas à la réduction des risques ? Il est aussi possible d’y inclure les dispositions financières et fiscales pouvant prendre la forme de taxes ou de pénalités incitant les industriels, par exemple, à entreprendre certains travaux sur leurs installations [MSP, 2008c, p. 59].

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En première lecture, le large éventail de réponses abordées ci-dessus pourrait s’appliquer sur tous les territoires confrontés à un risque industriel majeur. Pourtant, l’exploration des cas français et québécois révèle une hétérogénéité dans leur mise en œuvre. Malgré tout, lorsqu’une réponse est identifiée, il importe de caractériser l’éventail des acteurs qui participent à sa mise en œuvre.

1.2. Une large palette d’acteurs intervenant dans la mise en œuvre de

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