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EFFETS DE L’E-CIGARETTE SUR LA SANTE :

Dans le document La cigarette électronique. (Page 193-200)

1)- Risques de l’e-liquide et de la « vapeur » sur la santé :

Actuellement, on n’en connait pas suffisamment sur ces produits. Le manque d’études et de recul invite à mettre ceux-ci sous surveillance qui pourrait être réduite avec l’accumulation des données.

Les e-cigarettes peuvent en théorie poser des problèmes sanitaires du fait de l’e-liquide :  qui peut se répandre et entrer en contact avec la peau.

 qui peut être ingéré, en particulier par un jeune enfant. Et de la « vapeur » :

 qui peut provoquer ou entretenir une dépendance à la nicotine.  qui peut exercer certains effets sans délai.

Les risques des e-liquides sont liés avant tout à des produits de mauvaise qualité, de mauvais choix des composants des e-liquides et de mauvaises manipulations comme ça peut être le cas par exemple en laissant le produit à la portée des jeunes enfants.

L’e-cigarette bien fabriquée et bien utilisée est en elle-même un produit qui présente des dangers infiniment moindre que la cigarette, mais les dangers ne sont pas totalement absents. Le principal danger intrinsèque de l’e-cigarette est lié à la dépendance à la nicotine contenue, mais la forme du produit et sa gestuelle sont aussi des facteurs qui pourraient contribuer à entretenir la dépendance.

2)- La pénétration de la « vapeur » inhalée dans le corps : 2.1)- Devenir de la vapeur inhalée au niveau pulmonaire :

L’aérosol provenant des e-cigarettes se dépose différemment selon le type d’inhalation. Les utilisateurs doivent inspirer lentement et pendant une durée suffisante pour déclencher la valve dans les systèmes auto-déclenchés (2,5 à 15 cm H2O). Pour moduler ou augmenter la dose de nicotine et accroître la quantité de vapeur émise, il faut prolonger l’inspiration.

La « vapeur » inhalée, faite de gouttelettes de petite taille, progresse dans les voies respiratoires où les particules de diamètre inférieur au micron (PM1) descendent au plus profond des voies respiratoires. Dans les poumons, 20% des gouttelettes formant l’aérosol vont se déposer [179], le reste de la « vapeur » inhalée sera expirée (exhalée) comme le sont toutes les particules de cette taille submicronique. Une inspiration lente ou une apnée de quelques secondes en fin d’inspiration augmente de façon très importante le dépôt pulmonaire de tout aérosol de cette taille, donc de l’aérosol de l’e-cigarette.

Les fumeurs et les vapoteurs connaissent (ou ressentent de façon inconsciente) cette sensation sur le larynx « throat hit » qui précéderait immédiatement la libération de dopamine dans le système de récompense. Ce comportement conditionné favorise l’action hédonique de la cigarette.

Avec la cigarette conventionnelle, après une période d’abstinence tabagique temporaire, le fumeur dépendant déclenche une inspiration beaucoup plus ample et prolongée que lors de la prise d’une bouffée quand il est rassasié de nicotine. Et surtout, l’apnée de plusieurs secondes qu’il pose en fin d’inspiration va considérablement augmenter le dépôt pulmonaire. Bien que le phénomène n’ait pas été étudié en détail avec l’e-cigarette, les lois de dépôts des particules sont universelles. Du fait de la taille des particules, la fumée tabagique ou l’aérosol d’une e-cigarette peuvent partiellement se déposer par impaction quand le courant inspiratoire est rapide.

Cependant le dépôt se fait selon le modèle universel de dépôt des particules, essentiellement par diffusion et sédimentation. Ces deux modes de dépôt, en régime calme,

sont directement proportionnels au temps de persistance de l’aérosol dans les voies respiratoires.

Selon les modèles de dépôt, garder la fumée d’une cigarette ou la « vapeur » d’une e-cigarette durant 5 secondes en faisant une apnée en fin d’inspiration au lieu de la garder 1 seconde, va multiplier par 5 les dépôts des différentes substances et en particulier le dépôt pulmonaire de nicotine.

2.2)- Pharmacocinétique de la nicotine inhalée :

 Pharmacocinétique de la nicotine provenant des e-cigarettes par rapport aux

autres sources de nicotine :

Cette cinétique dépend de la présence de nicotine dans la cartouche et de la quantité émise.

Les données actuelles ne permettent pas de savoir avec certitude où est absorbée la nicotine inhalée de l’e-cigarette.

Si la nicotine avec l’e-cigarette est absorbée lentement par la muqueuse buccale avec un pH neutre ou alcalin, sa cinétique est alors voisine de celle des substituts nicotiniques.

Si la nicotine inhalée avec l’e-cigarette à un pH acide et est absorbée sans délai par le poumon pour atteindre le cerveau en 7-8 secondes, elle produit un renforcement de l’addiction comparable à celle d’une cigarette.

La réalité pourrait être une combinaison de ces hypothèses, donnant un pic de nicotine intermédiaire entre les deux.

Cette connaissance de la cinétique est essentielle pour déterminer si l’e-cigarette est plutôt un produit voisin des substituts nicotiniques ou s’apparente plutôt à une cigarette traditionnelle donc à un « produit du tabac ».

Figure 75 : Schématisation de la cinétique de la nicotine en cas d’absorption pulmonaire (taux très élevé et rapide) et en cas d’absorption buccale (pas de pic élevé et absorption lente).

 Pharmacocinétique de la nicotine inhalée provenant des anciennes e-cigarettes : Les progrès réalisés dans la fabrication des e-cigarettes entre 2008 et 2010 ont abouti à une forte augmentation du pourcentage de nicotine contenue dans les e-liquides délivrés par les dispositifs.

Cette nicotine, entrant dans l’organisme sous forme gazeuse dans la vapeur ou au sein des fines gouttelettes, peut en théorie se déposer soit dans la bouche et être absorbée par les veines qui circulent sous les muqueuses tapissant la bouche et la gorge, soit au plus profond du poumon et être alors absorbée très rapidement par les veines pulmonaires.

Les premières études montraient très peu – voire pas du tout – de nicotine ou de ses métabolites dans le plasma des fumeurs qui utilisaient des e-cigarettes car il n’y avait que très peu ou pas de nicotine dans la « vapeur » produite. La courbe publiée par Vansickel, dans une étude réalisée avec des e-cigarettes conçues en 2008-2009 illustre bien ce fait : la cinétique de la nicotine de vraies cigarettes montre une augmentation rapide de son taux dans le plasma du sang veineux, puis une redescente très progressive. Pour deux marques d’e-cigarettes anciennes (de mauvaise qualité), on observe une augmentation du taux de nicotine également entre 5 et 15 minutes, mais infiniment plus faible qu’avec la vraie cigarette

[185].

Figure 76 : Cinétique de la nicotine délivrée par une cigarette et deux e-cigarettes (HYDRO et NPRO). Le taux de nicotine est en ng / ml, le temps en minute, les flèches indiquent la prise du produit.

Cette mauvaise biodisponibilité de la nicotine délivrée par d’anciennes e-cigarettes mal conçues explique l’absence de résultat positif dans une étude clinique conduite par Polosa avec trois types de cartouches d’e-liquide dont celles étiquetées « fortes » ne délivraient en fait que peu de nicotine. La nicotine n’arrivait ainsi que difficilement dans le sang et ne pouvait avoir d’effet notable sur la sensation de manque [186].

 Pharmacocinétique de la nicotine provenant des e-cigarettes récentes :

Les e-cigarettes les plus récentes sont de meilleure qualité et délivrent le plus souvent dans la bouche du consommateur plus de 50% de la nicotine contenue dans la cartouche

[187].

Cinq publications ont étudié les taux de nicotine plasmatique après prise unique d’e-cigarette entre 2010 et 2013. Aucune publication n’a étudié le taux de nicotine artérielle.

Trois publications de 2010 ne retrouvent que de faibles quantités de nicotine après la prise d’e-cigarette :

 Vansickel retrouve en 2010 de l’ordre de 1 ng/ml de pic de nicotine sérique [185].  Bullen rapporte en 2010 un pic de 1,3 ng/ml de nicotine sérique [188].

 Eissenberg en 2010, sur deux marques d’e-cigarette, rapporte à 5 minutes 2,5 et 3,5 ng/ml de nicotine plasmatique quand la vraie cigarette fait monter la nicotine à 16,8 ng/ml [189].

En 2012, avec des cigarettes plus récentes, Vansickel retrouve des taux de nicotine à 7,4 ng/ml [190] et en 2013 avec des e-cigarettes actuelles, il retrouve à 5 minutes un taux de 11 ng/ml, approchant celui de la cigarette [191].

Ainsi les e-cigarettes modernes sont capables de délivrer en moins de 5 minutes des quantités de nicotine du même ordre de grandeur que les cigarettes, ce que ne faisaient pas les e-cigarettes disponibles en 2010. Certains auteurs évoquent l’expérience des vapoteurs pour expliquer ces différences. L’apprentissage nécessaire évoque avec les premières e-cigarettes a été considérablement réduit avec la performance des nouveaux produits.

Dans la salive, une étude de 2011, sur un échantillon de volontaires consommateurs uniquement d’e-cigarettes, Etter retrouve une nicotine salivaire de 322 ng/ml confirmant que les e-cigarettes sont efficaces pour délivrer de la nicotine [192].

Une étude conduite en 2013 par Flouris chez 15 fumeurs, fumant en alternance un jour une cigarette, le lendemain une e-cigarette, montre des taux de cotinine sérique (métabolite de la nicotine) équivalents [193].

3)- Effets aigus de l’inhalation de la « vapeur » :

3.1)- Effets attendues de la « vapeur » d’e-cigarette comparés à la fumée de cigarette :

Sur le plan théorique :

 L’absence de cancérogène connu à des taux significatifs dans les e-liquides (alors que plus de 60 cancérogènes sont identifiés dans la fumée du tabac dont 11 classés cancérogènes catégorie 1 par le CIRC) laisse à penser, en première

approche, que la « vapeur » des e-cigarettes n’est pas directement cancérogène.

 L’absence de monoxyde de carbone (CO) dans cette « vapeur » et le taux normal de monoxyde de carbone trouvé dans l’air expiré des utilisateurs d’e-cigarette témoignent que cette dernière ne prive pas l’organisme d’oxygène comme le fait la cigarette et que les effets cardio-vasculaires, s’ils existent, devraient être donc moins importants.

 L’absence de particules solides à des taux significatifs dans la vapeur alors que chaque cigarette fumée produit plus d’1 milliard de particules solides submicroniques dans le courant primaire et 5 milliards de nanoparticules dans le courant secondaire. Il est donc hautement vraisemblable que les effets cancérogènes irritants pour les voies respiratoires et délétères pour le cœur de ces micros et nanoparticules sont absents avec l’utilisation de l’e-cigarette. Les produits irritants de la « vapeur » produite par les e-cigarettes sont différents de ceux de la cigarette. Cependant, en dehors d’études spécifiques, il est difficile de faire des hypothèses sur la réduction ou non de l’irritation des voies aériennes supérieures et des bronches lors de l’utilisation d’e-cigarette [194].

Avec l’e-cigarette et la cigarette, la nicotine est délivrée rapidement ou très rapidement au cerveau. A priori les deux produits peuvent induire et entretenir une dépendance à la nicotine, mais si cela est bien prouvé pour la cigarette, c’est encore seulement suspecté pour l’e-cigarette [195].

Il est clairement démontré que les cancérogènes sont responsables des cancers liés au tabagisme, que le monoxyde de carbone et les particules fines sont les deux vecteurs majeurs de la toxicité cardio-vasculaire de la fumée des cigarettes et que les particules solides jouent un rôle important dans la survenue de la BPCO. Il est tout aussi démontré que ces trois produits n’existent pas à des taux significatifs dans la « vapeur » des e-cigarettes. Il est donc logique d’attendre une réduction de ces trois risques chez les fumeurs de tabac qui passent à l’e-cigarette, mais ces faits restent à démontrer.

3.2)- Effets sur les voies aériennes supérieures :

La « vapeur » des e-cigarettes peut dessécher et irriter la gorge et la bouche. L’arrivée rapide dans l’arrière-gorge de la « vapeur » inhalée (« avalée ») provoque un picotement, un hit. C’est la nicotine qui entrainerait cette sensation dans la gorge. Elle se rapproche beaucoup de celle procurée par la fumée des cigarettes de tabac. L’effet dépend entre autres du dosage en nicotine de l’e-liquide. Les fabricants essaient de reproduire cette sensation de hit avec les e-liquides sans nicotine en ajoutant le menthol ou le poivre ou en créant des liquides « flash », mais ces liquides brulent plus qu’autre chose et la recette du hit n’a pas dévoilé tous ses secrets.

La toux est un symptôme fréquent chez les utilisateurs d’e-cigarette, rapporté par exemple par plus d’un tiers des patients de l’étude prospective de Polosa [186]. Elle a souvent un point de départ ORL et non bronchique comme avec le tabac. Une toux bronchique est cependant retrouvée durant les quelques semaines qui suivent l’arrêt du tabac quelque soit l’aide reçue pour arrêter de fumer : les bronches retrouvent leur sensibilité et se débarrassent des secrétions qui les encombrent. Ceci peut expliquer l’augmentation de la toux durant les premières semaines du passage de la cigarette à l’e-cigarette.

Fumer du tabac augmente le risque d’adhésion des bactéries dans les voies respiratoires, conduisant à plus que doubler le risque de méningite, de pneumonie à pneumocoque, de légionellose, de tuberculose, etc. Mais aucune donnée n’est disponible sur le risque d’infection des voies respiratoires avec l’e-cigarette. Des arguments théoriques liés à la composition de l’aérosol formé laissent à penser que ce risque serait réduit avec l’e-cigarette par rapport à la cigarette de tabac.

Une publication récente montre que la margination des globules blancs [196] aux parois des vaisseaux sanguins, perturbée lors de l’exposition active à la fumée du tabac, n’est pas influencée par le vapotage actif ou passif.

Dans le document La cigarette électronique. (Page 193-200)