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Effets de taille

Chapitre 1 : État de l’art

I) Propriétés magnétiques

2) Effets de taille

De façon remarquable, il est aussi possible qu’un matériau ferromagnétique, antiferroma-gnétique ou ferrimaantiferroma-gnétique devienne paramaantiferroma-gnétique3. Tout dépend des énergies mises en jeu. À température ambiante, le fer à l’état massif est ferromagnétique. En revanche si la tempéra-ture augmente, l’énergie thermique kBT augmente (avec kB la constante de Boltzmann) et l’aimantation tend à s’annuler. Cela s’explique par le fait que cette énergie thermique va à l’encontre des couplages d’échange. Il existe alors une température de transition entre ces deux états magnétiques nommée température de Curie (TC)3,17.

Pour résumer, le magnétisme à l’état massif est déjà bien défini dans la littérature. Ce-pendant, la diminution de la taille vers l’échelle nanométrique induit de nouveaux phénomènes spécifiques au nano-monde.

2) Effets de taille

a) Magnétisme à l’échelle du nanomètre

À l’échelle nanométrique, certains comportements physiques sont modifiés à cause du changement de dimension. Cela s’explique par la différence de rapport entre la surface et le volume, qui peut excéder la valeur de 1 dans le cas des nanoparticules. On retrouve alors à l’échelle nanométrique un plus grand pourcentage d’atomes en surface, qui possèdent moins de premiers voisins que les atomes centraux. Il en découle plusieurs conséquences (Figure 1-7).

Figure 1-7 : Bilan des différents effets de taille sur le comportement magnétique d’un métal de transition à l’état massif et à l’échelle nanométrique.

La première conséquence concerne la diminution du champ cristallin, provoquant alors une augmentation du moment orbital et du couplage spin-orbite. L’énergie d’anisotropie magnéto-cristalline augmente alors2,5,8,19. Par ailleurs, le fait d’avoir moins de premiers voisins diminue la délocalisation des électrons. Contrairement au diagramme d’orbitales moléculaires du matériau massif, où les niveaux d’énergies de valence sont très proches et forment des bandes d’énergie, on retrouve ici des états discrets. Ainsi, chaque atome voit son moment magnétique de spin lo-cal augmenter. Le moment magnétique des atomes en surface est alors plus grand que ceux des atomes centraux. Ce phénomène s’accentue de plus en plus lorsque la taille de la nanoparticule diminue2,8,19,34. Enfin, on notera qu’il est possible d’avoir des matériaux présentant des proprié-tés ferromagnétiques à l’échelle nanométrique mais pas à l’état massif. Cette observation a été faite pour le rhodium notamment35.

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29 b) Le superparamagnétisme

Cependant, il subsiste encore un effet de la taille sur certains de ces états magnétiques. En effet, à l’état massif, il y a des domaines de Weiss qui induisent une forte diminution du mo-ment magnétique mesuré. Du fait de l’épaisseur non nulle des parois de domaines, le nombre de ces domaines diminue avec le volume et il existe une taille pour laquelle il n’y a qu’un domaine magnétique. Dans cette configuration, si une nanoparticule théoriquement ferromagnétique est en dessous de cette taille critique, il peut être observé un renversement spontané de l’aimantation du nano-objet (qui est la somme des moments atomiques par unité de volume), ce qui conduit à un état proche du paramagnétisme. On dit alors que la nanoparticule est dans un état superparamagnétique2,3,5,8,36. Toutefois, il est possible de revenir à un état ferromagnétique en changeant un paramètre : la température. Ce paramètre est en effet le principal acteur du renversement d’aimantation, puisque l’énergie thermique, kBT peut être plus grande que l’énergie magnétique, KV. Comme pour la température de Curie, il existe donc une température où l’on observe la transition entre un état superparamagnétique et ferromagnétique. Celle-ci s’appelle température de blocage (TB)3,5. Ce terme de blocage définit bien la transition d’un état où les moments sont désordonnés (superparamagnétisme) à un état où les moments sont orientés et bloqués (ferromagnétisme).

Comme pour la mesure des champs coercitifs, il existe différentes techniques pour déter-miner la température de blocage3, comme celle basée sur l’évolution de la valeur du moment en fonction de la température (Figure 1-8). En pratique on utilise un protocole de mesure pour dé-terminer des courbes de refroidissement sans champ et avec champ appelé ZFC-FC (pour Zero Field Cooled-Field Cooled).

Figure 1-8 : Exemple de courbes ZFC-FC.

Ce protocole consiste à diminuer la température d’une enceinte (appelé PPMS, cf. An-nexes), par l’intermédiaire d’une électronique, dans laquelle il y a un échantillon magnétique. Dans notre cas, la température la plus basse est de 3 K. Dans ces conditions, les énergies ther-miques sont très faibles et pour un échantillon superparamagnétique à température ambiante, on peut avoir un état ferromagnétique (ou non selon les matériaux). Un faible champ magné-tique (environ 100 Oe) est appliqué puis on augmente la température. À chaque degré, le mo-ment magnétique est mesuré jusqu’à atteindre la température ambiante. On a alors la courbe dite de ZFC. On détermine la valeur de TB comme le maximum de cette courbe, marquant la transition de l’état ferromagnétique à l’état superparamagnétique. Ensuite, on fait diminuer la

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température jusqu’à 3 K avec le champ magnétique. On a alors accès à la courbe FC, qui en pra-tique est moins exploitée mais nous renseigne sur l’intensité des interactions magnépra-tiques entre nanoparticules dans l’échantillon. Il est possible d’accéder à cette courbe en mesurant l’aimantation non pas en descendant la température, mais lors d’une seconde remontée en tem-pérature (après avoir effectué une courbe ZFC). C’est d’ailleurs cette deuxième configuration qui a été employée lors de la thèse.

Différents paramètres influent sur les températures de blocage, les valeurs de HC, MR et MS

et la forme des courbes d’hystérésis. Il y a d’une part les paramètres propres aux conditions de mesures, en l’occurrence la valeur du champ appliqué (dans le cas des courbes ZFC) et la tem-pérature de travail (cas des courbes d’hystérésis). En général plus le champ appliqué est grand plus la valeur de TB est faible37–42. À l’inverse, plus la température de travail sera grande, moins le champ coercitif HC sera grand puisque l’on se rapproche de la température de blocage. On observe alors à basse température une ouverture de cycle. D’autre part, la valeur du moment mesurée pour ces deux expériences est liée au rapport signal sur bruit, donc à la quantité de matière de l’échantillon. Aussi dans le cas des nanoparticules, la température de blocage et HC

augmentent avec la taille2,8. Ce comportement est très souvent vérifié dans la littérature jusqu’à une taille critique. Cette taille critique correspond à la taille pour laquelle il y a plus d’un domaine magnétique au sein de la nanoparticule. Au-delà, on observe une diminution du champ coercitif avec l’augmentation de la taille. Cela a été vérifié expérimentalement pour des nanoparticules de CoO de tailles de plus de 10 nm43.

Ces différentes mesures permettent au final de remonter à la constante d’anisotropie ma-gnéto-cristalline K. Comme nous l’avons vu à l’état massif, la structure cristalline bloque le mouvement des électrons selon une direction cristalline. Cela explique pourquoi les moments orbitalaires sont faibles à l’état massif. On a alors un conditionnement du moment magnétique par la structure cristalline. Un moment magnétique s’orientera plus facilement selon la direction du champ magnétique appliqué si celui-ci est aligné selon une direction cristalline du matériau. On dit alors que l’on a un axe « de facile aimantation » (de la même manière qu’il y a un axe de facile aimantation pour les nanoparticules anisotrope (cf. L’énergie d’anisotropie))3,5,8,44. Cet axe est propre à la structure cristalline et donc à la nature du matériau. Expérimentalement, il est possible de remonter à une valeur de la constante d’anisotropie par l’intermédiaire de la température de blocage. La température de blocage définit la température à partir de laquelle l’aimantation de chaque nanoparticule peut se retourner. Plus précisément, la barrière d’énergie que le système (les nanoparticules) doit franchir pour retourner l’aimantation s’écrit de la façon suivante (déterminé par l’intermédiaire du modèle de Stoner-Wohlfarth qui permet de modéliser le retournement de l’aimantation dans les nanoparticules monodomaines ferroma-gnétiques2,8,23,45).

ΔE = KeffV

Ici, Keff est la constante d’anisotropie effective et V le volume de la nanoparticule. Cette constante regroupe les constantes d’anisotropies magnéto-cristalline mais aussi les interactions dipolaire magnétique, l’anisotropie de forme et de surface. Chaque nano-objet possède une forme et une taille et chacun de ces paramètres influe donc sur l’énergie d’anisotropie magné-tique. L’anisotropie de forme est liée au champ démagnétisant, champ formé à la surface d’un objet magnétique et tend à s’opposer au champ magnétique interne du matériau. Dans le cas

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d’une sphère, ce champ démagnétisant n’a pas d’influence sur l’orientation du moment. Le moment magnétique sera alors dans une orientation aléatoire. En revanche, si nous considérons un objet de forme anisotrope (ellipse, bâtonnet,…), alors le champ démagnétisant s’orientera de telle sorte à minimiser son énergie3,5,8,18. En d’autres termes, elle sera orientée selon l’axe le plus long, l’aimantation suivant également ce même axe. Bien que l’intensité de l’aimantation soit atténuée par le champ démagnétisant, il sera possible d’induire l’aimantation dans un sens préférentiel. Le champ coercitif sera alors plus grand que dans un objet isotrope. La troisième anisotropie concerne l’anisotropie de surface. Elle est observée pour des films minces et les na-noparticules. Les atomes présents en surface d’un film sont dans un environnement différent de ceux au cœur du film. Il y a alors une brisure de symétrie entre le cœur et la surface. Les mo-ments magnétiques des atomes de la surface ont alors tendance à se mettre perpendiculaire-ment à la surface du film ou des facettes de la nanoparticule18. Enfin, concernant les interac-tions dipolaires magnétiques, celles-ci apparaissent lorsque des nanoparticules, ayant chacune une aimantation, sont proches les unes des autres. Chaque nano-objet forme spontanément un champ magnétique qui va influer sur les nanoparticules voisines (cf. III)2) Auto-assemblage de nanoparticules inorganiques).

Ayant connaissance de tout cela, il est donc possible de remonter à cette constante en uti-lisant les mesures faites par VSM. En effet, à la température de blocage TB, le temps de relaxa-tion τ d’un moment magnétique, temps nécessaire au retournement de l’aimantarelaxa-tion, s’écrit en fonction de l’énergie thermique kBTB et de l’énergie d’anisotropie magnétique KeffV.

τ = τ0× exp(KeffV k⁄ BTB) KeffV = kBTBln(τ τ⁄ ) 0

Le temps de relaxation τ correspond au temps de mesure τm, valant 300 s et le pré-facteur exponentiel τ0 est de l’ordre de 10-10 s46. Cette relation a été utilisée dans le cadre de cette thèse pour déterminer la constante d’anisotropie magnétique.

Afin de choisir notre candidat, nous nous sommes basés sur les constantes d’anisotropes magnétiques obtenues à l’état massif de différents matériaux (Figure 1-2). Parmi ceux-ci, seule la synthèse de nanoparticules de CoPt est connue par le laboratoire d’accueil. Nous avons donc axé ces travaux de thèse sur la synthèse, la caractérisation et l’organisation de ce matériau par différentes techniques.

Pour résumer, la plupart des grandeurs importantes du magnétisme viennent d’être défi-nies. Toutes ces grandeurs sont fortement dépendantes du matériau étudié (Figure 1-2), la structure cristalline et l’agencement des atomes dans une nanoparticule ayant une incidence directe sur les propriétés physiques (que ce soit en magnétisme47 ou en optique48). Dans le sous-chapitre suivant, nous allons donc rappeler quelques types de nanoparticules et nous étudierons aussi en plus en détail les nanoalliages magnétique de type CoPt.

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II) Caractéristiques et méthodes de fabrication de nanoparticules