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Effet de la surface sur l’organisation des nanoparticules

Chapitre 1 : État de l’art

III) Auto-assemblage

3) Effet de la surface sur l’organisation des nanoparticules

a) Auto-assemblage de molécules organiques sur surface

Plusieurs molécules peuvent s’auto-assembler et s’auto-organiser sur surface. Les alcanes à longues chaînes ou leurs dérivés comme l’alkylamine, les alcanols ou alcanethiols s’auto-assemblent sur HOPG notamment158. Une organisation lamellaire est alors observée, où les fonc-tions polaires (amines ou alcools par exemple) de deux molécules sont en interaction.

Il a également été montré que les chaines carbonées et les groupements aromatiques s’assemblent sur graphite HOPG selon le modèle de Groscek159,160. Les chaînes carbonées se pla-cent de telle sorte à avoir les atomes d’hydrogène au pla-centre des cycles composant le premier feuillet de graphène (Figure 1-29).

Figure 1-29 : Schéma de l’adsorption de chaînes carbonées (C18H38) sur une surface de graphite HOPG ou a est la distance CX-CX+2 et b la distance CX-CX+2 du réseau du graphène158,159. Des molécules cristal liquide telles que les perylènes et leurs dérivés sont aussi très étu-diées sur différentes surfaces tels que l’or (111)161,162, le graphite162,163 et le MoS2163. Par exemple, il a été observé en STM la formation de monocouches organisée de perylène, mais si on change le substrat, des réseaux différents sont observés. Sur MoS2 et sur graphite, une phase rectangulaire et une phase linéaire sont principalement observées (Figure 1-30)164. En revanche, sur or, la phase rectangulaire est observée ainsi qu’une seconde phase hexagonale. De plus, il a été montré que selon la structure ((111) ou une structure vicinale (11 11 12)), le réseau est plus ou moins compact. Aussi, il a été mis en avant une influence de la longueur de chaîne, mais aus-si du substrat sur le réseau formé par les dérivés de perylènes.

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Figure 1-30 : Image STM d’un réseau de perylène déposé sur MoS2 et le modèle d’assemblage moléculaire associé164.

Comme pour les perylènes, il est possible d’observer des réseaux différents selon la lon-gueur des chaînes se trouvant en périphérie de dérivés du naphtalène (nommé Cn-DNI)165. Par exemple, pour des chaînes courtes (n = 3 ou 4 atomes) ou chaînes carbonées comportant entre 12 et 18 atomes de carbones, un réseau lamellaire est observé (Figure 1-31). En revanche, pour des chaines carbonées de taille moyenne (n compris entre 4 et 12 carbones), une structure nid d’abeille semble plus stable.

Figure 1-31 : Images STM (a) d’un assemblage de molécules de C3 – DNI (en haut) et du réseau du graphite (en bas) et (b) d’un assemblage de molécules de C18 – DNI (en haut) et du réseau du

graphite (en bas). Les lignes vertes représentent les chaînes aliphatiques.

Les monocouches auto-assemblées forment certains types de réseaux. Différents para-mètres tels que la concentration15,166, la température15 et la sonde permettant de balayer l’échantillon (pointe STM par exemple) peuvent influer sur le type de réseau observé. Les molé-cules organiques peuvent aussi être positionnées perpendiculairement à la surface du substrat. Il est nécessaire pour cela qu’une partie de la molécule puisse s’adsorber fortement à la surface. Deux grands exemples sont à citer. Il y a, d’une part, les alcanethiols sur une surface d’or130 où la fonction thiol interagit avec le métal. C’est d’ailleurs pourquoi ces molécules servent d’agent

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stabilisant pour les nanoparticules d’or. Le second exemple très connu est la formation d’une couche hydrophobe sur une surface hydrophile de SiO2, dont le procédé associé est la silanisa-tion. Elle consiste à faire réagir un alkyltrichlorosilane avec les fonctions hydroxyles présentes en surface d’un substrat (silicium, verre,…). Il y a alors des liaisons covalentes qui se forment entre l’atome de silicium et les oxygènes des fonctions hydroxyles167. Selon la nature de la sur-face, il a été observé des organisations de polymères semi-conducteurs mesogènes diffé-rentes132.

Plusieurs possibilités existent donc quant à la modification de la nature de la surface. De plus, il est très aisé de modifier la surface et d’induire un auto-assemblage spécifique en fonc-tion des paramètres mis en jeu. Nous avons alors cherché dans la littérature des exemples d’assemblages de nanoparticules induits par des modifications de surfaces.

b) Assemblage induit

Si un assemblage induit doit être fait, il est nécessaire d’avoir un élément propre à la sur-face qui attire les nanoparticules dans une position définie. Ce concept a pour nom la « recon-naissance chimique » et il est très utilisé dans le domaine de la biologie, plus particulièrement dans la fabrication et l’utilisation de capteurs biologiques168. Ce concept repose sur les interac-tions entre le système cible et le capteur. De plus, les interacinterac-tions sont souvent des liaisons hy-drogène (faibles), ce qui permet une certaine mobilité du capteur ou de la cible. Certains cher-cheurs ont donc utilisé cette stratégie pour étudier l’auto-assemblage de nanoparticules sur une monocouche de molécules ou polymères, l’utilisation de nanoparticules entourées d’un ligand étant généralement préconisée. En effet, il est possible d’avoir des agents stabilisant où les deux extrémités sont fonctionnalisées (une fonction pour jouer le rôle d’agent stabilisant et la seconde pour interagir avec le capteur).

Figure 1-32 : (a) Schéma théorique de l’auto-assemblage des nanoparticules d’or sur le film de polymère ; (b) Image MET d’une organisation hexagonale de nanoparticules due au polymère

sous une de ses formes cristallines ; (c) Image MET d’une organisation cubique des nanoparticules169,170.

Des nanoparticules d’or ont été auto-assemblées et auto-organisées à l’aide d’un film de polyéthylèneimine. Les nano-objets sont entourés ici d’acides sulfoniques qui vont alors interagir

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avec les fonctions imines via des liaisons hydrogène. Aussi, ce polymère a la particularité de présenter deux structures cristallines selon certaines conditions. C’est d’ailleurs grâce à cette singularité qu’il a été observé par MET deux auto-organisations de nanoparticules d’or (Figure 1-32)169. Par contre, quelle que soit la configuration, les nanoparticules sont très proches, ce qui dans le cas de nanoparticules magnétiques ne garantit pas qu’il y ait plus d’effet dû au champ induit Hinduit.

Un autre exemple de reconnaissance chimique peut être cité : celui de nanoparticules d’or de 1,5 nm entourées de MOT (1-mercaptooctyl)-thymine) sur une monocouche de DTOT (8-(4,6-diaminol[1,3,5]triazin-2-yl)-octane-1-thiol) (Figure 1-33). Ici, la fonction thiol est chimisor-bée sur la surface de la nanoparticule. Il a alors été caractérisé par STM, à l’interface liquide-solide sur une monocouche de DTOT adsorbée sur Au(111), un auto-assemblage, mais qui ne pré-sentait pas d’organisation (Figure 1-34).

Figure 1-33 : Molécules de MOT et de DTOT liées par liaisons hydrogènes171.

Figure 1-34 : (a et b) Images STM de l’auto-assemblage de nanoparticules d’or sur une mono-couche de MOT (a : 880 x 880 nm2 et b : (170 x 90 nm2)); (c) Images STM d’une monocouche d’heptanethiol (880 x 880 nm2); (d) Images STM d’une monocouche d’heptanethiol/MOT (880 x

880 nm2)171.

Comme le montre la Figure 1-33, ce sont les liaisons hydrogène qui interviennent dans cet auto-assemblage. En revanche, sans une couche de DTOT, il n’y a pas d’auto-assemblage. Cette complémentarité est nécessaire car dans les mêmes conditions avec un alcanethiol ou du MOT, aucun auto-assemblage n’est visible171. Cependant, dans cet exemple, le contrôle de la distance inter-particulaire est difficile car elle est dépendante de la position du capteur (ici le DTOT).

Une autre étude décrit l’arrangement de nanoparticules d’or obtenu par voie physique via une matrice composée d’un dérivé du diacétylène sur MoS2 (0001)172. L’acide

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nonacosadiynoique (ANCD) est déposé par drop casting et forme des monocouches auto-assemblées compactes. Le dépôt d’or se fait ensuite par évaporation thermique sous ultra-vide et de manière contrôlée. Enfin les caractérisations par STM sont faites à l’air.

Différentes expériences sont réalisées. La première est la visualisation des nanoparticules d’or sur MoS2 (0001) par STM. Les nano-objets ont une hauteur de 2 nm et une largeur théorique de l’ordre de 10 nm mais semblent plus larges en STM à cause de la convolution de la pointe. Ensuite, les molécules organiques ont été observées seules en STM pour confirmer qu’elles s’auto-assemblent via les groupements acides pour donner un réseau linéaire (Figure 1-35-a, b et c).

Figure 1-35 : Images STM de réseau d’ANCD (a) à grande échelle, (b) à petite échelle et (c) mo-dèle de l’auto-assemblage ; (d) et (e) images STM après un dépôt lent d’or sur le réseau, (f) et (h) après un second dépôt lent et (g) la transformée de Fourier associée à l’image f ; (i) image STM après un dépôt rapide d’or sur le réseau, (j) la transformée de Fourier associée, (k) zoom

d’une région de l’image f et (l) zoom d’une région de l’image k et les distances interparticulaires172.

Une fois cette vérification faite, les molécules puis des atomes d’or, qui vont servir à for-mer les nanoparticules, sont déposés successivement. Le dépôt du métal est réalisé à différentes

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vitesses. Il a été montré alors que les étapes de nucléation et de croissance des nanoparticules d’or se faisaient principalement sur la fonction alcyne des carbones (Figure 1-36). Initialement, les atomes sont déposés aléatoirement puis grâce d’une part à l’interaction entre les atomes d’or et d’autre part l’interaction entre la triple liaison et l’or, la nucléation se fait sur le grou-pement alcyne. Étant donné qu’il y a un réseau régulier des molécules d’ANCD sur le MoS2

(0001), il y a une régularité dans les positions des nanoparticules d’or (Figure 1-35-f, g, h, i, j, k et l).

Un dépôt similaire a été réalisé avec l’acide stéarique, qui ne possède pas de fonction al-cyne mais qui ressemble à l’ANCD. Dans ce cas-là, il y a peu d’ordre prouvant ainsi la nécessité d’avoir une liaison triple pour induire un ordre positionnel. Des études ont montré que la vitesse du dépôt influe sur l’ordre positionnel. À noter ici que les tailles mesurées expérimentalement par STM sont très proches des tailles attendues, que ce soit pour les réseaux de molécules ou les nanoparticules. Aussi, il a été observé durant le dépôt la formation de polydiacetylène (sûre-ment dû au chauffage) ce qui induit un léger rapproche(sûre-ment des nanoparticules d’or172.

Cette étude a donc fait apparaître une possibilité d’induire une auto-organisation sans uti-liser la reconnaissance chimique mais plutôt la différence d’énergie de surface. La différence entre ces deux concepts réside principalement dans le type d’interaction mis en jeu. Dans la reconnaissance chimique, ce sont des atomes spécifiques qui vont interagir avec d’autres atomes spécifiques d’une surface. En revanche, l’énergie de surface est un phénomène de surface qui fait intervenir des forces attractives, mais qui sont souvent d’intensités plus faibles encore que les liaisons hydrogène. Dans le cas de l’or sur les dérivés du diacétylène, il y a une attraction plus forte sur les fonctions alcynes que sur le squelette carboné172.

Figure 1-36 : (a) Schéma des étapes de nucléation, crossance et coalescence de nanoparticules d’or sur le réseau d’ANCD ; (b) vue latérale et de haut d’une monocouche d’ANCD et (c) du

polydiacétylène172.

Cependant, le principal inconvénient de ces stratégies est que la taille semble difficile-ment contrôlable via les méthodes physiques à cause de la coalescence (Figure 1-36-a). C’est

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pourquoi une étude de l’auto-organisation induite a été faite avec des objets obtenus unique-ment par voie chimique, procédé avec lequel la polydispersité en tailles pourrait s’avérer alors plus faible.

Dans ce contexte, ce sont encore une fois des nanoparticules d’or qui ont été assemblées sur une matrice organique non poreuse. Les nanoparticules ont été obtenues par voie chimique par la méthode de transfert de phase liquide-liquide. Celles-ci sont entourées de dodécanethiol qui joue le rôle de stabilisant et le diamètre du cœur métallique est de 1,9 nm. Après synthèse, les nanoparticules sont lavées à l’éthanol pour limiter les problèmes de conductivité lors des mesures en STM. Le réseau observé est formé de molécules de 1,4-di(décyloxy)-2,5-bis(S-acétylthiométhyl)benzène (PhC10-SAc) (Figure 1-37) qui s’organisent via l’interdigitation des chaines alkoxy en un réseau linéaire. Celles-ci ont été observées sur HOPG à l’interface liquide-solide, dans le tetradécane. Sur les images STM (Figure 1-38), un changement de contraste est observé lorsque le groupement chimique (aromatiques et/ou chaines alkyles) change. Une obser-vation de nanoparticules seules a été réalisée mais ne montrait pas d’auto-assemblage, seule-ment la présence d’agrégats ou de nanoparticules déposées sans organisation173.

Figure 1-37 : Molécule de PhC10-SAc173

Figure 1-38 : (a) Image d’une monocouche de PhC10-SAc (14 nm x 14 nm) de paramètre de maille a = 2,1 nm et b = 1,0 nm et α = 86° ; (b) image STM de deux domaines de PhC10-SAc (21 nm x 21

nm) ; (c) image STM d’un monodomaine (12 nm x 12 nm) et profil du trait bleu en insert ; (d) modèle du réseau de PhC10-SAc sur graphite173.

Après avoir observé le réseau, quelques microlitres de la solution de nanoparticules dans le tétradécane ont été ajoutés (Figure 1-39). Après quelques minutes, les nano-objets deviennent visibles et forment un réseau linéaire bien différent du réseau hexagonal compact souvent ob-servé sur HOPG. Il a alors été montré que les nanoparticules étaient alignées linéairement grâce aux molécules de PhC10-SAc. Plus particulièrement, le cœur métallique est en interaction avec le cœur aromatique et les chaines alkyles du surfactant sont en interaction avec les chaînes alkyles du PhC10-SAc. Tout comme l’étude précédente, ce sont les énergies de surface qui sont mises en jeu. Ces deux études montrent qu’il y a donc une interaction non négligeable entre l’or et les groupements aromatiques (ayant une liaison double ou triple).

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Figure 1-39 : Image STM à (a) grande échelle (100 nm x 100 nm) et (b) en haute résolution (40 nm x 40 nm) de nanoparticules d’or stabilisées par du dodécanethiol à l’interface liquide-solide

(en insert, la transformée de Fourier)173.

Ces exemples montrent qu’il est possible d’avoir un assemblage induit. Cependant, cer-tains inconvénients subsistent. Le premier concerne la proximité des nanoparticules lorsque des polymères sont utilisés. Dans le cas montré plus haut, la distance inter-particulaire est en effet du même ordre de grandeur que celle obtenue avec des ligands seuls. Un système où le capteur (i.e. la fonctionnalité) est espacé à de plus grandes distances aurait été intéressant et proba-blement pu être utilisé. Un autre inconvénient concerne cette fois-ci la non uniformité de la distance inter-particulaire. En effet, le fait de déposer sur une surface d’or des alcanethiols in-duit la formation d’une monocouche très dense, où les molécules sont très proches les unes des autres. Il y a d’une part un effet dû aux interactions de van der Waals et d’autre part, un effet de la minimisation de l’énergie du système en recouvrant au maximum la surface. Ces deux ef-fets rendent délicates la possibilité de positionner les nano-objets car ceux-ci seront placer de manière non contrôlée sur la surface. Ceci est dû au fait qu’il est difficile de positionner parfai-tement les capteurs sur la surface. Soit il y a trop de capteurs, ce qui aura pour effet d’avoir un assemblage très compact, soit il y en a peu et les assemblages seront locaux. Une autre possibi-lité est la dilution des capteurs par des molécules non fonctionnalisées, mais leurs positions se-raient alors aléatoires (Figure 1-35).

Cependant, la dilution peut être contrôlée dans le cas de monocouches bidimensionnelles assemblées (adsorbées parallèlement à la surface). Plus spécifiquement, l’idée serait d’intercaler entre les nanoparticules des molécules organiques qui s’organisent et s’ordonnent sur de longues distances. Ce type d’assemblage est alors appelé auto-assemblage poreux ou ta-mis moléculaire.