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cristallisés par μ-PD

II- 6 Effet de la matière première

La formation d’une bulle, d’un pore ou d’une inclusion est liée à la déviation de la composition stœchiométrique de l’alumine (Al2O3). Quand la composition varie par rapport à la stœchiométrie Al2O3, des phases secondaires sous formes de microparticules ou des précipités apparaissent dans le cristal. Un appauvrissement en oxygène provoque l’apparition de lacunes d’O2 et un enrichissement en aluminium (Al). Les bulles peuvent surgir dans le cas de saphir avec des densités de lacunes d’O2 élevées.

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Quelles que soit l'orientation du cristal et la vitesse de tirage, nous avons toujours utilisé le même type de creuset (Ir), les mêmes matières premières (Al2O3) et la même atmosphère de croissance (Ar). Dans le cas de l’utilisation de creusets en molybdène (Mo) ou en tungstène (W), il est possible que des bulles et des inclusions se forment. Contrairement à notre cas, bien souvent ces dernières sont disposées de manière aléatoire et mal ordonnée. De plus, sous une atmosphère interne d'argon gazeux, le creuset d'iridium est stable et nous n'avons pas enregistré de variation de masse du creuset après chaque opération de tirage. Il est possible que la formation et la répartition des bulles soient fortement influencées par la forme du capillaire et l'écoulement hydrodynamique de la masse fondue sur les lèvres de la surface du capillaire. Le flux de fusion saturé en gaz entre en collision les uns avec les autres au niveau du capillaire. Dans une telle configuration, la micro-turbulence peut être observée dans la zone de collision et les bulles peuvent atteindre rapidement la taille critique, puis capturées par l'interface de cristallisation suivie par l'incorporation dans le cristal. Si au cours du processus de cristallisation, une évaporation se produit, le rôle de l'atmosphère de cristallisation est de limiter le taux d'évaporation dans les mêmes conditions, (dans le cas de l'argon, il limite l'évaporation intensive de la matière première d’alumine). Cependant, l'évaporation de la masse fondue, si elle existe, est liée aux diverses interactions chimiques dans le liquide. Le mécanisme de ce phénomène peut être associé à l'adsorption de l'argon par la surface de la masse fondue (liquide). Malgré la simplicité chimique de l'oxyde d'aluminium, la masse fondue d'Al2O3 contient des ions complexes de: (AlO+), (AlO2-), (Al2O+), (Al2O2+), (Al+) et (O-) [5]. La dissociation de la masse fondue peut impliquer différentes réactions chimiques:

Al2O3 ֐ AlO + AlO2 Al2O3 ֐ Al2O + 2O Al2O3 ֐ Al2O2 + O AlO2 ֐ AlO + O AlO2 ֐ Al + 2O Al2O ֐ 2Al + O Al2O2 ֐ Al2O + O

Pendant la croissance cristalline du saphir, à haute température de fusion (2050°C), l'évaporation primaire d’Al+ peut entraîner une perturbation de la stœchiométrie de l'alumine fondue et, par conséquent provoquer la création d’une bulle et son incorporation à travers l'interface de cristallisation [2]. Assez souvent, la matière première d’alumine en fonction du fournisseur est susceptible de contenir des impuretés de quelques ppm difficiles à doser chimiquement. Nous avons déjà montré que la présence de phase secondaires et des impuretés

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peuvent être captées par l’interface de cristallisation et se trouver par la suite dans le cristal [11]. Dans le but d’analyser la composition de la bulle, nous avons réalisé un dosage chimique par la technique LIBS. Pour effectuer le dosage chimique d’une bulle par LIBS, le laser est focalisé sur la surface juste au-dessus de la bulle. Pour chaque mesure, une séquence de 100 coups de laser a été tirée au même endroit. Ce nombre de tirs permet d'ablater et de caractériser la zone du matériau jusqu'à la bulle, de la percer et de caractériser la bulle, puis de continuer à ablater et caractériser la région au voisinage de la bulle comme mentionné ci-dessous (Figure

18). Ainsi, l'analyse de ces bulles à l'aide du LIBS a montré la présence de certaines impuretés

chimiques.

Figure 18: Schéma illustrant la méthode d’analyse d’une bulle par LIBS.

La figure 19 montre que la quantité d'impuretés est plus importante dans la bulle que dans le reste du matériau, (au dessus et en dessous de la bulle). La matière première d'alumine (Al2O3) est connue pour contenir des impuretés de type: Ca, Mg, Si, .... de concentration de quelque ppm [2]. En raison de leur faible concentration dans le cristal, il est très difficile de les quantifier par une analyse chimique (GDMS, ICP). Par conséquent, ces impuretés étrangères comme Ca, Mg, Si, Cu peuvent participer à la formation de la bulle. Par contre, dans le cas d’un barreau exempt de bulles, (Figure 19c), nous n'avons pas enregistré un signal significatif qui correspondrait à la présence d’impuretés. Nous pensons que la raison principale de la présence de ces bulles est très probablement liée à la décomposition chimique de l'alumine fondue et à la présence d’espèces chimiques étrangères. Ces impuretés pénètrent dans le cristal à partir de la matière première d'alumine de départ.

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Figure 19: Analyse chimique d’une bulle par LIBS.

a) une bulle juste sous la surface et une deuxième plus profonde.

b) une seule bulle sous la surface.

c) une région sans bulle.

II-7 Conclusion

Ces résultats ont montré l’impact de la vitesse de tirage, l’orientation cristallographique du germe et les gradients de température sur la propagation des bulles dans le cristal. A notre connaissance, dans le cas de la cristallisation du saphir, la prise en compte de ces paramètres n’a jamais été abordée du point de vue quantitatif par d’autres auteurs. Nous avons montré qu’une cristallisation en régime stationnaire, correspondante à une interface plane, est indispensable pour limiter la propagation des bulles. En revanche, la perturbation du front de cristallisation génère et facilite la propagation des bulles dans le cristal. Il est très important de maitriser la température au niveau de l’interface de cristallisation pour avoir dans la zone fondue des températures qui ne sont pas très élevées par rapport à la température de fusion du saphir. Certes, dans le cas de la micro-pulling down on a une zone fondue de petite dimension, mais la complexité des phénomènes d’ordre thermique ou de transport de matière pouvant se produire dans le liquide, lors du tirage tient pour l’essentiel au mode de chauffage particulier mis en œuvre. Le creuset joue en effet le rôle d’élément chauffant du dispositif. Le liquide est nécessairement plus chaud au contact des parois des creusets que dans la partie du capillaire. Ce dernier est donc le siège d’importants gradients thermiques qui engendrent des courants de convection dans le liquide qu’il est important de maitriser à travers le contrôle de la thermique autour du creuset et dans la zone fondue au niveau du capillaire. L’obtention d’une interface

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plane permet de minimiser la formation de bulles. Cela suppose la maitrise des mouvements de convection naturels et forcés dans la zone fondue. Les bulles quand elles sont formées, elles peuvent être des catalyseurs d’impuretés. Les espèces chimiques étrangères se condensent (s’agrègent) autour de la bulle d’où l’intérêt de faire croitre du saphir à partir d’une matière première de haute pureté (> 99,9999%). Le paramètre le plus important qui influence la densité et la distribution des bulles est la vitesse de tirage. Elle est très importante pour la maitrise du procédé et surtout du point de vue économique. Une vitesse de tirage élevée est préférable, mais l’accélération est susceptible d’augmenter la densité des bulles et de dégrader par la suite les propriétés mécaniques et optiques du cristal. Pour des vitesses de tirage faibles, (V inférieure à 200 μm/min), il n’y a pas de bulles. Pour des vitesses de tirage (200 < V < 1200 μm/min) on enregistre un seul rideau de bulles à la périphérie du cristal. Dans cet intervalle de vitesse de tirage, quels que soient les gradients de températures et les directions de tirage, (orientation du germe), la distribution des bulles est ordonnée dans un hexagone dont les intersections des arrêtes sont perpendiculaires aux axes cristallographiques (Figure 20).

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Figure 20: Distribution des bulles en fonction des vitesses de tirage, des orientations cristallographiques des germes et des gradients thermiques (1GT et 3GT).

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III- Evaluation des contraintes dans les barreaux de saphir