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1.5 Effet de l’irradiation

1.5.7 Effet de l’irradiation de l’oxyde

Les effets d’irradiation de la zircone sont relativement bien connus car la zircone a été envisagée comme matrice de confinement des produits de fissions par le passé. Les défauts produits par irradiation dans les céramiques sont beaucoup plus complexes que ceux générés dans les métaux et sont responsables du changement de nombreuses propriétés, notamment de conduction électrique, ionique, thermique et mécanique du matériau.

1.5.7.1 Zircone irradiée avec des neutrons

Dans le cas du Zircaloy-4, des études ont montré un accroissement de la diffusion du fer des précipités conduisant à des zones de ZrO2 dopées (1% atomique) en fer en solution solide comparativement aux oxydes formés sur les matériaux non irradiés [Iltis, 95b] [Lefebvre, 97]. Sous irradiation, à haut taux de combustion, la germination de l’oxyde semble perturbée à l’interface métal/oxyde. L’orientation des grains serait de plus différente entre la croissance d’une couche sous irradiation en réacteur et celle formée hors irradiation [Iltis, 1995b].

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Figure 1.25 : Comparaison entre les diffractogrammes DRX de la couche d’oxyde d’un tronçon massif 1 cycle étage 2 et 5 cycles étage 6 venant de réacteur nucléaire [Gibert, 1999].

En réacteur, C. Gibert a montré malgré la difficulté expérimentale de mise en œuvre d’analyses DRX sur des tubes de Zy4 que vraisemblablement la proportion de phase quadratique sur la zone analysée diminuait avec le temps en réacteur et avec l’épaisseur d’oxyde. Sur une couche d’oxyde formée après 5 cycles en réacteur, la phase quadratique n’est plus visible sur les diffractogrammes. L’oxyde de surface étant le plus ancien, il est théoriquement aussi le plus endommagé. Cette information révèle que nous n’avons probablement pas de transition de phase α-zrO2  β-ZrO2 en réacteur comme cela peut être observé par irradiation aux ions à des niveaux d’endommagement comparables. Hors irradiation, la concentration moyenne en phase quadratique dans un oxyde de 1,5 µm est de 15% environ pour l’alliage Zircaloy-4, la majorité de la phase quadratique étant située au niveau de l’interface métal/oxyde. [Tupin, 2015]

1.5.7.2 Types de défauts ponctuels crées dans la zircone stabilisée

Les études présentées dans ce paragraphe portent sur l’identification des différents défauts induits par irradiation aux électrons et aux ions d’un monocristal de zircone cubique dopée à l’yttrium (9.5% molaire). Les techniques d’analyses employées pour la caractérisation de ces défauts sont l’Electron Paramagnetic Resonance (EPR) et la Thermo-Stimulated Luminescence (TSL) [Costantini, 2013]. Précisons que dans ces céramiques, la concentration en lacunes anioniques est très élevée (plusieurs %).

1) Défauts de type F

Les défauts de type F, produits par irradiation ionique, correspondraient, d’après J.M. Costantini, à des bilacunes d’oxygène simplement ionisées, soit un défaut complexe de type [Vo˙Vox]˙ dans la notation de Kröger-Vink. Ces défauts seraient principalement créés par cascades de déplacements (collisions nucléaires). De plus, en termes de stabilité thermique, ils se recuisent totalement pendant un traitement thermique isochrone de 30 minutes à 550 K sous vide (Figure 1.27).

39 2) Défauts de type T

Les défauts de type T seraient liés aux cations contrairement au cas précédent. Ils correspondraient à un cation de zirconium au degré d’oxydation de +3 associés à deux lacunes d’oxygène sur l’axe <111> ce qui nous donne un défaut complexe de type [Vo˙˙Zrzr’ Vo˙˙]˙˙˙ (le degré d’oxydation du zirconium dans la zircone étant habituellement de +4). Ce cation zirconium aurait, comme le montre la Figure 1.26, un nombre de coordination de 6 avec les atomes d’oxygène. Or, normalement, le nombre de coordination de l’atome de zirconium avec les atomes d’oxygène est de 7 dans le cas de la structure monoclinique et de 8 dans le cas de la structure quadratique et cubique.

Figure 1.26 : Schéma d’un défaut de type T dans une maille de la zircone cubique. [Zu, 2007]

Ces défauts seraient principalement créés par interactions électroniques (excitations électroniques). D’après la littérature, à faible niveau d’endommagement de la zircone, ces défauts se recuisent totalement lors d’un traitement thermique isochrone à 550 K de 30 minutes. A haut niveau d’endommagement, ils se transformeraient en défauts ne comprenant plus qu’une lacune d’oxygène [Zr’ Vo˙˙]˙ et s’annihileraient alors pendant un traitement thermique de 30 minutes à 900 K [Costantini, 2013].

Ces défauts peuvent théoriquement, être créés en irradiant uniquement avec des électrons et des photons ionisants tels que les rayons X et γ.

La Figure 1.27 décrit l’évolution de la fraction normalisée des défauts de type F et T (N/N0) d’un monocristal de zircone cubique irradiée suivant différentes conditions en fonction de la température lors d’un traitement thermique de 30 minutes sous vide.

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Figure 1.27 : Evolution de la densité normalisée des défauts de type F et T (N/N0) en fonction de la température d’un traitement thermique isochrone de 30 minutes sous vide selon différentes conditions d’irradiation aux électrons ; 1 MeV avec une fluence de 9,7 x 1017 cm-2 : défauts de type T en triangle vide ; 1 MeV avec une fluence de 1 x 1019 cm-2 : défauts de type F en carré plein et défauts de type T en carré vide et losange plein ; 2 MeV avec une fluence de 3.2 x 1018 cm-2 : défauts de type F en cercle plein et des défauts de

type T en cercle vide.

Comme indiqué sur la Figure 1.27, en irradiant à haute fluence d’électron (1019 e-/cm²), le recuit des défauts de type T s’effectue à plus haute température (750-900K au lieu de 500K pour les irradiations à basse fluence). Concernant les défauts de type F, la recombinaison de ces défauts est totale lors des traitements thermiques au-delà de 550K pendant 30 minutes et cela, quels que soient la fluence d’irradiation et le type de particule.

Il est important de retenir dans ces deux paragraphes qu’une irradiation de la couche d’oxyde, bien qu’elle génère des interstitiels, entraine essentiellement des modifications sur le réseau lacunaire de la zircone.

1.5.7.3 Effet de l’irradiation ionique sur la structure cristalline

Comme l’illustre la Figure 1.28, la zircone monoclinique n’est pas stable sous irradiation ionique au-delà d’un niveau d’endommagement de 0,5 dpa à température ambiante. [D. Simeone, 2002][Mougel, 2001]

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Figure 1.28 : Evolution de la proportion de phase quadratique déterminée par analyses DRX en fonction de l’endommagement par des ions xénons et bismuth d’une poudre de zircone monoclinique.

La phase monoclinique se transforme en effet en zircone quadratique au-delà de 0,5 dpa environ. Celle-ci se restaure après un traitement thermique de 550 K pendant 30 minutes sous air humide, des conditions relativement similaires au recuit des défauts de type F indiqué précédemment. Comme une forte concentration en lacunes est susceptible de stabiliser la phase quadratique, il est possible que les défauts de type F produits par cascades de collision soient responsables de cette transition de phase [Simeone, 2002]. Cox a émis, à juste titre, une critique concernant les conditions du recuit. Selon lui, la vapeur d’eau présente dans l’air humide catalyserait et donc favoriserait la transformation q-ZrO2  m-ZrO2 [Cox, 2005].

Des études par spectroscopie Raman ont montré par ailleurs que la transformation monoclinique-quadratique induite par irradiation est favorisée en présence de contraintes de compression [Schuster, 12].

Figure 1.29 : Spectres Raman d’une poudre de zircone monoclinique suivant différentes conditions a) non irradiée mais sous contrainte b) irradiée avec des ions uranium sans contrainte c) irradiée et sous contrainte

42 La Figure 1.29 indique clairement que pour une même fluence d’irradiation, la transition de phase m-zrO2  q-ZrO2 se produit sur le matériau en compression mais pas sur le matériau irradié non contraint. Cette transformation de phase est donc dépendante de la fluence d’irradiation, de la température et du niveau de contrainte mécanique dans la zircone.

Figure 1.30 : Spectres Raman d’échantillons de zircone polycristalline irradiés avec des ions Ne+ de 150keV à des fluences comprises entre 5.1015 et 1017 Ne/cm² [Valdez, 08].

Comme le montre la Figure 1.30, pour des irradiations à hautes fluences d’une zircone monoclinique polycristalline (1017 ions/cm²), deux nouvelles bandes de vibration apparaissent par spectroscopie Raman, une bande à 262 et 702 cm-1 [Valdez, 08]. Aucune hypothèse concernant l’origine de ces deux bandes n’est formulée dans cet article. Ces deux bandes et la majorité des modifications visibles sur les spectres Raman après irradiation feront par la suite l’objet d’une étude approfondie.

1.5.8 Effet de l’irradiation avec des ions de la couche d’oxyde formée sur