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Chapitre IV : Rôle de la canopée dans le fonctionnement de l’étage médiolittoral moyen

IV.2.3. Effet de la coupe sur la diversité algale et animale

Diversité algale

Le nombre total de taxons d’algues identifié est de 9 sur toutes les zones à T0 et varie entre 12 (zones 20 et 0) et 15 taxons (zone 80) à T24.

Figure IV.6. : Nombre moyen (± écart-type) de taxons de macroalgues par cadrat avant le traitement (T0, mars 2006), et après en octobre 2006 (T8), mars 2007 (T12), octobre 2007 (T19) et mars 2008 (T25).

Le nombre moyen (± écart-type) par cadrat varie de 5 ± 0,7 taxons.cadrat-1 (zone 0) à 5 ± 1,6 taxons.cadrat-1 (zone 1) à T0 (Hc = 1,81, p > 0,05) et de 7 ± 1,8 taxons.cadrat-1 (zone 0) à 9 ± 1,7 taxons.cadrat-1 (zone 80) à T24 (Hc = 6,63, p > 0,05) (Fig. IV.6). Le nombre moyen de taxons d’algues augmente significativement sur la zone 1 (Hc = 27,89, p < 0,001) de T0 à T19 et est suivie d’une diminution significative à T24 (Fig. IV.6.). Sur la zone 80, l’augmentation significative (Hc = 15,19, p < 0,01) n’a lieu qu’à partir de T12 et de façon plus graduelle puisqu’il n’y a pas de différence significative entre T12 et T19. Sur la zone 20, une augmentation significative du nombre moyen de taxons par cadrat a uniquement lieu à T12 et est suivie d’une diminution significative à T24 (Hc = 23,07, p < 0,001). Enfin, sur la zone 0, il y a d’abord une diminution significative à T7, suivie d’une restauration partielle de T12 à T19 et totale à T24 (Hc = 10,22, p < 0,05) (Annexe 1, Tableau 1.5.).

L’absence de canopée a pour conséquence une perte de substrat disponible ainsi qu’une modification des conditions environnementales (taux d’humidité, ensoleillement, température) qui peut avoir des effets différents sur les espèces appartenant à différents groupes fonctionnels (sensu Tilman 2001) (Tableau IV.1.). L’étude du pourcentage de recouvrement et du nombre de taxons par cadrat de ces groupes permet de mieux comprendre l’effet du retrait partiel ou total de la canopée sur la diversité algale.

Tableau IV.1. : Macroalgues identifiées au cours de l’étude de l’effet du retrait total ou partiel de la canopée d’Ascophyllum nodosum. Notez que le genre Polysiphonia possède des espèces libres (gazonnante) et épiphytes (P. lanosa est une épiphyte obligatoire d’A. nodosum). Fucus vesiculosus, généralement fixée sur le substrat, peut également être épiphyte d’A. nodosum.

Groupes fonctionnels Taxons correspondants

Ascophyllum nodosum Fucus vesiculosus

algues formant une canopée

Fucus serratus Cladophora rupestris Chondracanthus acicularis Lomentaria articulata Chondrus crispus Anhfeltia plicata Cladostephus spongiosus Polysiphonia sp. Rhodothamniella sp. Cryptopleura

algue rouge non identifiée algues gazonnantes

algue verte non identifiée

Phymatolithon lenormandii Hildenbrandia rubra algues encroûtantes Petrocelis cruenta Polysiphonia lanosa algues épiphytiques Pilayella littoralis Fucus vesiculosus Ulva spp. algues opportunistes Enteromorpha spp.

Les algues des genres Ulva et Enteromorpha sont surtout présentes saisonnièrement et peuvent être fixées sur la roche, sur les autres algues (canopée ou autre) ou simplement enchevêtrées, notamment autour des thalles d’A. nodosum.

Le retrait partiel ou total de la canopée n’entraîne pas de disparition d’algues gazonnantes, c’est-à-dire les algues dressées sous la canopée formant un petit gazon (en anglais, ‘turf-forming algae’) ni d’algues encroûtantes (Tableau IV.1.). En revanche, Polysiphonia lanosa, épiphyte obligatoire d’A. nodosum, et F. vesiculosus, présent comme épiphyte d’A. nodosum avant le retrait de la canopée, disparaissent des zones 20 et 0 suite au retrait de la canopée et ne réapparaissent qu’à T12 et seulement sur la zone 20 pour ce qui est de F. vesiculosus. En effet, après le retrait de la canopée sur la zone 0, cette espèce est présente directement fixée sur la roche et non plus comme épiphyte d’A. nodosum. Sur la zone 20 la restauration du nombre d’épiphytes est partielle à T19 et totale à T24 (Hc = 29,48, p < 0,001) tandis que sur la zone 0 la restauration est toujours partielle à T24 (Hc = 12,05, p < 0,05). L’augmentation significative de la diversité algale observée sur la zone 1 et la zone 80 est due à l’augmentation significative sur ces zones (1) du nombre d’épiphytes (zone 1 : Hc = 18,04, p = 0,001 ; zone 80 : Hc = 10,78, p < 0,05), (2) du nombre de taxons d’algues gazonnantes, telles que Lomentaria articulata, Anhfeltia plicata, ou Cryptopleura sp. (zone 1 : Hc = 28,94, p < 0,001 ; zone 80 : Hc = 16,14, p < 0,001 ; Annexe 1, Tableau 1.6.), et (3) du nombre de taxons d’algues opportunistes, telles que Ulva spp. et Enteromorpha spp. (zone 1 : Hc = 28,53, p < 0,001 ; zone 80 : Hc = 22,89, p < 0,001).

Diversité animale

Le nombre total de taxons de la macrofaune varie entre 15 (zone 20) et 22 taxons (zone 0) à T0 et de 18 (zone 0 et 20) à 21 taxons (zone 1 et 80) à T24. Le nombre moyen (± écart-type) varie de 7 ± 2,2 taxons.cadrat-1 (zone 20) à 10 ± 3,4 taxons.cadrat-1 (zone 0) à T0 (Hc = 5,32, p > 0,05) et entre 7 ± 2,8 taxons.cadrat-1 (zone 20) et 11 ± 2,9 taxons.cadrat-1 (zone 80) à T24 (Hc = 9,31, p < 0,05) (Fig. IV.7.). Sur la zone 1 et la zone 80, le nombre moyen de taxons de la macrofaune ne varie pas significativement pendant toute la durée de l’étude (zone 1 : Hc = 6,09, p > 0,05 ; zone 80 : Hc = 8,09, p > 0,05). Sur la zone 20 et la zone 0, le nombre moyen de taxons de la macrofaune diminue d’abord significativement à T7 et T12 et la restauration est totale sur les deux zones dès T19 (zone 20 : Hc = 14,15, p < 0,001 ; zone 0 : Hc = 21,31, p < 0,001) (Annexe 1, Tableau 1.7.).

Figure IV.7. : Nombre moyen (± écart-type) de taxons de la macrofaune par cadrat avant le traitement (T0, mars 2006), et après en octobre 2006 (T8), mars 2007 (T12), octobre 2007 (T19) et mars 2008 (T25) sur chaque zone.

La densité moyenne de la macrofaune varie de 210 ± 112,0 ind.m-2 (zone 0) à 255 ± 74,8 ind.m-2 (zone 1) à T0 (Hc = 1,37, p > 0,05) et de 156 ± 48,7 ind.m-2 (zone 20) à 216 ± 96,0 ind.m-2 (zone 80) à T24 (Hc = 3,98, p > 0,05) (Fig. IV.8.). Les densités ne varient pas significativement sur la zone 1 et la zone 80 (zone 1 : Hc = 8,18, p > 0,05 ; zone 80 : Hc = 7,87, p > 0,05). Sur les zones 20 et 0, la diminution des densités est significative à T7, maintenue à T12 et la restauration est totale dès T19 (zone 20 : Hc = 18,36, p = 0,001 ; zone 0 : Hc = 24,38, p < 0,001) (Annexe 1, Tableau 1.7.).

Figure IV.8. : Densités (± écart-type) de la macrofaune (ind.m-2) par cadrat échantillonné de mars 2006 (T0) à mars 2008 (T24) sur chaque zone.

Tableau IV.2. : Taxons de la macrofaune identifiés au cours de l’étude de l’effet du retrait total ou partiel de la canopée d’Ascophyllum nodosum.

Taxon Motricité Groupe trophique

Eponges Grantia compressa sessile suspensivore

Halichondria panicea sessile suspensivore

Hymeniacidon sanguinea sessile suspensivore

éponge non identifiée sessile suspensivore

Cnidaires Actinia equina sessile carnivore

Bunodactis verrucosa sessile carnivore

Actinia fragacea sessile carnivore

Anemonia viridis sessile carnivore

Dynamena pumila sessile carnivore

Laomedea sp. sessile carnivore

Campanularidae sessile suspensivore

Cerianthus lloydii sessile carnivore

Polychètes Eulalia sp vagile carnivore

Lanice conchilega sessile suspensivore

Spirorbis sp. sessile suspensivore

Crustacés Balanus perforatus sessile suspensivore

Elminius modestus sessile suspensivore

Verruca stroemia sessile suspensivore

Amphipode vagile brouteur

Dynamene bidentata vagile brouteur

autres Isopodes vagile brouteur

Carcinus maenas vagile carnivore

Liocarcinus sp. vagile carnivore

Pagurus bernhardus vagile carnivore

Mollusques Achantochitona sp. vagile brouteur

Patella vulgata vagile brouteur

Littorina littorea vagile brouteur

Littorina nigrolineata vagile brouteur

Littorina obtusata vagile brouteur

Gibbula cineraria vagile brouteur

Gibbula pennanti vagile brouteur

Gibbula umbilicalis vagile brouteur

Osilinus lineatus vagile brouteur

Calliostoma zizyphinum vagile carnivore

Nassarius reticulatus vagile carnivore

Nucella lapillus vagile carnivore

Ocenebra erinacea vagile carnivore

Bryozoaires Alcyonidium sp. sessile suspensivore

Ascophora sessile suspensivore

Chilostome anasca dressé sessile suspensivore

Electra pilosa sessile suspensivore

Flustrellidra hispida sessile suspensivore

Membranipora membranacea sessile suspensivore

Schizoporella sp. sessile suspensivore

Vesicularia spinosa sessile suspensivore

Il est également possible d’étudier l’effet des traitements sur la macrofaune par leur capacité à se déplacer ou non (espèces vagiles ou sessiles) et par groupes trophiques (suspensivores, brouteurs ou carnivores au sens large, de prédateurs à omnivores en passant par nécrophages) (Tableau IV.2.). En effet, les espèces constituant ces différents groupes peuvent subir différemment la disparition de la canopée selon que celle-ci fait office de support, de protection ou de source alimentaire.

Le nombre moyen de taxons vagiles ne varie pas significativement au cours de l’étude au sein de chaque zone (zone 1 : Hc = 3,34, p > 0,05 ; zone 80 : Hc = 4,23, p > 0,05 ; zone 20 : Hc = 5,33, p > 0,05), excepté pour la zone 0 où le nombre de taxons est significativement supérieur à T0 et T19 par rapport à T7, T12, et T24 (Hc = 15,12, p < 0,01) (Fig. IV.9.a). L’effet du traitement est encore plus marqué sur les abondances de la faune vagile (Fig. IV.9.b). Alors qu’il n’y a pas de différence significative sur la zone 1 (Hc = 8,73, p > 0,05) et la zone 80 (Hc = 5,72, p > 0,05) au cours de l’étude, il y a une diminution significative des densités à T7 et T12 sur la zone 20 et la zone 0, suivie d’une restauration totale à T19 et T24 (zone 20 : Hc = 17,41, p < 0,001 ; zone 0 : Hc = 24,71, p < 0,001) (Annexe 1, Tableau 1.8.).

Figure IV.9. : Nombre moyen (± écart-type) (a) et densités (ind.m-2) moyennes (± écart-type) (b) des taxons vagiles présents de mars 2006 (T0) à mars 2008 (T24) sur chaque zone.

Ces variations sont notamment dues aux variations de densité des brouteurs (Fig. IV.10.a), en particulièrement celles de Littorina obtusata (Fig. IV.10.b). D’une part, il n’y a aucune variation significative sur la zone 1 (Hc = 2,23, p > 0,05). D’autre part, les densités de cette espèce diminuent significativement à T7 et T12 sur les zones 20 et 0 par rapport aux autres zones, puis montrent une récupération totale sur ces deux zones à T19 et à T24 (zone 20 : Hc = 20,19, p < 0,001; zone 0 : Hc = 19,42, p = 0,001). Seule la zone 80 montre une tendance différente, avec une densité significativement supérieure à T0 par rapport à toutes les autres zones et une différence significative à T12 par rapport à T7 d’une part et T24 d’autre part (Hc = 12,08, p < 0,05). Ces mêmes variations sont observées pour les densités des brouteurs, excepté pour la zone 80, qui ne montre pas de différence significative des densités au cours de l’étude (Hc = 5,82, p > 0,05) (Annexe 1, Tableau 1.9.).

Figure IV.10. : Densités (ind.m-2) moyennes (± écart-type) des brouteurs (a) et de Littorina obtusata (b) dénombrés de mars 2006 (T0) à mars 2008 (T24) sur chaque zone.

Le nombre de taxons sessiles (Fig. IV.11.a) de la zone témoin diminue significativement à T7 puis augmente significativement de T7 à T12 et de T19 à T24 (zone 1 : Hc = 13,59, p < 0,01). Sur la zone 80, une augmentation significative n’a lieu qu’à T12 et T19 par rapport à T0 et T7 (zone 80 : Hc = 9,50, p = 0,05). Le traitement a pour effet une diminution significative sur les zones 20 et 0 à T7 et T12 et une récupération seulement partielle (zone 20 : Hc = 17,17, p < 0,01 ; zone 0 : Hc = 21,26, p < 0,001) (Annexe 1, Tableau 1.10.). Les variations du nombre de taxons sessiles sont en grande partie dues à celles des suspensivores (Fig. IV.11.b). En effet, les mêmes variations significatives sont observées pour le nombre de taxons suspensivores sur la zone 1 (Hc = 14,11, p < 0,01), aucune variation significative n’a lieu sur la zone 80 (Hc = 2,43, p > 0,05) et une diminution significative a lieu à T7 et T12 sur la zone 20 et seulement à T7 sur la zone 0, suivie d’une récupération totale sur ces deux zones (zone 20 : Hc = 16,60, p < 0,01 ; zone 0 : Hc = 22,74, p < 0,001) (Annexe 1, Tableau 1.10).

Figure IV.11. : Nombre moyen (± écart-type) de taxons sessiles (a) et de suspensivores (b) échantillonnés de mars 2006 (T0) à mars 2008 (T24) sur chaque zone.

Le nombre de carnivores ne varie pas significativement sur la zone 1 (Hc = 5,60, p > 0,05) et montre une augmentation significative sur la zone 80 à partir de T12 (Hc = 13,32, p = 0,01). Sur la zone 20, il y a également une augmentation significative mais seulement à partir de T19 (Hc = 13,60, p < 0,01). Enfin sur la zone 0, il y a une diminution significative à T7 et T12 (Hc = 17,51, p < 0,01) et une restauration totale dès T19. Malgré ces variations différentes d’une zone à l’autre, il n’y a plus de différence significative entre les zones à T19 (Hc = 0,88, p > 0,05) et à T24 (Hc = 6,53, p > 0,05) (Fig. IV.12.).

Figure IV.12. : Nombre moyen (± écart-type) de taxons carnivores échantillonnés de mars 2006 (T0) à mars 2008 (T24) sur chaque zone.

Les variations observées chez les carnivores sont principalement dues à Nucella lapillus, Laomedea sp. et Dynamena pumila qui disparaissent totalement des zones 20 et 0 à T7 et ne réapparaissent que très progressivement à partir de T12. A T7 les seuls carnivores encore présents sur les zones 20 et 0 sont quelques anémones, quelques individus de l’espèce Carcinus maenas et de l’espèce Pagurus bernhardus. A T12, quelques individus de N. lapillus réapparaissent sur les zones 20 et 0 (1 sur chaque zone) en plus des anémones et des individus de C. maenas et quelques colonies de Laomedea sp. ont recolonisé la zone 20.