• Aucun résultat trouvé

The Economics of Ecosystems and Biodiversity sur les traces du MEA

Le MEA a fermement établi le concept de services éco systémiques comme modèle important pour lier le fonctionnement des écosystèmes aux bénéfices apportés au bien-être humain. Le cadre du MEA constitue donc le fondement pour l'évaluation des conséquences économiques des pertes de biodiversité. Toutefois, il n'a pas été développé comme un exercice d'évaluation et ne correspond donc pas tout à fait au cadre pertinent pour cet objet.

Partant du protocole recommandé par le MEA, les étapes préconisées par le TEEB sont les suivantes :

1. Définir les actions politiques appropriées basées sur les pilotes à l'origine des pertes: la biodiversité est perdue et les écosystèmes dégradés via une diversité de pilotes (pertes et dégradations d'habitats, surexploitation, espèces invasives, réchauffement

de manière, une fois l'objectif de conservation explicité, à déterminer un panier d'actions politiques permettant d'atteindre cet objectif.

2. Définir les états du monde potentiels : évaluer l'efficacité d'une action politique particulière nécessite de comparer deux états du monde hypothétiques (avec action, sans action) obtenus via des scénarios appropriés.

3. Quantifier et cartographier la manière dont l'approvisionnement biophysique des bénéfices est affecté par l'action politique : la première étape consiste à définir ce que sont les bénéfices ou processus bénéficiaires qui seront évalués. Ils doivent être définis avec attention afin d'éviter les doubles comptes. Pour chaque bénéfice particulier, il faut comprendre comment son approvisionnement est affecté par l'action politique. Pour ce faire, il faut pouvoir quantifier l'approvisionnement prévu pour chaque état du monde considéré. Les variations spatiales dans l'approvisionnement des bénéfices peuvent ensuite être cartographiées.

4. Quantifier et cartographier la valeur économique de variations dans les bénéfices découlant des actions politiques : l'information concernant la façon dont la production biophysique de chaque bénéfice change sous chaque scénario devient la base de l'évaluation économique, en utilisant les outils appropriés. Différents bénéfices correspondent à différents types de valeurs économiques, ce qui affecte les méthodes utilisées pour quantifier ces valeurs.

5. Quantifier et cartographier la valeur économique totale de variations dans les bénéfices dérivés d'une action publique : une fois converties en une monnaie commune, les informations pour tous les bénéfices et services sont combinées. Cela fournit une quantification globale de la valeur économique des différences observées dans les flux de bénéfices et services.

6. Quantifier et cartographier les coûts de l'action politique : dans la plupart des cas, les valeurs et étendues géographiques des coûts devront être modélisées à partir de points de données collectées.

7. Quantifier et cartographier les conséquences économiques nettes d'une action politique : pour cela, les coûts de l'action avec les gains économiques issus des bénéfices et processus obtenus à partir de la conservation additionnelle de biodiversité et d'écosystèmes sont comparés.

Un apport essentiel du TEEB, par rapport au MEA, est situé dans la classification des services éco systémiques. En effet, du fait du mélange entre les processus et bénéfices, le cadre choisi par le MEA est particulièrement propice aux doubles comptes. Au contraire, la classification proposée dans le document du TEEB "Scoping the Science" (Balmford et al. [6]) a été développée dans l'objectif explicite de fournir une base adéquate pour l'évaluation économique.

Les auteurs font une distinction explicite entre processus et bénéfices. Ils considèrent ainsi deux types de processus : les processus au cœur de l'écosystème, les fonctions éco systémiques de base, et les processus éco systémiques bénéficiaires, processus spécifiques soutenant directement les bénéfices humains. Les bénéfices correspondent aux produits finaux de ces processus éco systémiques bénéficiaires. Il aurait alors été souhaitable de se concentrer sur ces groupes de bénéfices finaux pour servir de base à l'évaluation économique (se concentrer sur les bénéfices permet d'éviter les doubles comptes puisque la valeur des différents processus éco systémiques aurait été partitionnée en fonction de leur contribution à chaque bénéfice final). En pratique, malheureusement, cette stratégie est très difficile à suivre sur la base de la littérature disponible. Le partitionnement a donc été effectué sous forme de revues thématiques constituant un mélange entre les bénéfices et processus. En traduisant les liens entre les bénéfices et processus au sein d'une matrice, les auteurs ont été capables de les grouper de façon à faire un compromis entre l'idéal théorique et la réalité pratique, tout en évitant explicitement les doubles comptes.

Le TEEB utilise les réflexions et recommandations du MEA comme point de départ. Les principaux éléments clés que nous avons retenus à partir des travaux du MEA, notamment l'ancrage de l'évaluation sur les impacts réellement supportés par les milieux naturels, se retrouvent également dans les préconisations du TEEB. Il en est de même pour les divergences puisque le TEEB conserve la même échelle macroéconomique d'évaluation et le même objectif axé sur l'évaluation des politiques publiques. Cependant, le TEEB s'est orienté

rapproche donc un peu plus de ce que nous cherchons à faire. De fait, les étapes préconisées ici ressemblent aux étapes d'une analyse coûts-bénéfices, dans laquelle devra justement s'insérer notre méthode d'évaluation. Des travaux du TEEB, nous retenons donc surtout la classification des services éco systémiques, spécifiquement créée dans un objectif d'évaluation économique et a priori plus propice à une intégration dans le cadre d'une analyse coûts-bénéfices. Comme le MEA, le TEEB recommande d'évaluer les services éco systémiques en utilisant les méthodes traditionnelles et plus particulièrement le transfert de bénéfices, que nous étudierons dans la section suivante (2.1.2.). Nous avons, pour notre part, choisi d'utiliser une méthode d'évaluation par équivalence, fondée sur l'obtention d'une équivalence en nature entre l'impact écologique généré par le projet d'aménagement et la mise en œuvre de mesures compensatoires. Les mesures compensatoires, telles qu'elles sont appliquées actuellement en Europe non opérationnelles en Algérie, feront l'objet de la section d'après (2.1.3.).

2.1.2. Le transfert de bénéfices

Les vingt dernières années témoignent d'un appui croissant en faveur des analyses coûts-bénéfices à la fois comme méthode d'évaluation de projets ou comme outil d'aide à la décision concernant les politiques publiques (Bateman et al. [7]). Outre Atlantique, l'Environnemental Protection Agency [EPA], agence fédérale américaine pour la protection de l'environnement, a même développé, suite à l'Exécutive Order 12291, des guides permettant à ses agents d'effectuer leurs propres ACB6. Suite à cette "officialisation" de l'ACB, la prolifération des analyses et des méthodes d'évaluation qui s'y rattachent a été concomitante à un intérêt croissant porté au potentiel du transfert de bénéfices. En effet, du fait des budgets d'études restreints et du temps généralement limité dont disposent-les analystes, l'EPA suggère, lorsque cela est possible, que les coûts et les bénéfices soient déterminés à partir de résultats provenant d'études existantes (Desvousges et al. [60]).

6

U.S.EPA, 1983, guidelines for performing regulatory impact analysis, EPA-230-01-84-003, O-ce of Policy Analysis, Washington DC, 103p.