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Section 1 : La méthode des risques attribuables pour contourner

4. Les données de morbidité et de mortalité des cancers

4.1. Méthode d’estimation des données d’incidence, de prévalence et de mortalité

La morbidité peut être mesurée par la prévalence ou l’incidence de la pathologie. Le nombre de cas prévalents d’un cancer nous donne le nombre total de personnes atteintes de ce cancer dans une population donnée pour une année donnée. La prévalence partielle est parfois préférée à la prévalence totale. Elle restreint la définition aux personnes diagnostiquées avant une date donnée et vivantes à cette date. Le nombre de cas incidents mesure le nombre de nouveaux cas du cancer dans une population donnée pour une année donnée.

Nous nous intéressons également aux données de mortalité. Elles estiment le nombre de décès dans une population donnée pour une année donnée.

En France les données d’incidence et de prévalence de certains cancers peuvent être difficiles à estimer. Il n’existe pas de registre pour toutes les localisations de cancer. Cependant le réseau français des registres de cancer FRANCIM (France Cancer Incidence et Mortalité) regroupe les informations de 17 registres, 11 généraux qui recensent l’ensemble des nouveaux cas de cancer et 6 spécialisés sur certaines localisation de cancer (digestifs, gynécologique, hémopathies malignes, leucémies de l’enfant, tumeurs solides de l’enfant, thyroïde). Cette base de données commune a été créée en 2000 et est gérée par le service statistique des Hospices Civils de Lyon. Des estimations d’incidence des cancers sont régulièrement réalisées en France à partir de cette source de données.

Un programme spécifique a été développé pour le mésothéliome de la plèvre. Il s’agit du PNSM qui a été mis en place en 1998 en France. Il permet de recueillir tous les cas incidents dans 21 départements français et d’estimer directement la fraction attribuable à l’amiante. Les 21 départements inclus dans le programme concernent 16 millions de personnes. Cet échantillon est représentatif de la population française au niveau des caractéristiques démographiques, de l’activité économie et de l’emploi. Chaque nouveau cas de mésothéliome est identifié dans un délai court après le diagnostic. Un processus standardisé est mis en place pour confirmer cliniquement tous les cas ainsi recensés. Les patients sont ensuite interrogés en face à face selon un questionnaire standardisé afin de collecter des informations sur leur vie et notamment sur leur exposition à l’amiante.

Les données de mortalité du cancer en France sont accessibles par l’intermédiaire du Centre d'épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc). Comme son nom l’indique, ce laboratoire appartenant à l’INSERM produit des statistiques annuelles sur les causes de décès

en France à partir de certificats et bulletins de décès. Depuis 1968, le CépiDc a constitué une base de données d’environ 18 millions d’enregistrements.

Encadré n°1

Le choix de 2010 pour l’année d’évaluation

Que l’on adopte une approche par l’incidence ou par la prévalence, l’évaluation du coût social des cancers imputables à des facteurs de risque professionnels nécessite de fixer une année pour l’évaluation. Bien que la volonté de fournir des estimations récentes soit toujours présente, ce choix est généralement conditionné par les données disponibles.

Les données nécessaires à l’évaluation des coûts sont disponibles ou facilement actualisables. La rareté des données se situent plutôt sur l’aspect épidémiologique.

Les données de prévalence d’exposition SUMER et Matgéné datent de 2003 et 2007. Les estimations « vie entière » portent sur une période longue d’environ 60 ans. Pour tenir compte du temps de latence entre l’exposition et l’apparition du cancer, il serait préférable de disposer d’information sur la prévalence au moins dix ans avant l’année de l’évaluation. Nous pouvons cependant faire l’hypothèse d’une utilisation pour l’année 2010.

Les données de prévalence, d’incidence et de mortalité des cancers sont quant à elles beaucoup plus rares. C’est principalement à partir de ces données que le choix de l’année de l’évaluation a été fait. Le cancer du poumon a une incidence beaucoup plus importante que le cancer naso-sinusien et le mésothéliome de la plèvre. Il est de plus le cancer dont les données disponibles sont les plus récentes puisqu’elles portent sur 2008 et 2010. Les données d’incidence et de prévalence ne sont pas disponibles pour la même année pour les différents cancers étudiés (cf annexe 1). Quelque soit l’année retenue pour l’évaluation, des estimations sont donc nécessaires. Dans ces conditions, nous avons décidé de retenir la date la plus récente c’est-à dire 2010.

Pour obtenir une estimation pour l’année 2010 de la prévalence, de l’incidence et de la mortalité pour les cancers du poumon, de la plèvre et les cancers naso-sinusiens, il a fallu mobiliser plusieurs sources de données et réaliser quelques approximations.

Les données de mortalité du CépiDc sont disponibles par code CIM pour les années 2000 à 2008. Ces données montrent une évolution du nombre de décès suite à un cancer naso-sinusien ou un mésothéliome relativement linéaire. Les données de mortalité pour ces deux types pour 2010 ont été estimées par la méthode des moindres carrés ordinaires. L’évolution de la mortalité par cancer du poumon étant beaucoup moins régulière, l’estimation des données pour 2010 provient directement de la littérature (BOSSARD et alii 2010)

Il n’existe qu’une seule source récente pour les données de prévalence (COLONNA et alii 2008) et elle ne fournit pas de données pour le cancer naso-sinusien. Les données disponibles portent sur la prévalence partielle à 5 ans qui estime le nombre de cas diagnostiqués depuis moins de 5 ans avant la date de point et toujours vivants à cette date. Des estimations ont été réalisées pour les années 2002 et 2012. Pour les cancers du poumon et le mésothéliome de la plèvre, nous avons donc réalisé une interpolation linéaire pour estimer la prévalence pour l’année 2010.

Aucune source ne fournit de données d’incidence pour chaque cancer pour l’année 2010. Pour le cancer du poumon, les estimations d’incidence sont issues d’un rapport de BOSSARD et alii (2010). A l’aide d’estimations d’incidence du mésothéliome de la plèvre (BELOT et alii 2008a) et des données de mortalité issues du CépiDc, un ratio incidence/mortalité a été créé pour l’année 2005 et appliqué aux données de mortalité de 2010 pour estimer l’incidence du mésothéliome de la plèvre pour 2010. Très peu de données sont disponibles pour le cancer naso-sinusien. Pour estimer son incidence, nous avons repris un ratio incidence du cancer du poumon/incidence du cancer naso-sinusien que nous avons appliqué aux données de 2010 (AUTIER et alii 2007).

4.2. Résultats de l’estimation des données d’incidence, de prévalence et de mortalité pour l’année 2010

Pour estimer l’incidence du cancer naso-sinusien pour l’année 2010, nous multiplions les estimations d’incidence du cancer du poumon pour cette même année par 0,019 pour les hommes et par 0,033 pour les femmes (AUTIER et alii 2007).

Pour les cancers du poumon et le mésothéliome de la plèvre, nous utilisons les données de prévalence disponibles pour les années 2002 et 2012 pour estimer les valeurs pour l’année 2010. Pour cela nous faisons l’hypothèse d’une évolution constante au cours de ces années ce qui nous permet d’estimer les valeurs pour toutes les années entre 2002 et 2012 (cf tableau 6).

Tableau 6 : Estimation du nombre de cas prévalents de cancer du poumon et de mésothéliome de la plèvre entre 2002 et 2012. Pathologie Genre 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 Cancer du poumon Homme 31 830 32 350 32 870 33 390 33 910 34 430 34 950 35 470 35 990 36 510 37 030 Femme 8 100 8 194 8 288 8 382 8 476 8 570 8 664 8 758 8 852 8 946 9 040 Ensemble 39 930 40 544 41 158 41 772 42 386 43 000 43 614 44 228 44 842 45 456 46 070 Mésothéliome de la plèvre Homme 580 589 598 607 616 625 634 643 652 661 670 Femme 220 223 226 229 232 235 238 241 244 247 250 Ensemble 800 812 824 836 848 860 872 884 896 908 920

Pour estimer les données de mortalité pour le cancer naso-sinusien et pour le

mésothéliome de la plèvre, nous nous sommes basées sur les données du CépiDc (cf tableau 7). Notre analyse commence en 2000, date à partir de laquelle les données

sont disponibles par code CIM. En étudiant l’évolution du nombre de décès selon le sexe sur la période 2000 à 2008, on remarque une évolution régulière pour le mésothéliome de la plèvre (cf figures 9 et 10) ainsi que pour le cancer naso-sinusien chez l’homme (cf figure 11). Dans ces cas de figure, on peut supposer que l’évolution du nombre de décès est linéaire. Pour le cancer naso-sinusien chez la femme, nous faisons la même hypothèse même si l’évolution semble moins régulièrement (cf figure 12). Cependant comme le nombre de cas est faible et que l’estimation ne porte pas sur une année lointaine, cette hypothèse doit aboutir à une estimation proche de la réalité.

Tableau 7 : Evolution du nombre de décès entre 2000 et 2008 par pathologie selon le genre. Pathologie Genre 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 Plèvre (CIM 10 : C45.0 + C38.4) Homme 623 535 643 598 588 573 614 567 574 Femme 238 240 230 239 228 249 227 228 250 Ensemble 861 775 873 837 816 822 841 795 824 Naso-sinusien (CIM 10 : C30 + C31) Homme 98 94 87 103 98 106 121 129 128 Femme 42 62 43 47 49 60 61 59 51 Ensemble 140 156 130 150 147 166 182 188 179 Source : CépiDc

Figure 9 : Evolution du nombre de décès par mésothéliome de la plèvre entre 2000 et 2008 chez les hommes.

Figure 10 : Evolution du nombre de décès par mésothéliome de la plèvre entre 2000 et 2008 chez les femmes.

0 100 200 300 400 500 600 700 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 0 50 100 150 200 250 300 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009

Figure 11 : Evolution du nombre de décès par cancer naso-sinusien entre 2000 et 2008 chez les hommes.

Figure 12 : Evolution du nombre de décès par cancer naso-sinusien entre 2000 et 2008 chez les femmes 0 20 40 60 80 100 120 140 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 0 10 20 30 40 50 60 70 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009

Pour chaque pathologie et selon le genre, nous estimons donc par la méthode des moindres carrés les paramètres a et b de la droite de régression Y = a X + b avec Y l’estimation du nombre de décès pour l’année X (1 pour l’année 2000 donc 11 pour l’année 2010). Les résultats sont présentés dans le tableau 8.

Tableau 8 : Estimation des paramètres a et b par la méthode des moindres carrés par pathologie et par sexe.

Pathologie Genre Estimation du paramètre a Estimation du paramètre b Mésothéliome de la plèvre Homme -3,05 605,8 Femme 0,27 235,22 Cancer naso-sinusien Homme 4,93 83,44 Femme 1,27 46,33

Pour estimer l’incidence du mésothéliome de la plèvre pour l’année 2010, nous avons créé des ratios incidence/ mortalité pour 2005 selon le sexe (cf tableau 9). Chaque ratio est ensuite multiplié par l’estimation du nombre de décès pour 2010.

Tableau 9 : Estimation de ratios incidence/mortalité pour l’année 2005 par pathologie et par sexe.

Pathologie Genre Incidence en 2005 Mortalité en 2005 Ratio incidence/mortalité Mésothéliome de la plèvre Homme 642 573 1,12 Femme 264 249 1,06

Les calculs effectués nous permettent d’estimer pour 2010 l’incidence du

mésothéliome de la plèvre à 641 nouveaux cas pour les hommes et 252 pour les femmes (cf tableau 10). L’incidence du cancer naso-sinusien est évaluée à 510 cas pour les

hommes et 247 cas pour les femmes.

Pour cette même année, la prévalence du cancer du poumon et du mésothéliome de la plèvre est estimée respectivement à 35 990 et 652 cas pour les hommes contre 8 852 et 244 cas pour les femmes.

Le nombre de décès par cancer naso-sinusien est évalué à 138 pour les hommes et 60 pour les femmes. Pour le mésothéliome de la plèvre, l’estimation des décès est de 572 pour les hommes et 238 pour les femmes.

Tableau 10 : Estimation des données d’incidence, de prévalence et de mortalité par type de cancer et par sexe pour l’année 2010.

Pathologie Genre Nombre de cas prévalents Nombre de cas incidents Nombre de décès Poumon Homme 35 990 26 947 23 496 Femme 8 852 7 489 6 260 Ensemble 44 842 34 436 29 784 Plèvre Homme 652 641 572 Femme 244 252 238 Ensemble 896 893 810 Naso-sinusien Homme - 510 138 Femme - 247 60 Ensemble - 757 198

Section 2 : Résultats de l’évaluation du risque attribuable à chaque