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1. Les coûts pris en compte dans l’analyse

Notre évaluation, menée du point de vue de la société dans son ensemble, prend en compte les coûts directs et les coûts indirects tels que définis dans le chapitre 3. Le manque de données nous a conduits à ne pas inclure les coûts intangibles dans notre analyse. Pour les mêmes raisons, les coûts pour l’entourage du patient ne sont pas mesurés.

Parmi les coûts directs, seuls les coûts médicaux sont pris en compte. Ils se divisent en coûts hospitaliers et coûts des soins de ville. Les coûts hospitaliers comprennent les coûts liés aux séjours en médecine chirurgie obstétrique (MCO) auxquels nous ajoutons le coût des molécules onéreuses, les Missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation (MIGAC) relatives aux cancers ainsi que la radiothérapie privée qui n’est pas prise en compte dans le coût des séjours en MCO. Les soins de ville comprennent les soins ambulatoires, les médicaments et autres biens médicaux.

Nous évaluons les coûts indirects de morbidité et de mortalité dans les sphères marchandes et non marchandes. Pour les coûts indirects de morbidité, nous tenons compte à la fois de l’absentéisme et du présentéisme.

2. Approches par l’incidence et par la prévalence

Les approches par l’incidence et par la prévalence telles que définies dans le chapitre 3 fournissent toutes les deux des informations essentielles. Nous avons donc choisi d’évaluer les coûts selon ces deux approches. Selon l’approche par la prévalence, nous estimons le coût pour l’année 2010 de tous les cas de cancers d’origine professionnelle par facteur de risque. Nous estimons donc les coûts imputables aux cas prévalents ainsi qu’aux décès pour l’année 2010. Selon l’approche par l’incidence, nous estimons le coût tout au long de la vie des nouveaux cas de cancers professionnels diagnostiqués en 2010 selon le facteur de risque. Cette seconde approche comporte deux différences majeures par rapport à la précédente. Nous ne nous intéressons plus aux cas prévalents mais aux cas incidents et nous devons également tenir compte de la survie des patients au-delà de 2010 et donc des coûts indirects qui en découlent. La méthode d’évaluation des coûts selon l’approche par l’incidence est donc plus complexe et nécessite davantage de données.

Pour estimer les coûts directs et indirects de morbidité, il faut pouvoir estimer le nombre de patients toujours vivants X années après le diagnostic. La base de données Eurocare fournit des données en termes de taux de survie jusqu’à cinq années (cf tableau 15) pour les cancers

du poumon, du mésothéliome de la plèvre et pour le cancer naso-sinusien. Pour notre évaluation, nous faisons l’hypothèse que les décès ont tous lieu au 31 décembre. Nous supposons ainsi que tous les patients survivent la première année. Le taux de survie à 1 an est alors utilisé pour estimer le nombre de patients vivant sur l’ensemble de la seconde année et ainsi de suite.

Tableau 15 : Taux de survie du cancer selon la localisation et l’année

Pathologie Taux de survie

1 an 2 ans 3 ans 4 ans 5 ans

Cancer du poumon 44,27% 24,76% 19,03% 15,92% 14,05% Mésothéliome de la plèvre 38,17% 15,67% 10,60% 7,73% 4,62% Cancer naso-sinusien 79,84% 63,61% 55,48% 52,84% 50,04% Source : Eurocare

L’évaluation des coûts de mortalité peut également nécessiter des données supplémentaires selon l’approche adoptée. Nous évaluons le coût pour 2010 des décès survenus en 2010 selon l’approche par la prévalence alors que nous mesurons le coût des décès survenus après 2010 chez les patients diagnostiqués en 2010 selon l’approche par l’incidence. Nous avons donc besoin de données en termes de taux de décès.

Tableau 16 : Taux de décès du cancer selon la localisation et l’année

Pathologie Taux de décès

1 an 2 ans 3 ans 4 ans 5 ans

Cancer du poumon 55,73% 19,51% 5,73% 3,11% 1,87% Mésothéliome de la plèvre 61,83% 22,50% 5,07% 2,87% 3,11% Cancer naso-sinusien 20,16% 16,23% 8,13% 2,64% 2,80%

Si 44,27% des patients ont survécu la première année alors 55,73% d’entre eux sont décédés (100 – 44,27). La différence entre le taux de survie à 1 an et le taux de survie à 2 ans nous donne le taux de décès à 2 ans et ainsi de suite.

Selon l’approche par l’incidence mais aussi selon l’approche par la prévalence dans le cas des coûts de mortalité, nous sommes amenés à estimer la valeur pour l’année 2010 de coûts qui surviennent au-delà de l’année 2010. Pour cela, nous mobilisons donc un taux d’actualisation pour tenir compte de la préférence pour le présent et si nécessaire d’un taux de croissance pour tenir compte de l’accroissement futur de ces coûts. Pour l’ensemble de l’évaluation, nous utilisons des valeurs de taux de croissance de 2 %. Nous retenons une valeur de 5 % pour le taux d’actualisation conformément à la littérature (DRUMMOND et alii 2005). Dans la

troisième partie de notre travail, nous faisons varier ces valeurs pour tester la sensibilité des résultats.

Pour évaluer les coûts selon les approches par l’incidence et par la prévalence, des hypothèses doivent être posées. Nous disposons du nombre de cas prévalents de mésothéliome de la plèvre, de cancer du poumon mais pas de cancer naso-sinusien pour l’année 2010. Pour l’approche par la prévalence, nous faisons donc l’hypothèse qu’il est égal au nombre de cas incidents pour cette même année. Cette hypothèse aboutit sans doute à une sous-estimation du coût des cancers naso-sinusien. C’est toutefois le seul moyen d’estimer le coût des poussières de bois et de cuir selon l’approche par la prévalence.

Lorsque nous adoptons une approche par l’incidence, tout se passe comme si les nouveaux cas diagnostiqués en 2010 constituaient une cohorte fictive que nous suivons jusqu’au décès de l’ensemble des individus qui la constituent pour en estimer les coûts. Comme nous disposons des taux de survie à 5 ans et que nous supposons que tous les décès surviennent le 31 décembre, nous pouvons suivre cette cohorte fictive sur 6 années. Cependant, tous les individus ne sont pas décédés à la fin de cette période et entrainent toujours des coûts que nous ne pouvons plus évaluer par manque de données. Le cancer du poumon et le mésothéliome de la plèvre ont un pronostic très sombre puisque les taux de survie à 5 ans sont respectivement de 14,05 % et 4,62 %. On peut supposer que peu d’individu sont encore en vie l’année qui suit. Les coûts que nous ne pouvons pas prendre en compte ne sont sans doute pas très importants une fois actualisés. En revanche 50 % des patients atteints d’un cancer naso-sinusien sont toujours en vie 5 ans après le diagnostic. La sous-estimation des coûts pour la société imputables aux cancers naso-sinusien qui en découle est plus importante et sera discutée dans la troisième partie.

Encadré n°2

Horizon temporel et approche retenue

Dans l’encadré n°1, nous avons expliqué et justifié le choix de l’année 2010 pour notre évaluation. Ceci signifie que nous nous intéressons aux coûts pour l’année 2010 mais pas forcément aux coûts survenus en 2010. Une précision par approche et par type de coût est nécessaire pour éclaircir le lien entre le temps de l’évaluation et le temps de survenue des coûts.

Lorsque nous adoptons une approche par la prévalence, les coûts directs et les coûts indirects de morbidité surviennent uniquement en 2010. L’apparition des coûts correspond avec l’année de l’évaluation, aucun travail d’actualisation n’est donc nécessaire.

Pour évaluer les coûts de mortalité, seuls les décès survenus en 2010 sont pris en compte. Ils entrainent des coûts au-delà de l’année 2010 puisque l’individu, s’il n’était pas décédé continuerait à participer à la production. Les techniques d’actualisation sont alors mobilisées pour évaluer la valeur en 2010 de ces coûts de mortalité.

Selon l’approche par l’incidence, nous estimons les coûts imputables aux nouveaux cas de cancer diagnostiqués en 2010 quelle que soit l’année durant laquelle surviennent ces coûts. Le patient toujours en vie à l’année n+1 peut être hospitalisé ou connaître un épisode d’arrêt de travail par exemple. En utilisant les méthodes d’actualisation, on estimera alors la valeur pour 2010 des coûts directs et des coûts indirects de morbidité au-delà de l’année 2010.

Pour évaluer les coûts de mortalité, nous prenons en compte les coûts liés aux décès des nouveaux cas de cancer diagnostiqués en 2010. Comme nous faisons l’hypothèse que tous les décès ont lieu au 31 décembre, tous les patients survivent la première année. Les coûts de mortalité pris en compte correspondent donc aux décès survenus après 2010. Comme pour l’approche par la prévalence, les coûts de mortalité sont actualisés pour estimer leur valeur en 2010.