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Données de mortalité selon la classe sociale

Dans le document Dimensions psychosociales de la santé (Page 125-129)

C. Les maladies chroniques

4. CHAPITRE IV : TOUS ÉGAUX DEVANT LA MALADIE ET LA MORT ? LES

4.2. Données de mortalité selon la classe sociale

4.2.1. Mortalité différentielle en Grande-Bretagne en 1981

Les études statistiques anglo-saxonnes utilisent souvent la même échelle pour ventiler les personnes en fonction de la classe socioprofessionnelle à laquelle elles appartiennent. Celle-ci se compose de 5 catégories (Tableau IV.1) plus ou moins homogènes quant au standing de vie, au niveau d'instruction, aux valeurs et aux aspirations des individus qui en font partie. Ces catégories représentent donc plutôt un statut social qu'un mode de vie particulier ou un simple niveau économique.

TABLEAU IV.1:CATÉGORIES SOCIOPROFESSIONNELLES EN GRANDE-BRETAGNE

Classe Nature

I Administrations et professions libérales du plus haut niveau, directeurs d'affaires. II Autres professions libérales, d'administration et de direction : ceux qui sont responsables

de la marche des affaires, ceux qui exercent un pouvoir de contrôle sur d'autres. III Employés de bureau de commerce, d'administration, contremaîtres, ouvriers qualifiés.

Ceux-ci ne se limitent pas à un seul poste spécifique et sont dotés d'une dénomination spéciale, d'une responsabilité spéciale.

IV Ouvriers semi-qualifiés : personnes ayant un travail manuel ne nécessitant aucune habilité, ou formation particulière mais qui travaillent dans un secteur précis. V Ouvriers non-qualifiés : manœuvres, nettoyeurs et autres travaux subalternes. (Avalosse, 1997 : 8)

DPS – 2011-2012 - Pr. MAIRIAUX Page 126 Le tableau IV.2 reprend les ratios standardisés de mortalité (SMR : Standardized Mortality Ratio) pour les hommes et les femmes, en 1981 (Grande-Bretagne). Cet indicateur est le nombre de décès attribués à une cause donnée, observés dans un groupe donné pendant une période déterminée, rapporté au nombre escompté de décès attribuables à cette cause dans le même groupe pendant la même période. Ce rapport est généralement exprimé en pourcentage : le chiffre 100 signifie que le nombre de décès observés représente 100 % des décès escomptés. Il s'agit donc de la mortalité moyenne de la population de référence.

TABLEAU IV.2:MORTALITÉ DIFFÉRENTIELLE EN GRANDE-BRETAGNE EN 1981(SMR) Classes sociales Hommes (20 - 64 ans) Femmes (20 - 59 ans)

I 66 69

II 76 78

III non manuel 94 87

III manuel 106 100

IV 116 110

V 165 134

Avalosse (1997) : 8, d'après Davey Smith et al. (1990)

Que peut-on mettre en évidence avec ces ratios de mortalité calculés en fonction du sexe et de la classe sociale ?

Ces données suggèrent l'existence d'une hiérarchie sociale face à la maladie et à la mort : plus on descend dans l'échelle sociale, plus les taux de mortalité observés sont supérieurs aux taux moyen de référence. Ainsi, les membres de la classe I ont une mortalité nettement inférieure à la moyenne tandis que ceux de la classe V présentent un excès de mortalité très marqué. Les écarts selon la classe sociale sont par ailleurs plus marqués chez les hommes que chez les femmes

4.2.2. Evolution de la mortalité en Grande-Bretagne entre 1911 et 1981

Le tableau IV.3 montre l'évolution, en Angleterre et aux Pays de Galles, des SMR parmi les hommes de 15 à 64 ans en fonction des 5 catégories socioprofessionnelles déjà mentionnées.

TABLEAU IV.3:MORTALITÉ DIFFÉRENTIELLE,GRANDE-BRETAGNE ET PAYS DE GALLES,1981(SMR) CATÉGORIE SOCIALE Professions libérales I Dirigeants d'entreprise II Manuels et non manuels qualifiés III Semi-qualifiés IV Non-qualifiés V 1911 88 94 96 93 142 1921 82 94 95 101 125 1931 90 94 97 102 111 1951 86 92 101 104 118 1961 b 76 (75) 81 100 103 143 (127) 1971 b 77 (75) 81 104 114 137 (121) 1981 c 66 76 103 116 166 Marmot (1986) et OPCS (Bureau des recensements et enquêtes de population) (1978), cités dans Evans (1996).

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b

Pour faciliter les comparaisons, les chiffres entre parenthèses ont été recalculés en utilisant la classification des emplois de 1951.

c

Hommes de 20 à 64 ans, en Grande-Bretagne.

Ces données révèlent l'existence d'un gradient social de mortalité à chaque période de mesure durant les septante années analysées.

Au-delà de ce constat retrouvé dans d'autres études, le tableau III.3 révèle une autre tendance importante : les écarts de mortalité entre les classes sociales I et V ne sont pas constants au cours de la période observée. Ils sont, en effet, les plus faibles en 1931 (avant la crise économique des années 30), et restent ensuite relativement stables jusque dans les années 50 pour s'accentuer durant les dernières décennies. L'augmentation importante des écarts entre classes sociales résulte à la fois d'une amélioration très importante de l'espérance de vie de la classe I (SMR passant de 90 à 66) et d'une amélioration nettement plus faible de celle-ci dans la classe V (SMR passant de 118 à 166). Pour bien comprendre la signification de ces chiffres, il importe de rappeler qu'ils constituent des ratios par rapport à un taux moyen de mortalité. Or ce dernier a considérablement diminué entre 1911 et 1981 ; la valeur (SMR) 100 en 1981 correspond à un nombre de décès nettement moindre (à âge égal) que celui correspondant à la valeur (SMR) 100 en 1911.

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4.2.3. Espérance de vie au Canada en fonction des groupes sociaux

Cette étude compare l'espérance de vie des individus en fonction de leur sexe et de leur classe sociale. Les auteurs utilisent deux indicateurs : l'espérance de vie (le nombre d'années moyen à vivre) et l'espérance de vie sans incapacité (le nombre d'années moyen à vivre en bonne santé). Dans le tableau IV.4, l'espérance de vie est calculée à partir de la naissance.

TABLEAU IV.4.:DIFFÉRENCES D'ESPÉRANCE DE VIE ET D'ESPÉRANCE DE VIE SANS INCAPACITÉ ENTRE LES GROUPES SOCIAUX LES PLUS PAUVRES ET LES PLUS RICHES AU CANADA, FIN DES ANNÉES 1970

Espérance de vie en années

Espérance de vie sans incapacité en années EVSI / EV % Hommes : 20 % + pauvres 20 % + riches Différence 67,1 73,4 6,3 50,0 64,3 14,3 74,5 87,6 Femmes : 20 % + pauvres 20 % + riches Différence 76,6 79,4 2,8 54,9 67,6 12,7 78,2 85,0

Wilkins R. et Adams O.B. (1991), cité dans Avalosse (1997) : 40.

On constate que, pour les hommes, l'espérance de vie (EV) des plus pauvres est de 6,3 années inférieure à celle des plus riches et que cet écart s'accroît jusqu'à 14,3 années pour l'espérance de vie sans incapacité (EVSI). Pour les deux sexes, les écarts entre riches et pauvres en années d'espérance de vie sans incapacité représentent donc plus du double de l'écart en années d'espérance de vie simple. Ainsi, non seulement les groupes les plus défavorisés vivent moins longtemps mais, en outre, les années vécues sont marquées plus précocement par l'incapacité (Avalosse, 1997).

4.2.4. Données françaises relatives à la mortalité sociale

Les chercheurs français ont mis au point un dispositif spécifique complexe pour évaluer la mortalité sociale au cours du temps, c'est-à-dire les différences de mortalité en fonction de la classe sociale de l'individu. C'est en utilisant ce dispositif que l'INSEE (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques) a réalisé deux enquêtes importantes : en 1976, une étude sur "la mortalité des adultes suivant le milieu social" et, en 1991, une autre étude reprenant les données de mortalité de la période 1980-1990. En voici les principaux résultats55.

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