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De nombreuses opérations ont été conduites sur nos données à l’aide du logiciel SPSS (tris à plats et croisés, analyse en composantes principales (ACP), etc.) afin de les ex-plorer et de mettre à jour des configurations de distances à même de caractériser des groupes d’acteurs. C’est finalement par le biais d’une classification hiérarchique ascen-dante20(CHA), réalisée à partir de toutes les variables de distance dont nous disposions21

que nous avons achevé ce travail de partition de notre échantillon, sur la base des ressem-blances et dissemressem-blances des acteurs en termes de distances. Après avoir testé plusieurs partitions possibles à partir du même dendrogramme (partition en 2, 3, 4, 5 et 6 classes), nous avons choisi la partition en 5 de l’échantillon car elle présentait des valeurs re-marquables pour un maximum de variables. Ces 5 classes de cas sont donc caractérisées par leur relative homogénéïté en termes de distances, et leur hétérogénéïté vis-à-vis des autres classes. Cela signifie qu’au sein des 5 classes, les individus ont des configurations de distances comparables. Ils se sont donc vu attribuer une nouvelle variable stipulant leur classe d’appartenance, numérotée de 1 à 5.

A partir de ces classes, nous avons pu réaliser des tris croisés en série avec toutes les variables descriptives des distances : quantité de distances totale (DT), quantité de distance propres (DPr) et de distance des autres (DdA), actants des distances, types de distance, types de distance par actants, quantité des types de distance, etc.

Sur la base de la significativité du Khi-deux des tris croisés, nous avons pu identifier un jeu de variables22 permettant de caractériser les classes les unes par rapports aux autres.

Ces classes (Tab.3.9) nous ont d’abord confortée dans les positions émises précé-demment, puisqu’elles transcendent partiellement les catégories classiques d’acteurs de l’alerte. Même en considérant le fait que nos individus sont parfois mobiles entre les

20. Dans un processus itératif, on réunit, étape par étape, au sein de clusters les cas qui se ressemblent le plus sur les variables choisies. L’objectif principal des méthodes de classification automatique est de répartir les éléments d’un ensemble en groupes, c’est-à-dire d’établir une partition de cet ensemble. Différentes contraintes sont bien sûr imposées, chaque groupe devant être le plus homogène possible, et les groupes devant être les plus différents possibles entre eux.

21. En effet, travailler sur les individus nous condamnait à travailler sur 36 éléments, tandis que travailler d’abord sur les variables de distances et les liens qui existent entre elles a permis de s’appuyer sur une quantité de données beaucoup plus importante.

22. A l’aide des logiciels SPAD et SPSS (et du précieux support méthodologique et technique d’Isabelle André-Poyau), nous avons aussi conduit des ACP à partir de nos variables de distance. Cela nous a permis d’affiner la lecture de nos multiples variables et d’identifier les plus discriminantes. Il s’est avéré que cela concordait tout à fait avec les résultats de nos tris croisés, et aucune variable « étonnante » ou supplémentaire n’est apparue. Aussi, nous avons considéré que nous pouvions nous appuyer sur le jeu de variables identifiées préalablement pour caractériser la partition obtenue par CHA.

classes, on ne peut ignorer que les classes issues des variables de distance ne recoupent/re-couvrent pas totalement les catégories d’acteurs classiques.

Par ce fait même, cette classification nous a mis face aux limites de notre cadre in-terprétatif. Si nous étions convaincue qu’un météorologue peut parfois être proche, d’un point de vue des configurations de distance, d’un garde champêtre, il n’en demeure pas moins difficile de comprendre ce qui peut le rendre plus proche d’un garde champêtre que d’un autre météorologue. . . De fait, à l’exception de la classe 5, relativement homogène socialement et géographiquement, il semble que les catégories d’analyse des acteurs clas-siquement utilisées en sciences sociales23 soient en partie inopérantes pour expliquer la répartition des acteurs au sein des classes et caractériser leurs configurations de distances. Ceci nous a posé de sérieux problèmes, et nous a notamment amenée à remettre en ques-tion notre classificaques-tion. Nous avons donc conduit de nombreux tests afin de vérifier la validité de cette partition à l’échelle de l’échantillon, et il s’est avéré que du point de vue des relations de distances (actants, types de distances, etc.), les classes correspon-daient bien à des configurations spécifiques et distinctes. Nous en avons déduit que nos difficultés à identifier les facteurs qui répartissent les acteurs entre les classes relèvent de lacunes dans notre cadre interprétatif. Ainsi, alors que nous avions précédemment remis en question le cadrage herméneutique de l’approche classique, nous étions bien en peine de nous en dispenser au moment de l’analyse !

En somme, nous avons constaté que le type, ou la catégorie (classique) d’un acteur n’est pas totalement déterminant de sa configuration de distances. Il nous faudra donc chercher d’autres facteurs, notamment du coté des régimes d’engagement des acteurs (Thévenot, 2006).

Les classes d’individus issues de l’analyse des distances nous amènent donc à remettre en cause la typologie classique des acteurs du PA. Pour autant, elles ne peuvent constituer, telles quelles, une nouvelle typologie des acteurs. D’abord, la partition des classes se basant sur les variables de distances, les effectifs sont très variables : de 2 à 14 individus par classe. Leur intérêt est donc qualitatif plutôt que quantitatif24. De plus, nous avons vu que certains acteurs peuvent être « mobiles » selon les variables prises en compte. Aussi, bien que nos classes réunissent des cas qualitativement semblables, il reste difficile de les ériger en véritables « types d’acteurs », car cela supposerait une homogénéïté plus robuste que celle observée.

De fait, nous allons voir que ce qui rassemble les individus d’une classe, c’est le

par-23. Ici, on pouvait mobiliser, notamment : niveau socio-culturel, statut dans le PA, échelle d’action, localisation, etc.

24. Une étude ultétieure menée à partir des profils avec un souci de représentativité pourrait permettre d’explorer leur « épaisseur » quantitative.

T ab le 3. 9 – Rép ar ti ti on des act eu rs sel on les cl asses

tage de certaines caractéristiques extrêmes, mais qu’ils peuvent présenter, entre eux, des différences non négligeables pour d’autres variables. De plus, nous verrons que les valeurs extrêmes de chaque classe portent sur des variables différentes : si une variable permet de distinguer une classe des autres, elle ne permet pas pour autant de distinguer ces autres classes entre elles.

Afin d’extraire de cette classification les éléments vraiment significatifs des différentes configurations de distances du PA, il nous a donc semblé plus juste, plus pertinent, de construire à partir de ces classes des idéaltypes25 : des « profils de distance », caractérisés par des positions extrêmes sur quelques variables, et le rapport de ces positions à la moyenne (ou la médiane) de ces variables sur l’échantillon. Ainsi, plutôt que de décrire chaque classe d’acteurs, il est apparu heuristiquement plus pertinent d’appuyer leurs traits distinctifs en termes de distance, afin de contruire un acteur idéal-typique - ou profil -caractérisé par une configuration de distances spécifique.

Pour construire ces profils, nous serons donc plus attentive aux « positions » des classes sur une variable, qu’à la valeur exacte que prend cette variable pour chacune de classes. Ils auront donc moins vocation à décrire parfaitement la réalité qu’à fournir une modélisation permettant une meilleure compréhension de cette réalité, et notamment des différentes configurations de distances des acteurs du PA.