Avant d’aborder le bilan des résultats, il faut signaler que pour chaque critère, l’effet des différents facteurs de variation (appartenance au protocole Mamovicap ou pas, bassin de production) a été étudié par analyse de variance avec l’indicateur de réforme en question. Des tests de normalité ont été systématiquement réalisés. Un certain nombre des critères ne suivent pas une loi normale malgré de nombreuses transformations effectuées (logarithme, racine troisième, quatrième). Nous avons, cependant, poursuivi l’étude mais il faut interpréter les résultats avec précaution.
Dans ce projet étudiant la politique de réforme conduite par les éleveurs suivant l’état mammaire, et dans l’optique d’une future valorisation génétique pour améliorer la longévité fonctionnelle des animaux, plusieurs points sont à retenir :
Inciter les éleveurs à mieux déclarer les dates et les causes de réforme de leurs animaux dans SIEOL
Premier constat : au niveau des déclarations des dates de sortie
On constate qu’encore 10% des dates de réforme sont mal enregistrées. Les Pyrénées déclarent moins bien ces dates que le Rayon Roquefort, avec une différence de 10%. Il est important de communiquer auprès des éleveurs sur l’intérêt de bien renseigner les dates de sortie des animaux afin de pouvoir disposer de phénotypes précis de la longévité fonctionnelle, caractère que les maîtres d’œuvre des schémas de sélection souhaitent intégrer dans l’avenir.
Deuxième constat : au niveau de l’enregistrement des causes de réforme
Près de 60% des réformes, notamment dans le Rayon, n’ont pas de cause connue. On est donc face à un défaut d’exhaustivité de l’information. Là encore, on a besoin de connaitre les principales causes de départ des animaux, dans les fermes, ne serait-ce que pour disposer d’un observatoire permettant de mieux piloter l’amélioration de la longévité fonctionnelle des brebis et de mieux cerner les indicateurs de cette longévité (on connait la résistance aux mammites et la morphologie mammaire : y en a-t-il d’autres tels que la vitesse de traite, la résistance au parasitisme, etc..). Il s’est avéré que certains éleveurs avaient, quelquefois, des difficultés à identifier clairement les causes sanitaires de réforme. Afin d’améliorer ce point, les instituts techniques ou organismes de recherche pourraient leur proposer des formations afin de leur permettre i) d’avoir un aperçu exact de leurs principales causes de réforme et ii) d’identifier les enjeux et les bénéfices économiques et sanitaires qu’ils pourraient bénéficier avec une meilleure connaissance des pathologies sanitaires de leur troupeau. Ce manque de renseignement des causes de réforme limite donc l’interprétation des différentes raisons de sortie des animaux.
Poursuivre l’amélioration de la résistance des animaux face aux mammites
Constat : les infections mammaires sont une des principales causes de réforme en
ovins lait
Près de 50% des réformes sont expliquées par des mammites et des problèmes mammaires notamment dans les Pyrénées. Elles ont donc un impact économique et sanitaire
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non négligeable dans les élevages. La part plus importante des mammites dans les Pyrénées, est peut-être due à des pratiques et des conduites d’élevage différentes de la Lacaune (alimentation des animaux, structure des bâtiments, climat, caractéristiques propres à chaque race, présence ou non de transhumance, pratiques de traite différente : palpation mammaire lors de la traite, dans les Pyrénées). Les mammites jouent donc un rôle déterminant, en brebis laitières, puisqu’elles constituent un des principaux facteurs de variation de la durée de vie des brebis. Ce sont donc de bons prédicteurs de la longévité. En complément d’une meilleure résistance des animaux face aux mammites, l’accent pourrait être porté sur des formations terrain (dans des fermes expérimentales ou chez des éleveurs attentifs à ces problèmes) ou sur des communications qui récapituleraient les bons réflexes et attitudes à adopter concernant l’hygiène de traite et l’entretien de la machine à traire. Cette diffusion d’information s’avère d’ailleurs l’un des objectifs de Mamovicap.
Rester dans l’objectif d’une meilleure conformation mammaire avec un bon statut sanitaire
Premier constat : la morphologie de la mamelle a progressé ces dernières années
en Lacaune et doit être améliorée dans les Pyrénées
La sélection laitière a dégradé la mamelle et a conduit, par exemple, à des angles de trayon horizontaux. Or cette position i) ne favorise pas la pose aisée des faisceaux trayeurs lors de la traite (donc impact sur le temps de travail des éleveurs), ii) ne permet pas de récolter tout le lait citernal (donc pénalités financières pour l’éleveur) et iii) ne facilite pas la tétée des agneaux (donc impact économique pour l’éleveur, car les agneaux moins bien nourris, sont plus chétifs et donc plus sensibles aux pathologies diverses).
Deuxième constat : des taux de CCS élevés sont observés, notamment dans les
cheptels Mamovicap (cohérence avec le choix de ces élevages pour le protocole)
Un certain nombre de brebis, surtout dans les Pyrénées, possèdent des concentrations cellulaires dans le lait assez chargées. Or, il faut souligner que cette région n’a pas encore intégré le critère CCS dans leur index ISOL. Il faut donc, d’une part intégrer le critère cellules dans l’objectif de sélection, d’autre part, mettre en œuvre l’ensemble des facteurs liés à l’environnement (traite notamment) pour faire baisser les taux de CCS. Cet objectif est très important afin i) de réduire les coûts d’élevage (taux de réforme plus élevé, frais vétérinaires) et ii) améliorer le bien-être animal et la sécurité alimentaire des produits.
Troisième constat : un lien génétique fort existe entre la morphologie mammaire et
les CCS
Plus la mamelle est bien conformée, moins on a de cellules. Ce constat est très rassurant : la sélection d’animaux résistants aux mammites (faibles taux de CCS) favorise une meilleure conformation mammaire.
Quatrième constat : la politique de réforme dépend très fortement de l’état de santé
général de la mamelle
Plus les brebis possèdent un pis altéré, sur les statuts morphologique et sanitaire, plus elles sont réformées rapidement pour des pathologies mammaires. La réforme précoce est coûteuse. Il faut donc améliorer le statut de la sphère mammaire pour faire progresser la compétitivité des exploitations ovines laitières. Ce constat a d’ailleurs été vérifié dans d’autres espèces laitières telles que les bovins et les chèvres.
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Conclusion
Dès les années 1970, la filière ovine laitière a concentré sa sélection d’animaux uniquement sur les caractères de production (quantité seulement dans un premier temps, quantité et qualité chimique ensuite). Cet axe de sélection a provoqué une dégradation générale de la mamelle, sur les plans morphologique et sanitaire. Les pis sont devenus des « poches » plus sensibles aux infections mammaires et moins faciles à traire. Les animaux, également, moins résistants aux mammites, délivrent des teneurs en CCS dans le lait plus chargées. Face à ces constats, les maîtres d’œuvre des schémas de sélection Lacaune ont donc intégré des caractères fonctionnels (morphologie mammaire et cellules) dans l’index, depuis 2005. Les schémas de sélection des races Pyrénéennes vont faire de même dans les prochaines années.
Les mammites et les problèmes mammaires s’avèrent, en effet, des causes de sortie majeures dans les troupeaux ovins laitiers. Ils engendrent des pertes économiques non négligeables pour l’éleveur (taux de réforme plus élevés, frais vétérinaires accrus, pénalités financières plus importantes). Ces caractères fonctionnels constituent donc de bons prédicteurs de la longévité fonctionnelle des brebis. Cette dernière, augmentant la durée de vie productive de l’animal, réduit les coûts de production dans les élevages favorisant une meilleure compétitivité des exploitations. La diminution des mammites n’est possible que par la résistance des animaux face à ces pathologies mais aussi par un meilleur apport de conseils et de bonnes pratiques relatives à l’hygiène et à l’équipement de traite.
La sortie d’animaux, dans les élevages, représente pourtant une des principales décisions stratégiques sur la conduite d’un troupeau. Or, nous avons remarqué que très peu d’éleveurs, notamment dans le Rayon, renseignaient de manière assidue les causes de réforme de leurs animaux. C’est pourtant important de bien connaître les causes de sortie des brebis, ne serait-ce que pour mieux identifier les indicateurs de la longévité fonctionnelle. Pour perfectionner la déclaration des causes de réforme, les instituts techniques pourraient animer des formations ou des sessions de sensibilisation afin de montrer aux éleveurs le réel intérêt qu’ils ont i) de mieux renseigner les réformes au sein de leur cheptel et ii) de comprendre les enjeux et les bénéfices réels d’une meilleure connaissance des pathologies de leur troupeau. La prise en compte réelle de ce critère de sélection de la longévité sera probablement un élément déclencheur.
Nous avons souligné, que la politique de réforme des éleveurs est étroitement liée aux statuts morphologique et sanitaire du pis de leurs brebis. En effet, plus les animaux Lacaune détiennent des mamelles mal conformées et riches en CCS, plus rapidement ils sont réformés du cheptel pour des pathologies mammaires. D’ailleurs, les troupeaux du projet « Mamovicap », programme de recherche pour diminuer l’impact des mammites, possèdent plus de brebis avec des pis altérés, par rapport aux autres exploitations du noyau de sélection, ce qui est conforme avec les critères de choix de ces élevages
Améliorer l’enregistrement des causes de réforme et poursuivre la sélection d’animaux résistants aux mammites avec des mamelles bien conformées, sont les principaux axes de progrès de la longévité fonctionnelle pour rendre les exploitations ovines laitières plus rentables et plus efficaces. Des formations ou documents informatifs destinés aux éleveurs, sont de bons vecteurs de sensibilisation pour inciter aux bonnes pratiques afin de diminuer l’impact des mammites et d’éveiller l’intérêt réel de mieux déclarer les causes de sortie des animaux. Le programme CASDAR « RUSTIC » va débuter en 2016 sur le thème de la prise en compte des caractères de robustesse en sélection de petits ruminants. La longévité fonctionnelle fait partie des caractères mis en exergue dans ce projet. Il sera possible de s’appuyer sur les résultats de ce stage comme base d’étude de la longévité.
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GROUPES SOUS-GROUPES CAUSES EXACTES
Mammites
Mammites gangréneuses Mammites gangréneuses Mammites foudroyantes
Mammites cliniques avec des symptômes nets, généraux et
locaux Mammites Mammites cliniques Mammites allaitement Mammites coliformes Mammites Listéria Mammites avant agnelage Mammites cliniques avec
symptômes fonctionnels Sang dans le lait
Mammites chroniques décelables par palpation
Induration du pis Bosses dans le pis
Nodules Abcès mammaires
Gros pis Mammites chroniques avec
Pis déséquilibrés
Lait d’un côté, un seul quartier
Pis déséquilibré Mammites subcliniques Mammites subcliniques
Cellules CMT
Problèmes morpho fonctionnels mammaires
Traite Difficulté de traite
Vitesse de traite Conformation mamelle Mauvais pis Pis long Gros trayon Trayon Trayon Boutons mamelle Boutons trayon-ecthyma Boutons pis Verrues Croûtes Divers Divers Caractères laitiers Production laitière Production laitière Quantité de lait Mauvais index Qualité du lait Persistance laitière Tarie-Tarie au sevrage Persistance laitière insuffisante