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Chapitre 4 : Développement d'une immunothérapie ciblant la protéine SOD1 mal repliée pour le traitement de

4.4 Discussion

De nombreuses maladies neurodégénératives, telles que la maladie d'Alzheimer et celle de Parkinson, ont fait l'objet de recherche concernant le développement d'une immunothérapie ciblant les agrégats protéiques qui leur sont caractéristiques (Krishnamurthy and Sigurdsson 2011). Au cours des dernières années, des efforts de recherche important ont été déployés en ce sens pour ralentir la progression de la SLA, en ciblant les formes mal repliées de la protéine SOD1. Bien que des anticorps bénéfiques ayant un effet direct sur la progression de la maladie aient déjà été développés, il est d'intérêt de trouver l'anticorps optimal permettant de stabiliser les différentes formes mal repliées de la protéine SOD1 (Gros-Louis, Soucy et al. 2010). La cystéine 111 de la protéine SOD1 est un acide aminé clé dans la formation des ponts disulfures et se retrouve près de la surface de dimérisation de la protéine (Valentine, Doucette et al. 2005). Des études démontrent que sa délétion au sein des protéines mutantes diminue de façon importante la formation d'agrégats protéiques (Cozzolino, Amori et al. 2008). Ainsi, cette cystéine semblait une cible de choix pour la production d'un anticorps, puisque cet anticorps stabiliserait l'acide aminé et aurait un effet semblable à sa délétion, soit en diminuant la formation d'agrégats. C'est pourquoi notre choix s'est arrêté sur le KLH-peptide cys111 pour l'immunisation active.

Tel qu'attendu, le vecteur seul ne cause pas de réponse immunitaire affectant la survie ou l'apparition des symptômes chez les souris tgSOD1WT et les souris hSOD1G37R (Figure 4.2). De plus, les souris

tgSOD1WT immunisées ne voient également pas leur survie affectée et la production d'anticorps ne permet pas aux souris de développer la maladie (Figure 4.2). Ainsi, la survie et le phénotype des souris tgSOD1WT des deux groupes expérimentaux sont très similaires à ce qu'on retrouve dans la littérature (Bruijn, Houseweart et al. 1998). Cependant, de manière surprenante, les courbes de survie et d'âge de début d'apparition des symptômes de la maladie obtenues pour les souris hSOD1G37R immunisées infirment notre hypothèse de départ. En effet, à défaut d'avoir une survie

prolongée et un âge d'apparition des symptômes retardé par rapport aux souris hSOD1G37R non

immunisées, nous observons une survie écourtée d'en moyenne 7.5 jours et une tendance d'apparition des symptômes plus précoce (Figure 4.2). De plus, lorsque le titre des anticorps anti- peptide SOD1cys111 a été évalué par ELISA, il a été possible d'observer que l'immunisation des souris a été efficace. De manière intéressante, les souris présentant le phénotype de la maladie de façon plus précoce au sein du groupe expérimental des souris hSOD1G37R immunisées ont les titres

d'anticorps les plus élevés du groupe expérimental (en vert sur les figures 4.2B et 4.3). Ce résultat suggère ainsi que la quantité d'anticorps présents dans le sérum sanguin pourrait influencer directement la sévérité de la maladie ainsi que l'âge d'apparition des symptômes.

Tel qu'attendu, les immunofluorescences (IF) sur coupes congelées de moelles épinières de souris hSOD1G37R non immunisées présentent des agrégats protéiques SOD1 positive, tel que décrit

précédemment (Wong, Pardo et al. 1995). Les souris hSOD1G37R présentent une accumulation de

SOD1 au niveau de la moelle épinière semblable à celle des souris hSOD1G37R non immunisées,

résultat surprenant, puisque l'immunothérapie a été développée dans le but de diminuer l'agrégation protéique. Les souris tgSOD1WT, bien que surexprimant la protéine SOD1 de type sauvage, sont asymptomatiques et ne présentent pas de caractéristiques de la maladie (Bruijn, Houseweart et al. 1998). De plus, les souris tgSOD1WT non immunisées ne présentent pas d'agrégats protéiques SOD1 positive. De manière surprenante, les souris tgSOD1WT immunisées présentent des agrégats SOD1 positive dans la corne ventrale de la moelle épinière. Ces agrégats protéiques correspondent à ce qu'il est possible d'observer chez des souris pré-symptomatiques hSOD1G37R (Wong, Pardo et

al. 1995). Ces résultats suggèrent ainsi qu'en plus de déstabiliser les protéines SOD1 mutantes, les incitant ainsi à s'agréger davantage, il serait possible d'induire in vivo le mauvais repliement de la SOD1 de type sauvage.

Il a déjà été démontré que certains anticorps sont bénéfiques et ralentissent la progression de la maladie tandis que d'autres sont neutres et n'influencent pas le cours de la maladie. Plusieurs stratégies d'immunisation différentes ont été utilisées, tant actives que passives, et la plupart d'entre elles démontrent des résultats prometteurs, incluant une survie prolongée des souris et un délai dans l'apparition des symptômes (Urushitani, Ezzi et al. 2007; Gros-Louis, Soucy et al. 2010; Takeuchi, Fujiwara et al. 2010; Liu, Tjostheim et al. 2012). Cependant, il s'agirait de la première identification d'un anticorps néfaste, qui accélèrerait le développement des symptômes, en plus d'induire le mauvais repliement in vivo de la SOD1 de type sauvage. Cette découverte donne un nouvel éclairage sur les stratégies thérapeutiques à adopter en ce qui a trait à l'immunothérapie ciblant la SOD1 mutée.

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Au cours des années 1990, des essais cliniques utilisant des immunoglobulines intraveineuses (IVIG) ont été réalisés dans le but de traiter la SLA. Cependant, ces essais n'ont pas donnés des résultats concluants, en raison de l'absence d'effet satisfaisant suite au traitement (Meucci, Nobile- Orazio et al. 1996). Des recherches subséquentes ont permis de démontrer la production et l'accumulation anormale et toxique d'IgG chez certains patients atteints de SLAS (Donnenfeld, Kascsak et al. 1984; Engelhardt and Appel 1990). De plus, des expériences ont prouvé que les immunoglobulines purifiées de patients SLAS sont toxiques pour les neurones moteurs en culture, en plus de ceux chez la souris (Alexianu, Mohamed et al. 1994; Smith, Alexianu et al. 1994; Pullen and Humphreys 2000; Demestre, Pullen et al. 2005). Ainsi, ces évidences peuvent expliquer en partie pourquoi les essais cliniques aux IVIG n'ont pas obtenu le succès escompté, malgré les résultats prometteurs en pré-clinique et en clinique pour d'autres maladies neurodégénératives (Puli, Pomeshchik et al. 2012; Gong, Pan et al. 2013; Puli, Tanila et al. 2014). Les IVIG sont une portion du produit sanguin qui consistent en une concentration d'immunoglobulines humaines (IgG), dérivées du plasma sanguin de multiples donneurs (généralement entre 3000 et 10 000) et mis en commun dans le but d'en faire un traitement thérapeutique. Leur contenu élevé d'anti-idiotypes contre les autoanticorps est considéré comme l'élément thérapeutique clé de cette technique, utilisée essentiellement pour des maladies ayant une composante inflammatoire importante (Kazatchkine and Kaveri 2001). Bien entendu, ces résultats demeurent préliminaires et des investigations supplémentaires, tant chez la souris et chez l’humain, sont nécessaires. Les perspectives concernant ce chapitre seront présentées au chapitre suivant.

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