• Aucun résultat trouvé

Dire non – Fixer des limites sans blesser

« Être authentique plutôt que gentil » est un thème de notre module de formation sur la communication non violente. Nous vous entraînons à exprimer sincèrement votre propre opinion sans blesser les autres. Lorsqu’il

s’agit d’interrompre franchement les autres alors qu’ils parlent parce que nous n’avons plus la concentration nécessaire pour continuer à écouter, on se sent inquiet : « Je ne peux tout de même pas couper la parole à quelqu’un.

Cela ne se fait pas. » De telles réactions montrent simplement, d’après notre expérience, que beaucoup d’individus ont grandi en apprenant, par exemple, qu’il fallait privilégier la politesse à la sincérité. Ceci vaut également lorsqu’il s’agit de dire franchement « non » à quelqu’un. En s’interrogeant sur les besoins que vous satisfaites en étant gentil plutôt que sincère, il est clair que l’apparente harmonie s’obtient sur le long terme au détriment de la relation. Posez-vous la question suivante : Quel prix suis-je prêt à payer pour l’harmonie ? Car à long terme, votre intégrité personnelle, l’échange sincère, voire votre santé risquent d’en pâtir.

La communication non violente, qui veut que l’on soit sincère envers soi-même, signifie parallèlement s’intéresser aux besoins des autres. Par un

« non » clair, nous pouvons parallèlement faire savoir à quel besoin nous disons « oui ».

Exemple

Franck occupe une fonction d’interface au sein de l’équipe. Depuis neuf mois, il s’efforce de rassembler toutes les informations importantes. Tous apprécient sa disponibilité et sa fiabilité. Il cumule les heures supplémentaires et met sa famille au second plan depuis le début de ce nouveau projet. Franck commence à devenir nerveux et a du mal à dormir.

Son collègue Jean vient le voir : « Franck, Sarah a eu un accident et va être absente pendant au moins quatre semaines. Nous ne pouvons donc pas te livrer l’analyse. Peux-tu t’en charger toi-même ? » Franck est sous tension. Il aime rendre service mais lorsqu’il pense à toutes les tâches qu’il a dû remettre à plus tard au cours des dernières semaines, il se sent mal. Difficile d’accepter un travail supplémentaire. Il doit agir.

Dans cette impasse, comment Franck procède-t-il ?

Exemple

En répondant à son collègue « Un instant, je viens te voir tout de suite », il s’accorde une petite pause et quitte la pièce. Cette pause lui permet de respirer. Il est trop souvent dans le feu de l’action et a tendance à répondre impulsivement « oui » pour se montrer disponible. Ensuite, il regrette quand il prend conscience de l’ampleur de la tâche et de la pression supplémentaire qu’il va devoir supporter.

Dans les situations de stress, nous sommes souvent tentés de chercher une solution rapide et de répondre, par exemple : « Je vais m’en charger rapidement », ou « Il n’en est pas question, oubliez cette idée ! », ou encore un « Non ! » pur et simple, sans justification aucune. Toutes ces réactions ont des conséquences plutôt désagréables : dans le cas d’un « oui » rapide, la qualité du travail risque d’en pâtir, ainsi que la santé ; si c’est un « non » intransigeant, c’est la relation qui en souffrira. Dans de tels cas, il est essentiel de prendre le temps d’apporter une réponse consciente qui tienne compte de ses propres limites et de celles de l’interlocuteur.

Franck se pose ensuite d’autres questions :

• Qu’est-ce qui s’est concrètement passé pour que j’aie presque du mal à respirer ? Quels sont les faits ?

• Comment est-ce que je me sens maintenant et quels besoins dois-je faire entendre ?

• Que puis-je accepter malgré un « non » clair ?

Exemple

Franck est content de s’être ressaisi. En respirant bien, il a réussi à réfléchir plus calmement. Quelle est exactement la situation actuelle ? « Je travaille déjà depuis neuf mois sur ce projet, tous les jours de 10 à 12 heures par jour. Sarah m’avait promis de me fournir l’analyse pour la conclusion du projet la semaine prochaine. Elle est maintenant arrêtée pour quatre semaines et un collègue me demande si je peux me charger moi-même de cette analyse. » La seule énonciation de ces faits montre clairement à Franck tout ce qu’il a déjà accompli jusqu’ici. « Je vais avoir du mal à m’en sortir, j’ai l’impression d’avoir le couteau sous la gorge. » Quels besoins pourraient se cacher derrière tout cela ?

« D’une part, j’aimerais que l’on voie tout ce que je fais. D’autre part, j’ai besoin de personnes sur lesquelles je puisse compter et de soutien pour pouvoir fournir un bon travail. C’est pourquoi je vais dire à Jean de demander à quelqu’un du service voisin s’il peut se charger de cette analyse. Comme j’aime bien rendre service, je lui dirai aussi que je serai si besoin de nouveau disponible dans trois semaines pour d’autres projets. » Une nouvelle respiration lui montre qu’il est sur la bonne voie. L’idée de dire non lui semble

Exemple

« Qu’est-ce qui a pu inciter mon collègue à me demander de m’occuper de cette analyse ? Peut-être est-il lui-même paniqué. Il s’est sans doute dit que je saurais sûrement comme poursuivre et comment faire pour réussir. Peut-être a-t-il aussi besoin d’aide. »

Après cette pause, Franck se sent plus détendu et s’adresse franchement à son collègue :

Exemple

« Tu m’apprends l’accident de Sarah et tu me demandes si je peux m’occuper de cette analyse. Tu es sûrement sous pression et tu te demandes comment faire pour mener à bien le dossier. En ce qui me concerne, je dois terminer ce projet dans trois semaines et Sarah m’avait promis cette analyse pour la semaine prochaine. Le délai est vraiment très juste pour moi et j’ai besoin d’aide pour pouvoir mener correctement ce projet à terme.

C’est pourquoi je ne peux pas me charger de cette analyse et je préférerais que tu demandes à quelqu’un du service voisin. Dans trois semaines, je serai de nouveau disponible pour vous aider si besoin. »

Franck a montré qu’il comprenait son interlocuteur et qu’il était prêt à l’aider. Il prend ses responsabilités en expliquant pourquoi il préfère ne pas se charger de l’analyse, plutôt que de dire simplement : « Je ne peux pas… ». Les choses sont ainsi claires et Franck se montre bienveillant envers son collègue. En proposant son aide pour la suite, il montre qu’il s’intéresse aussi à son interlocuteur (voir également à ce sujet la check-list du dernier chapitre).

Respirez brièvement – même si vous pensez ne pas avoir le temps de le faire. Un « non » empathique et franc ne signifie pas seulement tenir compte de sa propre personne, mais aussi soigner sa relation avec l’autre.

Documents relatifs