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2. Choix et description des systèmes étudiés

2.4 Le dioxyde de titane TiO 2

L’étude des surfaces d’oxydes est un vaste domaine de recherche. Cet engouement s’explique par les nombreuses applications dans lesquelles les oxydes jouent un rôle. A cela s’ajoute le fait que sous conditions ambiantes, les métaux se couvrent d’une couche d’oxyde, l’étude de la surface métallique revient donc à étudier la surface de l’oxyde (Heinrich et al. 1994)

Le dioxyde de titane est certainement l’oxyde métallique le plus étudié compte tenu du large champ des applications possibles pour ce matériau. De ce fait de nombreux membres de la communauté scientifique voient en lui le système modèle lorsque l’on s’intéresse à l’étude des oxydes métalliques. L’étude de la surface du dioxyde de titane est le sujet d’un récent article de review de Dielbold (Dielbold 2003).

Le dioxyde de titane est utilisé en catalyse hétérogène comme photocatalyseur, dans les cellules solaires, il sert à la production d’hydrogène et d’énergie électrique. Les particules de TiO2 sont reconnues comme étant très stables chimiquement et fortement actives pour dégrader les composés organiques. Cette application intéressante de photocatalyse sous rayonnement UV et visible est très prometteuse et constitue un des domaines le plus vaste de l’étude du dioxyde de titane par la communauté scientifique (Herrmann 2005, Linsebigler et al. 1995, Berry et al. 1994)

Ces applications sont potentiellement importantes de nos jours alors que l’industrie chimique est de plus en plus confrontée aux contraintes environnementales du législateur amorçant le virage de la chimie « verte ». Ce catalyseur permet de traiter les eaux polluées en oxydant totalement des molécules organiques dangereuses et polluantes (Cheng et al. 2001, Li et al.

2007, Vulliet et al. 2003, Thevenet et al. 2005)

Ces propriétés de dégradation sont dues au caractère semi-conducteur de ce matériau, sa largeur de bande interdite (band gap) est de l’ordre de 3 eV. Les paires électrons-trous formées par une irradiation lumineuse adéquate (le proche UV) peuvent se séparer, migrer à la surface et ainsi réagir avec l’eau adsorbée et l’oxygène pour produire des espèces radicalaires. Celles-ci attaquent les molécules organiques présentes à la surface et peuvent mener à une décomposition totale en CO2 et H2O.

Le dioxyde de titane est également utilisé comme pigment blanc dans les peintures et les cosmétiques, il sert également de revêtement optique, dans les céramiques et dans certains composants électroniques, on lui trouve des applications dans les batteries à base de Lithium et des composants électrochimiques.

Il joue également un rôle dans la technologie des capteurs à oxygène et monoxyde de carbone, ceci grâce à la réactivité de O2 et CO sur ses défauts cristallographiques (Dutta et al. 1999). Il doit être étudié lorsque que l’on s’intéresse aux problèmes de biocompatibilité des implants et prothèses chirurgicales en titane (Zhu et al. 2006).

Le dioxyde de titane existe sous trois formes allotropiques : • brookite

• anatase • rutile

La formation d’une forme plutôt qu’une autre dépend de la température et de la pression lors de la formation de celui-ci. On peut retenir qu’à pression atmosphérique, c’est la forme anatase qui est majoritairement formée à base température. Pour des températures comprises entre 600 et 850°C, c’est la phase « haute température », c'est-à-dire la phase rutile qui se forme. La phase brookite, se formant sous certaines conditions de pressions, n’a été que très peu étudiée (Lee et al. 2006).

Le tableau I-2-5 compile les propriétés élémentaires de volume de ces trois formes cristallographiques (Dielbold 2003) :

Structure Système Groupe d'espace Constantes de maille

a b c c/a

Rutile tétragonal D144h – P42/mmm 0,4584 0,4584 0,2953 0,644 Anatase tétragonal D19

4h – I41/amd 0 ,3733 0,3733 0,937 2,51 Brookite Rhombohédrique D152h – Pbca 0,5436 0,9166 0,5135 0,944

Tableau I-2-5 : Paramètres de volume du cristal de TiO2

La forme étudiée dans les travaux ici présentés est la forme rutile car l’objectif initial est de travailler sur un oxyde modèle pour étudier la sorption et cela en s’affranchissant d’éventuelles photo-réactions à la surface, la forme rutile étant connue comme possédant des propriétés photocatalytiques moins importantes que la forme anatase. Cependant nous verrons par la suite que des processus photochimiques non négligeables sont tout de même observables avec cette phase.

Le TiO2 rutile est un système cristallin tétragonal appartenant au groupe d’espace D144h – P42 /mnm. Les ions Ti4+ sont de coordinence 6 dans le volume : il apparaît dans la maille un octaèdre TiO6 légèrement déformé compte tenu des longueurs des liaisons équatoriales et axiales (dTi-Oéq=192,6pm et dTi-Oax=201pm) (Angenault 2001). Il y a deux molécules de TiO2 par maille primaire.

Cette structure peut être décrite (figure I-2-4), soit comme un assemblage compact d’oxygènes avec des atomes de titane qui occupent la moitié des lacunes octaédriques, soit comme un assemblage d’octaèdres TiO6 liés par les sommets. Dans chaque cas, chaque atome d’oxygène appartient à trois octaèdres, occupant une position axiale dans un octaèdre et deux fois une position équatoriale pour les deux mailles adjacentes.

Figure I-2-4 : Maille élémentaire de rutile. Liaisons noires : liaisons équatoriales de192,6 pm. Liaisons rouges : liaisons axiales de 201pm.

L’étude de la réactivité de surface du dioxyde de titane va être réalisée à deux échelles : sur des faces monocristallines dans un premier temps puis sur des poudres polycristallines. Le but final étant de trouver une relation entre les deux et une éventuelle extrapolation des résultats sur monocristaux vers les poudres.

Les faces monocristallines étudiées sont les faces (001) et (110), elles seront plus longuement décrites et étudiées au chapitre II.

Le dioxyde de titane est certainement avec la silice (SiO2) et les oxydes de fer, l’oxyde le plus étudié par la communauté scientifique compte tenu du grand nombre d’applications possibles pour ce matériau.

La représentation de la surface du dioxyde de titane fait l’objet de nombreuses études expérimentales et théoriques. La face monocristalline (110) est de loin la plus étudiée car elle est considérée comme la face la plus stable (Onishi et al. 1994).

Comprendre l’état d’hydroxylation de la surface implique de décrire avec précision l’interaction des molécules d’eau avec la surface, point encore débattu au sein de la communauté scientifique. On distingue cependant deux processus distincts de sorption de l’eau en surface de TiO2 (Perron 2007) :

La sorption moléculaire au cours de laquelle la molécule d’eau s’adsorbe en conservant son intégrité et ne subit aucune transformation.

La sorption dissociative au cours de laquelle une molécule d’eau donne deux entités : OH et H. OH se fixe sur un titane pour donner un groupe de type TiOH terminal et le proton réagit avec un atome d’oxygène bicoordiné pour donner un groupement TiOH pontant.

Des études récentes semblent montrer que la sorption de l’eau sur la surface se fait conjointement de manière dissociative et moléculaire. Cela a été montré par désorption à température programmée (TPD) et spectroscopie haute-résolution par perte d’énergies d’électrons (HREELS) (Henderson 1996), par spectroscopie XPS (Bullock et al. 1996) et par microscopie à effet tunnel (STM) (Maksymovych et al. 2003).

La sorption est dissociative sur les défauts, ceux-ci sont « soignés » par la sorption d’eau qui permet aux sites d’atteindre leur coordinance adéquate. En parallèle, des molécules d’eau intègres se déposent sur la surface et un phénomène de sorption moléculaire devient prédominant lorsque les défauts de surface sont comblés. Des analyses par XPS, UPS et STM ont montré la forte réactivité des sites oxygène vacants sur lesquels se dissocient les molécules d’eau (Wang et al. 1995, Brookes et al. 2001, Schaub et al. 2001) de manière à combler les lacunes.