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Partie 1. LES EFFETS DES CANCERS SUR L’ACTIVITÉ

5. Maladies chroniques

5.1. Les maladies chroniques les plus prévalentes

5.1.5. Les diabètes de types I et II

Le diabète sucré33 est une affection métabolique qui se manifeste par un excès de sucre dans le sang (hyperglycémie). Il est dû à soit à déficience de la sécrétion de l’insuline par le pancréas, soit à une mauvaise utilisation de l’insuline par l’organisme, soit les deux. On distingue deux types de diabète. Le diabète de type 2 est le plus fréquent (9 cas sur 10). Il associe à des degrés variables une résis- tance à l'insuline et une carence de sécrétion d'insuline. Il survient chez des adultes d’âge mûr, sou- vent en surpoids ou obèses. Le traitement comporte des mesures hygiéno-diététiques (alimentation, activité physique) et un traitement médicamenteux (antidiabétiques oraux ou injectables, insuline). Le diabète de type 1, beaucoup moins fréquent (1 cas sur 10), est causé par la destruction des cel- lules bêta des ilots de Langerhans du pancréas. Les personnes atteintes ne sont plus capables de secréter de l’insuline. Le traitement de ce diabète est uniquement l’insuline. Il débute généralement dans l’enfance ou chez les adultes jeunes.

À long terme, le diabète est responsable de nombreuses complications, surtout vasculaires avec des cardiopathies ischémiques, des accidents vasculaires cérébraux, une atteinte de la rétine et une in- suffisance rénale chronique. La maladie est longtemps silencieuse, ne se manifestant que tardive- ment lors de l’apparition des premières complications.

La prévalence du diabète traité en France est estimée à 4,7 % en 2013, tous régimes d’assurance maladie confondus, soit plus de 3 millions de personnes traitées pour un diabète34. Le diabète de type 2 est plus fréquent chez les hommes que chez les femmes, et plus fréquent chez les personnes appartenant à des catégories sociales défavorisées. Le diabète est associé à 6,3 % de l’ensemble des décès survenus en France en 2009.

B/ L’effet du diabète sur l’emploi

Pour les besoins de l’étude, nous avons séparé les diabétiques en deux groupes selon le code CIM (Classification internationale des maladies de l’OMS) attribué aux personnes en ALD n°8. Les dia- bétiques codés avec le code E10-Diabètesucré insulino-dépendant (DID) ont été classés en diabète de type 1 et ceux codés E11-Diabète sucré non insulinodépendant (DNID) et E14-diabète sucré sans autre indication en diabète de type 2. Cette classification en DNID et DID ne recouvrant pas complètement les notions de type 1 et type 2, certains diabétiques de type 2, traités par insuline, peuvent avoir été classés par erreur en diabète de type 1.

Diabète de type 2

Le diabète de type 2 est la maladie chronique la plus fréquente parmi celles que nous avons étu- diées. 33 http://invs.santepubliquefrance.fr/Dossiers-thematiques/Maladies-chroniques-et-traumatismes/Diabete/Generalites-et-chiffres- cles/Le-diabete-Generalites 34 http://invs.santepubliquefrance.fr/Dossiers-thematiques/Maladies-chroniques-et-traumatismes/Diabete/Generalites-et-chiffres- cles/Le-diabete-en-quelques-chiffres-et-faits

Un an après la première inscription en ALD au titre du diabète de type 2, nous disposons dans l’échantillon de 3 576 hommes et 1 470 femmes. Cinq ans après, les effectifs sont de 1 946 pour les hommes et 770 pour les femmes. Plus précisément, l’attrition, de 46 % pour les hommes entre t+1 et t+5, s’explique à 61 % par une sortie de fichier (due à l’apparition d’une deuxième ALD, ou à la censure liée à la date de fin de fichier ou encore au changement d’activité), à 38 % par la retraite et à 1 % par le décès. Pour les femmes, l’attrition, de 48 %, s’explique à 71 %, par une sortie de fichier et à 29 % par la retraite. Il n’y a pas de décès pour les femmes.

Pour cette maladie chronique dont le début est asymptomatique et dont les traitements initiaux sont peu onéreux, la déclaration d’ALD peut survenir de nombreuses années après le début de la maladie et ne signe donc pas l’entrée dans la maladie. Il y a donc une importante sous-estimation de la pré- valence, de l’incidence du diabète, mais également de l’effet causal puisqu’on le lie à un événement – l’entrée en ALD – ne correspondant pas au début de la maladie.

À court terme, comme à plus long terme après l’entrée en ALD, l’effet du diabète sur l’emploi glo- bal est modéré mais s’amplifie avec le temps, passant de -1 à -3,5 pp chez les hommes. L’effet est plus élevé chez les femmes avec une diminution notable de l’emploi stable de -3,1 pp en t+1 à -6 pp en t+4 et t+5.

Cette baisse de l’emploi affecte principalement l’emploi stable. Par rapport à des personnes non malades, la proportion de personnes en emploi stable est inférieure de -3,7 pp après la première an- née chez les hommes et de -4,2 pp chez les femmes. Cette baisse atteint un maximum de -5,4 pp chez les hommes et -7,8 pp chez les femmes quatre années après la déclaration d’ALD.

À l’inverse, l’emploi instable subit une légère croissance, de l’ordre de 2 à 3 pp chez les hommes essentiellement. Chez les femmes, la croissance est plus faible (entre 1 et 1,8 pp) mais n’est signifi- cative que la première année et les deux dernières.

À un an, les situations d’arrêts maladie augmentent de +4,5 pp chez les hommes et +5,4 pp chez les femmes, et celles de chômage respectivement de +1,3 pp et +2 pp. Par ailleurs, l’inactivité aug- mente également mais chez les femmes seulement (+1,1 pp) ; elle diminue légèrement chez les hommes.

Par rapport aux non malades, la proportion d’hommes en arrêt maladie est stable, aux alentours de +4 pp, durant les cinq années observées. Chez les femmes, on note une baisse à partir de la qua- trième année à +2,7 pp en t+4 et +1,6 pp en t+5. La sortie vers le chômage se stabilise autour de +2 pp chez les hommes à partir de la deuxième année. En revanche, elle augmente chez les femmes jusqu’à 4,6 pp la troisième et quatrième année. Enfin, la proportion de personnes sortant vers l’inactivité augmente au cours du temps pour atteindre un maximum de +1,6 pp la cinquième année chez les hommes et de +2,6 pp chez les femmes.

Diabète de type 1

L’échantillon de diabétiques de type 1 est de 696 hommes la première année et diminue à 525 à t+5. Chez les femmes, on dénombre 341 femmes en t+1 et 264 à t+5. Plus précisément, l’attrition, de 26 % entre t+1 et t+5 pour les hommes, s’explique à 74 % par une sortie de fichier (due à l’apparition d’une deuxième ALD, ou à la censure liée à la date de fin de fichier ou encore au chan- gement d’activité), à 23 % par la retraite et à 3 % par le décès. Pour les femmes, l’attrition, de 23 %, s’explique à 85 % par une sortie de fichier, à 14 % par la retraite et à 1 % par le décès.

À court terme, l’inscription en ALD pour diabète de type 1 se traduit par une diminution de l’emploi stable de 3,3 pp pour les hommes et de 4,8 pp chez les femmes. Cette diminution se fait essentiellement au profit des situations d’arrêts maladie avec une augmentation de 7,8 pp la pre- mière année chez les hommes, se réduisant progressivement jusqu’à 3,2 pp à t+5. Chez les femmes, l’effet est encore plus fort, de 9,7 pp, et diminue faiblement autour de +8 pp en t+5.

Les effets sur le chômage se font sentir progressivement après l’entrée en ALD chez les hommes (de 0,7 pp en t+1 à 3,6 pp en t+5) comme chez les femmes (de 0,4 pp en t+1 à 2,5 pp en t+5). Les

Conséquences de la survenue du cancer sur les parcours professionnels : une analyse sur données médico-administratives

évolutions de l’emploi instable sont faibles chez les hommes (entre +1,1 à +2,2 selon les années). Chez les femmes, ils sont au maximum la première année avec une progression de +3,7 pp mais restent modérés sur l’ensemble de la période.

Enfin, les sorties de l’emploi vers l’inactivité sont similaires selon le genre. Chez les hommes, l’inactivité augmente de 1,5 pp la première année après l’entrée en ALD et ce pourcentage reste faible, atteignant un maximum de 2,6 pp en t+3. Chez les femmes, les résultats sont similaires mais un petit peu plus faibles que pour les hommes (0,6 pp en t+1 et 2,3 pp en t+3).

Au total, le diabète de type 1 a un effet négatif sur l’emploi global, un peu plus fort pour les hommes que pour les femmes. Cet effet est croissant avec le temps.

C/ Discussion des résultats

Nos analyses mettent en évidence un effet certain du diabète sur la participation au marché du travail. Cet effet est présent pour les deux sexes et pour les deux types de diabète. Sur l’emploi global, le dia- bète de type 1 a un effet plus important pour les hommes, et le diabète de type 2 a un effet plus impor- tant pour les femmes. Les transitions se font de l’emploi global vers le chômage et l’inactivité.

Les risques du diabète par rapport à l’emploi sont de deux types. D’une part, la menace d’hypoglycémie qui concerne les diabétiques sous traitements hypoglycémiants (insuline et sulfa- mides antidiabétiques) peut en effet représenter un risque pour la sécurité dans certains types d’emplois. D’autre part et à long terme, les complications vasculaires, oculaires, néphrologiques et neurologiques du diabète exposent le diabétique à un plus grand risque d’incapacités obérant ses possibilités de conserver son emploi (American Diabetes et al. 2012).

Les effets négatifs du diabète sur l’emploi sont bien connus dans la littérature et le diabète affecte l’ensemble des indicateurs liés à l’emploi (Minor, 2011): participation au marché du travail (Chat- terji et al., 2016 ; Harris, 2009 ; Latif, 2009 ; Seuring et al., 2015), nombre d’heures travaillées, arrêts de travail pour maladie (Brod et al., 2011 ; Ervasti et al., 2015), incapacité (Cleal et al. 2015), retraite prématurée (Cleal et al., 2015 ; Rumball-Smith et al., 2014), revenus (Steen et al. 2010). Des effets similaires ont été montrés pour la France à partir de la cohorte Gazel : une diminution rapide du taux de personnes en emploi chez les diabétiques par rapport aux non diabétiques, une augmentation du risque d’incapacité et de la probabilité de prendre sa retraite témoignant d’un im- pact négatif important du diabète sur la participation au marché du diabète (Herquelot et al., 2011). Le nombre de jours d’arrêts de travail est plus élevé chez les diabétiques que chez les non diabé- tiques, estimés à 95 jours par an chez les premiers versus 35 jours dans une étude suédoise (Ervasti et al., 2015). Des épisodes fréquents d’hypoglycémie semblent être une des raisons majeures de ces arrêts. Ils entraînent une perte de productivité en moyenne de 8,3 à 15,9 heures de travail par mois selon la date de survenue (pendant ou en dehors des heures de travail ou durant la nuit) [Brod et al. 2011]. En France, l’impact est plus important que dans les autres pays comparés (États-Unis, Royaume-Uni et Allemagne) avec 27,3 % de diabétiques qui cessent le travail ou annulent une réu- nion ou un rendez-vous après un épisode d’hypoglycémie, contre 8,8 % en Allemagne et 10,8 % aux États-Unis.

La sortie prématurée du marché du travail est également plus fréquente chez les diabétiques. A par- tir des enquêtes SHARE en Europe, HRS aux Etats-Unis et ELSA au Royaume-Uni, Rumball- Smith et al. (2014) montre que le diabète est associé à une augmentation de 30 % de la probabilité de sortir prématurément de l’emploi. Les retraites prématurées pour incapacité liée au diabète affec- tent toutes les catégories socioprofessionnelles, mais sont nettement plus fréquentes chez les ou- vriers (Cleal et al., 2015).

Les différences que nous observons selon le genre sont aussi retrouvées dans la littérature avec des effets plus importants chez les hommes sur la probabilité de sortir du marché du travail (Chatterji et al. 2016), une participation au marché du travail moindre chez les hommes par rapport aux femmes (Harris, 2009) ou encore une diminution de la probabilité d’être en emploi plus forte chez les

hommes que chez les femmes (Seuring et al., 2015). Toutefois, une autre étude au moins contredit ces résultats en montrant un impact négatif et significatif du diabète sur la probabilité d’être en em- ploi chez les femmes uniquement (Latif, 2009). Aucune de ces études toutefois ne permet de diffé- rencier diabète de type I et diabète de type II comme nous l’avons fait.

5.2. Comparaison à titre exploratoire entre les différents types de cancer et les diffé-