CONSEIL DE.LA REPUBLIQUE — SEANCE DU 5 AOUT 1947 1517 d'engagement entre le montant de ce cré
M. le président. La séance est reprise
II. — DETTE EXTÉRIEUR^
« Chap. 060. — Redevance annuelle en-..
vers l'Espagne pour droit de dépaissance sur les deux versants. de la frontière des Pyrénées, 45.00Q francs. » — (Adopté.)
« Chap. 031. — Service de l'emprunt contracté aux Etats-Unis en 1924 , 96.500.000 francs. » — (Adopté.)
« Chap . 062. — Service des emprunts contractés auprès de gouvernements étran
gers de l'Export-Import Bank et de la ban
que internationale de la reconstruction de
puis 19î4, 4.769-200.000 francs. » — (Adopté.) ■
« Chap. 063. — Service des emprunts contractés ' aux • Pays-Bas et en Suisse,
285.007.000 francs. »" — (Adopté.)
2° partie. — Dette viagère.
«Chap. 070. — Remboursement à la caisse des dépôts et consignations des pen
sions et secours alloués aux victimes de l'expédition de Chine en 1900,- 15.000 francs. » — (Adopté.)
. « Chap. 071. — Pensions militaires, 10 milliards 96 millions de francs. » —
(Adopté.) , - \
La parole est à M. Charles-Cros.
M. Charles-Cros. Mesdames, messieurs, je n'ai pas l'intention d'anticiper sur jes remarques que nos collègues d'outre-mer ne manqueront pas de faire lorsque vien
dra la discussion du budget des anciens combattants et victimes de la guerre? Des chiffres ont été cités dans la presse, dans des propositions de loi, à la tribune de l'Assemblée nationale, qui témoignent de l'anomalie résultant de la discrimination raciale qui subsiste encore en matière de pensions dans les territoires d'outre-mer suivant qu'il s'agit d'un pensionné africain ou d'un pensionné européen, et qui est la conséquence de la discrimination raciale qu'on retrouve à l'origine du recrutement militaire et dans les corps de troupe.
On a dit, par exemple, que, pour une in
validité déterminée, un Africain touche 7.000 francs alors que son compagnon d'armes européen, pour la même invali
dité, perçoit 48.000 flancs.
J'ai la conviction que des injustices de ce genre font le plus grand tort au prin
cipe même de l'Union française et qu'ils doivent cesser. (Applaudissements à gauche et au centre.)
Mais, à propos du chapitre 71 — pensions militaires — c'est un autre sujet que je veux aujourd'hui brièvement aborder et qui a sa place dans la discussion du budget des finances. Mes observations, d'ailleurs, sont valables pour les chapitres 72 — pen
sions civiles —, 81 — pensions d'invali
dité —, et 80 — rajustement des pensions civiles et militaires.
En premier lieu, se pose la question de ' l'application dans les territoires d'outre-mer- des rajustements de pensions c:\iles, militaires et d'invalidité. A la suite de la promulgation de la loi du 9 août 1946, notamment, il a été décidé que des ins
tructions particulières fixeraient les condi
tions d'application de ladite loi dans les territoires d'outre-mer. Ainsi, le payement des pensions aux nouveaux taux dans ces
territoires est subordonné à la réception
par les trésoriers-payeurs généraux des territoires d'outre-mer des instructions auxquelles je viens de faire allusion. Tant que ces instructions ne seront pas parvenues dans les territoires d'outre-mer, les nouveaux taux ne pourron-t être appliqués.
- Or ces instructions, monsieur. le minis
tre, n'ont pas encore été envoyées par vos services et ne sont même pas encore ré
digées, si je suis bien informé. Vous com
prendrez dès lors les impatiences- des inté
ressés, et vous excuserez, je crois, le ton véritablement exaspéré des réclamations qu'ils nous adressent.
Le président d'une importante associa
tion d'anciens combattants de l'Afrique occidentale française écrit par exemple:
« Un très gros mécontentement existe parmi les anciens combattants. On ne se moque pas mieux des gens et ce n'est pas ainsi qu'on fera l'Union française. Dites
bien au ministre que je ne pourrai pas
arrêter le flot' des mécontentements (' des manifestations qui peuvent résulter .e cet état de choses. Au moirfnt où notre attention est particulièrement attirée vers l'In
dochine, Madagascar et l'Afrique du nord,
nos vrais et fidèles patriotes ne doiventpas être .l'objet de mesures vexatoires qui
indisposent justement les meilleurs d'entrenous. » •
Je précise que le signataire de ces ligne?
n'est pas du tout un agitateur, mais un homme pondéré, le représentant d'une grande société commerciale, bien connu pour sa modération. Je vous demande donc, monsieur le ministre, de faire hâter la rédaction et l'envoi "outre-mer des ins
tructions attendues par des «dizaines de milliers de pensionnés civils et militaires.
La deuxième question sur laquelle je voudrais attirer l'attention du Conseil et de M. le ministre, c'est précisément les conditions d'application des textes relatifs au rajustement des pensions. Le point de friction réside actuellement en-ceci : appliquera-t-on les taux de pensions dans les territoires d'outre-mer en francs mé
tropolitains convertis en francs locaux, ou, comme le demandent les intéressés, et comme semblent l'imposer la logique et la réalité des faits, franc pour franc?
Lors de la rupture de la parité moné
taire entre la métropole et certains terri
toires d'outre-mer, le 26 décembre 1945, il avait été décidé, par un souci d'équité, de payer franc pour franc et au taux de l'époque les pensions et les arrérages dans les zones du franc C. F. A. et du franc C. F. P.; mais, depuis lors, aucune déci
sion n'a été prise (juant aux majorations de pensions décidées ultérieurement au 26 décembre 1915 par des décrets ou lois relatifs, je le répète, aussi bien aux pen
sions civiles et militaires qu'aux pensions d'invalidité.
Il semble même que le Gouvernement ait cru voir là une difficulté qui, à mon avis, n'existe pas, mais qui explique très certainement, pour Une part, le, retard apporté à la rédaction et à l'envoi aux K-ésoriers-payetirs généraux des instruc
tions dont je parlais au début de cet exposé.
Les pensionnés civils et militaires . en Afriiju) occidentale française, et particu
lièrement au Sénégal, demandent le
1534 CONSEIL DE LA REPUBLIQUE — SEANCE DU 5 AOUT 1947 pavement de leur pension au taux métro
politain, rajustement compris, et en nom
bre de francs C. F. A. égal au nombre do francs métropolitains.
Je crois savoir que cette revendication est générale dans les territoires d'outre
mer.^ Les arguments présentés me parais
sent dignes d'attention et je me fais un devoir de vous les rapporter:
D'abord', disent-ils, c'est en francs C. F.
A. et non en francs métropolitains que fonctionnairs et militaires en activité per
çoivent leur solde et effectuent leurs ver sements mensuels à la caisse de retraites.
Il semble donc formal que leur pension
de retraite leur soit payée dans la monnaie qui a servi à constituer cette retraite.
Ensuite, retraités et pensionnés vivant en Afrique noire règlent leurs dépenses quotidiennes .„en monnaie locale, c'est-à-dire non en francs métropolitains conver
tis en francs C. F. A., mais, en véritables francs C. F. A.
Comment équ/librer leur budget, si par le jeu de la conversion, leurs ressources se trouvent amputées des 7/17® ?
A ce sujet, je voudrais contester, sinon détruire, par iin exemple précis, une lé
gende qui veut que les pensionnés d'Afri
que noire bénéficient d'une situation pri
vilégiée parce que disposant d'une mon naie plus appréciée que la nôtre.
La chose est peut-être exacte lorsqu'il s'agit d'un transfert de capitaux sur la métropole. Tout le monde sait que 100.000 francs Ci F. A. correspondent à 170.000 francs métropolitains. Mais les pensionnés africains ou européens rési dant en Afrique noire utilisent quotidien
nement une monnaie qui, sur place, n'est pas particulièrement appréciée.
Et comment -le serait-elle? Comme en Europe, le cours des produits de première nécessité suit, quand il ne 'la précède pas, l'échelle des salaires.
Voici l'exemple précis que je veux ci ter: le prix du journal que nous achetons chaque matin et dont nous ne saurions nous passer, constitue une sorte d'étalon, parce que cet achat quotidien correspond à l'un de nos besoins les plus élémentaires et parce que le prix en est marqué. 11 n'y a pas de variation possible; il n'y a pas encore de marché noir sur cet article.
J'ai, dans mon dossier, des exemplaires de journaux paraissant à Dakar, d'un mo
dèle courant, comme vous île voyez. Le prix n'en est pas moins de 7 francs C.F.A., c'est-à-dire exactement de 11 fr. 90 métro
politains. '
Voilà qui peut donner une idée du coût de la vie outre-mer et qui démontre qu'il n'est pas exagéré d'appliquer, là-bas, en matière de pension puisqu'on l'applique déjà en matière de solde d'activité, le. taux métropolitain, franc pour franc.
Il y â une dernière considératioij: les Français vivant à l'étranger et titulaires d'une pension civile, militaire ou d'inva
lidité perçoivent le montant de leur pen
sion sur la base du taux métropolitain, mais en francs métropolitains convertis en monnaie du pays étranger qu'ils habitent.
Je me suis laissé dire qu'il n'y aurait donc rien que de très normal à ce que les pensionnés de l'Afrique noire soient
places sur un pied d'égalité avec ces Fran
çais vivant à l'étranger.
Cet argument, monsieur le ministre, qui . n'est certainement pas celui que vous m'opposerez, s'il était connu des intéres
sés, serait accueilli, je vous l'assure, avec la plus vive déception, et sa cruauté, me permettrai-je de dire, serait ressentie avec douleur, car l'Afrique noire, en particu lier, ne se considère à aucun titre comme un pays étranger. (Applaudissements.)
Le vice-président de l'Association des
amputés' et grands blessés de guerre de
l'Afrique occidentale française m'écrivait, il y a à perne un mois, que la situation actuelle.créait, parmi les invalides de guerre et en général parmi tous les anciens combattants, une atmosphère de mé
fiance vis-à-vis de la France, pour laquelle ils se sont sacrifiés.
« Nous ne pouvons pourtant pas, écrit-il, traiter la France de marâtre et d'ingrate, nous qui avons donné le meilleur de nous-mêmes pour elle. Comprenez notre amer
tume ». Et je cite toujours;- « Une grande puissance comme la France ne peut lésiner sur quelques maigres sous avec ses am
putés et ses grands blessés >\
Voilà qui traduit un état d'esprit' contre lequel, je vous en conjure; monsieur le ministre, il est temps de réagir en don
nant aux trésoriers-payeurs généraux les instructions qu'ils - attendent et que les intéressés aussi attendent depuis de longs mois; en appliquant outre-mer et franc
pour franc les taux de pension métropo
litains; en faisant bénéficier intégralement
les pensionnés d'outre-mer des avantages
concédés aux pensionnés métropolitains
et, en particulier, de l'effet de fa rétro
activité des rajustements de pensions.
C'est une question de justice et de sage politique dans l'Union française.
Or, ai-je besoin de le souligner pour
conclure, il n'est ipas trop tard pour faireen Afrique noire une sage politique, qui
ne peut être qu'une politique de justice et d'équité. ( Applaudissements .)M. le président. La parole est' à M. le ministre des finances.
M. le ministre des finances. La question qui a été soulevée par M. Charles-Cros est double. Il s'agit d'abord du taux des pensions et des majorations intervenues depuis juillet 1946.
Je reconnais qu'il y a là un retard re
grettable. Ce retard s'explique dans une certaine mesure par le fait qu'il a fallu trancher certaines questions préalables, ce qui nécessita leur examen par plusieurs ministères: le ministère de la France d'outre-mer, le ministère des finances, le ministère des anciens combattants et, dans la mesure où il s'agit de militaires, le ministère de la guerre.
Vous voyez qu'il y a là déjà une pre
mière difficulté, difficulté que nous ren controns d'ailleurs également lorsqu'il s'agit d'affaires métropolitaines.
En outre, il fallait se demander dans quelle mesure les décisions prises en faveur du personnel en exercice dans la métropole pourraient s'appliquer au per
sonnel ayant servi dans les territoires d'outre-mer et y ayant sa résidence. En effet, ce que le Parlement avait voté au mois d'août 1946 était une indemnité de vie chère. Il fallait donc examiner si les conditions de vie étaient, dans tous les territoires d'outre-mer, comparables à ce qu'elles étaient dans la métropole.
Il est évident que, du fait même de l'existence d'une autre monnaie, d'un franc .colonial, les prix ne sont pas les mêmes en valeur nominale que dans la métropole. Ceci est reconnu par tout le monde. Il y avait donc là une étude à faire.
Pour ces raisons, il y a eu des retards.
Je déclare encore une fois que je le re
grette, mais je puis dire à M. Charles-Cros que les instructions qu'il attend sont im
minentes et je pense qu'elles donneront satisfaction à ceux qui les attendent.
La deuxième question est la suivante:
quelles seront les modalités de payement au point de vue de la monnaie?
Vous savez que, dans ces territoires, il y a deux catégories de fonctionnaires i
ceux qui dépendent du budget local et ceux qui sont fonctionnaires métropoli
tains en service sur ces territoires.
Un principe veut que le fonctionnaire ait partout, sur le territoire de l'Union française, le même traitement lorsqu'il appartient à la même catégorie et à un même grade. Loin de vouloir considérer ces fonctionnaires comme étant sur terri
toire étranger, j'estime, au contraire, parce qu'ils sont sur un territoire placé sous la souveraineté française, qu'ils ont droit aux mêmes émoluments que leurs cama
rades restés dans la métropole.
U existe enfin des indemnités spéciales appelées autrefois indemnités coloniales, qui se justifient par des conditions de vie parfois plus dures et des séparations qui méritent une compensation.
Ceci dit, je crois qu'il faut maintenir ce
principe de l'identité de rémunération, donc aussi de l'identité de pension pour les fonctionnaires, quelle que soit leur rési dence, sur les territoires placés sous la souveraineté nationale. .Vous voyez tout de suite quelles diffi
cultés nous avons à surmonter ! Ces fonc
tionnaires vivent sur un territoire où a cours un. franc d'une valeur supérieure au franc métropolitain. Il nous paraît dif
ficile d'admettre que le nombre de francs locaux, si je puis employer ce terme, tou chés par ces retraités puisse être le même que le nombre de francs métropolitains
touchés ipar leurs camarades lorsqu'ils ha
bitent en France. S'il en était ainsi, je crois qu'on irait au delà de ce qui est justifié, au delà de ce que justifie la comparaison des situations du point de vue cherté de vie et conditions d'existence.
Je ne veux pas me prononcer aujour-d'hui sur le fond, mais simplement mar
quer les difficultés à surmonter.
Mais ici encore, je le répété, les décisions vont être prises ; nous sommes maintenant?
d'accord avec les divers ministères inté
ressés, je puis en donner l'assurance à
l'auteur de l'amendement.
Je m'excuse auprès de lui, comme auprès du Conseil de la République, de ces diffi
cultés et de ces lenteurs. Je comprends que ceux qui en sont les victimes s'impa tientent, mais la. multiplicité des mesures qui interviennent, les rajustements conti nuels, les contradictions et parfois l'obscu rité des textes ont une part dans les res
ponsabilités. Je iplaide donc, dans une cer
taine mesure, les circonstances atténu
antes, mais l'essentiel est que, maintenant, nous aboutissions rapidement. ( Applaudis sements .)
. M. le président. La parole est à M. Le
moine.
M. Lemoine. Mesdames, messieurs, dans-son préambule, notre Constitution déclare:
« la France forme avec les peuples d'ou
tre-mer une Union fondée sur l'égalité des droits et des devoirs, sans distinction de race ni de religion. »
S'agissant de pensions de retraites aux militaires d'origine hors-métropole, vous me permettrez de constater que l'ordre des facteurs est interverti : l'égalité des devoirs a précédé ici toute revendication sur l'éga
lité des droits.
Aucune objection de casuistique, au
cun mauvais prétexte ne peut donc un seul instant être opposé à cette revendication*
C'est pourquoi nous voyons se multi
plier, deipuis décembre dernier, les propo
sitions de résolution et les propositions de loi tendant à aligner, sur un pied d'égalité,
CONSEIL DE LA REPUBLIQUE — SEANCE DU 5 AOUT 1947 pensions et'retraites d'anciens combattants
et d'anciens militaires, pour tous les. res sortissants de 1' Union française.
Un même jour récent, nous recevions à la -distribution, sous les n°" 2028, 2029 et 2030, trois documents annexés au procès-verbal de la seule séance du 16 juillet 1947 de l'Assemblée nationale tendant tous trois à accorder aux anciens militaires autoch
tones des territoires d'outre-mer le béné
fice de la législation applicable aux an
ciens militaires métropolitains en vertu les lois du 31 mars 1919 et du 16 avril 1930 et en matière de pensions et de retraites pour anciens combattants et victimes de la guerre.
Je me permets, en passant, de remar
quer que, s'agissant de la stricte applica
tion de la Constitution, il eût été bic a plus normal que le Gouvernement ne laissât pas à chaque parlementaire le soin de deman
der isolément le respect de cette Constitu
tion; il eût été bien plus normal que le
Gouvernement prit lui-même les initiativesnécessaires.
Mais si j'insiste- pour que, sans tarder,
toutes les mesures d'égalité soient prises, i'ai hélas! aujourd'hui une revendication bien plus élémentaire à présenter.Ici les décisions sont prises,_ et depuis longtemps. Un décret du 16 juillet 19-16 porte à 200" p. 100 à compter du 15 avril
1945 ~ le. supplément temporaireaugmen-- tant le principal de la pension des anciens
militaires et marins musulmans de l'Afrique du Nord.
" A la faveur de cette majoration, la pen
sion des anciens militaires et marins mu
sulmans de l'Afrique du Nord allait varier selon les cas entre 20 et 33 p. 100 de la
pension des anciens militaires non musul
mans. Bien faible acheminement vers l'égalité des droits ! Encore faudrait-il ap
pliquer la décision prise.
Plus de treize mois ont passé et le décret n'est toujours pas appliqué."
Sur une question posée par mon cama
rade, Pierre Fayet, nous pouvons lire au Journal officiel du 24 mai 1947 la réponse de M. le ministre des finances. Le décret
■n'est pas appliqué, d'abord parce que M. le
ministre des finances et ses services se sont rendu compte — je cite textuellement
— « qu'il était parfois difficile de déter
miner le pays d'origine de ces militaires ».
J'avoue nç, pas comprendre' comment il
est possible d'éprouver des difficultés à déterminer le pays d'origine de vieux militaires qui, outre leurs pièces d'identité civiles, possèdent des livrets militaires et des pièces matricules fort précises à ce su
jet. Les difficultés doivent être bien rares et bien exceptionnelles et, dans presque trus les cas sinon dans tous, le nécessaire aurait dû pouvoir être fait depuis long
temps.
N'oublions pas qu'il n'est pas question, ici, de liquider des pensions mais simple
ment d'appliquer des majorations à des titres de pension existant déjà et que;
lors de leur établissement, ces titres de pension ont dû être revêtus de tous les renseignements sur l'identité, donc sur le pays d'origine de leurs bénéficiaires.
M. le ministre donne à la carence de ses services une seconde raison, je dirai- même un second mauvais prétexte aussi impré
vu qu'inadmissible, « Nous avons été, d'autre part, dit-il, saisis de propositions et de demandes tendant à étendre le béné
fice de cette allocation à tous les territoires d'outre-mer ». Et l'on attend que toutes ces demandes soient présentées pour ap
pliquer un décret déjà existant 1
Je préfère m'abstenir de qualifier cet argument; tout commentaire ne pourrait être que trop sévère. N'oublions pas, en
effet, pour ne citer qu'un exemple pris en
haut de l'échelle, que lorsque la majoration de 200 p. 100 sera enfin appliquée, un.
adjudant musulman à 25 annuités recevra, par an, 14.064 francs, soit 38 francs 50 cen
times par jour. Jusque là, c'est 32 francs par jour qu'il percevra en tout.
Oli, je sais bien, il y aura le rappel.
Comme si on se nourrissait à retardement ! Car vous estimerez, comme moi, que ces 32 francs quotidiens ne permettent même pas d'assurer la plus frugale nourriture.
Le rappel? Le décret du 16 juillet 1946 le faisait partir du 15 avril 1945, et M. le ministre de conclure: « Bien entendu, les deux mesures concomitantes prendront effet du 1 er juillet 1946 ». Comprenne qui pourra ce « bien entendu », mais s'il est maintenu,- les intéressés comprendront qu'ils sont dépouillés de 14 mois dudit rappel. Je me permets de demander très respectueusement, mais très énergique
ment au Gouvernement, en attendant que soient prises les dispositions nécessaires pour assurer le respect de la Constitution, que soient immédiatement appliquées les dispositions du décret du 16 juillet 1946.
Le Gouvernement n'a pas le droit de ter
giverser plus longtemps.
M. le président. La parole est à M. le ministre des finances.
M. le ministre des finances. Je n'ai pas souvenir de cette réponse faite i. une question écrite. J'en vérifierai les élé
ments. Il est bien entendu que le règle
ment en vigueur, que ce soit une ordon
nance ou un décret, sera strictement ap
pliqué notamment pour ce qui concerne la rétroactivité.
Quant aux difficultés qui ont été signa
lées dans cette réponse, elles sont ren
contrées par le ministère de la guerre qui établit les dossiers.
Mes services ont répondu en invoquant les difficultés rencontrées par les adminis
trations intéressées au point de vue de l'état. civil, et du lieu de naissance de beaucoup de ces militaires, qui n'étaient pas nécessairement originaires de l'Afrique au Nord. Ce n'est pas moi-même qui ai inventé cette difficulté. Croyez, monsieur le conseiller, que ces cas sont assez fré
quents dans des régions non organisées ou qui ne possèdent pas les habitudes que nous avons dans la métropole.
Mais, là encore, je reprends ce qui A été dit par M. le rapporteur tout à l'heure."
Dans tout ce qui est liquidation de pen
sions, nous avons 4 souffrir de délais ex--cessifs, je suis le premier à le reconnaître.
Je vous déclare très nettement que j'ai cherché à lutter contre cet état de choses, mais je ne suis pas arrivé, jusqu'à main
tenant, à surmonter toutes les difficultés.
Nous devons aboutir — et là, j'accepte ce qui a été dit dans le rapport — à une réforme et à une simplification de la procédure de liquidation des pensions, et aussi recourir à des moyens modernes pour l'établissement des dossiers. Je pense qu'enfin tous nos pensionnés, d'où qu'ils soient, pourront plus rapidement entrer en jouissance des sommes qui leur sont dues.
M. le président. Il n'y a pas d'autre observation ?...
Je mets aux voix le chapitre 071 avec le chiffre de 10 milliards 96 millions de francs.
-(Le chapitre 071, avec ce chiffre, est adopté.)
M. le président. « Chap. — 072. — Pen
sions civiles, 11.429.000.000 de francs. » —>
(Adopté.)
« Chap. 073. — Supplément à la dota
tion de l'ordre national de la Légion d'hon
neur pour les traitements viagers des membres de l'ordre et des médaillés mili
taires, 294.526.000 francs. » — (Adopté.)
« Chap. 074. — Contribution de l'État au payement de pensions servies par di
verses collectivités, 42 millions de francs. >i
— (Adopté.)
« Chap. 075. — Allocations du codede la famille,' 1.029.000.000 de francs. » —>
(Adopté.)
« Chap. 076. — Remboursement de re
tenues et subventions de l'État à la caisse nationale des retraites pour la vieillesse, 14 millions de- francs. » — (Adopté.)
« Chap. 077. — Allocations aux veuves sans pension, 58.400.000 francs. j>
(Adopte.) , .
-« Chap. 078. — Allocations complémen
taires aux retraités de la caisse nationale des retraites pour la vieillesse, 100.000 francs. » — (Adopté.)
« Chap. 079. — Versements au fonds spécial prévu par l'article 3 de la loi du 21 mars 1928 sur le régime des retraites des ouvriers des établissements industriels de l'État. — Compléments de pensions aux ouvriers et allocations aux ouvriers et veuves d'ouvriers de ces établisse
ments. » — (Mémoire.) " \
« Chap. 080. — Indemnité spéciale tem
poraire aux retraités de l'État affiliés à la caisse nationale des retraites pour la vieillesse, 27 millions de francs. » —■
(Adopté.) . ^
-« Chap. 081. — Pensions d'invalidité, 20.257.909.000 francs. »
Sur ce chapitre, je suis saisi d'un amen
dement présenté par Mme Claeys, tendant à réduire ce crédit de 1.000 francs et à ramener, en conséquence, la dotation de ce chapitre à 20.. 257. 998. 000 francs. .
La parole est à Mme Claeys,
Mme Claeys. Si j'ai déposé cet amende»
ment, c'est pour rappeler les promesses faites par M. lë ministre au sujet de l'aug
mentation des pensions d'invalidité.
En août 1946, M. le ministre déclarait que, pour 1947, il pensait qu'une « revalo risation plus complète deviendrait pos
sible ».
Vous avez bien relevé ces pensions au coefficient 4,5, mais le coût de la vie atteint 9, c'est-à-dire le double.
Il est regrettable et navrant de constater;
que toutes les victimes de la guerre, les mutilés dans leurs voitures, les aveugles furent obligés de manifester dans la rue pour revendiquer leurs droits.
Le coefficient 5,8 que demandent toutes les associations d'anciens combattants est légitime et encore bien minime.
Les promesses doivent être tenues, et,
surtout, quand il s'agit de ceux qui n'ont
pas marchandé leur vie, qui ont tant souffert pour le pays, c'est un devoir' qu'il faut accomplir.
De toutes parts, la question se poso d'augmenter les salaires ou les traite
ments devant la hausse du coût de la yie.
Pourquoi les invalides de la guerre, ceux qui ont le plus souffert, seraient-ils ou
bliés ?
Ce n'est pas une question d'argent, puis
que les profiteurs de la guerre n'ont pas remboursé1 aux victimes l'argent gagné honteusement par la collaboration avec l'ennemi.
Cet amendement n'est pas une réduc tion,. vous le savez bien, mais j'insiste afin que l'on fasse droit aux victimes de la guerre, à leurs justes revendications.