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Description des techniques employées : Spectroscopie d’absorption des rayons X

Principe

I.

La spectroscopie d’absorption des rayons X (XAS pour « X-ray Absorption Spectroscopy ») englobe plusieurs techniques reposant toutes sur l’absorption d’un faisceau X par un centre absorbeur. Dans cette présentation, nous nous limiterons à la description des spectroscopies « X-ray Absorption Near Edge Structure » (XANES) et « Extended X-ray Absorption Fine Structure » (EXAFS). D’autres techniques construites à partir du XAS sont également envisageables (par exemple, le « X-ray Magnetic Circular Dichroism » (XMCD).

Le XAS est une spectroscopie d’absorption, à l’instar de la spectroscopie infra-rouge ou de la spectroscopie UV-visible. Cette méthode permet donc de mesurer l’absorption d’un système A = -log(I/I0), I0

désignant l’intensité lumineuse incidente et I l’intensité lumineuse sortante de l’échantillon (dans la direction de propagation du faisceau). Les transitions observées en XAS sont des transitions électroniques depuis les orbitales de cœur de l’élément sondé vers les couches de valence de cet élément. Les orbitales impliquées dans ces transitions dépendent de la nature de la transition, ou « seuil », étudiée. Le degré d’oxydation et l’état de spin de l’élément sondé, la géométrie locale autour de cet élément, la nature chimique de ses voisins sont autant de paramètres influençant l’énergie nécessaire pour effectuer cette transition cœur  valence.

Deux grands types de XAS peuvent être distingués : le XAS au seuil L2,3 (d’un atome absorbeur) sonde les niveaux nd mis en jeu lors des transitions 2p nd d’un élément ; le XAS au seuil K sonde les niveaux np mis en jeu lors des transitions 1s np d’un élément. Le XAS au seuil L2,3 est un outil particulièrement intéressant permettant de sonder les orbitales de valence (orbitales magnétiques) d’un composé contenant des métaux de transition ; en effet, la couche de valence nd des métaux étant partiellement occupée, la transition 2p nd sonde directement ces niveaux électroniques. Cependant, cette technique nécessite de placer l’échantillon à analyser sous vide, le spectre XAS au seuil K des éléments légers présents dans l’air (principalement azote et oxygène) masquant le spectre XAS au seuil L2,3 des métaux de transition de la première série.

Des études précédentes montrent que les ABP AxCoFe peuvent être particulièrement sensibles au vide, celui-ci pouvant provoquer jusqu’à la perte de leurs propriétés de commutation dans les cas les plus critiques. Nous avons donc privilégié la spectroscopie XAS au seuil K des métaux de transition lors de l’étude des ABP AxCoFe. Comme le XAS au seuil K sonde les niveaux np mis en jeu lors de la transition 1s np de l’élément étudié, les orbitales magnétiques (nd) ne sont pas directement impliquées. Cependant, l’énergie associée à cette transition dépend du degré d’oxydation et de l’état de spin du centre absorbeur. Dans certains cas (composés non-centrosymétrique), les orbitales np et nd peuvent également être couplées par l’intermédiaire des orbitales des ligands (dans le cas d’un métal de transition). Le XAS au seuil K peut ainsi fournir une information indirecte sur la nature et l’occupation des orbitales magnétiques.

Le spectre XAS comprend deux parties : la région XANES, centrée autour du pic principal d’absorption, caractérisée par son maximum d’absorption (‘raie blanche’), et la région EXAFS, située à plus haute énergie (Figure A12). L’EXAFS est une technique d’absorption liée au XANES. L’émission d’un photon lors de la désexcitation de l’atome sondé en XAS engendre une onde sphérique qui est diffusée par les atomes environnants. Les ondes rétro-diffusées peuvent interférer avec le faisceau de rayons X et ainsi perturber l’intensité de celui-ci au niveau du détecteur. Un schéma de principe est présenté à la Figure A13.

Figure A12 –Spectre XAS au seuil K du cobalt (obtenu pour K0,1CoFe). Les régions XANES et EXAFS sont mises en évidence.

Dispositif expérimental

II.

Dans le cadre de ce travail, les mesures de XAS ont été réalisées sur la ligne de lumière ODE du synchrotron SOLEIL. L’anneau du synchrotron SOLEIL joue le rôle de source de lumière (dans le domaine des rayons X durs pour la ligne ODE). Le principe de fonctionnement d’un synchrotron ainsi qu’une brève présentation du synchrotron SOLEIL sont proposés en Annexe V.

La sélection de la gamme d’énergie adaptée au seuil sondé (dans notre cas, les seuils K du cobalt et du fer) se fait par dispersion du rayonnement synchrotron au moyen d’un jeu de miroirs courbés, positionnés en amont du banc optique où sont placés l’échantillon et le détecteur. La sélection de la gamme spectrale correspondant au seuil d’étude se fait par positionnement angulaire du banc optique. Un schéma de principe est présenté à la Figure A14.

Figure A14 – Schéma du montage optique permettant de sélectionner un seuil d’absorption sur la ligne

ODE.

Le banc optique se compose d’un porte-échantillon mobile (assorti d’un environnement-échantillon permettant un contrôle de la température, de la pression, du champ magnétique, etc. selon les besoins de l’expérience) et d’un détecteur (caméra « Charge-Coupled Device » – CCD). L’échantillon est déposé dans une enclume de diamant, elle-même enchâssée dans une cellule en tantale (Figure A15). La cellule est placée dans un berceau réglable en position placé perpendiculairement au faisceau de rayons X. Le banc optique est schématisé à la Figure A16. La pression interne de l’enclume est déterminée par la méthode de fluorescence du rubis.[184] Lors de l’expérience multi-lignes XAS-spectroscopie infra-rouge, décrite dans le Chapitre I, ce type de détermination de la pression interne de la cellule a été proscrit ; le laser utilisé dans la méthode de fluorescence du rubis est en effet susceptible de déclencher la photo-commutation de certains ABP AxCoFe. Une calibration de la pression interne de la cellule par suivi par spectroscopie infra-rouge des bandes de vibration du quartz[70] a été retenue lors de l’étude multi-lignes. Cette méthode est présentée dans l’Annexe IV.

Le signal d’absorption est directement enregistré spatialement par les différents pixels de la caméra CCD. Le spectre d’absorption est ensuite extrait par calibration du signal CCD au moyen de feuilles métalliques d’énergies de seuil connues. Le dispositif complet de la ligne ODE est présenté à la Figure A17.

Figure A15 – Cellule à enclume de diamant utilisée sur la ligne ODE. En haut : cellule assemblée ; en

bas : différentes partielle de la cellule (de gauche à droite : partie supérieure du capot, enclume et partie inférieure).

Figure A16 – Schéma du dispositif expérimental utilisé lors des mesures par XAS sous pression sur la

Figure A17 – Dispositif XAS complet de la ligne ODE. Couleurs : fente (rouge), berceau (cyan),

Application aux analogues du bleu de Prusse cobalt-fer

III.

Dans les ABP AxCoFe, la spectroscopie XAS peut être utilisée pour sonder les éléments cobalt (Figure A18) et fer (aux seuils K respectifs). Dans l’état CoIIFeIII, le spectre XAS au seuil K du cobalt (resp. du fer) présente un maximum d’absorption proche de 7725 eV (resp. 7131 eV), caractéristique d’ions cobalt CoII

(HS) (resp. d’ions fer FeIII

(BS)). Dans l’état CoIIIFeII, le spectre XAS au seuil K du cobalt (resp. du fer) présente un maximum d’absorption proche de 7728 eV (resp. 7130 eV), caractéristique d’ions cobalt CoIII(BS) (resp. d’ions fer FeII

(BS)). Le profil du seuil (région XANES) donne également des informations concernant la géométrie locale autour de l’élément sondé (octaédrique pour les cations cobalt et fer dans les deux états électroniques). Enfin, la position des oscillations EXAFS indique les distances entre l’élément sondé et ses premiers voisins : dans l’état CoIIFeIII, d(CoII(HS)-N) = 2,08 Å et d(FeIII(BS)-C) = 1,94 Å ; dans l’état CoIIIFeII, d(CoIII(BS)-N) = 1,91 Å et d(FeII(BS)-C) = 1,92 Å. Ces résultats sont en accord avec la littérature.[60]

Figure A18 – Spectres XAS au seuil K du cobalt des ABP K0,1CoFe (rouge), représentatif de l’état électronique CoIIFeIII, et Rb2CoFe (bleu), représentatif de l’état électronique CoIII

Annexe IV

Description des techniques employées :