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Fiche signalétique

4.3. Saint Fargeau « Bois de Bailly » (89) : prospections, sondages et datations.

4.3.1. Description des sites prospectés.

4.3.1.1. Caractéristiques générales des amas.

Les sites inventoriés ne fournissent pas la même qualité d’information. Le site 89.344.022 correspond ainsi probablement à des déchets remaniés, voire déplacés et ne sera donc pas pris en compte dans les synthèses suivantes.

D’autre part, certains amas de scories ont probablement été individualisés artifi ciellement. De petites concentrations de scories situées à côté de très gros amas remaniés ont été individualisés alors que leur proximité géographique et la typologie des scories laissent à penser qu’ils constituent une seule entité. C’est le cas du petit amas 89.344.038 qui appartient probablement au très gros amas 89.344.013. Il en est de même pour les sites 89.344.001 et 89.344.037 qui formeraient un même ensemble et d’autre part pour les sites 89.344.006 et 89.344.007.

Nos réfl exions peuvent donc s’appuyer sur un minimum de 37 amas inventoriés dans ce secteur. Nous présenterons dans un premier temps une synthèse s’appuyant sur les seules caractéristiques topographiques et les observations de terrain réalisées durant les prospections. Ces commentaires seront par la suite complétés par l’étude des déchets prélevés sur les amas. Au moins trois groupes bien distincts d’amas ont pu être perçus lors des prospections. Ils se distinguent par la dimension des « tas » de déchets, par la couleur du sédiment ou encore par la densité de scories visibles en surface (fi g. 40).

Un premier groupe de sites couvre de petites surfaces (comprises entre 11 et 84 m² d’après les relevés de terrain) et est caractérisé par de faibles élévations (inférieure à 50 cm). Les volumes estimés sont ainsi inférieurs à 15 m3. L’aspect de surface de ces sites est très caractéristique. Ils

sont constitués d’un sédiment noir très charbonneux, et sein duquel se répartissent de très fortes concentrations de scories plus ou moins fragmentées. Six sites partagent ces caractéristiques (89.344.010, 011, 014, 018, 034, 039).

Un deuxième groupe rassemble de « gros » amas. Ces sites (89.344.001, 002, 003, 006, 013, 015 et ceux associés 007, 037, 038), s’étendent sur plus de 1000 m², avec des élévations proches ou dépassant le mètre (les volumes estimés sont compris entre 160 et près de 4000 m3). A

l’exception du site 89.344.015, ils se répartissent dans le tiers nord du secteur prospecté. Tous ces amas ont subi d’intenses remaniements modernes, probablement en lien avec l’exploitation de scories de la fi n du XIXe et du début du XXe s. Ces exploitations prennent la forme de tranchées

ou de cavités larges de plusieurs mètres. Dans certains secteurs seuls des amas constitués des rebuts de criblage subsistent.

Le dernier groupe est majoritaire avec 20 amas. Ils se caractérisent par une faible lisibilité. Sans l’expérience de Jean-Pierre Piétak, un grand nombre de ces sites n’aurait pas été identifi é. Ces amas sont de faible hauteur, ne dépassant généralement pas la trentaine de centimètre (volumes inférieurs à 200 m3). Ils sont constitués d’un sédiment brun-clair à marron dans lequel

se répartissent de petits fragments de scories éparses. Des chablis ou des taupinières permettent parfois de cerner de plus grandes concentrations de déchets. Les surfaces couvertes sont généralement inférieures à 500 m², même si quelques sites plus étendus ont été identifi és (900

m² pour le plus grand). Peu visibles, la plupart de ces amas sont intacts ou n’ont fait l’objet que de destructions très ponctuelles qui ne sont pas forcément à relier aux travaux d’exploitation des XIXe-XXe.

Cinq sites présentaient des caractéristiques ne permettant pas de les classer dans un groupe déjà défi ni (89.344.004, 012, 019, 022, 035).

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4.3.1.2. Caractéristiques stratigraphiques.

Trois amas ont été appréhendés en coupe. Deux sont des coupes « opportunistes » observées sur des chemins ou des fossés traversant les amas 89.344.024 et 89.344.033. Ces deux sites se rattachent à la dernière catégorie d’amas « discrets ».

Un sondage a également été réalisé cet été sur l’un des sites prospectés en avril (site 89.344.006 appartenant aux gros amas). Ce dernier devait faire l’objet de terrassements afi n de permettre l’aménagement d’un layon. Nous en avons profi té pour eff ectuer une demande d’opération archéologique.

Observations stratigraphiques sur l’amas 89.344.024.

Cet amas circulaire a été traversé par un chemin moderne bordé d’un fossé. L’amas a ainsi été traversé sur environ 1 mètre d’épaisseur. Nous avons réalisé un nettoyage sommaire de la coupe accessible.

La stratigraphie est la suivante (fi g. 41) : le sol naturel, une argile jaune- blanche comprenant des blocs de silex, est visible à 95 cm de profondeur. Il est surmonté par une couche en apparence homogène de 85 cm d’épaisseur constituée de limon brun ocre dans laquelle se répartissent des fragments de scories de taille centimétrique, ainsi que quelques fragments de parois. Ces éléments sont dispersés dans toute l’épaisseur de cette strate. Elle est recouverte par une couche d’humus d’une épaisseur de 10 cm.

Figure n°41. Amas 89.344.024 coupé par un fossé bordier de chemin.

Observations stratigraphiques sur l’amas 89.344.033.

Cet amas a été coupé par un chemin bordé d’un fossé. L’amas a été traversé sur une épaisseur d’une soixantaine de centimètres (fi g. 42). Le terrain naturel, de l’argile blanche, est visible à 45 cm de profondeur. Il est recouvert par un limon argileux brun. Des fragments de scories centimétriques ont été observées entre -25 et - 45 cm. La terre végétale est absente dans ce secteur.

Une datation radiocarbone permet de dater cet amas entre 390 et 205 CalBC.

Sondage sur l’amas 89.344.006.

Un sondage a été réalisé à l’occasion d’aménagements envisagés par l’ONF sur un amas très étendu, mais en apparence très remanié. L’ouverture a été eff ectuée au tractopelle, la mairie de Saint-Fargeau nous ayant mis à disposition l’appareil et son chauff eur durant 1 journée. Le rebouchage a été eff ectué immédiatement après la fi n de l’intervention.

Un sondage de 6 m de long sur une largeur maximale de 2,40 m a été ouvert en périphérie est du site (fi g. 43). Il a été implanté dans la seule zone apparemment peu touchée par des remaniements récents et car une plus grande quantité de scories de taille pluri-centimétrique était visible en surface.

Figure n°43. Localisation du sondage (noir) sur l'amas 89.344.006.

Le sondage, orienté nord-sud, a été ouvert du sud vers le nord. Dans la partie sud-ouest, est apparue une vaste fosse [114] large de 2 m et profonde d’au moins 2,30 m sous le niveau d’humus actuel (fi g. 44, 48, 49). A cette profondeur nous avons interrompu l’excavation pour des raisons de sécurité. Les parois de cette fosse semblaient alors se resserrer, mais le fond reste incertain. Elle recoupe les niveaux de rejets de fours et de scories, et est donc bien postérieure à l’amas de déchets. Elle s’enfonce profondément dans le terrain naturel et ne semble pas forcément en lien avec la ré-exploitation des scories. Aucun élément ne permet de proposer de datation.

Au même niveau, une autre fosse [108] (fi g. 47), occupe la partie sud-est du sondage et est seulement profonde d’une soixantaine de centimètre. Dans ce secteur l’ensemble des niveaux de déchets sidérurgiques est donc perturbé sur environ 2 m de long.

Des accumulations de déchets non remaniées ont été observées sur une longueur de 4 mètres. Nous avons percé ces niveaux afi n de les appréhender en stratigraphie. Le décaissement a été

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le niveau d’humus. Dans ce secteur, il s’agit d’une couche d’argile jaune très compacte. En fi n d’opération l’argile jaune a été surcreusée d’environ 50 cm sans que l’on rencontre de nouvelle structure archéologique, ce qui a permis de vérifi er qu’il s’agissait bien du terrain naturel.

Le décapage sur la couche d’argile naturelle a permis de mettre en évidence trois structures probablement reliées à l’exploitation métallurgique. Deux [117] et [118] sont des trous de poteaux de plan circulaire (fi g. 45), mesurant 50 cm de diamètre. Leur profondeur minimale est de 70 cm. Elles sont apparues au niveau du terrain naturel [110]. Leur remplissage s’avère très compact et comprend des fragments centimétriques à décimétriques de scories écoulées, de parois et de blocs de silex, emballés dans un limon très argileux marron clair mélangé à des nodules infra-centimétriques de terre cuite. Seuls quelques fragments de charbon de bois ont été observés dans le comblement [112]. Le remplissage [111] était au contraire très charbonneux.

Figure n°44. Plan du sondage et des structures décapées sur le terrain naturel

Figure n°45. Trou de poteau 117, avant et après fouille

Sondage profond jusque - 1,90 m sous l’humus

110 114 117 118 115 1 m 117 110 112

A quelques centimètres de [111] a été observée une zone rubéfi ée [115] couvrant plus d’une cinquantaine de centimètres de diamètres. Elle était constituée de grains de minerai centimétriques de couleur rouge, mêlés à des fragments de charbon de bois (fi g. 46). La dureté du terrain, renforcée par la sécheresse de cet été, n’a pas permis une fouille manuelle de cette structure. Elle a été coupée mécaniquement.

Figure n°46. US 115, zone de grillage de minerai ?

Les trous de poteau pourraient appartenir à la structure d’un abri, comme on en connait sur certains sites de réduction et notamment sur les fours de réduction (Domergue et al. 1993, Sarreste 2011). La profondeur et la largeur relativement importante de ces trous caractérisent un bâtiment d’une certaine robustesse, et non pas un simple abri léger.

L’accumulation de fragments de minerai grillé correspondrait quant à elle à l’emplacement d’une aire de grillage aménagée dans une petite cuvette sur le terrain naturel. Le sondage a donc probablement touché une zone proche des structures de réduction. Nos objectifs n’étant actuellement pas de fouiller ce type de structure nous n’avons pas cherché à ouvrir davantage la zone de fouille.

Figure n°47. Relevé et vue de la coupe est du sondage

+ +Sud

Nord alti. approx. entre 241 et 249 m (GPS)

Humus

Rejets de scories majoritaires

Rejets de parois de fours Charbon Terrain naturel 1 m 101 102 103 107 110 106 105 104 109 108

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L’ensemble de ces aménagements est recouvert par les niveaux de destructions de fours (fi g. 47, 48). Les couches reposant directement sur le terrain naturel correspondent à des rejets de scories écoulées se subdivisant en au moins deux couches distinctes [105] et [107]. Leurs caractéristiques sont identiques : elles sont constituées de fragments de scories de taille centimétrique à pluri- décimétrique. L’enrobage de terre est quasiment absent dans ces strates. Un niveau de rejets de charbon de bois [106] s’intercale entre ces deux niveaux.

Ces couches de scories sont surmontées par un niveau cendreux gris [104] comprenant quelques fragments de scories décimétriques et des nodules de terre cuite. L’ensemble est recouvert par un épais niveau [103] très compact de comprenant des nodules centimétriques et des pains décimétriques d’argile blanche à rose. Quelques fragments de scories sont également présents, ainsi que quelques fragments de charbon de bois.

Les niveaux supérieurs [102] et [101] correspondent aux parties sommitales remaniées. L’absence de fragments de scories de taille pluri-centimétrique s’explique probablement par leur récupération durant les phases modernes de réexploitation de l’amas.

La couche [102] est ainsi un niveau très compact mêlant nodules de silex et quelques pains d’argile décimétriques dans un sédiment argileux marron. Le niveau d’humus [101] se développe sur une dizaine de centimètres d’épaisseur.

Figure n°48. Relevé et vue de la coupe ouest du sondage

1 m

Humus

Rejets de scories majoritaires

Rejets de parois de fours Charbon Terrain naturel

Niveau d’utilisation atelier

Remaniements postérieurs à l’atelier 113 101 102 103 116 107 110 114 106 Sud

alti. approx. entre 246 et 249 m (GPS)

Nord +

Cette stratigraphie semble caractéristique de rejets successifs d’éléments de destructions de fours. La base comprend les scories écoulées hors de la cuve, premières à être évacuées du four pour récupérer la masse de métal. Viennent ensuite les niveaux cendreux pouvant provenir de l’intérieur du bas fourneau. Suivent ensuite les rejets de parois de four, correspondant à une phase terminale de destruction – reconstruction des structures de chauff e. L’épaisseur d’accumulation de ces déchets renvoie à des utilisations successives de plusieurs fours dont les déchets semblent avoir fait l’objet d’un tri avant d’être rejetés à cet emplacement de l’amas.

Figure n°49. Vue générale du sondage vers le nord

Deux prélèvements de scories ont été eff ectués dans les niveaux [105] et 107] et les fragments de minerais de la couche [115] ont été prélevés. La couche charbonneuse [106] a été en grande partie prélevée afi n de faire l’objet d’une étude dendroanthracologique et pour des datations. Des charbons ont également été prélevés dans les US [103] et [111] pour datations.