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3.3 Les métalloboranes

3.3.3 Description de l’interaction

La jeunesse du développement des métalloboranes depuis la dernière décennie a avivé la nécessité de comprendre la nature de l’interaction d’un ligand Z avec les mé- taux de transition. Il est certain que l’interaction métal-bore entraîne une donation d’une paire libre de l’or vers l’atome de bore, mais la seule connaissance de la na- ture des interactions orbitalaires est trop restrictive ce qui entraîne un débat sur le degré d’oxydation du centre métallique selon que l’interaction soit considérée comme purement dative ou covalente. Dans cette section nous rappellerons les règles de déter- mination du degré d’oxydation, et présenterons les divergences concernant la vision de l’interaction dans les métalloboranes.

Degré d’oxydation du métal et ligand Z : Le degré d’oxydation Mx du métal dans un complexe est relié à dnqui est le nombre d’électrons n des orbitales non-liantes ou anti-liantes de type d centrées sur le métal. La façon la plus commune de compter dn dans un complexe est la suivante :

n= ME − ON (1)

avec ME, nombre du groupe “Ölender” (nombre d’électrons de valence au degré d’oxydation 0) , et ON, nombre d’oxydation. Toutefois dans les cas litigieux à propos du nombre d’oxydation, Green propose par sa classification des liaisons covalentes[46] une autre définition dépendante du nombre d’électrons de valence NV :

3.3 Les métalloboranes

n= ME − NV (2)

Comme le rappelle Hill dans un courrier publié dans Organometallics de 2006 [38] de nombreux cas litigieux laissent apparaître un n différent selon la méthode d’estimation de n concernant les métalloboranes et les ligands Z en général. En effet, dans le cas (1), l’atome de bore ne modifiera pas le degré d’oxydation du métal, alors que dans le formalisme de Green (2), NV le nombre de valences est diminué de 2 par un ligand Z. Ainsi dans les complexes impliquant un ligand Z, deux résultats sont possibles selon la méthode d’estimation du degré d’oxydation du métal. Cette contradiction est illustrée pour trois complexes dans la figure 3.8. Pourtant le degré d’oxydation devrait être dépendant de la molécule et non de la méthode de détermination de ce nombre. Cette différence provient de la détermination du nombre d’électrons de valence du métal impliqués dans l’interaction métal-bore dans les complexes métalloboranes. En effet, un débat est né entre Hill et Parkin sur ce point. La question principale est : dans le cas du bore comme ligand Z, faut-il considérer un transfert total des électrons du métal vers l’atome de bore ?

Il est important de connaître le nombre d’oxydation du métal car il est relié à la configuration dn. Connaître n indique si le métal possède suffisamment d’électrons pour de la réactivité comme lors d’une réaction d’addition oxydante qui requiert n ≥ 2. Il joue aussi un rôle dans la connaissance des propriétés magnétiques et spectroscopiques d’une molécule.

Fig. 3.8: Estimation du degré d’oxydation dans trois complexes métallaboratranes

Deux visions de l’interaction sont proposées par Hill et Parkin (fig 3.9). Pour Hill, le métal garde ses électrons et le ligand est postulé BR3 neutre (le boratrane), ce qui se traduit par un métal sans changement de degré oxydation dn. Pour Parkin, le métal

transfère deux électrons, le ligand est alors de la forme [BR2−3 ] et le centre métallique de- vient alors dn−2(dans le cas d’un complexe ML

xZ1). L’illustration de cette divergence est

représentée par les complexes isoélectroniques et structurels [RhCl(PPh3){B(mtM e)3}] et [RhCl(PPh3){B(mttBu)3}] dont le métal est décrit comme d8 RhI par Hill alors que Parkin le décrit comme d6 RhIII .

CHAPITRE 3. Ligand ambiphile

Fig. 3.9: Formes limites de la liaison métal - bore

Description de la liaison : Pour identifier le rôle joué par l’atome de bore dans les complexes, Parkin a effectué des calculs théoriques sur deux complexes hypothétiques [Ir(PH3)Cl{kx-B(mimH)

3}][40] avec (x=4) et sans (x=3) interaction du bore (fig 3.10).

Le complexe k4 a été optimisé sans contrainte géométrique, alors que la géométrie du complexe k3 a été contrainte à un atome de bore trigonal-plan et une distance B-Ir de 3.00 Å.

Fig. 3.10: Complexe modèle d’iridium calculé par Parkin[40]

Dans le complexe k3, il n’y a pas d’interaction entre le métal et l’atome de bore (fig 3.10). L’orbitale la plus haute occupée (HO) est l’anti-liante σ∗(Ir − Cl) impliquant la dz2 centrée sur le métal. Lorsque la géométrie est relaxée et que l’atome de bore s’approche de l’iridium (complexe k4, fig 3.10, droite), l’orbitale vacante pz du bore interagit avec le centre Ir-Cl. Une interaction 3c-4e classique s’effectue alors. Trois orbitales sont formées, une anti-liante, une non-liante et une liante B-Ir-Cl. Ainsi, le mélange de l’orbitale dz2 doublement occupée de l’iridium avec la pzvacante du bore conduit à la formation d’une orbitale liante. Donc pour Parkin, la mise en commun

3.3 Les métalloboranes

des électrons lors de la coordination du bore s’accompagne forcément d’une diminu- tion de dn à dn−2 conformément à la convention de Green de détermination du degré d’oxydation (2). Enfin Parkin utilise un argument géométrique : le complexe k4 est pseudo-octahédrique ce qui est caractéristique des complexes d6.

D’autre part, Bourissou a effectué une étude théorique du complexe

[{k3-(o-iPr2P)C6H4)2BPh}RhCl(dmap)[65] et a montré un schéma orbitalaire iden- tique 3c-4e. Toutefois les auteurs mettent en avant une étude NLMO qui montre une contribution de 79.3% de l’orbitale dz2 du Rh dans l’orbitale moléculaire liante Rh-B contre seulement 17.1% venant de l’orbitale vacante du bore. Ceci indique que la densité électronique reste principalement localisée sur le métal ce qui conduit les au- teurs à conserver le degré d’oxydation d8 du métal sans interaction malgré la géométrie pseudo-octahédrique qui caractérise les complexes d6.

Hill dans son courrier d’Organometallics de 2006 rappelle que dans tous les cas, il ne faut pas oublier que le degré d’oxydation n’apporte pas d’information sur la quantité de transfert de charge et que la charge réelle du métal se situe entre les deux cas limites présentés dans la figure 3.9. Il propose alors une notation inspirée de la chimie des nitrosyles inspirée par Enemark et Felthman[66] où le degré d’oxydation du métal n’est plus explicite, mais reflète l’ensemble métal-bore :

[M → B]n

Cette notation permet d’éviter les malentendus entraînés par le comptage des élec- trons. Hill remarque que le transfert de charge du métal vers l’atome de bore et la détermination d’un degré d’oxydation devront être accompagnés d’une étude théorique précise pour être quantifiés.

Chapitre 4

Nature de l’interaction Or→Bore

Le complexe diphosphineboratrane-or-chlore (DPBAuCl, fig 4.1) est le premier com- plexe avec une interaction or-bore. Il fut synthétisé en 2006 par l’équipe de D. Bouris- sou. Ce complexe présente une distance or-bore de 2.31 Å qui est légèrement inférieure à la somme des rayons covalents ainsi qu’un déplacement chimique du bore de 24.6 ppm. Ces paramètres sont les premiers indices d’une interaction or-bore. L’atome de bore se comporte comme un ligand Z et notre complexe s’inscrit dans le débat présenté précédemment concernant le degré d’oxydation du métal. Le métal met-t-il en commun deux de ses électrons ? Dans la partie 4.1, nous ferons une présentation des complexes, de leurs synthèses et de leurs caractérisations géométriques expérimentales. Puis nous entrerons dans l’étude théorique dans le paragraphe 4.2, où nous présenterons les résul- tats théoriques obtenus concernant l’interaction or-bore par une combinaison d’outils théoriques classiques : orbitales moléculaire, NBO, et AIM.

CHAPITRE 4. Nature de l’interaction Or→Bore

4.1

Synthèse et géométrie de DP

R

B

ph

AuCl

(R=iP r2, P h2)