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énergétique à l’environnement, des intérêts mouvants pour la synergie

B. Gérer la dynamique des productions de chaleur fatale

1. Des variations régulières dans la répartition des flu

La répartition des sources d’énergie qui alimentent le réseau de chaleur est présentée publiquement de manière statique : on peut ainsi lire dans l’ensemble des documentations émanant des collectivités ou du concessionnaire que plus de 80% de la chaleur délivrée par le réseau est une chaleur de récupération, 60% provenant spécifiquement de la captation (voir par exemple la Figure 4.12 pour l’année 2011). Il est également fait référence aux systèmes de captation en fonction de la puissance maximale qu’ils peuvent délivrer (pour rappel : 20 MW pour la première, 8 MW pour la seconde).

Cependant, cette représentation statique cache en fait de nombreuses variations dans la quantité de chaleur effectivement récupérée chez ArcelorMittal. La mise en service de la

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deuxième captation en offre une illustration particulièrement parlante. En 2008, année de cette mise en service, le secteur de l’acier se porte mal : les ventes du secteur automobile, qui constitue le principal client de l’antenne dunkerquoise de l’aciériste, chutent. En conséquence, les usines tournent au ralenti. En particulier, la chaîne d’agglomération n°2, de laquelle est issue la seconde captation, ne fonctionne pratiquement plus et même pas du tout pendant quatre mois au cours des six premiers mois de son exploitation.

« On a mis en place la deuxième captation, il y a eu les essais de faits, très concluants, ça a marché, mise en route pour un hiver normal, et puis arrêt de la production. Tout de suite. »

Entretien avec le directeur du service énergie de la ville de Dunkerque – 15/04/2015

« Le problème c’est que si ça s’arrête il faut remplacer par du fioul lourd et nous il faut qu’on ait plus de 50% d’ENR. Actuellement on a 60% et ça nous donne droit à une TVA à 5.5%, mais si on passe en dessous de 50%, la TVA passe à 20% ! Et c’est vérifié bien sûr. Tous les trois mois j’envoie un tableau de suivi à un BET [Bureau d’Etudes Techniques] qui vérifie. »

Entretien avec le responsable de l’exploitation du réseau – EGL – 03/02/2015

Figure 4.12 : Répartition des sources d'énergie du réseau de chaleur en 2011 - Source : Etude pour le développement du chauffage urbain de la région de Dunkerque - Cabinet Hexa Ingénierie – 2012

La situation financière du réseau s’en trouve particulièrement fragilisée puisque le remboursement des investissements liés à cette captation est déjà en cours, sans que la récupération de chaleur ne permette de diminuer la quantité de fioul brûlée dans les chaufferies complémentaires. On trouve des traces de ces difficultés dans les comptes-rendus

60% 13%

13%

11% 3% Récupération de chaleur ArcelorMittal

Chaufferie de l'Ile Jeanty au fioul lourd Cogénération et chaufferie gaz Hôpital Cogénération et chaufferie gaz Les Glacis

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d’exploitation rédigés par EGL et remis à la collectivité. Ainsi, peut-on lire dans le compte- rendu financier de l’exercice 2008 que, « malheureusement, les conditions économiques de fin 2008 avec le fort ralentissement de production d’Arcelor n’ont pas permis d’utiliser au maximum la récupération de chaleur fatale au détriment de la consommation de fioul. Par contre, les charges fixes d’amortissement de la nouvelle captation ont pris effet au premier avril 2008, date de mise en service de l’installation (le démarrage était initialement prévu au premier juillet 2008). […] La redevance d’occupation versée à Arcelor a pris effet également au premier avril 2008 ». Les conclusions tirées dans le compte-rendu financier de l’exercice de 2009 sont similaires :« compte-tenu de la réduction de l’activité d’Arcelor suite à la crise économique, il n’y a pratiquement pas eu de récupération de chaleur sur la nouvelle captation de l’agglo. n°2 en 2009. Pour assurer la production de chaleur aux usagers il a été consommé du fioul à un coût unitaire beaucoup plus important en substitution de la chaleur de récupération ».

Il faut toutefois noter que l’exploitant avait été mis en garde par ArcelorMittal de telles possibilités lors du montage du projet.

« Pour le deuxième, la seule question qu’on se posait c’était en disant, oui, il y a des fois on arrête la chaîne 2. Elle était plus petite, des fois on l’arrête, est-ce que ça marche quand même pour Dalkia et pour le réseau de chaleur, est-ce que ça les intéresse ? Bon, finalement vu le flux, vu le réseau, ça les intéressait quand même. Donc le projet s’est monté malgré les aléas qu’il y avait d’une plus petite chaîne qui marchait moins souvent, qui pouvait avoir des arrêts importants l’été et qui avait d’autres contraintes. »

Entretien avec le responsable de l’environnement et des risques technologiques – ArcelorMittal Dunkerque – 02/02/2015

La situation spécifique de 2008 a particulièrement marqué les acteurs puisque plusieurs nous en ont fait part au cours des entretiens. Elle ne doit toutefois pas cacher les variations régulières et moins spectaculaires dans la production de l’usine qui influencent l’équilibre du réseau tout au long de son exploitation.

« Le point qui est un peu gênant c’est qu’Arcelor, sa vocation ce n’est pas de faire de la chaleur. Donc lui quand il y a un problème technique, quand il y a une baisse d’activité en métallurgie, parce qu’il n’y a pas de commande, eux ils coupent, et quelle que soit la saison. Donc ça peut arriver qu’en hiver, on ferme les robinets. »

Entretien avec le directeur du service énergie de la ville de Dunkerque – 15/04/2015

La Figure 4.13 offre une image de ces évolutions telles que comptabilisées par EGL entre 2008 et 2012. Les baisses de récupération en été sont liées aux faibles besoins de chauffage

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des abonnés du réseau, tandis que les variations observées au cours de l’hiver sont liées à des évolutions de la quantité de chaleur effectivement récupérable sur les installations d’ArcelorMittal.

Figure 4.13 : Evolution de la quantité de chaleur récupérée chez ArcelorMittal entre 2008 et 2012 – Source : Dalkia, 2013, « Réseau de chauffage urbain – Raccordement au CVE de Dunkerque », Document de présentation à destination des acteurs

publics locaux, consulté aux archives de la CUD

On peut également observer les traces de ces variations dans les rapports techniques et financiers d’exploitation du concessionnaire et dans les comptes-rendus des réunions mensuelles tenues entre EGL et le SICURD. L’exploitant fait ainsi régulièrement part de baisses de production liées à des variations de l’activité de l’industriel, en particulier lorsque des activités de maintenance lourdes sont mises en œuvre. Il est par exemple fait mention en octobre 2006 de travaux sur les hauts fourneaux qui entraînent un ralentissement de l’activité des chaînes d’agglomération. En somme, l’exploitant du réseau se trouve tributaire de dynamiques industrielles et économiques sur lesquelles il n’a pas de prise et qui influencent fortement l’équilibre métabolique du réseau et sa traduction économique puisque ses dépenses sont en partie liées à la quantité de combustibles fossiles qu’il doit brûler.

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