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Des lacunes substantielles dans les processus budgétaires

6.6 La fonction comptable et financière et la fiabilité des comptes

6.6.2 Des lacunes substantielles dans les processus budgétaires

Conformément à l’article L. 1412-1 du CGCT, les EPIC constitués par les EPCI pour la gestion directe d’un SPIC sont des régies qui relèvent des dispositions du chapitre Ier du titre II du livre II de la deuxième partie de ce code.

6.6.2.1 L’absence de débat sur les orientations budgétaires

Les dispositions de l’alinéa 2 de l’article L. 2312-1 du CGCT prévoient que dans les communes de 3 500 habitants et plus, un débat a lieu au conseil municipal sur les orientations générales du budget. Ces dispositions sont applicables aux SPIC par renvoi de l’article L. 2221-5 du même code. Ainsi, l’office de tourisme de Grand Châtellerault, EPIC chargé de la gestion d’un SPIC et rattaché à une collectivité de plus de 3 500 habitants, est tenu d’organiser un tel débat par renvoi des articles L. 1412-1 et L. 1412-2 du CGCT. Ce débat doit porter également sur le personnel et son évolution dès lors que l’office est un établissement rattaché à une collectivité de plus de 10 000 habitants comportant une commune d’au moins 3 500 habitants. (question écrite n° 05380 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI) publiée dans le JO Sénat du 31/05/2018 - page 2596)

Le débat sur les orientations budgétaires (DOB) porte sur les orientations générales à retenir pour l’exercice considéré et, éventuellement, les exercices suivants.

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Il permet aux membres de l’assemblée d’exprimer leurs vues sur une politique budgétaire d’ensemble. Il permet également à l’ordonnateur de faire connaître ses choix budgétaires prioritaires et les modifications à apporter par rapport au budget antérieur.

Ce débat se situe à l’intérieur d’un délai de deux mois précédant l’examen du budget primitif (article L. 2312-1 du CGCT).

Il s’effectue dans les conditions prévues pour toute délibération de l’assemblée.

Des comptes-rendus des séances du CODIR, il ressort qu’un seul DOB a eu lieu le 16 janvier 2019 pour cette année. Ce document expose les contraintes de l’office et ses perspectives pour l’année à venir. Le 6 novembre 2018, une note relative à la situation comptable et financière de l’office a été transmise aux membres du CODIR mais il ne s’agit pas d’un rapport d’orientations budgétaires (ROB) donnant lieu à débat. Il en est de même pour ce qui est présenté comme le DOB pour l’année 2020 et pour l’année suivante, étant précisé qu’il n’y a pas eu de délibération spécifique sur le DOB comme exigé par les textes.

L’approbation lors de la séance du CODIR du mois d’octobre du rapport d’activité de l’année en cours, avec les données arrêtées au 30 septembre et accompagné d’une esquisse de budget prévisionnel pour l’année suivante ne vaut pas davantage DOB au sens des textes précités.

En l’absence de communication du rapport d’orientations budgétaires aux membres de l’assemblée délibérante, la délibération adoptant le budget primitif est annulée car prise à l’issue d’une procédure irrégulière, l’absence de communication de ce document étant considérée comme un vice substantiel (par exemple TA Montpellier, 11 octobre 1995, commune de Bédarieux ou plus récemment TA de Lyon, 9 décembre 2004, Nardonne). En outre, le DOB doit être retracé dans le compte-rendu de la séance qui lui a été consacrée afin de prendre acte de sa tenue (CAA Marseille, 22 mars 2012, commune de Roquefort-les-Pins).

Recommandation n° 5 : Se conformer aux dispositions de l’article L. 2312-1 du CGCT (applicable par renvoi des articles L. 1412-1 et L. 1412-2 du même code) pour la tenue des débats d’orientations budgétaires.

6.6.2.2 Des budgets primitifs incomplets et des décisions modificatives lacunaires Selon l’article R. 133-15 du code du tourisme, le budget est préparé par la directrice de l’EPIC et est présenté par le président au comité de direction, qui en délibère avant le 15 novembre. Il est ensuite transmis à l’assemblée délibérante de la collectivité de rattachement pour approbation, puis en préfecture pour visa du contrôle de la légalité, au plus tard 15 jours après le délai limite fixé pour son adoption. Si le conseil communautaire, saisi à fin d’approbation, n’a pas fait connaître sa décision dans un délai de trente jours, le budget est considéré comme approuvé.

En l’espèce, le conseil de la CAGC n’a jamais approuvé explicitement le budget de l’office (article L. 133-8 du code du tourisme).

Le budget soumis au vote doit respecter la maquette définie par l’instruction budgétaire et comptable M4, qui comprend les informations générales, une présentation générale du budget, le détail par chapitre des articles en dépenses et en recettes, ainsi qu’un ensemble d’annexes obligatoires : états relatifs aux éléments du bilan (notamment états relatifs à la dette, méthodes utilisées pour les amortissements, état des provisions, etc.), états relatifs aux engagements hors bilan (états des emprunts garantis, subventions versées dans le cadre du vote

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du budget, état des engagements reçus, etc.), autres éléments d’information (notamment état du personnel et liste des organismes dans lesquels a été pris un engagement financier).

Les budgets primitifs adoptés par l’office de tourisme ne comportent aucune annexe alors qu’il devrait y avoir a minima celle relative au personnel et celle comportant les signatures.

Si la présentation du budget dans l’annexe de la délibération comporte un détail par chapitre et article, les recettes réelles et d’ordre ne sont pas différenciées au niveau de chaque chapitre. La reprise anticipée des résultats ne figure pas non plus dans ces documents.

Les prévisions budgétaires pour l’exercice 2018 sont sujettes à caution dès lors qu’elles ont été évaluées au vu des données arrêtées au 30 septembre 2017. Pour les autres exercices, les données étaient arrêtées au 31 décembre de l’exercice précédent, ce qui est plus logique et fidèle. Il est à noter que pour l’exercice 2020, la délibération n’est pas accompagnée d’une présentation par chapitres et articles budgétaires comme les autres années ce qui constitue une lacune grave en terme d’informations délivrées aux membres délibérants.

En l’absence de débat d’orientations budgétaires, hormis pour 2019, il n’est pas possible de connaître les hypothèses et les orientations stratégiques qui sous-tendent les projets de budgets.

Les décisions modificatives, quant à elles, sont succinctes dans la motivation de leur adoption. Elles sont souvent nombreuses (quatre décisions modificatives pour le seul exercice 2019) et parfois adoptées hors délai. Ainsi la décision modificative n° 4 relative à l’exercice 2019 a été délibérée le 19 février 2020 et rejetée par le contrôle de légalité en raison de sa tardiveté.

Il importe que les documents budgétaires soumis au CODIR soient complets et comportent l’ensemble des éléments et le niveau de détails et d’informations prévus par l’instruction M4.

6.6.2.3 Des comptes financiers qui n’en sont pas

Pour les régies (au sens d’établissement) dotées de la personnalité morale et de l’autonomie financière chargées de l’exploitation d’un SPIC, l’établissement du compte administratif n’a pas à être effectué puisqu’il existe, d’après les textes applicables, un document particulier qui est établi à la clôture de l’exercice, le compte financier. Ce document est une synthèse tenant lieu à la fois de compte administratif et de compte de gestion. Il est préparé par le comptable, selon les dispositions des articles R. 2221-49 à R. 2221-52 du CGCT. Ces régies doivent donc adopter un compte financier. En pratique, il est admis que ce compte financier puisse toutefois être constitué du compte administratif auquel est joint le compte de gestion. Le vote de l’assemblée délibérante porte alors sur les deux documents ainsi réunis.

Le contenu du compte financier est défini par l’article R. 2221-51 du CGCT qui dispose que celui-ci comprend la balance définitive des comptes, le développement des dépenses et des recettes budgétaires, le bilan et le compte de résultat, le tableau d’affectation des résultats, les annexes définies par instruction conjointe du ministre chargé des collectivités locales et du ministre chargé du budget, et la balance des stocks établie après inventaire par le responsable de la comptabilité matière. Il comprend les éléments prévus pour le compte de gestion, ainsi que les annexes du compte administratif.

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Par la délibération n° 8 du 19 février 2020, l’office de tourisme a entendu préciser qu’à chaque fois que les actes pris comportaient l’expression « compte administratif », il convenait de lire « compte financier ».

Cependant, l’examen des documents présentés aux membres du CODIR fait apparaître que ceux-ci se sont prononcés sur des comptes administratifs. En effet, les documents ne comportent pas d’informations sur les comptes de tiers (de classe 4) ou comptes financiers (de classe 5) qui figurent au sein des comptes de gestion. Pour l’exercice 2019, seule la page intitulée « présentation générale » a été fournie au CODIR ce qui est particulièrement lacunaire et insuffisant pour éclairer les membres délibérants.

Enfin, la page des signatures, annexe obligatoire, n’est jamais renseignée à l’exception du compte administratif relatif à l’exercice 2018 qui présente en page de couverture des signatures sans référence aux noms et qualités des signataires, ou aux éventuels pouvoirs.

Le juge administratif a précisé que l’organe délibérant ne peut valablement délibérer sur le compte administratif que s’il dispose du compte de gestion et que celui-ci a été préalablement approuvé (CE 28 juillet 1995, Mme Medes, n° 93407).

Dès lors que le comité de direction n’a formellement délibéré que sur le compte administratif, sans avoir approuvé préalablement le compte de gestion, ces délibérations sont irrégulières.

Le compte administratif, ou financier, relatif à l’exercice 2020 n’a pas été adopté à la date de clôture de l’instruction.

L’office de tourisme de Grand Châtellerault a fourni à l’occasion du 3ème questionnaire des « comptes financiers » pour les exercices 2017 à 2019. Ceux-ci sont toutefois dépourvus de toute mention attestant de leur transmission en préfecture.

6.6.2.4 Une absence totale de comptabilité d’engagement

L’article L. 2342-2 du CGCT, applicable aux communes et étendu aux établissements publics rattachés à celles-ci et à leurs groupements, prévoit la tenue d’une comptabilité d’engagement des dépenses.

L'arrêté du 26 avril 1996 relatif à la comptabilité de l'engagement des dépenses des communes, des départements et des régions et de leurs établissements publics pris pour l'application des articles L. 2342-2, L. 3341-1 et L. 4311-1 du CGCT précise que l'engagement juridique est l'acte par lequel la collectivité ou l'établissement public crée ou constate à son encontre une obligation de laquelle résultera une charge.

La comptabilité des dépenses engagées permet de connaître le montant des crédits ouverts et disponibles, pour engagement et mandatement, ainsi que les dépenses et recettes réalisées. En fin d’exercice, elle vise à déterminer le montant des charges et produits à rattacher qui influent sur le résultat de fonctionnement. Elle permet également de dresser l’état détaillé des restes à réaliser ou l’état des dépenses engagées non mandatées.

Interrogé sur l’éventuelle tenue d’une comptabilité d’engagement, l’office de tourisme n’a fait parvenir aucune réponse à ce sujet, de sorte qu’aucun élément ne permet de savoir si une comptabilité d’engagement est tenue par ses soins.

Aucune des factures envoyées ne mentionne de numéro d’engagement. Une des factures fournies lors du contrôle fait référence à un devis.

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Aucun report d’engagement n’a été constaté dans les comptes administratifs transmis.

La présence de dépenses à régulariser au compte 4728 pour 34 k€ en 2017, 52 k€ en 2018 et 66 k€ en 2019 tend à confirmer que des dépenses sont prises en charge sans engagement et payées avant enregistrement en tant que charge (voir paragraphe 6.6.5 sur les comptes à régulariser).

De plus, aucun élément n’a été apporté pour détailler une éventuelle procédure interne pour sécuriser les commandes et le suivi de l’annualité des charges. La Chambre rappelle à l’office qu’il doit impérativement mettre en place une comptabilité d’engagement, accompagnée d’un dispositif de vérification du service fait, de manière à disposer d’une comptabilité administrative fiable, résidant dans l’enregistrement régulier des engagements de dépenses et recettes, ainsi que des émissions de mandats et de titres.

6.6.3 Un déficit dépassant le seuil autorisé après retraitement des remboursements

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