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De l’exclusion des femmes des espaces publics…

Partie I CADRE THÉORIQUE

Chapitre 1. Une recherche inscrite dans la géographie du genre

1.7. Sur les espaces publics, privés et domestiques

1.7.2. De l’exclusion des femmes des espaces publics…

L’espace public en tant qu’espace commun a été, du Moyen Âge jusqu’à l’avènement du capitalisme au XIXe siècle, un domaine convoité par les autorités publiques. Selon Éliane Viennot (2012), il s’opère, à partir du XIIIe siècle, une dégradation juridique des conditions de travail responsable de la construction de l’infériorité des femmes. Leur accès à la maîtrise est restreint, le veuvage n’entraîne plus, dans certains métiers, la capacité de diriger l’atelier. Les conséquences de ces restrictions sont la perte d’autonomie et de marges de manœuvre. La vie même des femmes est menacée par le développement de la chasse aux sorcières, notable à partir du XVe siècle et qui durera jusqu’aux premières décennies du XVIIe siècle. Derrière cette chasse aux sorcières c’est tout un programme d’anéantissement des savoirs populaires qui se met en place (Federici 2014, p. 208). Tout un système de connaissances féminines est ainsi attaqué en même temps que le domaine de l’instruction se développe exclusivement en direction des hommes. Tout ce processus se traduit par la subordination, l’exploitation et l’invisibilité sociale des femmes. Dans l’imaginaire collectif, le contrat social fait coïncider la société civile avec la sphère publique, indépendante et étrangère à la sphère privée, qui, sans portée politique, n’intéresse pas les théoriciens politiques. Le contrat social, qui rend les hommes libres, trouve

ainsi son pendant dans le contrat sexuel (Pateman, 2010). À l'exception de quelques figures comme Olympe de Gouge, l’opinion générale s’accorde sur une égalité « entre les hommes » et une irrévocable inégalité naturelle « entre les femmes et les hommes » (Fraisse, 2000). Ce postulat va avoir des conséquences non négligeables sur la place et le rôle des femmes et des hommes au sein de la famille.

Avec l’avènement de la révolution industrielle, initiée en Angleterre à la fin du XVIIe siècle et exportée en France aux XVIIIe et XIXe siècle, la considération de la nécessité de préserver la cellule familiale en y assignant la femme, comme moyen de protéger la société des effets provoqués par la naissante industrialisation, est largement acceptée et entérinée par l’ensemble de la société. La famille, au-delà d’être l’instance de reproduction et de production de la société, devient le refuge des relations intimes et affectives, le lieu où la personne moderne trouve abri et réconfort. La famille apparaît de plus en plus comme un « palliatif à la superficialité et à la corruption régnante dans la sphère publique » (Tronto, 2009, p. 91), sorte de refuge face « à cette réalité économique chaotique. » (Sennett 1979, p. 114). C’est la raison pour laquelle elle doit rester en marge de ces élans politiques et démocratiques qui pourraient ébranler l’ordre instauré. « Il faut protéger la famille de la contagion démocratique, le lien sexuel de l’égalité démocratique […] Casser l’analogie entre la famille et la cité obéit donc à une raison politique ; il faut préserver le lien sexuel, la relation entre un homme et une femme, de l’identique et de l’égalitaire. Une femme ne doit pas ressembler à un homme ; une femme ne doit pas être l’égale d’un homme. » (Fraisse, 2000, p. 173). Par cette exclusion et cette assignation des femmes à la condition de nature, se met en marche tout un projet social tourné vers la domesticité. S’ensuit leur mise à l’écart des espaces jusqu’alors utilisés comme lieux de sociabilité et leur enfermement dans les espaces clos des maisons. Ainsi, Michelle Perrot, en situant son analyse au XIXe siècle, montre comment la politique menée en Angleterre autour de la mécanisation des lavoirs et de la construction des marchés couverts a un impact sur les modalités de sociabilité entre les femmes. L’ambition de rationnaliser l’espace et le temps de la ménagère motive leur mécanisation. Cela aura pour conséquence la perte du contrôle et de la gestion des opérations de lavage et d’un espace-temps qu’elles maîtrisaient (Perrot, 1998). Par ailleurs, l’apparition des marchés couverts permet d’encadrer davantage les déplacements et l’activité, injectant une sorte de rationalisation qui influera sur les modalités relationnelles. Cette rationalisation spatiale, impulsée par les autorités publiques, s’articule avec le discours sur l’incompétence féminine dans les affaires publiques et sur leur vocation naturelle à s’occuper du foyer et de la famille, ce qui a comme conséquences leur exclusion des espaces publics et leur renfermement progressif dans le for intérieur du domicile. Les raisons de cette exclusion

n’allaient pas de soi ; pour la justifier, il fallait entériner l’inégalité fondamentale entre les sexes. S’amorce ainsi un processus historique de construction de l’inégalité entre les hommes et les femmes. Tout au long du XIXe siècle, la participation sociale et culturelle des femmes se fait de plus en plus discrète. Comme le dit M. Perrot, leur présence est inexistante au sein des « Clubs, cercles aristocratiques et bourgeois, loges et chambrées, cabinets particuliers loués l’espace d’un soir pour une partie galante, cafés, cabarets et bistrots, ces “maisons du peuple” […] quadrillent la ville. Dans ces espaces intermédiaires d’une sociabilité presque exclusivement masculine, les femmes, suspectes, dès qu’elles sont “publiques”, ont peu de place. » (Perrot dir., 1999, p. 281). Ainsi, progressivement, l’idéologie reléguant la féminité au stade de nature fait système.

1.7.3. …à leur assignation dans les espaces domestiques

Le terme de domesticité – à l’égal d’autres termes voisins tels que domicile – dérive de la racine latine « domus », maison familiale. « Tous les espaces intérieurs de la domus relèvent de la sphère privée. » (Thébert, 1985, p. 339). La construction de la domesticité renvoie au processus historique qui a accompli l’assignation des femmes au travail domestique et à toutes les tâches relevant de cette sphère.

1.7.3.1. Monopole de la filiation, de la procréation

« Il y a de cela bien longtemps, les femmes s’asseyaient à l’avant des pirogues et les hommes à l’arrière. C’étaient les femmes qui chassaient et qui pêchaient. Elles quittaient les villages et y revenaient quand elles le pouvaient ou quand bon leur semblait. Les hommes construisaient les cabanes, préparaient le repas, alimentaient le feu des brasiers contre le froid, s’occupaient des enfants et tannaient les peaux dont on se couvrait. Ainsi s’écoulait la vie en Terre de Feu, au pays des Indiens Onas et des Yahgans, jusqu’au jour où les hommes tuèrent toutes les femmes et passèrent les masques qu’elles avaient inventés pour les terrifier. Seules les petites filles qui venaient de naître échappèrent à l’extermination. Tout le temps qu’elles grandirent, leurs assassins leur dirent et leur répétèrent que servir les hommes était leur destin. Elles le crurent. Comme le crurent leurs filles et les filles de leurs filles. »

Eduardo Galeano, Mémoire du feu. 1. Les Naissances

De manière générale, l’anthropologie structuraliste situe l’origine de l’ensemble des fonctions sociales et économiques dans le système de parenté. Ces fonctions ordonnent la vie des individu·es et leurs différentes positions et pouvoirs des un·es par rapport aux autres. Ainsi, Claude Levi-Strauss instaure l’interdition de l’inceste et l’échange des femmes par les hommes

comme le point fondateur de la société et le reflet de l’existence d’une domination masculine. Pour Maurice Godelier, c’est aussi le système de parenté qui est premier. Selon ses dires, la parenté institue le mariage ; ce dernier ne fait qu’acter les règles de parenté déjà implicites par et dans la communauté (Godelier, 2001). L’homme, en tant que générateur de vie, parvient à transcender la parenté par la filiation, en transmettant son propre nom à l’ensemble des générations qui lui succèdent. Ainsi, selon les règles de la parenté, on ne se marie pas avec n’importe qui, et ce mariage instaure des liens nouveaux entre des personnes qui vont accomplir des fonctions sociales au-delà des limites marquées par la parenté : « des fonctions économiques, quand ils servaient à gérer la propriété et à organiser le travail, fonctions politiques quand ils servaient à représenter et à défendre les intérêts des groupes, fonctions religieuses lorsqu’ils devenaient le cadre des rapports des hommes avec les esprits et les dieux. » (Godelier, 2001, p. 97). Mais ces fonctions sont distribuées de façon asymétrique chez les hommes et les femmes en vertu de la capacité de ces dernières à enfanter. Cette prérogative octroyée par la nature aux femmes expliquerait leur exclusion de l’ensemble des fonctions politiques, économiques et religieuses. « Concernant la production et l’élevage des enfants, on sait que traditionnellement, les deux activités non seulement ont été réservées aux femmes (ce qui allait de soi pour la grossesse et l’accouchement) mais furent d’autant plus valorisées que, ce faisant, on justifiait l’exclusion de celles-ci des responsabilités politiques, économiques ou religieuses. » (Godelier, 2004, p. 529). L’explication de la domination à partir de la capacité à enfanter des femmes est aussi arguée par bon nombre d’auteur·es., comme Simone de Beauvoir dans le Deuxième sexe, ou encore F. Héritier. Cette anthropologue consacre une bonne partie de son œuvre à ce sujet (Héritier, 2012, I & II). Selon ses dires, l’irrévocable injustice naturelle selon laquelle, à la différence des femmes, les hommes ne peuvent procréer des filles et des garçons – c’est-à-dire, du semblable et du différent –, expliquerait cette domination. Ce « butoir de la pensée », pour utiliser ses termes, constitue le principe fondateur de la domination masculine : « ce n’est pas l’envie du pénis qui entérine l’humiliation féminine mais ce scandale que les femmes font leurs filles alors que les hommes ne peuvent faire leurs fils. Cette injustice et ce mystère sont à l’origine de tout le reste, qui est advenu de façon semblable dans les groupes humains depuis l’origine de l’humanité et que nous appelons la domination masculine. » (Héritier, 2012, II, p. 23). De même, Olivia Gazalé explique, dans Le Mythe de la virilité (2017), que, jusqu’à la sédentarisation des populations au Néolithique, la capacité des femmes à procréer et l’ignorance du rôle des hommes dans la procréation donnaient lieu à une fascination et à une conception magique de l’enfantement (Gazalé, 2017). Cette surprenante, et inexplicable, capacité des femmes fait d’elles des ressources convoitées par les hommes : « le

moteur de la hiérarchie était bien là : dans l’appropriation de la fécondité et sa répartition entre les hommes. » (Héritier, 2012, II, p. 20). Le corps devient ainsi, pour F. Héritier, le lieu par excellence où se concentre et s’inscrit la domination. Mais cela instaure également un nouveau paradigme cognitif. Selon elle, la domination entraîne une sorte de « valence différentielle » entre les sexes. Cela se traduit non seulement par le pouvoir d’un sexe sur l’autre, mais aussi par la « valorisation de l’un et (la) dévalorisation de l’autre. » (Héritier, 2012, II, p. 17). Dans Le Mythe de la virilité, O. Gazalé rejoint ces propos ; selon elle, ce changement de paradigme de la pensée se situe dans le passage d’une conception unisexuée à une conception bisexuée de la reproduction. De protagoniste active, la femme devient le réceptacle passif de la puissance masculine. Ainsi, sa place est devaluée et reléguée à un deuxième plan. Désormais, le ventre, pendant si longtemps veneré, n’est plus que le réceptacle voué à la réception du sperme masculin, la source de la vie (Gazalé, 2017). Ce nouveau paradigme déborde les seules frontières qui bornent les rapports femmes/hommes pour apporter une vision du fonctionnement du monde en général. Il agit comme un agent régulateur, et ordonne de manière cohérente les croyances, les symboles, les rites, les récits, et tout ce que comporte l’essence de la vie sociale, faisant ainsi système. P. Bourdieu explique que ce système parvient à se naturaliser comme un allant de soi à partir d’une correspondance s’opérant entre les structures objectives de la société, les principes de cognition et les dispositions subjectives. L’incorporation des « contraintes objectives » telles que les normes, les interdits, les obligations, les prérogatives, etc., se transforment en principes d’une vision du monde qui légitime à son tour l'ordre social. C’est par cette opération, qui consiste à socialiser le biologique et à biologiser le social (Bourdieu, 1998), que se fonde cet ordre social. Tout ce processus participe de l’instauration de ce P. Bourdieu nomme « amor fati » : une logique de « vocation » qui a pour effet « de produire de telles rencontres harmonieuses entre les dispositions et les positions qui font que les victimes de la domination symbolique peuvent accomplir avec bonheur les tâches subalternes ou subordonnées qui sont assignées à leurs vertus de soumission, de gentillesse, de docilité, de dévouement et d’abnégation. » (Bourdieu,1998, p. 64). Bien que ce système peut varier dans ses modalités de manifestation et d’expression, il semble invariable dans son fondement. Cela s’explique par le fait que les dominées, « n’ayant pas d’autres grilles de lecture et de vision que celles issues du système qui les subjugue, y adhèrent comme s’il s’agit de l’ordre naturel des choses. Tel qu’il le dit, le dominé ne peut manquer à “s’accorder au dominant” (donc à la domination) lorsqu’il ne dispose, pour le penser et pour se penser ou, mieux, pour penser sa relation avec lui, que d’instruments qu’il a en commun avec lui. » (Bourdieu, 1997, p. 245).

1.7.3.2. Sur l’assujettissement des femmes par l’institution familiale

Un des premiers auteurs à s’intéresser à l’origine de la domination masculine fut F. Engels. Dans son livre L'origine de la famille, de la propriété privée et de l'État, publié en 188412, il la situe dans l’avènement de la propriété privée. Celle-ci amène, comme corrélat, le mariage conjugal de type patriarcal, mariage où l’homme est le seul souverain. Dans la pensée d’Engels, les rapports conjugaux ressemblent aux rapports d’esclavage. La condition de la femme fut « dégradée » et « asservie », devenant ainsi « simple instrument de reproduction » (Engels, 1952, p. 40). Ces aspects politiques et économiques, inhérents à l’institution du mariage, sont repris plus tard à la lumière du matérialisme féministe (Guillaumin, 1978 ; Wittig, 2001 ; Delphy, 2013). Le travail domestique et l’élevage des enfants sont considérés comme des tâches productives et comme le noyau central de l’oppression des femmes. C’est pourquoi la famille est le lieu de leur exploitation économique et le mariage l’institution qui instaure la gratuité du travail des épouses et l’appropriation de leur force de travail (Delphy, 2013). Ici, comme chez Engels, le rapport des femmes à la production ressemble aux rapports de servage. C. Guillaumin, tout en s'inscrivant dans cette même démarche, considère que l’appropriation s’effectue de manière structurelle, dépassant ainsi le seul domaine du travail. C’est cette appropriation qu’elle nommera « sexage » (Guillaumin, 1978). Quant à M. Witting, elle explique la suprématie masculine, dans La pensée « Straigth », à partir du système hétérosexuel considéré comme un régime politique générateur de la « classe de femmes ». Pour en sortir et abolir l’antagonisme de classe, la seule voie possible est celle de se détourner des relations hétérosexuelles et opter pour la dissidence, ce qui passe par des rapports lesbiens. C’est à ce moment précis que la célèbre phrase « les lesbiennes ne sont pas des femmes » s’érige comme un leitmotiv pour l’abolition de ces dites classes. Dans le sillon du matérialisme féministe, S. Federici historicise le processus social inhérent à l’assujetissement des femmes. La transition du féodalisme au capitalisme s’accompagne d’un processus d’enclosure et de privatisation de la terre qui eut des conséquences sur la division du travail. Celle-ci se caractérise par une progressive assignation des femmes au travail reproductif et par une augmentation de sa dépendance financière à l’égard des hommes. Le salaire masculin devient ainsi un moyen de contrôler et d’accumuler le travail des femmes (Federici, 2014, p. 148). Mais dans ce processus de transition, les crises économiques et la baisse de salaires qui frappent l’Europe aux XIVe et XVe siècles, constituent les aspects les plus importants pour comprendre la politique sexuelle

et la chasse aux sorcières organisées par l’État. De même, la recherche d’un apaisement des tension générées par le capitalisme incipient aux XVIe et XVIIe siècles motive la mise en place d’une politique sexuelle qui prend la forme d’une institutionnalisation par l’État de la prostitution. Peu à peu, se dessine un nouveau modèle de féminité, « la femme et l’épouse idéale, passive, obéissante, économe, taiseuse, travailleuse et chaste. Ce changement s’opéra à partir de la fin du XVIIe siècle, après que les femmes avaient été soumises à deux siècles de terrorisme d’État. » (Federici, 2014, p. 208). Mais, ce nouveau système économique n’a pas que des conséquences sur les conditions de vie des femmes et sur l’embryonnaire classe de prolétaires (dont les femmes font également partie). Le passage du système féodal au système capitaliste trace aussi les contours de l’exploitation de nouvelles sources de richesse, lesquelles s’étendent au -elà du continent européen, via la colonisation et l’esclavage d’autres peuples, notamment en Amérique. De ce fait, l’exploitation des femmes est concomitante à l’exploitation des ressources naturelles et à la domination, voire l’extermination d’autres cultures. C’est sur ce point que le courant matérialiste trouve une connexion avec l’écoféminisme.

En conclusion, l’organisation de l’oppression des femmes dans l’institution familiale trouve son origine dans le monopole par les hommes de la filiation et de la procréation (Godelier, 2004 ; Héritier I ; II, 2012), dans l’avènement de la propriété privée et du mariage conjugal (Engels, 1952), et dans l’appropriation de la force et du fruit du travail des femmes (Guillaumin, 1978 ; Wittig, 2001 ; Delphy, 1995, 2013 ; Federici, 2014). C’est pourquoi, le foyer symbolise, pour les femmes, l’espace de leur dévouement et de leur consécration aux besoins de la famille : « La maison n’est pas le cadre d’un projet qui débouche sur le monde. Derrière les doubles rideaux tirés, les volets baissés, les clôtures, les haies, les barrières, la maison enferme toutes les valeurs de la femme, elle s’oppose à l’extérieur comme le plein au vide, l’endroit à l’envers, la paix au tumulte. » (Dumont & Franken, 1977, p. 45). Comme le dit F. Collin, les femmes dans l’espace privé sont privées d’une privacité : « En ce sens, l’organisation de la famille dans l’espace domestique, indûment appelé privé, répond en effet aux rapports de pouvoir. Un des effets de ces rapports, peu souligné jusqu’alors, est que les femmes y sont privées de privacité. »13 (Collin 1994, p. 235). En revanche, pour les hommes, le foyer est la possibilité d’un espace privé pour soi, d’un lieu pour la réalisation personnelle (Perrot, 1999).

13 Propos écrits en espagnol dans les Actes du congrès. La traduction en français est faite par moi-même. “En

este sentido, la organización de la familia, en el espacio doméstico indebidamente asimilado como privado, responde en efecto a relaciones de poder. Y uno de los efectos de estas relaciones, poco subrayado hasta ahora, es que las mujeres están privadas en él de privacidad.”

Le poids assumé par les femmes au sein du foyer influe sur la structure globale du marché de l’emploi. Ainsi, malgré la progression considérable de leur participation au marché de l’emploi, le temps consacré à la sphère domestique se répercute sur le moindre temps qu’elles consacrent au travail rémunéré. De ce fait, elles sont plus nombreuses à occuper des emplois à temps partiel et à avoir un niveau salarial plus faible que les hommes. Étant donné que les rôles et les pratiques forgent des identités et en sont le moyen d’expression, les femmes vont être plus enclines que les hommes à développer une identité en accord avec l’intériorité des espaces domestiques. S’y écarter, suppose une incursion dans des espaces qui ne sont pas ressentis comme leur étant destinés.

1.7.3.3. ….et sur l’hexis corporelle de la féminité

Le corps entre dans le domaine de la géographie dans les années 90 avec des auteur·es comme Doreen Massey, Heidi J. Nast et Steve Pile. Il entre comme matière mais aussi comme discours. La géographie envisage le corps « en dépassant la pensée rationaliste occidentale qui fonctionne sur des oppositions binaires telles que corps/esprit, homme/femme, intérieur/extérieur. Leur approche est résolument dynamique, corps et espace sont analysés