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De par les propriétés intrinsèques des colles et du lipiodol, leur utilisation doit respecter certaines recommandations. Nous citons dans ce chapitre toutes les recommandations retrouvées pour l’embolisation avec des agents liquides collants que ce soit dans la littérature scientifique ou dans les instructions d’utilisation des fabricants.

i. Température d’utilisation des colles et du lipiodol Tableau 6 : Propriétés physico-chimiques des colles comparées au lipiodol et au sang.

La plupart des colles sont conservées à 4°C, le lipiodol est en revanche conservé à température ambiante. Nous avons vu plus haut (tableau 6) que les viscosités variaient en fonction de la température. Aucune recommandation concernant la température optimale d’utilisation intégrant l’impact sur la polymérisation n’existe. Une étude in vitro a toutefois été réalisée par Bracard et al. (1998) pour démontrer l’impact de la température sur la viscosité du mélange lipiodol et colle (Bracard et al. 1998). Les auteurs rapportent qu’en chauffant le mélange (histoacryl et lipiodol) à près de 40°C, la viscosité de celui-ci diminuait significativement et que son injection était plus aisée. Le tableau 7 est issu de cet article. Pour le Purefill®, le fabricant stipule que la fiole doit être sortie de son lieu de stockage quelques minutes avant son utilisation.

ii. Préparation du mélange colle – lipiodol

Les mélanges sont réalisés de façon empirique, selon les habitudes des opérateurs. On ne sait pas s’il existe une méthode de mélange optimale. En clinique, on observe des pratiques très variées concernant la méthode de mélange de la colle et du lipiodol. Certains utilisent un robinet 3 voies, d’autres utilisent la méthode de la bulle avec retournement de la seringue, d’autres encore préfèrent réaliser le mélange dans une cupule ou encore faire des aspirations- refoulements. Le mélange colle-lipiodol est effectué selon un ratio, qui dépendra de la fluidité du mélange souhaité. Le ratio le plus souvent utilisé est 1/1 soit 50 % de colle et 50 % de

Tableau 7 : Résultats de l'étude de Bracard et al. sur la viscosité du nBCA en fonction de la température et de la concentration de colle dans un élange colle+lipiodol (Bracard et al. 1998).

lipiodol. On sépare les dilutions basses (1/1 ; 1/3) des dilutions hautes (1/4, 1/9). Le premier chiffre représente la proportion de colle, le deuxième celle du lipiodol. Cependant il est difficile d’apprécier la dilution nécessaire en fonction du territoire anatomique, du type de vaisseau, de la vitesse de circulation du vaisseau et du type de lésion à emboliser. De nombreux opérateurs ont des « habitudes » de travail non fondées sur des données scientifiques.

Il est admis qu’en ajoutant plus de lipiodol, la polymérisation est retardée. Takasawa et al. (2012) ont publié une analyse in-vitro et in-vivo (modèle canin) sur le mélange n-BCA (histoacryl) et lipiodol (Takasawa et al. 2012). Les résultats de l’étude in vitro ont permis de montrer une augmentation de la viscosité du mélange (mPa.s) avec l’ajout du lipidol (figure 16).

Les auteurs avaient également analysé indirectement la capacité de diffusion du mélange en mesurant l’aire formée par le mélange au contact d’un volume sanguin défini. Ils concluaient à une diffusion augmentée (augmentation de l’aire du polymère) qui suivait une exponentielle avec l’ajout du lipiodol (figure 17) (Takasawa et al. 2012).

Figure 16 : Représentation de la viscosité du mélange nBCA-lipiodol, en fonction du % de lipiodol (Takasawa et al. 2012).

Figure 17 : Capacité de diffusion du mélange nBCA-lipiodol représentée indirectement par l'aire formée par le mélange à la surface d'une boîte de pétri en fonction du volume de lipidol (Takasawa et al. 2012).

Ils ont également montré une augmentation des temps de polymérisation avec l’ajout du lipiodol (figure 18) (Takasawa et al. 2012). Les temps étaient similaires entre les ratios 1 :1 et 1 :2, entre les ratios 1 :3 et 1 :5 et augmentaient exponentiellement pour les ratios 1 :6 et 1 :9.

Selon le fabricant, Le Purefill®, doit être mélangé avec une huile iodée dans les proportions 1 pour 2 et il est recommandé de réaliser ce mélange dans un bécher en verre stérile.

iii. Interactions avec les ions OH-

En raison du risque d’interaction des ions OH- contenus dans le sérum physiologique

et/ou les produits de contraste ioniques avec la colle (risque de polymérisation précoce), ces produits sont proscrits lors de l’utilisation de colles. D’autre part, il ne faudra aucun contact de la colle avec le sang avant que celle-ci n’atteigne la cible à emboliser. Le rinçage des cathéters, microcathéters et de leur embase est nécessaire. Moore et al. (2006) ont publié une note technique sur l’utilisation de glucosé à 5 %, injecté simultanément avec le mélange colle-lipiodol, pour diminuer les réactions ioniques et favoriser la progression du mélange (Moore, Murphy, and Gailloud 2006). Depuis, il est recommandé d’utiliser du sérum glucosé à 5 % lors des embolisations à la colle, pour le rinçage des cathéters et microcathéters. Le fabricant du Purefill® recommande également le rinçage au G5%.

iv. Compatibilité avec les seringues et les microcathéters

L’utilisation de cyanoacrylate nécessite l’utilisation de seringues compatibles (polyéthylène, PE ou polypropylène, PP). Les seringues en polycarbonate (PC) sont à proscrire. Le fabricant du Glubran2® souligne qu’outre le polycarbonate, la colle ne doit pas être utilisée avec des dispositifs ou instruments contenant du silicone. Il est recommandé de toujours utiliser des microcathéters pour injecter le mélange colle-lipiodol.

Tous ces microcathéters sont compatibles avec les colles, contrairement au DMSO (solvant nécessaire pour l’utilisation d’agents liquides non adhésifs).

v. Injection du mélange et rinçage du microcathéter

Un rinçage du cathéter par une première injection de lipiodol pourrait permettre de lubrifier celui-ci. La colonne de mélange peut être injectée lors d’une seule injection ou selon la technique du sandwich. Elle peut être faite en flux bloqué ou en flux libre. Le choix se fait en fonction des habitudes des opérateurs. La vitesse d’injection au travers du cathéter ne suit actuellement pas de recommandation. La colonne de mélange colle-Lipiodol pourrait être poussée par du lipiodol seul. Une fois la colonne de mélange injectée, le micro-cathéter est rincé puis rapidement retiré sous scopie afin d’éviter le risque d’encollage dans le vaisseau. Certains préconisent l’utilisation de paraffine ou d’huile siliconée pour éviter cette complication (A Laurent 2006). La perméabilité du microcathéter doit être vérifiée sur la table d’angiographie avant une nouvelle utilisation. Il est fréquent que le microcathéter soit occlus par un « cast » de colle empêchant sa réutilisation. Il convient également de vérifier qu’il n’existe pas de résidu de colle polymérisée à l’extrémité du cathéter porteur. Ce dernier ne pourra pas être réutilisé si c’est le cas. Les résidus de colle peuvent être nettoyés à l’aide de solvant tel que l’acétone, mais cette technique n’est pas utilisée pour les cathéters. Afin d’augmenter la visibilité du mélange, certains préconisent de rajouter de la poudre de tantale. La baisse du pH du mélange retarderait la polymérisation (Spiegel et al. 1986)

Pour le fabricant du Glubran2®, il est recommandé de ne pas utiliser plus d’1 ml par injection pour éviter une embolisation non ciblée.