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CORRUPTION INTERNATIONALE

SECTION 2. LE DÉVELOPPEMENT DE MÉCANISMES VISANT À FACILITER L’IDENTIFICATION DES AVOIRS ILLICITES

280. – Plan de section. – Traditionnellement, les investigations judiciaires ont pour objectif

la manifestation de la vérité. Or la lutte contre la criminalité organisée et la grande délinquance économique et financière a fait de l’enquête aux fins d’identification des avoirs illicites – et notamment des produits et instruments de la corruption – « une priorité gouvernementale forte »923. Si le législateur ne prévoit pas explicitement cette forme d’enquête, il semble néanmoins que la loi n°2010-768 du 9 juillet 2010 lui ait conféré un véritable « fondement légal »924. En effet, ce texte impose « de fait aux OPJ une identification précise des biens devant être saisis permettant ainsi de faciliter leur confiscation ultérieure »925. Dans le domaine de la lutte contre la corruption transnationale, l’identification des avoirs illicites nécessite la plupart du temps que les services de police judiciaire coopèrent avec leurs homologues étrangers. Cette coopération s’effectue généralement par le biais des organes classiques de coopération policière, mais également via des réseaux de coopération spécialisés dans le recouvrement des avoirs illicites. Depuis la loi n°2013- 1117 du 6 décembre 2013 – qui transpose la décision 2007/845/JAI du 6 décembre 2007 – certains services de police judiciaire, dont la plate-forme d’identification des avoirs criminels (PIAC), peuvent échanger des informations avec les services compétents des autres Etats membres de l’Union européenne aux fins de dépistage et d’identification des avoirs illicites. Au niveau judiciaire, l’identification de biens illégaux à l’étranger implique également de recourir à la coopération internationale, et notamment à l’entraide judiciaire926. Celle-ci peut être mise en œuvre par les juridictions françaises directement ou via les organes ou réseaux de coopération judiciaires supranationaux. La présente section se propose d’analyser – à la lumière des dispositions pertinentes de la CNUCC – l’enquête patrimoniale en tant qu’outil d’identification des avoirs illicites (§1), puis la coopération internationale aux fins d’identification des avoirs illicites (§2).

923 Circ. du 15 mai 2007 (NOR INT/C/07/00065/C), p. 2.

924 SOUVIRA J-M, MATHYS P. & DEFOIS S., « La plate-forme d'identification des avoirs criminels (PIAC),

outil à disposition des enquêteurs et des magistrats », AJ Pénal, mars 2012, p. 134.

925 PATTIN M., GOJKOVIC-LETTE J., LEBEAU J-P., « Le cadre juridique du dispositif de captation des avoirs

criminels et sa mise en œuvre par la gendarmerie nationale », AJ Pénal 2012, p. 130.

926 La loi n°99-515 du 23 juin 1999 a introduit un chapitre dans le CPP relatif à l’entraide judiciaire internationale,

modifié par la loi n°2004-204 du 9 mars 2004. Cette dernière loi a également créé la possibilité pour un procureur de la République ou un juge d’instruction de créer une équipe commune d’enquête (ECE) avec un ou plusieurs Etats, en application de la Convention relative à l’entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l’UE du 29 mai 2000.

137 §1. L’ENQUÊTE PATRIMONIALE, OUTIL D’IDENTIFICATION DES AVOIRS ILLICITES

A. Les dispositions de la CNUCC

281. – Identification et localisation. – La CNUCC exige des Etats parties qu’ils prennent

les mesures nécessaires pour permettre l’identification et la localisation du produit d’infractions relevant de la corruption – ou de biens dont la valeur correspond à celle de ce produit – ainsi que des biens, matériels ou autres instruments utilisés ou destinés à être utilisés pour ces mêmes infractions aux fins de confiscation éventuelle927. Elle fait ainsi obligation aux Etats parties de « prendre des dispositions d’ordre législatif pour garantir l’existence de pouvoirs adéquats étayant les mesures de recherche et d’enquête nécessaires pour localiser les avoirs, les identifier et faire apparaître leurs liens avec les infractions commises »928.

282. – Obtention de documents. – Afin d’identifier et localiser les produits et instruments

de la corruption, les Etats parties ont l’obligation d’habiliter leurs tribunaux ou leurs autres autorités compétentes à ordonner la production ou la saisie de documents bancaires, financiers ou commerciaux929. Par documents bancaires et financiers, les rédacteurs de la convention ont voulu désigner notamment les documents d’institutions offrant des services financiers930. Par document commerciaux, ils ont voulu viser ceux relatifs à des transactions immobilières ou établis par des sociétés de navigation, des transitaires ou des assureurs931. Ces documents doivent pouvoir être

produits par décision contraignante, par perquisition, ou par d’autres moyens afin que les services de répression soient à même d’exécuter les éventuelles mesures de saisie et confiscation932

.

283. – Techniques d’enquête spéciales. – Enfin, la CNUCC exige de chaque Etat partie qu’il

prenne les mesures nécessaires afin que ses autorités compétentes puissent « recourir de façon appropriée, sur son territoire, à des livraisons surveillées et, lorsqu’il le juge opportun, à d’autres techniques d’enquête spéciales telles que la surveillance électronique – ou d’autres formes de surveillance – les opérations d’infiltration, et pour que les preuves recueillies au moyen de ces techniques soient admissibles devant ses tribunaux »933. Si la convention préconise ces techniques

afin de combattre efficacement la corruption, celles-ci peuvent également se révéler utiles pour identifier ou localiser les produits ou instruments d’infractions.

927 CNUCC, art. 31 (2)

928 ONUDC, Guide législatif pour l’application de la Convention des Nations Unies contre la corruption, 2007,

p. 144 (point 419)

929 CNUCC, art. 31 (7). Un Etat partie ne peut invoquer le secret bancaire pour refuser de donner effet à ces

dispositions.

930 Ibid.

931 ONUDC, Ibid. p. 145 (point 421) 932 Ibid.

138 B. L’enquête patrimoniale en droit français

I. Méthodologie

284. – Notion d’enquête patrimoniale. – En France, l’identification des avoirs illicites, et en

particulier des produits et instruments de la corruption, est réalisée par les services de police judiciaire au moyen d’une enquête patrimoniale. Cette forme d’enquête n’est pas définie par le législateur. Le GAFI définit l’enquête financière, laquelle inclut l’enquête patrimoniale. Selon lui, une enquête financière désigne « un examen des affaires financières liées à une activité criminelle, visant à identifier l’ampleur de réseaux criminels et/ou le degré de criminalité, identifier et dépister le produit du crime […] et tout autre bien soumis ou susceptible d’être soumis à confiscation et établir des preuves susceptibles d’être produites dans des procédures pénales »934

. Il ressort de cette définition que l’enquête patrimoniale a principalement pour but « de détecter, d'identifier et de saisir les biens de l'auteur d'une infraction afin de permettre à la juridiction de jugement d'appliquer les peines complémentaires de confiscation »935. Etant donné l’objectif final de confiscation, il est

nécessaire, au début de toute enquête patrimoniale, de déterminer ce qui pourra être confisqué936.

285. – Biens des personnes visées. – Selon la plate-forme d’identification des avoirs

criminels (PIAC), l’enquête patrimoniale a pour finalité « de dresser pour chaque personne poursuivie l’état de son patrimoine, la nature de ses droits sur les biens et la réalité de la propriété »937. Elle consiste donc – en premier lieu – à déterminer les personnes physiques et morales visées par l’enquête et à établir le patrimoine de ces personnes, et notamment de recenser les biens dont ils sont propriétaires. En effet, le droit français permet de saisir – et en cas de condamnation, de confisquer – l’instrument de l’infraction dont la personne mise en cause, ou le condamné, est propriétaire. Il permet également – sous certaines conditions – de confisquer les biens appartenant au condamné dès lors que celui-ci ne peut en justifier l’origine, voir même tous ses biens.

286. – Biens de tiers. – Très souvent, les investigations patrimoniales doivent être étendues

au-delà des personnes mises en causes, principalement au cercle familial, aux relations ou aux tiers938 tels que les associés, les proches collaborateurs, les structures juridiques ou encore les intermédiaires – ou hommes de paille – qui protègent le mis en cause « en détenant un avoir ou en

934 GAFI, Normes internationales sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme

et de la prolifération. Les recommandations du GAFI, février 2012, p. 105 (point 2) (Note interprétative de la recommandation 30).

935 SOUVIRA J-M, MATHYS P. & DEFOIS S., Ibid. 936 Ibid.

937 Ibid. 938 Ibid.

139 ouvrant ou gérant un compte, souvent contre une petite rémunération »939. En effet, l’expérience montre – notamment en matière de corruption transnationale – que les personnes qui commettent des infractions relevant de la grande délinquance économique et financière ne possèdent pas d’avoirs ou de comptes bancaires en leur nom propre940

, sauf lorsque ceux-ci sont parfaitement licites. Les biens résultant des infractions commises par ces personnes sont souvent « détenus par d’autres individus ou des sociétés de manière à dissimuler la personne physique qui contrôle, in

fine, les avoirs ou comptes bancaires »941 mais aussi afin de dissimuler la traçabilité des fonds (paper trail)942. Ces techniques relevant de l’ingénierie juridique permettent à ces personnes de soustraire artificiellement des biens de leur patrimoine, le procédé le plus communément utilisé consistant pour le délinquant « à faire acquérir des biens immeubles par une ou plusieurs sociétés civiles immobilières (SCI) constituées par des prête-noms »943. Le droit français permet de saisir – et en cas de condamnation, de confisquer – l’instrument de l’infraction ainsi que d’autres biens appartenant à des personnes autres que le condamné. Il permet en outre de saisir et confisquer entre toutes mains les biens qui sont l’objet ou le produit direct ou indirect de l’infraction.

287. – Date d’acquisition et mode de financement des biens. – La date d’acquisition et le

mode de financement de ces biens doivent également être déterminés par l’enquête patrimoniale. Selon la PIAC, ces renseignements pourront « démontrer que le bien acquis pendant la période des faits est probablement le produit de l’infraction »944. Cette hypothèse pourra « être étayée en rapportant notamment que la personne ne peut pas justifier de revenus légaux suffisants pour procéder à l’achat d’un tel bien »945

.

288. – Quantification du produit de l’infraction. – Enfin, la valeur des biens identifiés devra

être estimée. Selon la PIAC, l’enquête patrimoniale doit en effet « permettre de renseigner le plus précisément possible les magistrats sur le montant du produit du crime et du préjudice éventuel »946. Cette évaluation « est capitale pour que puisse être respecté le principe de proportionnalité de la peine »947. En effet, les tribunaux seront plus à même de prononcer des sanctions patrimoniales

proportionnées948.

939 BRUN J-P., GRAY L., SCOTT C., STEPHENSON K. M., Manuel de recouvrement des biens mal acquis. Un

guide pour les praticiens, p. 53 (point 3.1)

940 Ibid. 941 Ibid.

942 PAVLIDIS G., Confiscation internationale : instruments internationaux, droit de l’Union européenne, droit

suisse, Schulthess, 2012, p. 72.

943 CUTAJAR C., « Saisie pénale et libre disposition », D. 2012, p. 1652. 944 SOUVIRA J-M, MATHYS P. & DEFOIS S., Ibid.

945 Ibid. 946 Ibid. 947 Ibid. 948 Ibid.

140 II. L’acquisition de données

a) Les informations en accès libre

289. – Les informations en accès libre. – L’enquête patrimoniale consiste principalement à

recueillir des données, notamment financières, provenant de diverses sources. Les investigations peuvent initier par la recherche d’informations open source en provenance des médias ou d’internet949

, comme par exemple les arrêts des tribunaux français disponibles sur le site Légifrance, ou par une recherche dans une bibliothèque de sources publiques préalablement constituée950.

290. – Les fichiers à la disposition des enquêteurs. – En outre, les officiers de police

judiciaire (OPJ) en charge de l’enquête peuvent consulter les nombreux fichiers mis à la disposition des services de police ou de gendarmerie951. Ils ont notamment un accès direct au fichier national des immatriculations952 – lequel contient des informations provenant des renseignements recueillis par les préfectures lors de l'établissement des certificats d'immatriculation – ainsi qu’au fichier des véhicules volés953 et au registre d’immatriculation des aéronefs. L’enquêteur peut également

consulter les sources de droit public dont il a compétence pour accéder954. b) Les réquisitions judiciaires

1. Dispositions législatives

291. – Notion de réquisition. – L’acte principal de l’enquête patrimoniale demeure la

réquisition judiciaire955. Il s’agit d’un « acte par lequel un magistrat ou un officier de police judiciaire impose à une personne de fournir une prestation qu’il n’est pas en mesure d’effectuer lui- même faute des moyens, du pouvoir ou des compétences techniques nécessaires »956. Dans le cadre d’une enquête patrimoniale, un tel acte permet « l’obtention d’informations et de documents précis permettant d’identifier un élément de patrimoine »957. En particulier, il permet de détecter des

949 PAVLIDIS G., Ibid. p. 75.

950 PELISSER E. (Ss. dir. CUTAJAR C.), Vademecum de l’investigation financière et de l’analyse financière

criminelles, CEIFAC – GRASCO – Université de Strasbourg, 2015, p. 25.

951 Il s’agit notamment des fichiers de police judiciaire encadrés par le code de procédure pénale et alimentés par

les OPJ eux-mêmes : les fichiers d’antécédents judiciaires, STIC pour la police et JUDEX pour la gendarmerie, (CPP, art. 230-6 et s.), les fichiers d’analyse sérielle (CPP, art. 230-12 et s.) et le fichier des personnes recherchées (CPP, art. 230-19 et s.)

952 Le fichier national des immatriculations est placé sous l’autorité et le contrôle du ministère de l’Intérieur. 953 Arrêté du 20 janvier 1994, NOR: INTD9400076A, art. 2.

954 PELISSER E., Ibid. P. 26.

955 Les réquisitions ont été introduites par les lois n°2003-939 du 18 mars 2003 et n° 2004-204 du 9 mars 2004

mais avaient cours bien avant.

956 DESPORTES F., LAZERGUES-COUSQUER L, Ibid. p. 1561 (point 2409). 957 CUTAJAR C., Ibid.

141 comptes bancaires, des biens immeubles, des intérêts dans des sociétés et connaître des revenus déclarés958.

292. – Réquisition aux fins de remise de documents. – La principale forme de réquisition est

celle qui vise à remettre au magistrat ou à l’enquêteur des documents intéressant les investigations. Ainsi, le procureur de la République, le juge d'instruction ou l’OPJ peuvent – par tout moyen – requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute administration publique susceptible de détenir des documents intéressant l’enquête ou l'instruction de lui remettre ces documents, sans que puisse lui être opposée l'obligation au secret professionnel959. Lorsqu’elle s’adresse à un avocat, un huissier, un notaire, un médecin ou un journaliste, la remise d’informations ne peut intervenir qu'avec l’accord de ces derniers.

293. – Réquisition aux fins de mise à disposition d’informations contenues dans des

systèmes informatiques. – Une autre forme de réquisition est celle qui vise à transmettre aux

magistrats et enquêteurs des informations contenues dans des systèmes informatiques960. L’OPJ961 peut en effet exiger des organismes publics ou des personnes morales de droit privé – à l'exception des associations et autres organismes à but non lucratif et à caractère religieux, philosophique politique ou syndical et des organismes de presse écrite ou audiovisuelle962 – qu’ils mettent à sa disposition les informations contenues dans les systèmes informatiques ou de traitements de données nominatives qu'ils administrent, à l'exception de celles protégées par un secret prévu par la loi 963.

294. – Réquisition aux fins de préservation de documents. – Enfin, la dernière forme de

réquisition est celle qui permet à un OPJ – sur autorisation du juge des libertés et de la détention saisi à cette fin par le procureur de la République ou avec l'autorisation expresse du juge d'instruction – de requérir des opérateurs de télécommunications, et notamment ceux dont l’activité est d’offrir un accès à des services de communication au public en ligne, de prendre, sans délai, toutes mesures propres à assurer la préservation, pour une durée ne pouvant excéder un an, du

958 SOUVIRA J-M, MATHYS P. & DEFOIS S., Ibid.

959 CPP, art. 60-1, 77-1-1 et 99-3. Le fait de s'abstenir de répondre dans les meilleurs délais à une réquisition est

puni d'une amende de 3750 euros.

960 Ils disposent également de la possibilité de formuler des réquisitions aux fins de prestation matérielle. Par

exemple, la réquisition à personne qualifiée, comme par exemple à un enquêteur « N-Tech » ou « ICC » qui va « procéder à l'analyse de tous les supports informatiques saisis », peut toutefois être intéressante car elle va permettre de révéler tous les fichiers effacés (LEMOINE V., « Les aspects policiers de la lutte contre la corruption », Gazette du Palais, 21 avril 2012, n° 11, p. 23).

961 En enquête préliminaire, l’OPJ agit sur autorisation du procureur de la République. En instruction préparatoire,

il est commis par le juge d’instruction.

962 Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, art. 8 II 3° al. 2 et art. 67 2°. 963 CPP, art. 60-2 al. 1, 77-1-2 al. 1 et 99-4 al. 1.

142 contenu des informations consultées par les personnes utilisatrices des services fournis par les opérateurs964.

2. Principales personnes faisant l’objet de réquisitions dans le cadre de l’enquête patrimoniale

i. L’administration fiscale

295. – Le fichier national des comptes bancaires et assimilés (FICOBA). – Dans le cadre

d’une enquête patrimoniale, la réquisition à l’administration fiscale est quasi-systématique965

. En particulier, « il n'est pas une enquête, qu'il s'agisse d'investiguer sur des infractions profitables, de rechercher de possibles circuits de blanchiment ou de déterminer la situation patrimoniale d'un suspect, qui ne débute par une interrogation du FICOBA »966. Le Fichier national des comptes bancaires et assimilés (FICOBA) est un fichier informatique qui recense tous les comptes bancaires ouverts sur le territoire français. Mis en place en 1980967, il enregistre plus de 80 millions de personnes possédant un compte bancaire ou assimilé en France. Il constitue « un instrument indispensable à tous les services répressifs pour les enquêtes les plus variées, et en particulier pour celles portant sur l'identification des avoirs criminels »968. Par conséquent, il est l'un des fichiers

que les services d'enquête en matière financière « utilisent le plus et celui qu'ils considèrent comme le plus utile à leur travail »969. Le FICOBA est alimenté par les personnes physiques ou morales qui

gèrent ces comptes, à savoir « les administrations publiques, les établissements ou organismes soumis au contrôle de l'autorité administrative et toutes personnes qui reçoivent habituellement en dépôt des valeurs mobilières, titres ou espèces »970. Sont donc notamment concernés la Banque de France, la Caisse des dépôts et consignations, les comptables publics, tous les établissements de crédit implantés sur le territoire français et les filiales ou succursales des établissements étrangers971. Ces personnes sont soumises à une obligation de déclaration d'ouverture, de clôture ou de modification des comptes972. Elles doivent déclarer les comptes de toute nature – comptes bancaires, postaux, d'épargne ou encore les portefeuilles boursiers973 – ouverts au nom de leurs

964 Ibid. art. 60-2 al. 2, 77-1-2 al. 2 et 99-4 al. 2.

965 La réquisition auprès d’autres administrations est également possible, par exemple au ministère de l’intérieur

qui gère les registres nationaux français de véhicules à moteur ou la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) qui gère le registre français des aéronefs.

966 ROBERT H., « Le FICOBA. Un instrument d'identification indispensable », in CUTAJAR C. (Ss. dir.),

Garantir que le crime ne paie pas. Stratégie pour enrayer les marchés criminels, PU Strasbourg, 2011, p. 153.

967 Arrêté du 19 mai 1980 aujourd'hui remplacé par l'arrêté du 14 juin 1982. 968 ROBERT H., Ibid.

969 GMD « CRIM » (Groupe multidisciplinaire « Criminalité organisée »), Ibid., p. 39. 970 CGI, art. 1649 A.

971 ROBERT H., Ibid.

972 Arrêté du 14 juin 1982, art. 1.

143 clients « quels que soient la nationalité ou le domicile du titulaire (résident ou non résident), la nature ou la dénomination du compte »974.

296. – L’exemple des réquisitions aux fins d’identification immobilière. – Outre le

FICOBA, d’autres fichiers de l’administration fiscale peuvent faire l’objet de réquisitions dans le cadre d’une enquête patrimoniale, notamment en matière d’identification immobilière. A cette fin, la PIAC recommande la réquisition à la Base nationale des données patrimoniales (BNDP)975. Créé en 2005976, ce fichier contient « l’essentiel des informations patrimoniales sur les biens détenus par les personnes connues par l’administration fiscale au travers de leurs différentes déclarations, principalement les extraits d’actes de mutation à titre onéreux (vente d’immeubles et de terrains) ou à titre gratuit (donation, succession) et l’identification et les adresses des personnes et des biens »977. En outre, il contient des informations relatives à la possession par une personne physique ou morale de sociétés enregistrées dans un État étranger978. La réquisition à la BNDP permet ainsi de détecter des biens immobiliers dont sont propriétaires des personnes physiques ou morales, tout comme la réquisition au fichier ADONIS, crée en 2003, qui donne accès au dossier fiscal des particuliers, et notamment à la taxe foncière979. Par ailleurs, la réquisition au Bureau de la conservation des hypothèques du bien immobilier – ou au livre foncier pour les bien situés en Alsace-Moselle – permet d’acquérir la copie de l’acte notarié et le relevé des formalités publiées au fichier foncier (extrait FIDJI, fiche immeuble ou fiche propriétaire)980. Ce fichier, créé en 1955, permet ainsi « l’identification du ou des propriétaires du bien, la nature du droit de propriété (pleine propriété, usufruit, indivision…) ainsi que l’existence de tiers pouvant avoir des droits sur le bien »981. En outre, la réquisition au service d’imposition des entreprises permet d’obtenir des

documents relatifs à des sociétés civiles immobilières (SCI) ayant acquis des biens immobiliers982. Enfin, la réquisition au service France Domaine « pourra fournir une estimation de la valeur vénale