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Une fois la chambre ovarienne de stade 1 formée, cette dernière quitte le germarium et se retrouve dans une région plus postérieure de l’ovariole appelée le vitellarium pour poursuivre son développement. L’ovogenèse, depuis la formation de la chambre ovarienne de stade 1 dans la germarium, jusqu’à la formation de l’œuf, dure environ 5 jours et a été caractérisée en 14 stades selon des critères morphologiques tels que la taille de l’ovocyte ou encore le statut de migration des cellule folliculaires autour des cellules nourricières et de l’ovocyte (Jia et al., 2016; King, 1970) (Figure 12). Au cours de cette ovogenèse, l’ovocyte devra acquérir les nombreuses ressources nécessaires au développement du futur embryon telles que des réserves énergétiques mais également des ARNm qui devront avoir une localisation polarisée pour définir les axes antéro/postérieur et dorso/ventral du futur embryon (Lasko, 2012). Toutes ces ressources lui seront fournies par les cellules nourricières mais également par les cellules folliculaires. Les cellules folliculaires vont également s’organiser en différents groupes de cellules qui seront primordiaux pour l’organisation de l’ovariole et former les différentes structures de l’œuf (Xiaodong et al., 2008). Ainsi, à la sortie du germarium, les cellules folliculaires se sont différenciées en trois sous populations : les cellules folliculaires polaires composées de 3 à 5 cellules et localisées aux extrémités antérieures et postérieures de la chambre ; les cellules folliculaires composant le pédoncule, qui relient entre elles les chambres ovariennes ; et les cellules folliculaires principales qui entourent l’ovocyte et les cellules nourricières.

Entre le stade 2 et le stade 6, l’ovocyte et les cellules nourricières continuent de croitre à la même vitesse. Cependant, l’ovocyte reste bloqué en prophase I de méiose au stade pachytène et est génétiquement inactif (Lake and Hawley, 2012). Ce sont donc les cellules nourricières, alors polyploïdes qui produisent un grand nombre d’ARNm et de protéines nécessaires au développement de l’ovocyte. Ces ressources lui sont délivrées au travers des canaux annulaires. Enfin, les cellules folliculaires continuent de se diviser pour pouvoir continuer d’entourer l’ovocyte et les cellules nourricières en croissance, jusqu’au stade 6, stade à partir duquel elles arrêtent de se diviser et deviennent elles aussi polyploïdes.

14 Entre les stades 7 et 10A, la croissance de l’ovocyte devient beaucoup plus importante que celle des nourricières. En effet, durant ces stades, appelés stades vitellogeniques, l’ovocyte accumule une grande quantité de réserves, le vitellus, provenant du corps gras et des cellules folliculaires, qui sera utilisé par le futur embryon. Au stade 10, ce dernier occupe alors la moitié de la chambre ovarienne. De plus, à ces stades, grâce à des déterminants cytoplasmiques sous forme d’ARNm qui se localisent asymétriquement, l’ovocyte acquiert une polarité antéro/dorsale et dorso/ventrale primordiale pour le développement du futur embryon (Voir chapitre I.3.C.b). Enfin, à partir du stade 9, les cellules folliculaires, qui formaient un épithélium cubique simple entourant à la fois les cellules nourricières et l’ovocyte vont subir différents changements morphogénétiques (Xiaodong et al., 2008). Les cellules polaires à l’antérieur de la chambre vont recruter des cellules folliculaires adjacentes qui vont devenir une population de cellules appelées cellules de bordure. Ces cellules vont alors quitter l’épithélium, entourer les cellules polaires et migrer, au travers des cellules nourricières, pour atteindre la membrane antérieure de l’ovocyte. En parallèle, à l’antérieur de la chambre, une partie des autres cellules folliculaires principales vont migrer vers le postérieur pour entourer l’ovocyte. Pour cela, elles vont se réorganiser en deux populations. Les cellules folliculaires à l’antérieure vont se réorganiser en cellules squameuses pour s’étendre et s’aplatir le long des cellules nourricières. Les autres cellules folliculaires vont se réorganiser en épithélium columnaire ou prismatique pour s’étirer selon l’axe apico-basal. Au stade 10, environ cinquante cellules squameuses entourent toutes les cellules nourricières alors que les cellules columnaires n’entourent plus que l’ovocyte.

Depuis le stade 10B, jusqu’au stade 12, la taille de l’ovocyte augmente de manière encore plus importante. Les cellules nourricières déversent massivement leur contenu cytoplasmique dans l’ovocyte. En fin de stade 12, ce dernier représente alors quasiment la totalité de la chambre ovarienne. Les cellules folliculaires columnaires quant à elles, migrent au stade 10B, entre l’ovocyte et les cellules nourricières. Ces dernières sont appelées cellules centripètes et formeront l’operculum du chorion. De plus, au niveau de l’axe antéro/dorsal, une partie de ces cellules se réorganise pour former un épithélium tubulaire en 3 dimensions qui produira les appendices respiratoires dorsaux de l’œuf.

Entre les stades 13 et 14, les cellules nourricières ainsi que les cellules folliculaires qui ont finies de secréter la membrane vitelline et le chorion, constituant de la coquille de l’œuf, entrent en apoptose et dégénèrent. Dans l’ovocyte, la méiose reprend, puis se bloque à nouveau en métaphase I. La méiose reprendra ensuite une fois l’œuf expulsé dans l’oviducte pour être fécondé.

Figure 13 : L’œuf de Drosophile

(A) Vue latérale de l’œuf de Drosophile et de ses différentes structures. L’aéropyle au postérieur et les appendices dorsaux en antérieur sont des structures respiratoires. Le Micropyle, en antérieur permet l’entrée du spermatozoïde dans l’œuf. (B) Vue dorsale de l’œuf de Drosophile.

Figure 14 : Différents types de cellules polarisées dans la chambre ovarienne de Drosophile Dans une chambre ovarienne de stade 9 : (A) l’ovocyte qui présente une polarité antéro/postérieure et dorso/ventrale, (C) les cellules de bordure une polarité de migration, (D) les cellules folliculaires une polarité apico-basale (B) et elles subissent des processus de morphogenèse en antéro/dorsal pour former les appendices dorsaux de l’œuf (E).

15 La fin de l’ovogenèse se caractérise donc par l’expulsion de l’œuf au postérieur de l’ovariole. Cet œuf est polarisé (Figure 13). En effet, ce dernier présente des structures chorioniques spécialisées qui permettent de distinguer son domaine antérieur de son domaine postérieur ainsi que son domaine dorsal de son domaine ventral. Au postérieur, l’œuf présente une structure respiratoire appelée aéropyle. A l’antérieur, il présente trois structures spécifiques. L’operculum, qui permet à la larve de sortir de l’œuf, le micropyle, qui permet l’entrée du spermatozoïde dans l’œuf et deux appendices respiratoires dorsaux qui ont également une fonction respiratoire. Cette polarisation morphologique externe est couplée, comme nous l’avons vu, à une polarité interne de l’ovocyte. Cette polarisation a été établie grâce à la polarité présente dans la chambre ovarienne dans laquelle plusieurs types de cellules polarisées cohabitent pour s’assurer du bon développement de l’ovocyte : une polarité apico-basale des cellules folliculaire ; une polarité antéro-postérieure et dorso-ventrale de l’ovocyte ; une polarité dite « front/arrière » de migration dans les cellules de bordure (Figure

14) … Les polarités apico-basale, puis antéro/postérieure et dorso/ventrale de ces cellules

seront donc décrites dans les prochains chapitres.

B. Polarité apico-basale des cellules épithéliales

L’épithélium est le tissu le plus abondant du règne animal. Les tissus épithéliaux sont composés d’une ou plusieurs couches de cellules qui permettent de protéger l’organisme des variations internes et de l’environnement. Il peut ainsi constituer une barrière chimique et mécanique protectrice pour l’organisme et peut détenir des fonctions de sécrétion ou d’absorption. Les cellules épithéliales sont définies comme étant des cellules juxtaposées, solidarisées par des systèmes de jonction et ayant des domaines apical et baso-latéral distincts. Le domaine apical fait face à l’environnement extérieur tandis que le domaine baso-latéral est en contact avec la matrice extracellulaire (Figure 15). Ces deux domaines sont séparés par un domaine de jonction qui permet de relier les cellules entres elles. Il existe deux types de jonctions dans ces cellules. Un premier type de jonctions dites serrées chez les vertébrés (TJ) ou septées (SJ) chez les invertébrés assure la régulation du transport entre les cellules, appelé paracellulaire, et au sein d’une même cellule, appelé transcellulaire. Le second type de jonction est appelé zonula adherens (ZA) ou jonction adhérente (AJ) et est commun aux vertébrés et aux invertébrés. Cette dernière assure la jonction entre les cellules en formant une ceinture continue autour de la cellule. Chez les vertébrés, la TJ est cependant localisée plus apicalement que la ZA alors que chez les invertébrés, la ZA est localisée plus apicalement que la SJ (Figure 15). Ainsi, chez la

Drosophile, la plupart des cellules épithéliales, à l’exception des cellules de l’intestin

Figure 15 : Représentation schématique d’un épithélium chez les vertébrés et chez les invertébrés

Adapté de Bergstralh et St Johnston, Essays In Biochemistry, 2012

Une cellule épithéliale est polarisée : elle possède un domaine apical (bleu), en général en contact avec l’extérieur, différent de son domaine basal (rouge) qui repose sur une matrice extra cellulaire (MEC). Les cellules au sein de l’épithélium sont en contact entre elles grâce à des jonctions cellulaires : des jonctions adhérentes (AJ) qui assurent la jonction entre les cellules et un autre type de jonction qui régule le transport entre les cellules. Ces dernières sont soit des jonctions serrées (TJ) chez les vertébrés, soit des jonctions septées chez les invertébrés (SJ). Chez les vertébrés, la TJ est la jonction localisée la plus apicalement tandis que chez les invertébré c‘est la TJ, sauf exception.

16 cours de l’ovogenèse : le domaine apical, la ZA, et le domaine apico-basal (Figure 15). C’est donc cette organisation que présentent les cellules folliculaires de la chambre ovarienne. Les SJ n’y sont cependant morphologiquement apparentes qu’à partir du stade 10 (Mahowald, 1972), bien que des protéines importantes pour la formation de ces jonctions soient exprimées avant (Oshima and Fehon, 2011). Dans ces cellules, trois modules composés de protéines, dont les protéines PAR, sont essentiels pour établir et maintenir la polarité apico-basale via notamment des régulations agonistes ou antagonistes.