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c. Les protéines de polarité

1. Biosynthèse des phosphatidyl-inositols

Les PIs sont modifiés de manière très dynamique grâce à l’action de nombreuses kinases et phosphatases spécifiques. Le renouvellement des PIs est très rapide. Un changement dans l’activité de leur kinases ou de leur phosphatases peut donc modifier rapidement la concentration locale de ces PIs. Le Phosphatidyl-Inositol (PIns) constitue le point de départ de la biosynthèse des PIs. Ce dernier est produit au niveau de la face cytoplasmique de la membrane du réticulum endoplasmique, de l’appareil de Golgi et des mitochondries par la Phosphatidylinositol synthase (Gardocki et al., 2005; Nikawa and Yamashita, 1984). Il peut également être produit à partir de la déphosphorylation du PI(3)P, PI(4)P et PI(5)P (phosphatidyl-inositol 5 phosphate) par différentes phosphatases des PIs (Liu and Bankaitis, 2010) (Figure 25).

Les kinases qui phosphorylent les PIs ont été répertoriées sous trois types de dénominations en fonction de l’endroit du cycle inositol qu’elles phosphorylent : les Phosphatidyl-inositol 3-kinases (PI3Ks) ; les Phosphatidyl-inositol 4-3-kinases (PI4Ks) ; et les Phosphatidyl-inositol phosphate kinases (PIPKs) (Sasaki et al., 2009). Les PI3Ks phosphorylent les PIs en position -3. Elles sont reparties en trois classes selon leur substrat et peuvent ainsi produire le PI(3)P (PI3K de type I, II et III) le PI(3,4)P2 (PI3K de type I et II) et le PI(3,4,5)P3 (PI3K de type I). Les PI4Ks, quant à elles, phosphorylent les PIs en position -4. Elles sont réparties en deux classes selon leur structure. Elle produisent toutes du PI(4)P à partir du PIns. Enfin, les PIPKs sont reparties en trois classes selon leur structure, leurs substrats et le type de PIs qu’elles produisent. Les PIPKs de type I (PIPKI ou PIP5K) et de type II (PIPKII ou PIP4K) produisent toutes deux du PI(4,5)P2 à partir de substrats différents (Voir partie II.1.A) alors que les PIPKs de type III (PIPKIII) phosphorylent toutes les PIs en position -5, ce sont donc des PIP5K (Phosphatidyl-inositol 5-kinases) qui produisent majoritairement du PI(3,5)P2 et du PI(5)P (Sasaki et al., 2009).

De même, les phosphatases qui déphosphorylent les PIs ont été répertoriées sous trois types de dénominations en fonction de l’endroit du cycle qu’elles phosphorylent : les Phosphoinositide 3-phosphatases (INPP3), qui déphosphorylent les PIs en position -3 ; les Phosphoinositide 4-phosphatases (INPP4), qui déphosphorylent les PIs en position -4 ; et les Phosphoinositide 5-phosphatases (INPP5), qui déphosphorylent les PIs en position -5. De nombreuses phosphatases des PIs, comme les Synaptojanines, sont capables de catalyser

Figure 26 : Alignement de séquences de la PIP5K SKTL de Drosophile et des PIP5K Humaines et de Souris Le domaine kinase des PIP5K est coloré en bleu.

32 différentes réactions en déphosphorylant au niveau de différents sites du cycle inositol (Sasaki et al., 2009) (Figure 25).

A. Biosynthèse du PI(4,5)P2

Le PI(4,5)P2 peut, tout d’abord, être généré par l’action de deux types de PIPKs : une phosphatidyl-inositol 5-phosphate 4 kinase (PIP4K) qui phosphoryle le PI(5)P en position -4 et une phosphatidyl-inositol 4-phosphate 5 kinase (PIP5K) qui phosphoryle les PI(4)P en position -5. Ainsi la production de PI(4,5)P2, nécessite soit la production par la PI4K du PI(4)P à partir du PIns puis l’action d’une PIP5K, soit la production par la PIPKIII du PI(5)P à partir du PIns puis l’action d’une PIP4K.

Chez les Mammifères, trois isoenzymes de PIP5K ont été identifiées, α, β et γ. Notons cependant que la nomenclature des PIPKIα et β est inversée entre l’Homme et la Souris. La PIP5KIα de Souris est donc l’homologue de la PIP5Kβ Humaine (Sasaki et al., 2009). La nomenclature de Souris sera utilisée par la suite. Chez la Drosophile, il existe deux isoenzymes homologues de la PIP5KIα de Souris : Skittles (SKTL) et PIP5K59B (Tableau

1). La PIP5K59B à été notamment impliquée dans le contrôle de la migration du mésoderme

dans l’embryon de Drosophile (Murray et al., 2012). De plus, il est important de noter que d’après le site FlyBase, seul SKTL est exprimé dans l’ovaire de Drosophile et il a été démontré qu’il était impliqué dans le contrôle de la polarité cellulaire de l’ovaire (Gervais et al., 2008) et dans la réponse à la lumière dans les photorécepteurs (Chakrabarti et al., 2015a). Il régule également la polarité des spermatides et la localisation à la membrane plasmique du complexe exocyste (Fabian et al., 2010). SKTL partage 59% d’identité avec la PIP5Kα de Souris et 58% avec la PIP5KIβ Humaine. De plus, le domaine kinase est encore plus conservé entre ces espèces (Figure 26).

Chez les Mammifères, il existe également trois isoenzymes de PIP4K : α, β et γ (Sasaki et al., 2009). Chez la Drosophile, seule une PIPKII existe, PIP4K. Cette dernière a été impliquée dans la croissance cellulaire durant le développement larvaire (Gupta et al., 2013). Notons enfin que parmi les deux types de PI4Ks (type II et III), qui produisent le PI(4)P, utilisé par les PIP5KI, il existe pour chaque, deux isoenzymes α et β chez les Mammifères (Sasaki et al., 2009). Chez la Drosophile, il existe une PI4K de type II, PI4KIIα et deux PI4K de type III, PI4KIIIα et β (Four wheel drive, FWD) (Tableau 1). Les PI4KIIα et PI4KIIIβ ont notamment été impliquées dans la régulation du trafic vésiculaire en participant respectivement à la sécrétion des granules de sécrétion de la larve (Burgess et al., 2012) et à la régulation de la protéine RAB, RAB11 durant la cytokinèse (Polevoy et al., 2009). La

Phosphatidyl-inositol Localisation Subcellulaire Fonctions Produit par Kinase Phosphatase PI(3)P Endosomes précoces et MVB Endosome sorting Trafic vers le lysosome (Pendaries et al., 2005) PIK359F/VPS34 CG2699/PI3K21B PI4-phosphatase/Fig4 PI(4)P Appareil de Golgi et légèrement à la membrane plasmique

Recrutement de protéines au Golgi (D’Angelo et al., 2008)

Sécrétion constitutive à partir du trans-Golgi (Pendaries et al., 2005) PI4KIIIα CG7004/Fwd CG2929/PI4KIIα CG6562/Synj CG3573/dOcrl INPP5E PI(5)P - Rôles potentiels :

Trafic de l’endosome tardif vers la membrane plasmique (Lecompte O, 2008) Diminution locale des adhésions du

cytosquelette membranaire (Pendaries et al., 2005)

- PI4-phosphatase

PI(3,5)P2 Endosome tardif

et lysosome

Recyclage des vacuoles membranaires

(Odorizzi et al., 2000) PI3P5K/FAB1 -

PI(4,5)P2

Membrane plasmique et

lysosomes

Endocytose (formation et scission des vésicules) (Bethoney et al., 2009) Exocytose (Localisation de l’exocyste)

(Liu et al., 2007)

Voies de recyclage (Tan et al., 2015) Nucléation de l’actine (Zhang et al., 2012) Stabilisation des jonctions (Goni et al., 2014) Migration cellulaire (Woodham and Machesky,

2014)

Adhésion cellulaire (Raucher et al., 2000)

PIP5K/SKTL CG3682/PIP5K59B CG17471/PIP4K INPP3/dPTEN PI(3,4)P2 Membrane plasmique - - INPP5E ?

PI(3,4,5)P2 Membrane plasmique

Endocytose

Croissance cellulaire (Voie AKT) organisation du cytosquelette

(Oikawa et al., 2004) Migration cellulaire (Woodham and Machesky, 2014)

PI3K92E/DP110 -

Tableau 1 : Localisations, fonctions et productions des PIs dans la cellule

En bleu sont indiqués les kinases et phosphatases impliquées dans la polarité de la chambre ovarienne de Drosophile.

33 PI4KIIIα est, quant à elle, principalement requise pour produire le PI(4)P dans la chambre ovarienne (Tan et al., 2014). Elle y régule notamment l’organisation de l’actine, le trafic vésiculaire et la polarité, des effets semblables à ceux observés dans un mutant sktl. Cependant, la PI4KIIIα jouant indirectement sur la production du PI(4,5)P2, il est difficile de dire si les effets sur la polarité ne sont pas directement liés au PI(4,5)P2. Elle participe également à la polarité des cellules folliculaires et notamment régule, en amont la production de PI(4,5)P2, la sécrétion des protéines de la membrane basale, spécifiquement dans le domaine basal (Devergne et al., 2014).

Le PI(4,5)P2 peut être également généré par l’action d’une phosphatase : une INPP3. Ces dernières utilisent alors comme substrat le PI(3,4,5)P3. La famille des INPP3 déphosphoryle les PIs en position 3 et est composée, chez les Mammifères, des protéines PTEN (Protein phosphatase and tensin homolog), TPIP (TPTE and PTEN homologous inositol lipid phosphatase) et plusieurs Myotubularines (Liu and Bankaitis, 2010). Ce sont les phosphatases PTEN et TPIP qui produisent du PI(4,5)P2. Les Myotubularines peuvent produire quant à elles, le PIns et le PI(5)P. Chez la Drosophile, il existe une INPP3, dPTEN qui, comme son homologue est un suppresseur de tumeur (Kim and Mak, 2006) (Tableau

1). dPTEN est ainsi impliqué dans de nombreux processus cellulaires comme par exemple la

croissance et la prolifération cellulaire (Huang et al., 1999) mais peut également être impliqué dans la polarité cellulaire. En effet, ce dernier est particulièrement important au niveau des jonctions cellulaires. Il participe ainsi à la morphogenèse des photorécepteurs, en régulant la quantité de PI(3,4,5)P3 et l’activation d’AKT1 au niveau du domaine apical (Pinal et al., 2006). Il participe également à la morphogenèse des cellules de l’aile durant le développement de la pupe en contrôlant la taille et la stabilité des jonctions entre les cellules (Bardet et al., 2013).

Enfin, le PI(4,5)P2 peut servir de précurseur pour de nombreux processus cellulaires. En effet, il a en premier été décrit comme étant le précurseur de l’inositol 1,4,5-triphosphate (IP3) et du diacylglycerol (DAG). Ces derniers sont tous deux générés pas hydrolyse du PI(4,5)P2 par la phospholipase C (PLC). l’IP3 mobilise le Ca2+ des réserves intracellulaires et le DAG va activer la protéine Kinase C (PKC), entraînant de nombreuses réponses cellulaires (Suh et al., 2008). De plus, pour réguler le niveau de PI(4,5)P2 dans certains compartiments spécifiques de la cellule, il est alors nécessaire de le phosphoryler en PI(3,4,5)P3 (voir prochaine partie) ou de le déphosphoryler en PI(4)P et PI(5)P. Cette déphosphorylation est alors effectuée par soit des INPP4, soit des INPP5. La famille des INPP4, déphosphoryle les PIs en position -4 et est constituée de seulement 4 protéines chez les Mammifères (Marat and Haucke, 2016). Ces dernières produisent alors soit du PI(3)P

34 soit du PI(5)P. Enfin, la famille des INPP5 est composée de 4 classes de protéines. De nombreuses protéines, appartenant à cette famille, dont les Synaptojanines, sont capables de déphosphoryler le PI(4,5)P2. Chez la Drosophile, dOCRL (oculocerebrorenal syndrome of Lowe1), Synaptojanine (SYNJ) et dINPP5E ont été identifiées comme des INPP5. Toutes sont exprimées dans l’ovaire de Drosophile d’après le site FlyBase (Tableau 1). Cependant, la SYNJ a majoritairement été impliquée dans l’endocytose Clathrine dépendante au niveau du domaine présynaptique (Verstreken et al., 2003), tandis que INPP5E a été impliquée dans le trafic vésiculaire des protéines nécessaires à la formation du cil du neurone chordotonal (Park et al., 2015). dOCRL, quant à lui, régule la quantité de PI(4,5)P2 lors de la cytokinèse des cellules de Drosophile S2. Ce dernier permet d’enrichir le PI(4,5)P2 au niveau du site de clivage pour recruter des protéines comme l’actine et la myosine, nécessaires à la cytokinèse (Ben El Kadhi et al., 2011; Ben El Kadhi et al., 2012).

B. Biosynthèse du PI(3,4,5)P3

La production de PI(3,4,5)P3 est effectuée par l’action de trois types de PIPKs, une PI3K, une PIP4K, ou une PIP5K. Cependant, ce dernier est en fait produit majoritairement par les PI3K. Ces kinases constituent une famille de 3 classes en fonction de leur structure et de leur substrat. Ce sont les PI3K de classe I qui produisent du PI(3,4,5)P3 à partir du PI(4,5)P2. Chez les Mammifères, il existe des sous familles : les PI3K de Classe IA et de Classe IB (Sasaki et al., 2009). Les PI3K IA sont des hétérodimères composés d’une sous unité catalytique (p110α, p110β ou p110δ) et d’une sous unité régulatrice (p85α, p85β, p55γ, p55α ou p50α). Les PI3K IB sont quant à elles, constituées d’une sous unité catalytique (p110γ) et d’une sous unité régulatrice (p101, p87 ou p84). Notons que les PI3K de classe II et III produisent majoritairement du PIns à partir du PI(3)P. Chez les Mammifères, il existe trois isoenzymes de PI3KII α, β et γ classées selon leur structure et une PI3KIII, VPS34. Chez la Drosophile, il existe seulement une PI3K de classe I composée d’une sous unité catalytique PI3K92E (DP110) et d’une sous unité régulatrice PI3K21B (DP60) (Tableau 1). Cette dernière phosphoryle à la fois le PIns, le PI(4)P et le PI(4,5)P2 (Vanhaesebroeck et al., 1997). La PI3KI régule notamment la croissance cellulaire des disques imaginaux de l’aile, et de l’œil ainsi que de la lignée germinale (Jagut et al., 2013; Leevers et al., 1996). Enfin, il existe également une PI3KIII chez la Drosophile, Pi3K59F. Cette dernière est impliquée dans des processus de trafic vésiculaire dont l’autophagie et l’endocytose (Juhász et al., 2008) (Tableau 1).

Figure 27 : Localisation différentielle des PIs dans les différents compartiments membranaires du trafic vésiculaire

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