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4 3 Déplacements saisonniers

Les déplacements saisonniers sont déterminés en grande partie par les caractéristiques écologiques des milieux. Ce rôle prépondérant des variables écologiques (altitude, pente, exposition, substration et couverture végétale) s’explique aisément par la nécessité pour chaque individu, d’équilibrer le bilan des apports et des dépenses énergétiques au moins sur l’ensemble du cycle annuel. Pour y parvenir, il est contraint de s’adapter continuellement aux variations des conditions du milieu en opérant une sélection des stations les plus aptes à satisfaire l’ensemble de ses besoins vitaux au moindre coût énergétique. On va observer des migrations à l’échelle du massif, mais aussi du domaine vital.

II. 4. 3. 1. A l’échelle du massif

La grande tendance est un déplacement vertical sur un même versant au cours des saisons, l’été étant marqué par une montée en altitude et l’hiver par une descente dans les forêts.

En été, la quantité d’aliments étant largement excédentaire et les déplacements aisés, ce sont la qualité de la nourriture et le maintien de l’équilibre hydrique qui déterminent le choix des milieux fréquentés. Ainsi, les isards montrent une nette préférence pour les expositions fraîches et des altitudes élevées (chaleur moindre). Les femelles et les jeunes se tiennent au- dessus de la forêt, dans les pâtures, couloirs, vires ou éboulis ; les mâles adultes et les vieux fréquentent plutôt la forêt et les vires boisées (22).

En automne, ce sont quasiment les mêmes endroits qui sont fréquentés. La seule différence est le regroupement des mâles adultes avec les femelles car on est en période de rut. Les mâles quittent la forêt et rejoignent les femelles en limite supérieure (pâturages, éboulis) (22).

En hiver, la quantité et la qualité des aliments diminuent considérablement alors que les isards doivent faire face à des dépenses énergétiques supplémentaires d’homéothermie et de locomotion. Lorsqu’ils le peuvent, pour s’alimenter à moindre coût, les isards descendent à basse altitude dans les secteurs forestiers libres de neige. Mais le plus souvent, le relief ou la pression humaine les oblige à demeurer au-dessus de la limite d’enneigement. Ils utilisent donc, après de fortes chutes de neige, des stations-refuges où la couverture neigeuse est moindre, voire nulle, en raison de particularités topographiques. Ce sont :

- en forêt, les lieux rocheux ou herbeux à forte pente quelle que soit l’altitude ou l’orientation du versant.

- au-dessus de la forêt, les escarpements en adret, les arêtes et les croupes balayées par les vents dominants. L’occupation des quartiers d’hivernage consiste alors en une suite d’extensions et de contractions de l’aire fréquentée à partir des stations-refuges. A cette époque, les interactions sociales peuvent être plus ou moins inhibées par la limitation des disponibilités alimentaires et spatiales.

Figure n°14 : Représentation schématique des divers types de stations-refuges (27)

Au printemps, leur préférence va aux forêts et aux clairières déneigées des adrets, plutôt en limite inférieure d’habitat, où le déneigement du terrain et la repousse de la végétation sont plus précoces ; puis, ils migrent en altitude, en suivant la pousse de l’herbe.

II. 4. 3. 2. Evolution du domaine vital

Le domaine vital d’un groupe d’isards évolue au cours des saisons. On assiste à des variations de taille et d’emplacement. Des études faites par Crampe dans le Parc National des Pyrénées, en vallée de Cauterets, donnent les résultats suivants, pour un groupe de jeunes femelles (26) :

- en hiver, chaque groupe de femelles évolue sur un espace restreint, domaine vital hivernal du groupe, sous ensemble spatial de la zone d’hivernage globale. Ce domaine vital hivernal du groupe est globalement juxtaposé à celui d’un autre groupe de femelles, mais peut présenter un certain degré de chevauchement spatial.

- peu avant les mises-bas et selon l’enneigement (du 15 avril au 1er mai environ), la population hivernante de femelles subit une forte dispersion, chaque groupe regagnant sa zone d’estive (domaine vital estival du groupe). Les marquages d’isard ont montré qu’une femelle née dans un territoire revenait mettre bas dans ce territoire.

- on constate 3 types d’installation estivale :

. estivage sur place : le domaine vital estival du groupe coïncide presque intégralement avec le domaine vital hivernal.

. estivage avec faible déplacement et occupation du domaine vital hivernal d’un groupe qui lui, s’est déplacé ailleurs.

. installation lointaine (pouvant atteindre 8 km) sur une zone désertée en hiver. On peut parler dans ce cas précis de transhumance saisonnière. Elle peut être modulée, tant à la montée printanière, qu’à la descente automnale, par un stationnement temporaire sur une zone intermédiaire. La descente du domaine estival sera la plus tardive possible, afin d’économiser les réserves nutritives dans le domaine hivernal. Un premier rapprochement dans une zone intermédiaire se fait lors des premières chutes de neige ; les fortes chutes de neige seulement obligeront les isards à rejoindre le domaine d’hiver (26).

Figure n° 15 : Cartographie des déplacements saisonniers de groupes contenant des individus marqués (26)

Ces migrations sont les mêmes d’une année sur l’autre, à savoir que les mêmes isards occupent les mêmes domaines tous les ans.

D’une manière générale, les domaines vitaux des mâles sont plus restreints que ceux des femelles, et les domaines d’hiver moins étendus que ceux d’été. Ainsi, l’ordre de grandeur des domaines vitaux se situe généralement entre 20 et 100 hectares pour les mâles et entre 50 et 500 hectares pour les femelles, suivant la saison.