4. Résultats et discussions
3.2. Renforcement de la mousse en présence d’huile
3.3.1. Déplacement de mousse dans un milieu poreux vertical 2D en l’absence
d’huile
Dans la première expérience à Cs = 10×CMC en l’absence d’huile, les isobares sont
distribuées verticalement à l’équilibre, et confirment le développement du front
vertical observé durant la co-injection (Figure 4-21). Les valeurs de pression ne sont que
peu affectées par la gravité, et suivent le déplacement du front de mousse. A l’inverse,
l’impact de la gravité se fait sentir sur la phase liquide, qui se déplace plus lentement. Il
Figure 4-33: Cartes de pression à l'équilibre pour différentes formulations de mousse de saponine en l'absence et en présence d'huile à la même qualité de 87,5 % et au même débit total d’injection de 6,3
169
peut donc être conclu que la phase gazeuse a un impact plus important sur la pression
dans le milieu, que la phase liquide n’en a.
Lorsque du gaz et une solution de tensioactif sont injectés dans un milieu poreux 2D
vertical saturé en tensioactif, de la mousse se forme avec un front vertical. Le front se
déplace de manière stable et homogène à l’intérieur du milieu poreux. La présence initiale
de tensioactif permet la formation d’un front vertical, et une augmentation homogène
progressive des pressions à l’intérieur du pilote. Lorsque l’ensemble du milieu a été
balayé par la mousse, les pressions se stabilisent et se distribuent de manière régulière.
Durant toute la durée de la co-injection, la phase gazeuse est renouvelée sur toute la
hauteur, tandis que la phase aqueuse n’est renouvelée que dans le bas du pilote.
Durant l’expérience de SAG, seule la phase gazeuse est renouvelée. Malgré cela, au
terme de l’expérience, une faible saturation est obtenue, ce qui pourrait s’avérer utile sur
le terrain, où de faibles pressions et de faibles saturations sont nécessaires.
Le mécanisme de variation de la force de la mousse en fonction de Cs lors des
expériences en colonne, peut être appliqué ici. En effet, lorsque Cs diminue, les valeurs de
pression diminuent à l’intérieur du pilote. Cette diminution est cohérente avec les
résultats en colonne qui montrent une diminution de la force de la mousse, et l’importance
de la concentration en tensioactif. Ainsi, tant que la concentration en tensioactif est
suffisante pour stabiliser les lamelles, la formation d’un front de mousse vertical semble
possible.
L’ajout de particules colloïdales permet également la formation de mousse selon le
même principe, mais avec une efficacité de balayage supérieure (S
wplus faible, voir le
Tableau 4-12), et de plus fortes pressions (Figure 4-33). Ceci présume de la formation et
de la persistance d’une mousse plus forte, et souligne l’importance des particules pour le
renforcement de la mousse en l’absence d’huile. Les particules forment une barrière
mécanique qui rend la déformation des lamelles et leur déplacement plus difficile. Cela
augmente la pression dans le milieu poreux, et permet à la mousse de balayer les pores
les plus petits. Ce meilleur balayage mène alors à une saturation plus faible. Singh et
Mohanty (2017) ont en effet montré que l’ajout de particules de silice à 0,3%wt à une
mousse d’alpha-olefine sulfonate (AOS) permet d’augmenter la pression dans un milieu
poreux hétérogène.
170
De même que pour les expériences en colonne, en présence d’huile le sable de la zone
supérieure du milieu est initialement mélangé à l’huile. Lors de l’injection d’eau, l’huile
présente dans les pores les plus larges est déplacée hors du milieu poreux. Le milieu est
alors à saturation résiduelle en huile, avec de l’huile présente dans les pores les plus petits.
Par la suite, l’injection de solution de tensioactif modifie l’équilibre dans le système. Les
tensioactifs peuvent en effet provoquer la formation d’émulsions et abaisser la quantité
d’huile résiduelle, comme confirmé par la légère production d’huile ayant lieu durant
l’injection de solution de tensioactif. Mais ce faisant, les molécules de tensioactifs se
placent à l’interface entre l’huile recouvrant certains grains, et l’eau, et stabilisent le
système, ce qui modifie les propriétés de surface des grains du milieu poreux, les rendant
hydrophiles.
3.3.2. Déplacement de mousse en présence d’huile
La comparaison des pressions obtenues à l’équilibre lors des expériences en l’absence
et en présence d’huile montre que les pressions sont plus faibles en présence d’huile,
quelle que soit la formulation.
Les précédentes expériences ont permis de montrer comment la mousse se propage
dans un milieu poreux en présence d’huile. L’importance de la concentration en
tensioactif a été mise en évidence comme un moyen de renforcer la force de la mousse et
d’augmenter sa résistance à l’huile. Mais les mousses obtenues en présence d’huile restent
peu fortes, et un essai de renforcement est réalisé par ajout de particules.
En présence d’huile, les pressions maximales obtenues augmentent de 90 mbar pour
une mousse à Cs = 3.2×CMC, à 230 mbar pour une mousse à 10×CMC, et atteignent 265
mbar lors de l’ajout de particules. Ces valeurs sont plus faibles que celles obtenues en
l’absence d’huile (respectivement 265, 305 et 335 mbar), montrant la formation de
mousses plus faibles, déstabilisées par l’huile. Toutefois, ces valeurs de pression prouvent
qu’un renforcement de la mousse est possible face à l’huile. Ces résultats confirment
également ceux obtenus dans les expériences en colonne.
171
Les isobares sont quasiment verticaux (Figure 4-33), montrant que la mousse est
faiblement impactée par la gravité. Ceci peut sembler contre intuitif avec la forme du front
observé en présence d’huile. En effet, durant la co-injection, le front n’est pas vertical sur
toute la hauteur, indiquant que les valeurs de pression ne le sont pas non plus. Cette
hétérogénéité de pression peut être observée sur la Figure 4-32 entre t1 et t2. Cela signifie
qu’avant d’atteindre l’équilibre, les pressions dans le bas du pilote augmentent
progressivement avant d’atteindre les pressions de la couche supérieure. A l’équilibre, les
pressions sont alors verticalement distribuées, montrant la capacité de la mousse à
bloquer entièrement le milieu poreux, même dans la partie à saturation résiduelle en
huile.
D’après les résultats précédents, la présence de mousse dans le système permet non
seulement un balayage de tout le milieu poreux, mais a aussi un effet bloquant sur toute
la hauteur, même en présence d’huile.
Le mécanisme suggéré de propagation de la mousse est donc le suivant : alors que le
gaz et la solution de tensioactif envahissent le milieu poreux, la présence de solution de
tensioactif facilite la formation de mousse. La mousse commence alors à se propager au
sein de la zone saturée en eau. Au contact de la zone à saturation résiduelle en huile, elle
est partiellement détruite, ce qui crée un chemin préférentiel avec un déplacement rapide
du front. Bien que la mousse formée soit de force modérée, son déplacement engendre
néanmoins une augmentation de pression et du RF afférent. Puis, tandis que l’injection
continue, la mousse se renforce et sous réserve d’une formulation optimale, un front
vertical peut être observé dans la partie supérieure du pilote. Dans le même temps, dans
la partie inférieure du pilote, la mousse progresse à une vitesse plus faible. Elle est
légèrement impactée par la présence d’huile de la partie supérieure, car le gaz y est en
partie dévié, du fait de chemins préférentiels. Après quelques volumes de pores, un
équilibre est atteint et le système se stabilise. La mousse remplie entièrement le milieu
poreux, avec des pressions homogènes sur toute la hauteur.
172
Dans le document
Mousses renforcées en polymère ou particules : application à la remédiation des sols pollués
(Page 189-193)