1. INTRODUCTION
1.2. Dénutrition chez la personne âgée obèse
1.2.1. Définition de l’obésité
Le surpoids est défini par un IMC ≥ 25 kg/m
2; l’obésité par un IMC ≥ 30 kg/m
2. Au sein
de l’obésité, on définit 3 stades : un IMC ≥ 30 kg/m
2représente une obésité modérée, un IMC ≥
35 kg/m
2une obésité sévère, et un IMC ≥ 40 kg/m
2une obésité morbide. Cette définition est
médicale, mais est ce que tous les patients en obésité se considèrent comme tel ? L’obésité
n’est pas perçue unanimement comme maladie par les patients, tandis qu’elle l’est pour la
majorité des médecins (18).
D’après l’OMS, Le surpoids et l’obésité sont définis comme «une accumulation anormale
ou excessive de graisse qui peut nuire à la santé». L’IMC est la mesure la plus utile du surpoids
et de l’obésité dans une population car, chez l’adulte, l’échelle est la même quels que soient le
sexe ou l’âge du sujet. Il donne toutefois une indication approximative car il ne correspond pas
forcément au même degré d’adiposité d’un individu à l’autre (19).
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L’obésité favorise la survenue de maladies cardiovasculaires (principalement les
cardiopathies et les accidents vasculaires cérébraux), du diabète, des troubles
musculo-squelettiques, en particulier l’arthrose, des cancers de l’endomètre, du sein et du colon).
1.2.2. La sarcopénie
Pour comprendre le concept de dénutrition chez la personne obèse, il est utile de
s’intéresser à la sarcopénie. La définition de la dénutrition étant principalement basée sur le
poids, il est difficile de se représenter une personne obèse dénutrie. Le poids total est
faussement associé au poids de la masse grasse. Une personne obèse et dénutrie, a un excès de
masse grasse et un manque de masse maigre. La mesure de la masse maigre est donc
nécessaire pour s’imaginer une dénutrition au cours d’une obésité et donc mesurer
l’importance de la fragilité d’une personne âgée obèse.
Auparavant la définition de la sarcopénie de Baumgartner était souvent utilisée, elle
était définit seulement par la baisse de la masse musculaire (20). C’est-à-dire que le rapport de
la masse musculaire appendiculaire divisée par la taille au carré était calculé, et le patient était
considéré comme sarcopénique si ce rapport était inférieur à deux écarts-types (21).
D’après le consensus européen de 2010 (EWGSOP), la sarcopénie est définie par une
diminution de la masse musculaire et de la fonction musculaire (force et/ou performance) qui
peuvent entrainer des comorbidités, une altération de la qualité de vie, voire le décès (22). Les 2
critères sont utiles au diagnostic car la force musculaire ne dépend pas seulement de la masse
musculaire, et la relation entre la force musculaire et la masse musculaire n’est pas linéaire (22).
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Les outils de mesure de référence sont :
o L’absorptiométrie biphotonique (DEXA) pour la masse musculaire : le taux de masse
maigre est calculé par le rapport de la masse musculaire appendiculaire, divisé par la
taille au carré. La sarcopénie est définie par un seuil inférieur à deux dérivations
standards.
o Le dynamomètre mesure la force musculaire : une force musculaire inférieure à 30 kg
chez l’homme et inférieure à 20 kg chez la femme définissent la sarcopénie.
o Le test SPPB (Short Physical Performance Battery) évalue la performance musculaire : ce
test mesure le temps d’équilibre du patient pieds joints, puis pieds l’un devant l’autre ; la
vitesse de marche sur 4 mètres ; se lever d’une chaise plusieurs fois d’affilé. Un test
inférieur à 8 sur un total de 12 points signe la sarcopénie (22), (23).
Ce dernier outil est le seul accessible aisément en pratique de ville.
La prévalence de la sarcopénie varie en fonction des études du fait de l’absence de
définition consensuelle au niveau mondial. La prévalence de la sarcopénie augmente avec l’âge.
Morley estime la prévalence de la sarcopénie entre 5 à 13 % dans une population de 60 à 70
ans, et entre 11 à 50% chez les plus de 80 ans, en fonction des études (24). A partir de 50 ans, la
perte de masse musculaire est estimée à environ 1 à 2 % par an (25). Après 60 ans, l’homme
perd en moyenne 2,4 kg de masse maigre tous les 10 ans et la femme 0,6 kg alors que la masse
grasse augmente (26).
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L’origine est plurifactorielle : diminution des apports protéiques, diminution des hormones
anabolisantes, diminution de l’activité physique, augmentation de l’inflammation, diminution de
la synthèse protéique. La sarcopénie entraine une augmentation des chutes, plus
d’institutionnalisation, une perte d’autonomie, une fragilité (27).
1.2.3. Obésité sarcopénique
L’obésité sarcopénique est définit par un IMC > 30 kg/m
2et une réduction de la masse et
de la fonction musculaire (28).
La perte de la masse et de la force musculaire liée à l’âge est souvent indépendante de la
masse corporelle (22). En règle générale, l’augmentation de la masse maigre va de pair avec
celle de la masse grasse. En revanche le sujet obèse sarcopénique a une masse maigre plus
faible que ne le voudrait son excès d’adiposité (29).
L’obésité entraine une insulinorésistance, une inflammation chronique, et une surcharge
adipocytaire. Ces 3 phénomènes sont impliqués dans la diminution de la synthèse protéique.
Notamment l’infiltration des cellules graisseuses dans le muscle est responsable d’une
lipotoxicité donc l’oxydation des acides gras est altérée. De ce fait il y a une diminution de la
masse et de la force musculaire, et la perte de la masse grasse est limitée (28). Le rapport de la
masse maigre par rapport à la masse grasse augmente et aggrave l’obésité sarcopénique.
1.2.4. Complications de l’obésité chez la personne âgée
La vieillesse aggrave les complications de l’obésité et inversement. Il existe donc une
augmentation des risques de survenue de maladie cardiovasculaire, diabète, insuffisance
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respiratoire dont un syndrome d’apnée du sommeil, arthrose, cancers, incontinence urinaire,
démence, troubles trophiques, déclin de la qualité de vie (26).
Le surpoids n’est pas associé à une augmentation du risque de mortalité chez les adultes
≥ 65 ans, mais l’obésité est associée à une augmentation modeste du risque de mortalité
d’environ 10 % (30). L’augmentation du risque de mortalité liée à l’obésité est observée jusqu’à
75 ans. Chez le sujet âgé, seuls 1,2 % des décès seraient liés à un IMC élevé (26).
Les complications de l’obésité et du vieillissement s’intriquent pour favoriser la
sarcopénie (Figure 1). La perte de masse maigre au cours des phases d’amaigrissement n’est pas
récupérée lors des phases de stabilisation ou de prise de poids. Les régimes « yoyo » pondéraux
augmentent le risque de sarcopénie (26). L’obésité favorise les maladies chroniques telles que
l’insuffisance cardiaque, respiratoire ou rénale. Mais l’association d’une de ces complications à
la dénutrition est une situation à plus haut risque de dénutrition que la présence concomitante
de l’une de ces maladies et de l’obésité (26).
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Figure 1 : impact de l’obésité et du vieillissement sur la performance physique et la sarcopénie,
intrication des facteurs physiopathologiques (d’après Quilliot et al., (26)).
1.2.5. L’amaigrissement chez la personne âgée obèse
Chez les sujets âgés obèses, la perte de poids involontaire est associée à une
augmentation du risque de mortalité, mais qui peut être liée à la pathologie sous-jacente.
Chez des patients âgés de plus de 60 ans, ayant un IMC ≥ 27 kg/m
2, une perte de poids
intentionnelle de 3 % (ou de 2 kg) par rapport au poids initial et un suivi ≥ 6 mois, apporte des
bénéfices significatifs chez les patients souffrant d’arthrose, de maladies coronariennes et de
diabète de type 2, mais a des effets légèrement défavorables sur leur densité osseuse et leur
masse maigre (30).
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Chez les personnes âgées obèses, la perte de poids surtout quand elle touche la masse
maigre a un impact majeur sur les capacités fonctionnelles c’est-à-dire sur la performance
musculaire. Sur le plan fonctionnel, c’est l’obésité associée à une sarcopénie qui représente la
situation la plus à risque (26).
1.2.6. Effet d’un régime restrictif sur la dénutrition et les carences
Un des objectifs du « programme national nutrition santé » (PNNS) et du « plan
obésité » vise à réduire l’obésité et le surpoids dans la population (5). La perte de poids chez les
sujets obèses peut être perçue favorablement dans une maladie chronique alors qu’elle est
souvent un facteur prédictif négatif de la maladie (26). L’amaigrissement volontaire ou
involontaire entraine une perte musculaire, une diminution de la masse maigre, donc un risque
de sarcopénie (26).
Lors des prises de poids ultérieures, ou effet rebond, le patient ne récupère pas toute sa
masse maigre, mais prend de la masse grasse. Lors d’une perte de poids, deux mécanismes sont
impliqués : la lipolyse diminue le nombre d’acide gras, et la protéolyse diminue les acides
aminés musculaires.
Pour assurer la quantité de glucose nécessaire au cerveau, et surtout dans les régimes
hypoglucidiques, l’organisme utilise la néoglucogénèse à partir des acides aminés (protéolyse)
ce qui diminue la masse musculaire (31). Enfin, ce problème peut être aggravé par le
vieillissement qui s’accompagne d’une sarcopénie et qui modifie la réponse métabolique au
déficit énergétique, illustrant le danger potentiel des régimes restrictifs dans cette population.
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Les régimes restrictifs (hyposodés, diabétiques, hypocholestérolémiant ou une
association) chez les personnes âgées de plus de 75 ans entrainent un risque plus élevé d’avoir
un score inférieur à 12 au test MNA dans sa forme courte (OR =3,6), donc une augmentation du
risque de dénutrition par rapport à une population du même âge sans régime (32). Il est difficile
d’allier des règles diététiques pour prévenir l’apparition d’une pathologie chronique et le risque
de perdre de la masse maigre car ces règles sont souvent contradictoires et peuvent générer
une perte d’envie de manger. D’autant plus que les conséquences de la dénutrition augmentent
le risque de décompensation de pathologies chroniques (33). La prévention de la perte de
masse maigre doit être la préoccupation majeure du régime prescrit à un obèse âgé.
Aucun des régimes ne semble être adapté aux besoins de cette population âgée, la
promotion de l’activité physique est indispensable au maintien de la masse maigre de la
personne âgée (34). En effet la pratique d’un exercice physique contre résistance permet
l’amélioration de la masse et de la force musculaire, mais ce n’est pas toujours suffisant pour
combler la perte chez la personne âgée (35). Le traitement efficace est l’association d’un
programme d’entrainement contre résistance et d’une supplémentation protéique adaptée.
Cette association permet la prévention et le traitement de la sarcopénie (23).
Dans le document
UNIVERSITE PIERRE ET MARIE CURIE - PARIS VI
(Page 33-40)