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à activité bactéricide

4. Caractérisation des matériaux

5.2. Dénombrement des bactéries en contact avec le matériau

Nous avons vu que, lorsque le Styrène Ammonium est introduit dans le coréseau, aucune colonie n’est observée sous le matériau, suggérant une inhibition de contact. Pour vérifier cette hypothèse, les

matériaux sont incubés en présence d’une suspension bactérienne à 107 UFC.mL-1 pendant 6h. Les bactéries

non adhérentes sont ensuite éliminées par des rinçages successifs ; les bactéries adhérentes sont ensuite récupérées par sonication douce, et dénombrées par étalement sur des géloses.

163 Un premier dénombrement a été fait avec des RIPs dans lesquels la concentration en sel d’Ammonium (Styrène ou Benzyl) est fixée à 3% (Figure 107). Le contrôle (CTR) correspond aux bactéries cultivées en surface du plastique de culture, en l’absence de matériau.

Figure 107 : nombre de bactéries viables après 6h de contact avec les différents RIPs POE-BSA/Fb contenant 3% de SN+ ou BN+ pour E.coli (barres sombres) et S.epidermidis (barres claires). L’expérience a été réalisée en n = 2.

Pour les deux souches bactériennes (E. coli et S. epidermidis), aucun effet antibactérien significatif n’est observé, que les matériaux contiennent du Styrène Ammonium ou du Benzyl Ammonium. En effet, le nombre de bactéries viables en surface des RIPs est très proche de celui du contrôle (moins de 0,5 log d’écart). On considère généralement qu’un effet significatif est observé quand la population bactérienne est diminuée de 5 log. Il est également possible que la concentration en styrène ammonium ne soit pas suffisante en surface du matériau. Enfin, la CMI du Benzyl Ammonium étant plus élevée que celle du Styrène Ammonium, il faut une concentration plus élevée pour observer un effet bactéricide.

L’expérience a donc été répétée, avec une concentration de 5% de SN+ et de BN+ (Figure 108).

1,0E+04 1,0E+05 1,0E+06 1,0E+07 1,0E+08 U FC /m at ériau E.Coli S.Epidermidis

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Figure 108 : nombre de bactéries viables après 6h de contact avec les différents RIPs pour E.coli (barres sombres)

S.epidermidis (barres claires). L’expérience a été réalisée en n = 2.

En dépit de la concentration plus importante, le résultat est le même que précédemment : aucune différence significative de viabilité des bactéries n’est constatée par rapport aux témoins lorsque les RIPs contiennent du Styrène ou du Benzyl Ammonium.

Ces résultats peuvent être expliqués. En effet, la quantité de sel d’ammonium (Styrène ou Benzyl) relarguée contre du tampon Tris en 72h est inférieure à 5% de la quantité introduite (cf § 5.1.1), soit moins

de 2,5 mg.mL-1, valeur très inférieure à celle de la concentration minimale inhibitrice (6 mg.mL-1 pour le SN+

et de 20 mg.mL-1 pour le BN+. Or, pour ces expériences, le temps de contact entre les matériaux et les

bactéries est de 18h seulement. La quantité de sels d’ammonium pouvant être relarguée pendant cette durée est donc inférieure à la quantité nécessaire pour observer un effet bactériostatique. Les ammoniums quaternaires présents à la surface du matériau sont donc trop faiblement concentrés ou trop peu accessibles. Ils ne peuvent pas induire la mortalité bactérienne par contact. Ce point n’a, faute de temps, pas pu être vérifié par des tests Live/Dead.

L’effet bactéricide des fragments de dégradation des matériaux a également été testé. Pour cela, les

matériaux sont incubés pendant 3 jours dans une solution de TL à 10 U.mL-1. Le surnageant de dégradation

est ensuite mis en contact avec une suspension bactérienne à 107 UFC.mL-1. Cependant, là encore, aucune

différence significative n’a pu être observée sur la croissance bactérienne. Or, après une dégradation totale

des RIPs POE-BSA/Fb contenant 30 et 50 mg.mL-1 de SN+ ou de BN+, la quantité de sels d’ammonium présente

dans le surnageant est supérieure à leur CMI. Dans le cas du styrène ammonium, sa photopolymérisation permet sa réticulation, et il est possible que les motifs ammonium quaternaires soient alors moins accessibles pour interagir avec les parois bactériennes. Cela expliquerait, d’une part, l’absence d’inhibition de la

1,E+04 1,E+05 1,E+06 1,E+07 1,E+08 1,E+09 U FC .matériau -1 E.Coli S.Epidermidis

165 croissance bactérienne dans le cas des RIPs contenant le Styrène Ammonium et d’autre part les écarts si importants entre les résultats observés pour la diffusion des sels d’ammonium incorporés au matériau pendant la synthèse ou par gonflement (cf § 5.1.2). Pour le Benzyl Ammonium, qui n’est pas réticulé, il est surprenant de ne pas observer d’effet sur la croissance bactérienne, mais aucune expérience supplémentaire n’a pu être faite pour apporter davantage d’informations sur les interactions possibles entre les composés issus de la dégradation.

6. Conclusion

Pour conclure cette partie, soulignons que les résultats sont en demi-teinte. Les matériaux élaborés ne permettent pas d’obtenir un effet antimicrobien significatif dans les conditions testées. Cependant, ces

tests antimicrobiens ont été effectués avec des concentrations bactériennes très élevées (106 et 107 UFC.mL

-1), bien supérieures à ce qui est habituellement retrouvé in vivo. Puisque le composé en solution est capable

d’empêcher la croissance bactérienne, il est probable qu’un tel matériau puisse limiter la colonisation bactérienne dans les conditions d’implantation. Des tests supplémentaires devraient donc être réalisés afin de vérifier ce point.

Toutefois, plusieurs hypothèses peuvent être avancées pour expliquer l’absence d’effet significatif sur la croissance bactérienne lors de l’incorporation des sels d’ammonium, et plus particulièrement du

Styrène Ammonium, dans le matériau. L’ammonium est séparé du cycle benzénique par seulement un –CH2,

donc une chaîne extrêmement courte. La mobilité de l’ammonium quaternaire est réduite. Il est donc peu vraisemblable qu’il puisse être en contact durable avec la paroi bactérienne une fois qu’il est lié de façon covalente dans le réseau. Cette hypothèse est confortée par le fait que la longueur de la chaîne alkyle liée à

l’azote été identifiée comme un facteur important dans le caractère bactéricide 249,260,262. Dans notre cas,

l’azote est entouré de 4 méthyle. Or, plus les chaînes greffées à l’azote sont longues, plus l’effet bactéricide

est important (en particulier contre les bactéries Gram positif 248). Il serait très intéressant de tester

l’incorporation d’un styrène ammonium contenant une chaîne alkyle entre le styrène et l’ammonium, ou comme substituant de l’ammonium.

Les matériaux présentés dans ce chapitre contiennent un réactif supplémentaire par rapport à ceux que nous avons développés précédemment. Cette étude a montré qu’il est possible de greffer un composé actif sur les coréseaux, d’une part et que les RIPs sont capables d’encapsuler un réactif lors de leur synthèse d’autre part. Dans le cas d’un composé greffé, des propriétés viscoélastiques supérieures à celles des RIPs présentés dans le chapitre 4 ont été obtenues et la dégradation est ralentie.

Enfin, bien que d’autres expériences soient nécessaires afin de confirmer ce point, les nouveaux matériaux obtenus pourraient limiter la colonisation bactérienne dans le cas d’une implantation in vivo.

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Chapitre 5 :

Matériaux à base de Plasma

Dans le chapitre 2, des RIPs PVA-BSA/Fibrine ont été caractérisés et ont démontré leur réversibilité à l’hydratation et leur dégradabilité. Dans le chapitre 3, le PVA a été remplacé par le POE et les propriétés de ces nouveaux matériaux ont été étudiées. Enfin, dans le chapitre 4, un sel d’ammonium a été incorporé au réseau, soit par greffage covalent, soit en étant retenu dans la phase sol de l’hydrogel. Dans ces 3 chapitres, c’est le réseau constituant la partie synthétique du matériau qui a été modifié. Dans ce dernier chapitre, nous nous sommes également intéressés à l’impact de la modification du réseau de fibrine sur les propriétés globales du matériau. Pour cela, nous avons tenté de réaliser la synthèse de RIPs à partir directement du plasma sanguin. Ces travaux ont été réalisés avec les RIPs obtenus à partir de PVAm et de POE, mais dans ce chapitre seuls les résultats avec le POE précédemment sélectionné seront détaillés. Les autres résultats sont reportés en annexe A.

En vue de leur implantation in vivo, il serait souhaitable de disposer de matériaux dans lesquels les protéines sont d’origine autologue, afin de limiter les réactions inflammatoires. Au lieu d’utiliser du fibrinogène commercial comme précurseur du gel de fibrine, nous avons donc utilisé du plasma sanguin total.

En effet, le plasma contient du fibrinogène (à hauteur de 5 mg.mL-1, la concentration choisie pour les

matériaux élaborés dans les chapitres précédents), mais également un grand nombre de protéines, de facteurs de croissance, et de molécules participant à la cicatrisation. Il est donc, en théorie, possible de faire gélifier le fibrinogène présent dans le plasma, afin de former un réseau de fibrine. De plus, si le prélèvement sanguin provient du patient lui-même, le réseau de fibrine présente un caractère « autologue ». Dans un premier temps, une présentation des produits existants à base de plasma sanguin sera faite. Puis la mise au point de la synthèse des RIPs à base de plasma sera exposée, et ainsi que les caractérisations des matériaux obtenus.