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différentes dégradations environnementales, l’augmentation des inégalités dans la distribution des ressources,

différentes dégradations environnementales, l’augmentation des inégalités dans la distribution des ressources, l’adoption de modes de production inadéquats comme l’élevage bovin, trois phénomènes qui ont lieu en Amazonie aujourd’hui. » (p. 275)

Quels indicateurs spécifiquement géographiques faire valoir pour les questions de développement durable ? Paysages et capacité de charge territoriale, des entrées à privilégier…

En résumé, la géographie se sert plutôt des indicateurs construits par les autres, elle participe au débat sur leur utilité avec un regard très critique, mais ses propositions concrètes dans ce domine demeurent peu nombreuses. Cette discipline aurait pourtant un atout majeur à jouer avec les indicateurs paysagers71. Ces derniers sont doublement géographiques. D’une part, ils renseignent sur un certain nombre de phénomènes à l’œuvre dans un territoire donné, ce qui permet de le rapprocher/différencier de ses voisins (fonction discriminante et subsumante de l’indicateur). D’autre part, ils sont basés sur l’observation d’un objet éminemment spatial : le paysage, autrement dit, une portion d’étendue terrestre pouvant être observée in situ ou via satellite. Comme le paysage est lui-même un produit des interactions entre faits naturels et sociétaux (Béringuier et al., 1999), les indicateurs paysagers seraient particulièrement bien adaptés à l’étude du développement durable. Plusieurs expériences ont été menées à cet égard en Amazonie brésilienne, le but était de rendre compte des dynamiques sociales et environnementales grâce aux traces laissées par les différentes populations dans le couvert forestier (Sobral Escada et Salas Alves, 2001 ; Laques, 2002 ; Laques et Venturieri, 2005). Ce qui peut se faire assez aisément avec une série d’images satellitales diachroniques, aspect non négligeable dans des zones difficiles d’accès où les informations statistiques, si elles existent, sont très rapidement obsolètes. Ce genre d’analyse a permis de mettre en évidence la responsabilité des programmes de micro-crédits ruraux de la fin des années 1990 dans l’accroissement des pâturages artificiels chez les agriculteurs familiaux (Laques et al., sous presse). Des phénomènes physiques (déforestation, artificialisation des milieux) peuvent directement être corrélés avec des facteurs d’ordre socio-économique.

L’idée des indicateurs géographiques pour le développement durable doit encore être approfondie, cette thèse en explore quelques aspects via les indicateurs paysagers et d’autres expérimentations sur des questions éminemment spatiales comme l’enclavement ou le transport. Pour le reste, IDURAMAZ se cantonne à une démarche classique en se servant d’indicateurs « basiques » à des fins géographiques : mesurer l’impact de diverses politiques de développement durable sur la santé, les revenus, l’organisation sociale etc. dans différentes communautés amazoniennes. L’idée d’inclure la capacité de charge à ce système de mesure a été abandonnée pour plusieurs raisons. Premièrement, il était impossible de réaliser un calcul d’empreinte écologique en bonne et due forme au vu du différentiel entre les données nécessaires et celles qui étaient disponibles. Deuxièmement, les solutions palliatives n’étaient pas toujours satisfaisantes. Au vu du lien qui a longtemps existait entre « crise des pâturages72

71 En voici une définition : « Synthétique et immédiat, le paysage fait sens. En nous les donnant à voir, il nous

parle des territoires, de leurs caractères, des systèmes socio-économiques qui les organisent, de leurs dynamiques. Physionomie perceptible de l’espace, le paysage représente en quelque sorte l’apparence extérieure de l’objet socio-spatial sur lequel travaille le géographe, et il constitue à ce titre un indicateur privilégié parce qu’immédiat pour son étude. » (Dérioz, 2002, p. 101).

»

72 La « crise des pâturages » décrite par de Reynal et al. (cités dans Théry, 1997), induite par une charge bovine

trop importante et/ou un usage excessif des brûlis de nettoyage, a longtemps conduit les producteurs locaux à une crise de production. Ce qui les obligeait soit à l’ouverture de nouvelles surfaces fourragères sur place, soit à la revente du lot pour tenter leur chance dans les zones peu anthropisées de la frontière. Dans les deux cas, il y avait accroissement des déboisements. Cette idée tend à être relativisée aujourd’hui, notamment parce que les espaces forestiers disponibles s’amenuisent, ce qui oblige les producteurs à une intensification sur place et des pratiques plus rationnelles. Le modèle de l’intensification et des pratiques rationnelles est largement diffusé dans le monde des fazendas, il se démocratise peu à peu dans les zones de petite agriculture familiale.

et déforestation en Amazonie, il aurait été judicieux d’intégrer des données sur la capacité de charge des surfaces pastorales. Pour cela, le nombre de bovins par hectare observé sur les sites étudiés aurait pu être comparé aux capacités moyennes fournies par la littérature (entre 0,273 et 174 bovin/ha75). Comme les terrains extractivistes ou amérindiens n’ont que très peu recours à l’élevage ou du moins sous des formes très différentes de celles des petits agriculteurs et des

fazendeiros, cette idée a été abandonnée. Cette réflexion mérite toutefois d’être approfondie

dans une nouvelle version du système d’indicateurs, en y intégrant notamment des données sur la capacité de charge de l’extractivisme ou des cultures vivrières.

Conclusion du chapitre I : des clés de lecture pour reconnaître les qualités/défaut d’une démarche indiciaire

L’objectif de cette première partie était de faire un état des lieux sur le plan conceptuel, méthodologique et épistémologique des systèmes d’indicateurs de développement durable. Au niveau des règles générales de construction, ils doivent répondre à un certain nombre de critères pour leur validation scientifique ou leur acceptation sociale. Dans le premier cas, la transparence est requise dans le choix des indicateurs ou des méthodes d’agrégation. Leur finalité probante doit également être mise en avant. Dans le deuxième cas, le système se doit d’être clair. Il est exhorté à simplifier un certain nombre de phénomènes afin les rendre intelligibles au plus grand nombre. En ce qui concerne leur façon d’aborder les questions de durabilité, ils doivent être avant tout multidimensionnels et ne pas se contenter d’établir des listes d’indicateurs dans chacune des dimensions. Il est indispensable que celles-ci soient mises en interaction que ce soit en les agrégeant ou en leurs faisant subir différentes analyses statistiques. L’articulation local/global et la prise en compte des questions générationnelles, plus difficiles à mettre en œuvre, peuvent être traitées comme des conditions subsidiaires. Elles donnent de la valeur ajoutée à un système d’indicateurs mais la confrontation de données de natures diverses demeure la condition première pour pouvoir parler de durabilité. Certains auteurs estiment que les indicateurs ont manqué à leur mission de communication du fait de leur faible assimilation par un public non averti (Levrel, 2006). Ceci est loin d’être faux. Mis à part l’IDH ou l’empreinte écologique – qui ne sont pas, pour les raisons exposées ci-après, des indicateurs de durabilité exemplaires – la plupart des systèmes de mesure élaborés depuis le Sommet de la Terre sont parfaitement méconnus du grand public. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que par un jeu de rétroactions la réflexion sur les instruments de mesure a contribué à étoffer ce concept : les systèmes d’indicateurs évoluent au grès des changements conceptuels mais contribuent eux aussi à la prise en compte de nouveaux facteurs, à la mise en œuvre de nouvelles orientations. Les difficultés à transposer telles quelles des grandes batteries d’indicateurs internationales aux échelles infra-nationales ont contribué à populariser l’idée, qu’au fond, la durabilité était relative aux réalités et spécificités territoriales et que, par conséquent, proposer des solutions univoques n’était d’aucune utilité. À la lumière de ces réflexions sur ce que doit être un système d’indicateur de développement durable, le chapitre suivant propose un état de l’art critique d’un échantillon d’expériences indiciaires. Le but est de fournir ici l’univers des références à partir desquelles le

73 Voir Tadeu Paulino, 2004

74 Chiffre de la FAO pour les régions sub-humides de savane. En milieu humide elle chute à 0,5 bovin/ha.

75 Pour un calcul efficace de la capacité de charge, des critères comme le poids et l’âge des animaux doivent

être normalement pris en compte. Faute de données sur les caractéristiques physiologiques des animaux, il est possible de s’en tenir à une fourchette de capacités de charge moyennes.

système IDURAMAZ a été construit : ses emprunts éventuels sur le plan méthodologique et conceptuel mais aussi les écueils qui se devaient d’être évités.

Chapitre II. Forces et faiblesses d’une sélection de systèmes

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