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Chapitre 4 : La mère au foyer

4.2 Des définitions

Afin de pouvoir analyser le traitement juridique de la mère au foyer et de pouvoir chiffrer le nombre ou la proportion de mères qui sont dans cette situation au Québec, nous croyons qu’il était nécessaire de circonscrire une définition de travail de « la mère au foyer ». Nous avons consulté des écrits des sciences sociales qui traitent spécifiquement des mères au foyer, la littérature produite par les groupes qui défendent leurs intérêts, les écrits des organismes chargés de compiler les statistiques, les organismes gouvernementaux concernés (Ministère de la Famille, Conseil de la famille et de l’enfance, Conseil du statut de la femme) et, enfin, le droit québécois. Nous avons constaté qu’il n’existe pas une définition unique de la mère au foyer et que les statistiques récentes sur celle-ci sont le résultat d’extrapolations plutôt que de questions directes sur elle. De plus, les travaux contemporains s’intéressant aux mères au foyer sont peu nombreux :

« Il n’existe pas d’étude récente de la situation des femmes au foyer. Elles représentent pourtant une portion encore significative des mères de jeunes enfants. Les mères de 20-24 ans qui ont un enfant de moins de 3 ans comptent 52,3 % d’inactives et celles de 25-29 ans, 33,3 %. »172

Certaines associations québécoises disent représenter les mères au foyer. La plus importante est l’AFEAS qui se décrit comme un organisme à but non lucratif regroupant 20 000 Québécoises ayant pour mission d’améliorer les conditions de vie et de travail des femmes et de défendre leurs droits. La reconnaissance du travail dit « invisible » fait partie de leurs objectifs173. Pour l’AFEAS, la mère au foyer est une catégorie des « travailleuses au foyer » qui exécute du « travail invisible, non rémunéré ». « Cette appellation s’applique à la personne qui exécute le travail au foyer,

                                                                                                                           

172 Madeleine GAUTHIER et Johanne CHARBONNEAU avec la collaboration de Martine CÔTÉ, Louise GAUTHIER, Angèle-Anne BROUILLETTE et Mircea VULTUR, Jeunes et fécondité : les facteurs en cause.

Revue de la littérature et synthèse critique, Institut national de la recherche scientifique, Urbanisation,

Culture et Société, Septembre 2002, p. 24.

173 Voir notamment L’AFEAS, Mémoire soumis à la CAS dans le cadre de la commission parlementaire sur

dans ses aspects privé et social et qui n’a pas accès aux mesures sociales rattachées au travail rémunéré ».174

Le travail au foyer comporte la fonction de reproduction, les soins et l’éducation des enfants, la prise en charge des personnes non autonomes et les tâches domestiques. Deux aspects distincts sont identifiés : l’aspect privé, soit la production domestique des biens et services entre personnes autonomes (entretien du foyer, des vêtements, confection des repas, courses, etc.), et l’aspect social, qui concerne plus spécifiquement le rôle de parent et d’aidant (mettre des enfants au monde, les éduquer, les garder, voir à leur entretien) et le rôle de dispensatrice ou dispensateur de soins aux personnes en perte d’autonomie, (qu’elles soient malades, âgées, invalides ou autres), ce que la littérature anglo-saxonne qualifie de « care work ».

Les lieux du travail au foyer sont divers. La maison est le lieu central du travail au foyer, mais ce dernier s’étend également à l’ensemble des endroits où s’accomplit ce travail (au sein du quartier, à l’école, au parc, au centre commercial, à la piscine municipale, au bureau du médecin, etc.).

Pour l’AFEAS, la mère au foyer est celle dont le temps est « majoritairement » occupé par les fonctions de maternage ci-haut décrites. Elle peut donc être aussi étudiante ou travailler à temps partiel.

Pour Christine Corbeil, Francine Descarries, Carmen Gill et Céline Séguin, la femme au foyer est celle qui est hors de la population active et pour qui le travail domestique et l’entretien des membres de la famille représentent l’activité principale175. Elles excluent donc des inactives les jeunes étudiantes de 15 à 20 ans, les filles célibataires demeurant chez leurs parents, les femmes seules et les femmes inaptes au travail. Selon elles, les femmes retirées du marché du travail et les jeunes mères en situation de discontinuité d’emploi dont la présence au foyer est temporaire devraient également être exclues de la définition.

                                                                                                                           

174 L’AFEAS, Les services de garde québécois : Consultations gouvernementales, Mémoire présenté le 4 septembre 2003.

Pour Dominique Maison, chercheur français ayant analysé l’expérience sociale des femmes au foyer en France, les mères au foyer sont aussi une sous-catégorie des femmes au foyer, qui doivent être définies « en creux », c'est-à-dire inactives ayant entre 15 et 64 ans, n’étant ni étudiantes, ni retraitées ou préretraitées176.

La Division de l’analyse des enquêtes auprès des ménages sur le travail à Statistiques Canada utilise la définition suivante du parent au foyer : « une mère ou un père ayant au moins un enfant dépendant de moins de 16 ans à la maison, qui n’a aucun travail rémunéré (mais qui serait apte au travail), qui ne recherche pas de travail, qui n’étudie pas, et qui fait partie d’une famille biparentale dans laquelle l’autre conjoint travaille ».177

Bien que cette définition exclue les mères dont l’activité principale est le maternage, mais qui occupent aussi un emploi à temps partiel ou qui sont étudiantes, ainsi que les mères qui sont seules ou monoparentales et qui pourraient avoir fait le choix d’être à la maison avec leurs enfants178, c’est la définition de travail que nous

avons choisi d’utiliser. Elle est la plus restreinte et nous permet de considérer plus rigoureusement certaines statistiques.