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3. Méthode et données

3.2 Définitions des variables d‟intérêt

La variable d‟aide étrangère

Selon les études, il existe quelques différences en ce qui concerne la définition de l‟aide. Ainsi, Burnside et Dollar (1998), Collier et Dehn (2001) et Dalgaard et al. (2004) utilisent l‟ « aide effective au développement » (« Effective Development Assistance ») calculée par Chang et al. (1998, 2002) ; celle-ci représente la somme des dons et de l‟équivalent-don des prêts, ce dernier étant mesuré en tenant compte du taux d‟intérêt. Cette mesure est critiquable dans le sens où elle ne reflète pas le bénéfice potentiel des flux d‟aide reçus par le pays en développement à une période donnée (Chauvet et Guillaumont 2001). Ainsi, beaucoup d‟études préfèrent utiliser l‟aide publique au développement telle qu‟elle est calculée par le Comité d‟Aide au Développement (OCDE). Cette mesure prend en compte les dons publics ainsi que les prêts publics, à condition qu‟ils aient un élément de libéralité au moins égal à 25 pour cent71

; les dons et les prêts ayant tous deux un objectif de développement.

Dans cette étude, nous utilisons l‟aide publique au développement nette72

rapportée au PIB, comme dans la plupart des études. On l‟utilise aussi rapportée à la population, de sorte à obtenir les flux d‟aide reçus par habitant (proposition de Roodman 2008). Nous utilisons également, comme alternative, ces deux mesures soustraites de la coopération technique. En effet, les sommes relatives à la coopération technique sont incluses dans les mesures d‟aide publique au développement ; néanmoins, elles sont incluses de manières différentes selon les bailleurs de fonds. Ainsi, la France inclut les « frais d‟écolage73,74 » alors que la Grande-Bretagne ne les inclut pas. Pour obtenir des mesures de l‟aide

71 L‟ « élément de libéralité » correspond au caractère de faveur des flux, i.e. à l‟élément-don de ces flux. Cet élément-don est calculé à partir du taux d‟intérêt du prêt, de sa maturité et du délai imposé pour le premier remboursement. Si le taux d‟intérêt est inférieur à celui du marché, alors on peut considérer que le prêt a une partie concessionnelle, favorable au pays receveur. Pour faciliter ses calculs, le CAD a « fixé » le taux du marché à 10%. Ainsi, pour le CAD, le degré de concessionalité est de zéro pour un prêt dont le taux d‟intérêt est de 10%, et il est de 100% pour un don (Source : CAD).

72 La variable d‟aide publique au développement nette est tirée du CAD et représente les dons et prêts concessionnels reçus, nets des remboursements du principal (les intérêts ne sont pas pris en compte).

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Les frais d‟écolage font référence aux bourses d‟études versées par les bailleurs de fonds à des personnes issues des pays en développement venant étudier dans le pays donateur.

74 Ces frais constituent en outre une part non négligeable : environ 10% de l‟aide publique au développement française (Source : CAD).

« harmonieuses » entre les différents bailleurs de fonds, pour tester la robustesse de notre analyse, nous retirons le montant de coopération technique à l‟aide publique au développement nette75.

Notre étude portant sur les bénéfices sur la santé que l‟aide peut apporter, nous souhaitons utiliser également comme mesure l‟aide affectée à la santé76

, uniquement pour mesurer les effets dits « directs » de l‟aide sur la santé. Cette mesure est tirée de la base SNPC du CAD (2009), et, comme vu dans le chapitre précédent, les valeurs ne sont fiables qu‟à partir de la fin des années 1990. Pour robustesse, nous utilisons également la variable d‟aide développée par l‟IHME (2009), fournie à partir de 1990.

L‟effet direct de l‟aide sur la santé est analysé dans un premier temps sur la période 1980-2004 avec l‟aide publique au développement globale nette, puis sur la plus courte et plus récente période 1996-2007 avec l‟aide affectée à la santé des bases SNPC et IHME.

La variable intermédiaire

L‟autre variable d‟intérêt est la variable intermédiaire, celle par laquelle l‟aide a un effet indirect sur la santé. La variable qui nous paraît synthétiser le mieux l‟amélioration de l‟environnement macro-économique est la croissance économique du PIB par habitant. En effet, le PIB se définit comme la création de richesse dans un pays donné au cours d‟une année donnée par les agents résidents. Le PIB paraît plus approprié que le PNB car il prend en compte la création de richesse à l‟intérieur du territoire plutôt que celle des agents nationaux vivant à l‟intérieur ou pas du territoire. Pour évaluer la richesse, on utilise également souvent le revenu national brut (RNB) qui fournit une mesure des revenus monétaires acquis durant l‟année par les ressortissants d‟un pays. Mais c‟est là un indicateur relativement peu différent de celui du PNB.

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Nous notons cependant que la coopération technique inclut des éléments importants et susceptibles d‟améliorer considérablement la situation sanitaire, comme par exemple les experts expatriés qui agissent sur place.

76 Nous utilisons ici comme mesure les décaissements d‟aide affectée à la santé au sens large, i.e. affectée aux secteurs de la santé, de l‟eau et des sanitaires et de la population (Source : SNPC).

Les critiques vis-à-vis de ces indicateurs économiques classiques sont nombreuses. Ainsi, même si le PIB par habitant est souvent traité comme une mesure du bien-être, il est largement admis que ce n‟en est qu‟une mesure très approximative (cf. Rapport de la Commission Stiglitz 2009). Tout d‟abord, le PIB se concentre sur la production et sur la consommation marchande, et ne prend pas en compte la richesse en stock. Dès lors, une catastrophe naturelle qui détruit de la richesse va pourtant contribuer au PIB à travers l‟activité de reconstruction. Aussi, le PIB ne prend pas en compte les externalités négatives de la production, comme les dégâts causés à l‟environnement, les prélèvements sur le patrimoine, etc., qui affectent pourtant le bien-être des populations. De même, les services publics, comme l‟éducation ou la santé, ne sont pas bien évalués, et reposent généralement sur les intrants utilisés pour produire ces services. Enfin, le PIB prend peu en compte l‟économie informelle ou l‟économie domestique, lesquelles pouvant pourtant contribuer au bien-être de la population77. Plusieurs mouvements ont remis en cause l‟usage du PIB, PNB ou RNB pour approximer le niveau de vie, avant la Commission Stiglitz. Le PNUD a notamment proposé plusieurs indicateurs de développement socio-économique multidimensionnels, tels que l‟indice de développement humain (IDH), qui combine trois facteurs : l‟espérance de vie à la naissance, le niveau d‟instruction mesuré par le taux d‟alphabétisation et le taux brut de scolarisation, ainsi que le PIB par habitant en parité de pouvoir d‟achat. L‟IDH classe ainsi les pays en établissant une moyenne normalisée de ces trois facteurs.

L‟IDH est une mesure intéressante pour mesurer le niveau de développement socio-économique d‟un pays. Cependant, il ne convient pas très bien à notre analyse. Dans un premier temps, un des sous-indices qui le composent est relatif à la santé. Or nous souhaitons ici identifier les effets directs et indirects de l‟aide sur la santé. Par ailleurs, l‟IDH classe les pays à un moment donné : il manque de dimension temporelle. Ainsi, entre deux dates, un pays peut observer une amélioration de classement, sans pour autant observer une amélioration de son bien-être. Enfin, les données relatives à l‟IDH ne remontent pas si loin que celle du PIB, et, surtout, la méthodologie de calcul de l‟IDH a évolué plusieurs fois au cours des années, ce qui rend impossible la comparaison de

77 Pour une liste plus exhaustive des critiques apportées au PIB, se référer au Rapport de la Commission Stiglitz (2009).

l‟indicateur dans le temps sans recalculer pour chaque année l‟IDH selon une méthode harmonisée. C‟est pour toutes ces raisons que nous préférons utiliser la croissance du PIB pour approximer l‟amélioration de l‟environnement socio-économique.