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Chapitre 4 : Cadre méthodologique : L’analyse des réseaux viaires au moyen de

I. Passage d’un objet empirique à un objet mathématique, du réseau au graphe

I.2. Le cas des réseaux viaires

I.2.3. Décrire le réseau converti en graphe

Une fois un réseau viaire converti en graphe, il est possible de le décrire au moyen de plusieurs mesures, que nous appelons des descripteurs de réseaux. Ces descripteurs ont été utilisés pour l’analyse des réseaux de transport dès les années 60, notamment par Garrison & Marble (1962) dans leur rapport The structure of

transportation networks, et par Kansky (1963) dans sa thèse Structure of transportation networks : relationships between network geometry and regional characteristics.

Depuis ces travaux pionniers, l’utilisation de descripteurs issus de la théorie des graphes pour étudier les réseaux de transport, et notamment les réseaux viaires, s’est largement répandue. Nous verrons que les travaux sur les réseaux viaires sont souvent le fait d’architectes partisans de la Space Syntax, mais aussi d’urbanistes, de géomaticiens, d’ingénieurs civils, ou encore de physiciens. Il existe également plusieurs collaborations interdisciplinaires. Nous verrons à la fin du chapitre que ces travaux peuvent être positionnés par rapport à deux tendances principales.

Les descripteurs de réseaux sont nombreux131, et plusieurs d’entre eux sont

pertinents pour le cas des réseaux viaires. Rappelons que notre objectif est d’explorer la relation entre les caractéristiques morphologiques des réseaux viaires et les conditions d’accessibilité offertes aux usagers. Pour cette raison, nous choisissons d’avoir recours à deux catégories de descripteurs : des descripteurs que nous qualifions de descripteurs morphologiques, et des descripteurs que nous qualifions de descripteurs d’accessibilité. Cette catégorisation des descripteurs de réseaux est propre à notre travail : dans la littérature en analyse de réseaux, ces descripteurs sont souvent utilisés de manière indifférenciée pour décrire la

130 Barthelemy (2011) et Lämmer et al. (2006) soutiennent que, même si les graphes planaires ne

permettent pas de prendre en compte le cas des ponts et des tunnels, ils demeurent pertinents pour représenter les réseaux viaires.

131 Voir notamment les archives du groupe fmr sur halshs, pour une revue des différents descripteurs,

notamment les articles de Ducruet : Les mesures locales d’un réseau, et Les mesures globales d’un

« structure132 des réseaux ». Toutefois, il nous semble intéressant de prendre appui

sur Haggett & Chorley (1969), qui différencient descripteurs des caractéristiques grossières des réseaux (measures based on gross characteristics), qui sont des descripteurs morphologiques, et descripteurs des caractéristiques des plus courts chemins (measures based on shortest-path characteristics), qui sont l’équivalent de nos « descripteurs d’accessibilité ».

Les descripteurs de réseaux peuvent également être classés en fonction de l’échelle à laquelle ils sont calculés. Certains sont globaux, calculés à l’échelle de l’ensemble du réseau. D’autres sont locaux, c’est-à-dire qu’ils sont calculés à l’échelle de chaque tronçon de voie. Toutefois, diverses méthodes permettent de décrire un réseau dans son ensemble, à partir de descripteurs calculés à l’échelle des tronçons. On peut par exemple décrire la distribution statistique du descripteur des tronçons, sur un histogramme par exemple, ce qui donne une idée de la manière dont se répartissent les valeurs du descripteur entre les tronçons du réseau (les tronçons prennent-ils des valeurs proches ou éloignées, pour le descripteur considéré ?). On peut également obtenir un résumé numérique du descripteur à l’échelle du réseau, en calculant la moyenne, la médiane (ou une autre valeur de référence) des valeurs prises par ce descripteur pour l’ensemble des tronçons. On peut enfin observer la

distribution spatiale du descripteur, en représentant (par un code couleur par

exemple) sa valeur pour chaque tronçon sur le graphe du réseau. Ces trois méthodes (description de la distribution statistique, résumé numérique, description de la distribution spatiale) sont souvent utilisées dans la littérature. Elles sont intéressantes dans le cadre de ce travail car elles correspondent à différentes manières de décrire les caractéristiques morphologiques d’un réseau viaire dans son ensemble, à partir d’observations réalisées sur ses tronçons.

Conclusion de la partie I

La théorie des graphes permet de représenter la morphologie des réseaux viaires de manière simplifiée. En effet, la morphologie d’un réseau viaire étant composée d’éléments linéaires (les voies) et d’éléments ponctuels (les intersections), le graphe, composé d’arêtes et de sommets, est intuitivement une bonne représentation de cette morphologie. Nous avons vu qu’il existait différentes manières de convertir la morphologie d’un réseau viaire en graphe. Certaines ne conservent que la topologie du réseau (graphe topologique) alors que d’autres en conservent la topologie et la géométrie (graphe géométrique). En outre, certaines représentations rendent la

132 Selon le CNRTL, une structure désigne l’agencement, entre eux, des éléments constitutifs d'un

morphologie du réseau abstraite, en convertissant les éléments linéaires en sommets et les éléments ponctuels en arêtes (graphe dual).

Chacune de ces représentations est adaptée à un objectif précis. Dans notre cas, nous avons choisi la représentation en graphe géométrique dual, car celle-ci permet de conserver la topologie, la géométrie et le dimensionnement du réseau, tout en permettant une focalisation sur les éléments linéaires, en l’occurrence les tronçons de voies.

Dans la partie II ci-dessous, nous présentons les descripteurs morphologiques que nous sélectionnons pour décrire les caractéristiques morphologiques des réseaux viaires. Nous verrons que la conversion de ces réseaux en graphes géométriques permet une description riche de ces caractéristiques. En effet, plus on s’éloigne de la représentation du graphe « pur », topologique, plus la description de la morphologie du réseau est précise, et les descripteurs morphologiques nombreux.