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Chapitre 1 : Du terrain ethnographique au cadre de la sociologie

2. Une recherche « sur » l’urbanisme : la sociologie pragmatique des épreuves pour

3.2. Le déclin de la cité industrielle par sa critique

L’idéal normatif dans l’ingénierie : développement des cités et chute sous l’effet de la critique

Le changement normatif du nouvel esprit du capitalisme dans l’ingénierie

L’identification d’une justification connexionniste de « l’approche globale » et des qualités du chef de projet dans les discours des enquêtés marque l’importance de la cité connexionniste dans le paysage normatif de l’ingénierie. En m’appuyant sur le travail de L. Boltanski et E. Chiapello, je peux soutenir l’hypothèse qu’il s’agit bien d’une manifestation du nouvel esprit du capitalisme dans le cadre de l’ingénierie urbaine, dans le cas de l’entreprise Gamma. Ce nouvel esprit s’appuie en effet sur cette nouvelle justification que constitue la « cité par projets ». Or la construction conceptuelle de cette cité s’appuie sur une analyse textuelle comparée de textes de management des années 1960 et 1990. C’est pourquoi les auteurs estiment qu’elle met en avant une évolution majeure de ces décennies dans les ressorts idéologiques qui soutiennent le capitalisme. Ce changement est caractérisé par l’apparition et la domination progressive du registre connexionniste dans un mouvement global au détriment des autres logiques normatives. Dans le cas des textes de management, leur analyse textuelle montre le maintien d’une importance des références industrielles, malgré un certain retrait233.

L’analyse qualitative par entretiens et observation dans le cadre de cette thèse ne permet pas un dénombrement quantitatif des occurrences234. En revanche, je peux extraire la structure

argumentative et constater une caractéristique de la progression du nouvel esprit du capitalisme dans le monde de l’ingénierie urbaine : la montée de la cité par projets s’effectue en grande partie à partir d’une critique visant la cité industrielle. Il ne s’agit en aucun cas de dire ici que la cité par projets s’approprie les critiques de la cité industrielle, de la même manière qu’elle incorpore les critiques sociales et artistes selon les auteurs du modèle. Il s’agit plutôt de montrer que la justification connexionniste survient au détriment de la cité industrielle. J’ai ainsi observé que les justifications connexionnistes sont systématiquement assorties d’une critique de la cité industrielle. En m’appuyant sur ce constat, il s’agit de montrer qu’elle met en lumière un changement normatif de l’ingénierie urbaine, qui passe d’un modèle industriel à un modèle par projet. J’en étudierai ensuite les conséquences dans les chapitres suivants.

Le modèle théorique des cités, en tant que sociologie de la critique, fournit les outils analytiques idoines pour identifier puis décrire précisément cette critique (ses ressorts argumentatifs, les objets qu’elle mobilise, ceux qu’elle disqualifie, ses appuis conventionnels et son efficacité) 235. Dans les

paragraphes suivants, je m’attacherai donc à synthétiser les principaux ressorts de cette critique de la cité industrielle repérables sur mon terrain d’enquête en les restituant à l’aide de cette sociologie de la dispute.

La modélisation sociologique de la critique

La critique se déploie dans ce qu’on peut appeler une « dispute », qui peut être plus ou moins conflictuelle (dans notre cas, les entretiens sont des argumentations critiques dans une situation bien peu conflictuelle). Rappelons que chaque situation de dispute donne lieu pour sa résolution à une épreuve qui permet de situer les objets et les personnes considérées selon une échelle de valeurs. De 233 L. Boltanski et E. Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, op. cit., p. 220‑222. Ils dénombrent dans les années 60, 6764 références au monde industriel contre 4972 dans les années 90 avec une apparition de 3996 références connexionnistes.

234 Une analyse textuelle transversale des justifications dans le monde de l’ingénierie serait un travail complémentaire à mener qui permettrait de corroborer certains résultats de cette thèse et d’évaluer plus précisément l’ampleur du changement et ses déclinaisons contingentes.

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manière générale, ce cadre considère que les acteurs impliqués dans la dispute sont capables d’identifier une définition particulière de la situation et de l’épreuve. Cette définition de la situation s’inscrit dans l’un des six mondes associés aux six cités (les auteurs postulent cette compétence d’identification grâce à la présence de dispositifs d’objets et de personnes permettant aux acteurs de comprendre la nature de la situation et d’identifier la cité afférente), par exemple lors d’un test d’une pompe, on sait en général qu’on cherchera à déterminer l’efficacité (identification d’une épreuve industrielle) et non la célébrité de la pompe (épreuve de renom).

Concernant la critique, pour L. Boltanski et L. Thévenot, elle s’appuie sur un travail de qualification des objets du monde, qui s’apparente à un travail de « dévoilement » de la part des acteurs. Ce dévoilement peut mettre en cause l’absence d’objet permettant d’évaluer la grandeur ou la présence d’objets ou d’états de personne relevant d’un monde différent perturbant l’épreuve. Les acteurs peuvent également dénoncer une épreuve ne correspondant pas au monde auquel appartiennent les objets en présence (face à l’enquête d’un inspecteur des impôts, du registre civique donc, faire valoir sa parenté avec le chef du service fiscal (monde traditionnel)). Il existe donc deux formes de la critique. D’une part, il y a celle du simple dévoilement visant à obtenir une qualification des éléments perturbateurs (les auteurs parlent de « machins ») ou l’absence d’éléments nécessaires à la mise en valeur. Cette qualification permet alors une réévaluation « juste » de la situation en maintenant la référence à la cité considérée au départ. L’objet de la dispute est donc de savoir si l’épreuve est pure, et amène donc à une clarification. Par exemple, lors d’une épreuve scolaire on peut dénoncer le fait que l’examinateur ait été attentif aux bonnes manières de sa classe sociale (grandeur domestique) et demander à revoir l’épreuve en réévaluant la prestation de l’étudiant sans considérer son attitude, sur des critères plus objectifs. D’autre part, le second type de critique est celui du « différend » et implique une confrontation entre deux mondes. Il débute certes par un dévoilement, mais consiste ensuite en un désaccord sur la cité considérée pour l’évaluation du rapport de grandeur des objets et personnes en présence. En fonction des cas, la résolution de la critique passe donc soit par un lissage cohérent de la situation dans un seul monde, le monde initial ou un autre en fonction de l’évolution de la dispute (un monde remporte la dispute) ; soit par la construction d’un compromis entre mondes qui sera alors par essence toujours précaire.

Le travail de dévoilement qui met en cause la validité d’une épreuve peut donc viser à montrer l’absence des dispositifs permettant d’attester de la qualité de grand d’une personne ou d’un objet. Par conséquent, dans ce cas de critique, l’exigence de justification devient plus grande et les grands devront faire montre le plus explicitement possible du sacrifice consenti qui leur permet l’accès à ce statut de grand. En effet, dans le modèle des cités, on accède au statut de grand en sacrifiant quelque chose (c’est la « formule d’investissement ») : par exemple l’attachement à une localisation pour la cité par projets (empêché par la mobilité et la flexibilité) ou tout simplement l’investissement en temps et argent pour la cité industrielle (permettant le progrès et la rentabilité).

Quant à elle, la critique sous forme de différend n’implique pas uniquement un dévoilement de pratiques déviantes dans un système de valeurs partagées. Le différend oppose au contraire plusieurs mondes. Après avoir relevé la présence de « machins » provenant d’un autre monde, les détracteurs ne vont donc pas les qualifier selon le monde actuel en terme dépréciatif (puisqu’ils y sont petits), mais ils vont au contraire tenir compte de leur grandeur dans un autre monde et retourner la situation. Les petits deviennent donc des grands dans un autre monde et à l’inverse les objets et personnes tenues comme grandes sont alors désignés comme petits dans le nouveau monde : « les critiques ont pour fonction de faire des équivalences entre les grandes des autres mondes et les petits du monde mis en valeur » (p. 282). Le désaccord porte bien sur le monde dans lequel l’épreuve doit se dérouler pour

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être légitime. Les auteurs proposent l’exemple de la « compétitivité des services publics » en indiquant qu’elle peut amener deux épreuves, de nature civique ou bien de nature marchande (p. 276).

Cet outillage théorique concernant la critique me permet d’analyser les ressorts argumentatifs et l’importance de la critique déployée dans le discours de « l’approche globale » à l’endroit de la cité industrielle. Il permet en effet de voir les pratiques, objets et personnes qui sont exclus, car considérés comme petits. Il permet également de voir les appuis conventionnels et dispositifs qui permettent à « l’approche globale » d’exclure ces éléments, car ne concourant pas suffisamment au bien commun. Il s’agit donc d’analyser les opérations de dénonciation menées par les acteurs de l’ingénierie.

Pour rappel et afin de comprendre la critique qui lui est adressée, figure ci-dessous une synthèse de la cité industrielle décrite selon la grammaire de L. Boltanski et L. Thévenot (p.252‑262).

Tableau 3 : synthèse de la cité industrielle selon la grammaire des économies de la grandeur (d’après Boltanski et Thévenot, 1991)

Élément des grammaires des cités Dans le cas de la cité industrielle

Principe supérieur commun L’efficacité, la performance, l’avenir

Relation naturelle entre les êtres Fonctionner : mettre en œuvre, liaison d’engrenage, être fonction de, rouage, interagir, avoir besoin, conditionner, nécessaire, intégrer, organiser, contrôler, stabiliser, ordonnancer, prévoir, implanter, adapter, détecter, analyser, prendre en compte, déterminer, mettre en évidence, mesurer, formaliser, standardiser, optimiser, résoudre, traiter

État de grand Performant : fonctionnel, fiable, opérationnel

État de petit Inefficace : improductif, non optimal, inactif, inadapté, en

panne

Déchéance de la cité L’action instrumentale : traiter les gens comme des

choses

Répertoire de sujets Les professionnels : expert, spécialiste, responsable,

opérateur Répertoire des objets et des

dispositifs

Les moyens : outil, ressource, méthode, tâche, espace, environnement, axe, direction, dimension, critère, définition, liste, graphique, schéma, calendrier, plan, objectif, quantité, variable, série, moyenne, probabilité, norme, facteur, cause

Rapport de grandeur Maîtriser

Épreuve modèle Test : lancement, mise en route, mise en œuvre,

réalisation Formule d’investissement (sacrifice

nécessaire pour être « grand »)

Progrès : investissement (effort, temps, argent), dynamique

Expression du jugement et formes de l’évidence

Effectif (mesure) : correct, en ordre de marche, fonctionnant

Dignité des personnes Le travail, l’énergie

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La dénonciation des objets du monde industriel : du hard au soft

La dénonciation de « l’approche techniciste »

Dans les entretiens sur « l’approche globale », la plupart des responsables de domaines de l’entreprise décrivent l’idéal de l’ingénierie en utilisant une argumentation par contraste. Leur idéal est souvent décrit par opposition à des pratiques jugées négativement : « mon boulot, c’est de garder le fil rouge

et de refuser l’approche techniciste »236 ou « j’essaye de détechniciser les offres »237. Elles sont l’adresse

d’une critique visant notamment un objet caractéristique du monde industriel : l’approche techniciste, et dévoilent ainsi des pratiques jugées inopportunes. Il s’agit bien d’une critique sous forme de dévoilement puisque pour eux l’approche techniciste n’a rien à faire dans un monde connexionniste et ils dénoncent donc son existence dans les projets. Ou à plus forte raison, cette approche doit être considérée comme ayant peu de valeur puisque les épreuves recherchées sont de nature connexionniste et dans ce monde l’approche techniciste est considérée comme « petite ». Dans la phrase citée, « garder le fil rouge » consiste bien à rester focaliser sur le « sens » du projet (une visée caractéristique de la cité par projets), par opposition à une approche techniciste qui consisterait à rechercher une maîtrise à tout prix de tous les paramètres du problème avant d’engager la réalisation du projet. En effet, la cité industrielle valorise la prévisibilité et la fiabilité en accordant une grande importance à la maîtrise. Les tenants de « l’approche globale » rejettent ainsi la focalisation sur la technique (qui vise à arraisonner la réalité pour sa maîtrise efficace238) au détriment de l’échange : « le

problème c’est que les chefs de projet sont parfois beaucoup dans la technique et sont de mauvais communicants »239.

Cette critique de l’approche technicienne repose aussi sur le refus de la prise en compte du sacrifice (de la forme d’investissement) relevant de la cité industrielle : « la question du temps est un faux

problème ou alibi pour certains chefs de projet [réticents à l’approche globale]. Ils restent trop dans la technique, or c’est du management de projet sans la responsabilité hiérarchique »240. Comme précisé

plus haut, dans le monde industriel, quelque chose est grand et valorisé au prix d’un investissement en temps et en argent. D’où la plainte maintes fois entendue dans les rangs de l’entreprise : « l’approche globale » nécessite du temps (et de l’argent). Or ce sacrifice n’a pas de valeur aux yeux de ceux qui considèrent que les épreuves sont de nature connexionniste et que l’investissement de forme procède plutôt du prix à payer pour la flexibilité et la mobilité. Dans cet extrait, la critique de la technique est réitérée pour valoriser le management de projet qui prend alors une connotation de souplesse et de dialogue. Ce changement transparait dans la schématisation de « l’approche globale » : il a été choisi de faire un schéma représentant les acteurs plutôt que les enjeux du projet (l’eau, l’environnement, l’énergie, etc.), puisque à chaque enjeu correspond un acteur avec qui travailler en dialogue (et un expert à mobiliser) et non plus une méthode pour traiter l’enjeu. Les méthodes et leur prévisibilité sont en effet des objets du monde industriel241. Dans « l’approche

globale » (et la cité par projets), l’objectivité apportée par des méthodes approuvées scientifiquement n’est plus privilégiée. À l’occasion d’une réunion de réflexion sur les pratiques de scénarios dans les projets, un chef de projet urbaniste prévient : « attention à la scientificité : il n’y a pas de « bon » 236 Entrevue avec Julien G., 38 ans, chef de projet en urbanisme et responsable de développement commercial, le 10 février 2014.

237 Remarque d’un chef de projet dans le domaine des transports, lors d’une réunion de travail interne sur les offres dans le domaine des transports, le 20 janvier 2015.

238 J. Ellul, Le Système technicien, op. cit.

239 Remarque d’une cheffe de projet en infrastructures urbaines lors d’une réunion de présentation de guides « approche globale », le 27 février 2014.

240 Discussion informelle avec Marc H., 43 ans, chef de projet et responsable de domaine en urbanisme, 2014. 241 Ce choix a été discuté et arbitré lors d’une réunion avec le directeur de l’innovation observée le 30 avril 2014.

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scénario au sens scientifique. C’est un choix politique, le choix du critère ou des indicateurs n’est pas objectif »242.

Éviter les « usines à gaz » : du hard au soft

La critique des objets du monde industriel contenue dans les discours sur « l’approche globale » dévoile l’inutilité d’objets concrets dans les épreuves connexionnistes ou leur non-pertinence. Un objet de ces griefs est désigné par la catégorie indigène dépréciative et répandue de « l’usine à gaz » :

« Les concurrents eux ils vont répondre à [l’approche globale] par des documents plus formels de suivi de leur approche si tu veux. Ils vont mettre tous les documents qui ont été cités : un plan qualité, un plan développement durable, un plan qualité environnementale, un plan management des risques … Ils vont mettre tout ça en œuvre, mais ça va être des belles usines qu’ils vont pas réussir à tenir la plupart du temps. Sauf que quand ils vendent le truc, tu vois, ça montre que c’est structuré. Tu vois ce que je veux dire ? Mais ça reste des usines à gaz qui à mon avis sont tellement lourdingues à mettre en œuvre et à piloter que finalement personne ne met en œuvre correctement […] Pof ! Tu donnes au maître d’ouvrage, après tu n’en entends plus jamais parler. »243

Cet extrait d’entretien traduit le rejet de la planification surnuméraire propre au monde industriel et sa volonté prédictive de maîtrise des aléas. Ce rejet se fait sur le mode du dévoilement puisque le

« finalement » dans la phrase « finalement personne ne met en œuvre correctement » correspond aux

opérateurs langagiers du dévoilement identifiés dans l’ouvrage De la justification244 (les « en fait »,

« en réalité », etc.). Ce dévoilement vise à critiquer la rigidité exprimée par l’adjectif « lourdingue », qui est un motif important de dévalorisation dans la cité par projets, puisqu’elle empêche la souplesse nécessaire à la prolifération des liens et des projets. Enfin le dévoilement montre que sous couvert d’une accumulation de « plans », leur utilité est nulle puisqu’ils ne sont pas mis en œuvre, montrant que ce qui pourrait être considéré comme grand dans le monde industriel doit être « en fait » évalué comme petit.

L’usage de telles méthodes contrevient à la flexibilité nécessaire dans les projets par une complication :

« Je pense qu’il faut qu’on bâtisse un peu pour chaque projet des grilles, des cartes un peu d’enjeux développement durable, un peu dégrossi par rapport à chaque sujet, sans que ça reste une usine à gaz. On voit bien que quand par exemple, je prends la méthode du conseil général du nord sur la route durable. Quand t’as un document de 150 pages ou 300 pages qui te présente simplement la structure de la grille enfin je veux dire c’est compliqué. »245

Cette complication est apportée par la volonté de scientificité justement rejetée par certains enquêtés (cf. ci-dessus) : dans la cité industrielle, la preuve scientifique est valorisée pour justifier une solution. Et puisque scientificité rime avec rigueur et exhaustivité, on aboutit facilement à des « usines à gaz » qui n’ont aucune utilité dans les épreuves connexionnistes que ces critiques voudraient voir à l’œuvre. On se situe donc bien dans un différend, puisqu’on assiste à une confrontation de mondes par le dévoilement de l’étrangeté des usines à gaz : alors que d’autres seraient tentés de vouloir répondre à des épreuves industrielles (par des usines à gaz), les promoteurs de « l’approche globale »

242 Réunion de présentation de guides « approche globale », le 27 février 2014. Remarque de Julien G., 38 ans, chef de projet en urbanisme et responsable de développement commercial, le 10 février 2014.

243 Entretien avec Frédéric P., 48 ans, chef de projet et responsable de domaine en infrastructures urbaines et de transport, 2014.

244 L. Boltanski et L. Thévenot, De la justification, op. cit., p. 270.

245 Entretien avec Frédéric P., 48 ans, chef de projet et responsable de domaine en infrastructures urbaines et de transport, 2014.

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revendiquent l’utilisation d’objets valorisés dans les épreuves connexionnistes (outils de communication souples par exemple).

Un autre exemple réside dans l’un des projets présentés lors d’un événement commercial de l’entreprise visant à vanter les mérites de « l’approche globale » et ses vertus différenciantes. À cette occasion, le projet de « chantiers furtifs » a été évoqué et loué en s’appuyant sur des objets du monde connexionniste tout en s’appuyant sur une critique du monde industriel du même ordre. Ce projet consiste en une nouvelle approche des chantiers visant à réduire les nuisances pour les riverains. Le sous-titre du projet est évocateur : « La co-construction : l’échange (le soft) au service du chantier (le

hard) ». Les approches « soft » sont bien valorisées puisque favorisent le dialogue (une pratique de

grand dans la cité par projets). Le chef de projet qui l’a présenté a insisté sur l’avantage de celui-ci par rapport au projet proposé par la concurrence : ils avaient proposé un très grand tableau multicritère comportant pléthore d’indicateurs, alors qualifié « d’usine à gaz » et critiqué comme étant inefficace et inadapté. De son côté les « chantiers furtifs » sont de « l’approche globale » « car ce n’est pas qu’une

réponse technicienne ». Toute une partie de la présentation consiste d’ailleurs à montrer comment le

projet tire parti des « outils de communication interactifs » et permet « d’exploiter le potentiel des

TIC ». Les nouvelles technologies de l’information sont identifiées par L. Boltanski et E. Chiapello

comme étant des objets significatifs de la cité par projets.

L’échec d’une précédente thèse CIFRE sur « l’approche globale »

Le principe de symétrie, commun à tous les cadres de sociologie pragmatique, consiste à considérer