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Introduction au premier chapitre

2. La créativité, une notion au cœur des théories de classes

Le point précédent a montré que la psychologie constitue un champ de recherche particulièrement porteur en ce qui concerne la conceptualisation de plusieurs notions clés liées à la créativité. Afin de poursuivre ce travail épistémologique, le point présent se focalise quant à lui sur les nombreux apports théoriques issus des travaux de sociologie. En effet, aborder la notion de créativité à travers un prisme sociologique nous paraît pertinent à plusieurs égards. D’abord, cette discipline des sciences humaines et sociales contribue à préciser davantage les contours théoriques de l’individu créatif en s’appuyant entre autres, sur diverses approches permettant de catégoriser le capital humain. Ces catégorisations sont très souvent réalisées en mobilisant les notions de classe et groupe socio-professionnels. De fait, en proposant d’analyser certains apports sociologiques relatifs à la créativité, notre seconde ambition est de mettre en lumière les fondements sur lesquels s’appuie une large partie de la théorie relative à la classe créative. Comme nous l’avons expliqué brièvement en introduction de chapitre, cette notion, développée par Richard FLORIDA a connu un succès retentissant dans les sphères médiatiques et économiques à compter des années 2000. Or, d’un point de vue scientifique, il est primordial d’expliquer pourquoi les principaux fondements de cette théorie sont limités et quelles sont les alternatives proposées par d’autres universitaires qui la remettent constamment en question.

2.1.Du capital humain à la classe créative.

À travers ce premier point, notre ambition est de présenter les différentes théories sociologiques qui participent de la conceptualisation de la classe créative. Dans le cadre de nos recherches, nous avons rapidement opéré un rapprochement entre la question de la créativité et celle du capital humain. Or, avant de parler de classe créative en tant que telle, la question de la différenciation du capital humain par le biais de groupes sociaux distincts s’inscrit au cœur de la recherche scientifique et notamment des travaux de sociologie. Nous pensons qu’il est pertinent de présenter certaines de ces théories de classes qui ont largement nourri la notion de classe créative au début des années 2000.

- Catégoriser le capital humain à travers la notion de classe sociale.

L’un des principaux apports de la sociologie en ce qui concerne les éléments de conceptualisation de la créativité repose sur la notion de classe sociale. À travers elle il devient effectivement possible de caractériser le capital humain en dépassant la seule dimension individuelle et en proposant une approche collective qui tend à synthétiser les caractéristiques d’un même groupe social.

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Dans un souci de clarté, il est donc intéressant de commencer par définir la notion de classe sociale qui aurait une influence réelle sur les croyances, les comportements ou les styles de vie (TREMBLAY, CHICOINE, 2007, d’après O’CONNOR, 2006). En sociologie, le terme de classe sociale s’entend donc comme « [l’ensemble des] groupes sociaux dans une société où il

n’existe pas de hiérarchie sociale officielle et juridique mais dans laquelle on observe une tendance à l’hérédité des positions sociales ; les membres d’une même classe se caractérisent par une même place dans les rapports de production, un mode de vie et des ressources propres et le même sentiment d’appartenir à ce groupe » (CAPUL, GARNIER, 2005, p. 425).

L’idée de groupe est ici particulièrement prégnante dans le sens où elle permet de réellement catégoriser le capital humain présent sur un territoire donné, en fonction de divers critères en tête desquels figure souvent la catégorie professionnelle. Or, au-delà de cette première définition qui a le mérite de poser les fondements des théories de classes en sociologie, d’autres éléments permettent également d’approfondir les déterminants propres à toute classe sociale. De ce point de vue, les réflexions de Karl MARX et Friedrich ENGELS publiées notamment dans le Manifeste du Parti communiste en 1848, constituent une référence majeure. C’est dans cet ouvrage que K. MARX va formuler une théorisation de la lutte des classes incarnées par la bourgeoisie et le prolétariat en déclarant notamment dès les premières pages que : « [l]’histoire

de toute société jusqu'à nos jours n'a été que l'histoire de luttes de classes. » (MARX, ENGELS,

1848, p. 6).Si cette première théorie n’est pas intimement liée à l’émergence de réflexions sur la créativité à proprement parler, elle n’en reste pas moins une base ayant permis d’amorcer un ensemble de travaux s’articulant autour de la notion de classe sociale. Par ailleurs, d’un point de vue géographique, les thèses de K. MARX et de F. ENGELS sont au cœur de nombreux travaux issus de l’école radicale (chapitre 3). À ce titre, l’on peut d’ores et déjà citer l’ouvrage majeur d’Henri LEFEBVRE sur le droit à la ville, publié en 1968 au même titre que l’ensemble de l’œuvre du géographe radicale britannique David HARVEY. Ces travaux soulignent en effet l’importance de la notion de classe à travers le creusement des inégalités pour les classes moyennes et populaires dans un contexte capitaliste et néolibéral.

- Caractériser les classes sociales en mobilisant des groupes socio-professionnels distincts.

Avant de s’intéresser au cas spécifique de la classe créative, il convient à travers ce point de montrer comment le critère de l’occupation professionnelle participe de la caractérisation des classes sociales dans la période contemporaine et à l’échelle internationale.

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Pour le chercheur Yannick LEMEL, « [l]’analyse des sociétés au prisme des classes sociales

a une très longue tradition. De tout temps, semble-t-il, l’une des manières de se représenter l’organisation des sociétés dans l’histoire occidentale a été de faire référence à un nombre limité de groupes distincts au sein de celles-ci. » (LEMEL, 2004, p. 110). Dès lors, l’une des

méthodes privilégiées pour caractériser la population d’une société est de procéder à un regroupement par type d’emploi occupé. Cette méthodologie permet entre autres de distinguer les classes sociales les plus dominantes et leur évolution au gré des époques.

Si dans la deuxième moitié du XIXème siècle le Bureau of the Census américain établit une première tentative de classification de la société étasunienne à travers la variable des professions occupées (EDWARDS, 1943 ; REICH, 1997), l’une des premières théories de classes à laquelle R. FLORIDA fait référence pour conceptualiser la notion de classe créative est celle du sociologue américain Charles Wright MILLS. Ce dernier décrit les changements sociaux et sociétaux prévalant aux États-Unis au milieu des années 1920. Selon lui, ces transformations sociales sont en partie induites par l’émergence des white collars, la classe de travailleurs dominants qui s’opposent alors aux ouvriers des grandes manufactures (les « cols bleus »). Cette théorie (MILLS, 1951) a été formulée dans le contexte d’un important changement économique où l’on note le passage d’une économie manufacturée à une économie de services.

Pour C.W. MILLS, les « col blanc » correspondraient aux travailleurs de Wall Street évoluant principalement dans le monde des affaires et de la finance. Cette théorie repose sur une méthodologie faisant appel à la fois aux données statistiques sur l’emploi et aux entretiens menés avec certains des membres de cette classe. R. FLORIDA s’appuie par ailleurs sur les mêmes référents méthodologiques pour développer la théorie de la classe créative. Cependant, malgré les apports significatifs entraînés par l’essor de ces réflexions, force est de constater qu’elles comportent certains biais. En effet, la théorie de classe développée par C.W. MILLS se focalise sur des individus au profil professionnel très spécifique qui correspondraient plutôt à l’idéal-type du travailleur dominant (LANG, 2006 ; DARCHAN, TREMBLAY, 2008 ; TREMBLAY, TREMBLAY, 2010).

À la suite de cette première théorie, plusieurs autres approches vont s’intéresser à l’émergence des classes dominantes. D’abord, dans les années 1960, l’économiste autrichien Fritz MACHLUP mène une série de travaux repris par le théoricien Peter DRUCKER et qui aboutissent à la théorie des « knowledge workers » (i.e. les « travailleurs du savoir »). Pour F. MACHLUP et P. DRUCKER, il s’agit alors de montrer quels sont les individus qui dominent

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en termes socio-économiques et quel type de profession ils occupent. À ce titre, les membres de la classe des « knowledge workers » regroupent des individus travaillant dans les secteurs de l’analyse de données, de planification, de programmation ou plus simplement dans des activités de recherches diverses (MACHALUP, 1962 ; DRUCKER, 1969). Si cette nouvelle classe sociale domine, c’est avant tout parce qu’elle est au cœur du traitement et de la manipulation de l’information brute.

Par la suite, au début des années 1970, le sociologue américain Daniel BELL analyse les changements économiques de la société dans laquelle il évolue pour finalement aboutir à la conceptualisation d’une nouvelle classe sociale qu’il nomme la « classe méritocratique » (BELL, 1973). Cette dernière se définit également par les travailleurs qui la composent et qui sont avant tout des cadres, des scientifiques, des ingénieurs ou des managers par exemple. D’après D. BELL ce sont ces catégories professionnelles qui dominent dans les sociétés occidentales des années 1970, au moment où l’on constate une transition entre l’économie postindustrielle et l’émergence d’entreprises valorisant le mérite des travailleurs qualifiés. En outre, à la fin des années 1970, les chercheurs américains Barbara et John EHRENREICH publient dans la revue Radical America, un article intitulé : « The Professional-Managerial

Class » en référence à la nouvelle classe moyenne composée de travailleurs intellectuels

salariés qui se situent entre la bourgeoisie et le prolétariat moderne, dans un contexte éminemment capitaliste (EHRENREICH, EHRENREICH, 1977).

Dans le sillage de ces théories multiples, les travaux de Robert REICH, publiés dans les années 1990, acquièrent une place prépondérante. En partant des premières catégories du Bureau of

the Census américain, R. REICH va réordonner les occupations professionnelles initiales pour

finalement faire émerger une nouvelle classification autour de trois types d’emplois : les services de production courante, les services personnels et enfin les services des manipulateurs de symboles (REICH, 1997). Pour l’auteur, « [l]es services de manipulation de symbole, […],

incluent toutes les activités de résolution de problèmes, d’identification de problèmes et de courtage stratégique […] » (REICH, 1997, p. 159). Les « manipulateurs de symboles » sont

donc des travailleurs diplômés (le plus souvent détenteurs d’un BAC+4 a minima) et qui « […]

se qualifient eux-mêmes de chercheurs, d’ingénieurs, d’informaticiens, d’avocats, et même [de] comptables créatifs ». (REICH, 1997, p. 163). Cette théorie comporte deux idées fortes.

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La première concerne le type de ressources auxquelles les « manipulateurs de symboles » s’intéressent et qu’ils vont échanger. Ici, il ne s’agit plus de biens ou de services classiques mais plutôt de ressources immatérielles telles que des mots, des idées, des données ou encore des représentations orales ou visuelles. La seconde repose sur le fait que cette théorie confère une importance toute particulière aux territoires sur lesquels s’ancrent les classes sociales dominantes. Effectivement l’auteur insiste sur l’importance de la concentration géographique dans l’apprentissage des « manipulateurs de symboles ». À ce titre il note l’intérêt de la localisation des universités à proximité des marchés mondiaux.

D’une manière générale, en étant proches spatialement, les « manipulateurs de symboles » parviendraient à créer un avantage comparatif spécifique qui repose sur l’émulation, les échanges informels et tout ce qui relève de l’effet cafétéria. Par ailleurs, la forte concentration de « manipulateurs de symboles » sur un territoire donné induirait une forme de développement local dans le sens où cette classe sociale va dynamiser le territoire au sein duquel elle est implantée. Ce dynamisme local s’exercerait en effet par le biais de petits commerces qui correspondent aux habitudes de consommation des « manipulateurs de symboles » mais aussi, de bars ou de restaurants.

Le développement de théories de classes dominantes reste une question importante au début des années 2000. Elle transparaît particulièrement bien dans les recherches du journaliste américain David BROOKS qui développe une réflexion autour de la classe des « bobos ». Ce néologisme issu de la contraction des termes bourgeois et bohème, traduit en réalité l’émergence d’une nouvelle classe sociale fondée sur les goûts et les attentes de certains groupes d’individus, vivant dans les centres urbaines (BROOKS, 2000). Si cette tentative de structuration sociale a été critiquée pour son manque de scientificité (CLERVAL, 2005), elle a pour autant connu un important succès médiatique et constitue l’une des théories de classe les plus comparables à celle de la classe créative au sens de R. FLORIDA. Plus concrètement, les « bobos » constitueraient un nouveau groupe social qui annihilerait les ruptures entre la classe bourgeoise aisée, traditionnelle orientée politiquement à droite et tournée vers une logique de consommation ; et la classe bohème dont les idéaux passent par un refus de la société de consommation, qui serait orientée politiquement à gauche, qui défendrait le respect de l’environnement et prônerait la liberté sexuelle.

Finalement, avant de s’intéresser plus précisément au cas de la classe créative, il convient de souligner l’abondance des sources concernant les tentatives de catégorisation du capital humain au sein d’une société ou d’un territoire.

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Les différentes théories présentées précédemment ont grandement nourri l’argumentaire de R. FLORIDA et permettent d’ores et déjà de nuancer la portée révolutionnaire de la théorie de la classe créative. L’ensemble de ces contributions défend finalement l’idée de l’émergence d’une classe de managers internationaux qui serait dotée d’une force symbolique importante (WAGNER, 2015) et qui s’inscrirait comme une nouvelle classe dominante au même titre que les individus créatifs.

2.2.La théorie spécifique de la classe créative.

Bien que fortement inspirée par l’ensemble des travaux précédents, la théorie de la classe créative présentée par Richard FLORIDA en 2002 marque un tournant conceptuel – ne serait-ce que par son accueil médiatique -, conserait-cernant la notion de créativité. En présentant serait-cette théorie, R. FLORIDA fait d’abord le constat d’une société contemporaine où la créativité constituerait une ressource de premier plan induisant de nouveaux savoirs et de nouvelles technologies. À la différence des chercheurs en psychologie qui tendent à prioriser les recherches autour de l’individu créatif, R. FLORIDA affirme dès le départ que les potentialités créatives s’inscrivent dans le cadre d’un processus de classe (FLORIDA, 2002). Selon lui, la créativité diffère de l’intelligence et implique plutôt un esprit de synthèse, une certaine confiance en soi ainsi qu’une habileté à prendre des risques.

Le processus créatif est quant à lui envisagé sous l’angle de la destruction – créatrice au sens de Joseph Aloïs SCHUMPETER (SCHUMPETER, 1942). En effet, R. FLORIDA estime que la créativité permet de détruire un bien, un service ou une idée tout en produisant un output de meilleure qualité. Il existerait selon lui trois formes de créativité : la créativité technologique, la créativité économique et la créativité artistique. Ces dernières seraient par ailleurs intimement liées les unes aux autres et dépendraient notamment de facteurs environnementaux et sociaux. C’est d’ailleurs ici que repose la potentielle originalité de la théorie de R. FLORIDA. En effet, contrairement aux autres approches théoriques qui considèrent principalement les professions occupées (facteur économique) comme élément caractéristique d’une classe sociale, R. FLORIDA affirme que l’emploi occupé n’est pas le seul caractère constitutif de la classe créative.

La classe créative inclurait ainsi plusieurs groupes professionnels mais aussi et surtout, des individus qui partageraient un ensemble de caractéristiques telles que : « […] l’individualisme

et l’affirmation de soi ; le mérite ; la diversité et l’ouverture d’esprit (acceptation des différences culturelles et sexuelles) » (VIVANT, 2006, p. 156).

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La notion de diversité fait par ailleurs écho à l’œuvre de la sociologue américaine Jane JACOBS qui montre dès les années 1960, l’importance de la diversité sociale et ethnique au sein des territoires afin de catalyser et d’exalter le potentiel créatif des individus qui y évoluent (JACOBS, 1961, 1970, 1984 ; DESROCHERS, 2001).

Au-delà de quelques apports généraux sur la notion de créativité, R. FLORIDA propose avant tout de mettre à jour la structure sociale des États-Unis et son évolution tout au long du XXème siècle en montrant comment les changements de mentalité ont contribué à l’émergence de la classe créative. Pour l’auteur américain, cette classe serait particulièrement ouverte d’esprit au point d’ériger la tolérance comme principale valeur individuelle et sociale.

D’un point de vue méthodologique, R. FLORIDA conceptualise l’indice de créativité globale à partir de la théorie des « 3 T » qui regroupe justement un indicateur de tolérance, associé à ceux de technologie et de talent. L’indice de créativité globale constitue alors le principal outil statistique pour mesurer et quantifier le potentiel créatif de chaque région étasunienne. La théorie des « 3T » fournit ainsi plusieurs données statistiques sur la classe créative.

Ces chiffres sont exploités par R. FLORIDA dans l’ensemble de ses ouvrages et viennent étayer le principal argument de l’auteur : « Some 38 million Americans, 30 percent of all employed

people, belong to this new class. » (FLORIDA, 2002, p.8)4. D’après les travaux de R. FLORIDA, la classe créative inclurait donc près d’un tiers des travailleurs américains et concurrencerait le secteur des services concernant la création de richesse. À partir de ce premier constat, il est intéressant d’analyser plus précisément le profil des individus inclus dans la classe créative selon l’auteur américain. De ce point de vue, la méthode retenue reste similaire à celle des autres théories de classes et s’appuie avant tout sur une catégorisation par l’occupation professionnelle. Ainsi, R. FLORIDA fait le choix de décomposer la structure sociale américaine en quatre groupes sociaux distincts : la classe créative, la working class, la classe de services et enfin les travailleurs du secteur agricole.

La classe créative se décompose en deux sous-catégories : le Super-Creative Core d’une part et le groupe des Creative Professionals d’autre part. Concernant les occupations professionnelles présentes dans le groupe du Super-Creative Core, on trouve des activités en lien avec l’informatique et les mathématiques ; l’architecture et l’ingénierie ; les sciences de la vie, les sciences physiques et les sciences sociales ; l’éducation, la formation et les activités

4 « Quelques 38 millions d’Américains, 30% des travailleurs, appartiennent à cette nouvelle classe » (FLORIDA, 2002, p.8. Traduction personnelle).

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bibliothécaires ; les arts, le design, l’entertainment, les sports et les médias. Ces occupations professionnelles sont donc globalement celles des scientifiques et des ingénieurs, des universitaires et intellectuels, des poètes et des écrivains, des artistes et des spécialistes de l’entertainment, des acteurs, des designers, des architectes ou encore des éditeurs, des chercheurs et des analystes. Le sous-groupe des Creative Professionals inclut quant à lui les activités de management, le secteur de la finance, les activités juridiques, le secteur de la santé ou encore les activités de ventes haut de gamme. À ces activités correspondent donc les emplois qui permettent d’aboutir à une résolution créative de problèmes très spécifiques en mobilisant un stock de connaissances complexes. Plus concrètement ce sous-groupe réunit entre autres, des avocats, des managers ou des médecins. Dès lors, l’on constate que la définition de R. FLORIDA est particulièrement large et qu’elle dépasse le cadre de l’économie créative (objet du chapitre 3).

En incluant des groupes professionnels aussi disparates (du point de vue des revenus mais aussi des orientations politiques ou des modes de vie) que les médecins, les artistes ou les manageurs, la classe créative s’opacifie pour finalement se déliter dans une succession de professions uniquement reliées par une capacité à s’appuyer sur des connaissances ou des techniques précises (HALBERT, 2010). Une telle réalité nous permet de suggérer que les pourcentages et les ordres de grandeur ardemment défendus par R. FLORIDA, présentent plusieurs biais qui contraignent fortement les analyses statistiques.

Parallèlement à ce premier groupe social, R. FLORIDA présente également la working class, ainsi que la classe de services et, dans une moindre mesure, les travailleurs du secteur agricole. La working class regroupe principalement les activités de construction et d’extraction, de réparation, d’installation et de maintenance, de production au sens large ou encore de transport de marchandises. Cette classe sociale est celle qui a connu le plus grand essor en termes d’emplois occupés sur la période 1920-1950. Cependant, au début des années 2000, elle ne représente plus qu’un quart des travailleurs américains selon l’auteur. Enfin, la classe de