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1.4 Le cotransporteur Na + /glucose (SGLT1)

1.4.5 Les courants transitoires

Chez un ovocyte de Xenopus non-injecté, lorsqu’un saut de Vm est appliqué à partir d’une valeur donnée (-50 mV), un large courant transitoire (Ic) est observé (Figure 1.14A). Le circuit électrique équivalent à un ovocyte contient une résistance et une capacitance. Le courant transitoire est donc dû à la charge ou la décharge de la capacité membranaire Cm. L’intégrale de ce courant transitoire tracée en fonction de la valeur de Vm appliquée sera linéaire et la pente représentera la capacité membranaire, puisque

dt dV C I m m c = . Chez un

ovocyte de Xenopus, la capacité membranaire est typiquement de l’ordre de 300-350 nF (ou

environ 10 µF/cm2 si l’on considère que le rayon moyen des ovocytes est de 0.5 mm). De plus, la vitesse de décroissance du courant, ou la constante de temps du courant capacitif,

sera directement dépendante de la vitesse à laquelle le Vm a été appliqué et sera de l’ordre de 0.5-2 ms en électrophysiologie en deux micro-électrodes.

Avec un ovocyte qui exprime le cotransporteur SGLT1, des courants transitoires sont aussi observés (Figure 1.14B) mais ils ne sont plus simplement linéaires en fonction du Vm appliqué et leur vitesse est significativement plus lente que la vitesse du saut de Vm. Ils ont été observés pour la première fois chez les ovocytes de Xenopus dans les années 1990

(Umbach et al., 1990; Parent et al., 1992a), ils sont dépendants de la présence de Na+ et une concentration saturante de Pz ou de glucose les inhibe complètement. C’est pour ces raisons que le premier modèle cinétique basé sur les courants transitoires de SGLT1 postule que lors d’un changement de Vm disons de 0 mV vers une valeur négative, ils proviennent de 1) du changement de conformation dépendante du Vm qui amène les sites de liaison au Na+ du milieu intracellulaire vers le milieu extracellulaire et 2) de la liaison des ions Na+ aux sites extérieurs du transporteur. Les courants transitoires sont caractérisés par leur constante de temps dépendante du Vm (τ-V) et par la courbe de charge transférée en fonction du Vm (Q- V). La quantité de charges transférées qui est mesurée lors d’un saut de voltage de -50 mV vers différents voltages (que l’on nomme QON par analogie avec les charges de «gating»

chez les canaux Kv), compris entre +75 mV et -175 mV par exemple, est aussi transférée lors du retour au voltage initial de -50 mV. Cette charge est nommée QOFF. QON est donc toujours égale à QOFF. Lorsque la concentration des ions Na+ extracellulaire est diminuée, l’amplitude des courants transitoires diminue, la constante de temps est modifiée et le V1/2 (voir Figures 1.15 et 1.16), le Vm auquel la moitié de la charge est transférée est déplacée vers les Vm négatifs (Chen et al., 1996). En absence de Na+ extracellulaire, il est encore possible d’observer des courants transitoires, à des Vm beaucoup plus négatifs et avec des constantes de temps plus rapides (Chen et al., 1996).

Figure 1.14 : Courants transitoires sensibles à la Pz chez un ovocyte injecté à l’eau (A) et chez un ovocyte exprimant SGLT1 (B).

La soustraction effectuée pour obtenir les courants sensibles à la Pz permet d’éliminer les courants capacitifs qui sont identiques avec ou sans Pz. Tiré de (Chen et al., 1996).

Figure 1.15 : Constantes de temps (rapide et lente) des courants transitoires de SGLT1 pour différentes concentrations de Na+ extracellulaire.

La constante de temps lente (τslow) est représentée par les symboles carrés noirs et la constante de temps rapide (τfast) par les triangles noirs. Les traits représentent les prédictions du modèle cinétique proposé. Tiré de (Chen et al., 1996).

Figure 1.16 : Courbe de charges transférées en fonction du voltage membranaire (Q-V) pour différentes concentrations extracellulaires de Na+ chez hSGLT1 mesuré en cut-open

ovocyte.

Les traits représentent les prédictions du modèle cinétique proposé. Tiré de (Chen et al.,

1996).

Les courants transitoires de SGLT1 peuvent être extraits des courants totaux de plusieurs façons. L’une d’elles, utilisée par le groupe de Wright, consiste à faire un lissage de courbe des courants mesurés en fonction du temps pour plusieurs Vm, avec l’expression suivante :

( )

t I t I t Iss I + ⎠ ⎞ ⎜ ⎝ ⎛− + ⎟ ⎠ ⎞ ⎜ ⎝ ⎛− = 2 2 1

1exp

τ

exp

τ

Équation 1

I1exp(-t/τ1) représente le courant capacitif de l’ovocyte, I2exp(-t/τ2) le courant transitoire associé à SGLT1 et Iss, le courant stationnaire. En supposant la présence d’une seule exponentielle pour les courants transitoires dépendants de SGLT1, selon la théorie des états de transitions d’Eyring, le groupe de Wright fait la supposition qu’une seule étape est nécessaire pour que le transporteur expose ses sites du Na+ au milieu extracellulaire. De cette façon, ils obtiennent les constantes de temps ainsi que les amplitudes, qui permettent de calculer la charge transférée.

L’autre méthode consiste en la soustraction entre le courant en présence de Na+ et celui en présence de l’inhibiteur spécifique de SGLT1, la Pz. En présence de Pz, le courant

représente essentiellement le courant capacitif de l’ovocyte plus tous les courants non spécifiques à l’expression de SGLT1. Il suffit ensuite de soustraire le courant stationnaire résiduel, représentant le courant que l’on appelle le courant de fuite de Na+ (Mackenzie et al., 1998; Loo et al., 1999), un courant présent en absence de glucose qui est inhibé par la

Pz. La quantité de charge transférée dans le champ électrique membranaire lors d’un changement de voltage s’obtient en faisant l’intégrale de ces courants transitoires en fonction du temps. La charge transférée en fonction du voltage appliqué est approximativement évaluée par une relation de Boltzmann tel que :

⎥ ⎦ ⎤ ⎢ ⎣ ⎡ ⎟ ⎠ ⎞ ⎜ ⎝ ⎛ ⎠ ⎞ ⎜ ⎝ ⎛ + = − 2 1 max 1 exp 1 V V RT zF Q Q Q m hyp Équation 2

où Qhyp est la charge transférée au voltage membranaire (Vm) hyperpolarisant, Qdep la charge transférée au Vm dépolarisant, on obtient alors la relation Qmax =QdepQhyp, z est la valence de la charge transférée, V1/2 le Vm auquel la moitié de la charge est transférée, F est la constante de Faraday dont la valeur est de 96 500 C/mol, R la constante des gaz (8.314 J/mol/K) et T la température en degrés Kelvin (K). Par ailleurs, les constantes de temps sont analysées avec les courants totaux desquels on soustrait le courant en présence de Pz. Deux courbes exponentielles sont nécessaires pour bien lisser ces courants, en absence ou en présence de Na+. Cela implique que même en absence de Na+, un minimum de deux transitions (donc trois états) sont requises pour que le transporteur expose ses sites du Na+ au milieu extracellulaire (Chen et al., 1996).

Lorsque la mutation de certains résidus a pour effet fonctionnel un déplacement de la courbe de charge transférée, il peut être tentant de penser qu’ils puissent constituer soit une partie de la charge mobile associée au cotransporteur soit un élément qui influence la position de la charge mobile. Pourtant, la nature moléculaire de cette structure (le «senseur de voltage») pourrait être difficile à déterminer puisqu’un déplacement de la courbe Q-V peut être observé en mutant les résidus de la boucle entre les STM IV et V (Lo et Silverman, 1998a) ainsi que plusieurs autres acides aminés, tel que démontré par le groupe de Wright (Panayotova-Heiermann et al., 1994; Panayotova-Heiermann et al., 1998).

Contrairement à ce qui fut trouvé chez les canaux Kv (voir section 1.2.1), aucun segment de SGLT1 ne contient plusieurs charges très bien conservées dans la famille SLC5 pouvant générer ces courants transitoires. Bref, l’origine moléculaire des courants transitoires en absence de Na+ chez SGLT1 n’est pas encore définie.

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