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1.2 Mécanisme de fonctionnement

1.2.2 Ca 2+ ATPase, SERCA

SERCA est une Ca2+ ATPase de type P (i.e. qui implique une phosphorylation de la protéine à chaque cycle de transport) contenue dans le réticulum sarcoplasmique du muscle squelettique (pour revue sur les ATPases, voir Horisberger, 2004). SERCA pompe, au coût d’une molécule d’ATP à chaque cycle, les ions Ca2+ qui s’accumulent dans les cellules musculaires après une contraction pour qu’ils retournent dans le réticulum sarcoplasmique afin de permettre la relaxation musculaire. L’énergie de l’hydrolyse de l’ATP permet à SERCA de transporter deux ions Ca2+ contre leur gradient de concentration, tandis que deux ou trois H+ sont transportés à contre-sens (Yu et al., 1993).

Le processus de transport des ATPases est complètement réversible, cela veut dire que lorsque le ratio ATP/ADP de la cellule est faible, les ATPases peuvent effectuer la synthèse d’ATP grâce au gradient électrochimique des ions transportés (H+, Na+, Ca2+). Le principe de fonctionnement de cette pompe est illustré schématiquement dans les insertions

des Figure 1.10 et 1.11. La pompe adopte deux conformations principales, E1 et E2, où les sites de liaison aux cations sont respectivement accessibles du côté cytoplasmique et du côté de la lumière du réticulum, dans le cas de SERCA, et chacune existe dans les états phosphorylés ou non (E1P et E2P). Les ions Ca2+ se lient à la conformation E1 du côté cytoplasmique, ce qui permet la liaison de l’ATP puis son hydrolyse. L’hydrolyse d’ATP engendre un changement de conformation de la pompe, les ions Ca2+ sont relâchés dans la lumière et les H+ peuvent se lier à leurs sites. Le phosphate est relâché à son tour dans le cytosol et l’enzyme peut recouvrer sa conformation E1 en libérant les H+ du côté cytoplasmique. Il existe des états où les ions sont attachés à la pompe mais n’ont pas accès aux milieux environnants. Il existerait deux portes qui bloqueraient le passage du côté cytoplasmique et du côté extracellulaire (ou de la lumière dans le cas de SERCA). L’existence de ces deux portes fut démontrée sur la Na+/K+ ATPase sur laquelle une toxine marine, la palytoxine peut se lier. La palytoxine confère à la pompe des propriétés d’un canal cationique non-sélectif tout en conservant certaines caractéristiques du mode d’accès alternatif des sites de liaisons aux ions (Artigas et Gadsby, 2002, 2003).

SERCA a été cristallisée avec ses ions Ca2+ (E1) en 2000 (Toyoshima et al., 2000). Ce qui est tout à fait exceptionnel dans le cas de SERCA, c’est que des structures 3D ont par la suite été trouvées dans différents états : sans Ca2+ (E2) (Toyoshima et Nomura, 2002), avec l’inhibiteur (thapsigargine) (E2-TG) (Toyoshima et Nomura, 2002) et en présence d’un analogue de l’ATP, l’AMPPCP (E1-AMPPCP) (Toyoshima et Mizutani, 2004). Ces différentes structures ont permis d’identifier des changements de conformation majeurs à l’intérieur des différentes parties de cette ATPase lors de son cycle de transport.

SERCA possède trois domaines cytoplasmiques : le domaine d’attache (domaine A), le domaine de liaison aux nucléotides (domaine N) et le domaine de phosphorylation (domaine P). Elle comprend un domaine membranaire formé par dix hélices α (Figure 1.10, et 1.11). Trois longues hélices du domaine membranaire (M3, M4 et M5) rejoignent le domaine cytoplasmique catalytique. Les structures de SERCA sous différentes conditions physiologiques montrent que de larges changements de conformation se produisent tant dans les domaines cytoplasmiques que dans le domaine transmembranaire. Par exemple, d’importants mouvements des domaines cytoplasmiques se produisent lors de la liaison et

l’hydrolyse de l’ATP. Sans ATP, les domaines N et P sont séparés par ~50 Å mais ils entrent en contact direct lorsqu’un analogue de l’ATP est présent sans que la structure du domaine N elle-même soit grandement modifiée (voir Figure 1.11) (Toyoshima et Nomura, 2002). Celle du domaine P subit des modifications, notamment concernant son orientation par rapport à la longue hélice M5. Les mouvements dans les domaines P et N (domaines catalytiques), et celui de l’hélice M5, vont donc engendrer des mouvements dans les hélices transmembranaires qui vont ensuite permettre aux ions d’être transportés. La dissociation du Ca2+ engendre aussi de nombreux mouvements parmi les hélices transmembranaires (voir Figure 1.10) : non seulement les hélices qui forment les sites de liaison aux ions (M4, M5, M6 et M8) sont affectées par l’absence de Ca2+, mais les hélices M1 à M3 également. Le mouvement de l’hélice M5 lors de la phosphorylation de l’ATPase éloigne les atomes d’oxygène qui formaient un des sites de liaison pour le Ca2+ ce qui a pour effet d’éliminer ce site et libérer le Ca2+ du côté de la lumière. On peut deviner un pore ouvert vers la lumière lorsque la pompe est en configuration E1(2Ca2+) (i.e. avec des ions Ca2+ liés avant la liaison de l’ATP). Par contre, en configuration E2 (par exemple en présence de TG), le pore s’est refermé (voir cercle pointillé à la Figure 1.10) et les sites de liaison du Ca2+ ont disparu. On peut donc imaginer que la pompe avec ses deux ions Ca2+ liés (E1(2Ca2+) de la Figure 1.10 ou 1.11), attache l’ATP et connaît un premier changement de conformation (voir Figure 1.11, E1(AMPPCP)). Par la suite, la pompe se fait phosphoryler ce qui déclenche un changement de conformation majeur qui redresse l’hélice M5 qui relie le domaine catalytique au domaine membranaire.

Figure 1.10 : Structures comparées de SERCA en présence de Ca2+ (E1-2Ca2+) et sans Ca2+ en présence de thapsigargine (E2-TG).

Figure 1.11 : Structures comparées de SERCA en présence de Ca2+ (E1-2Ca2+) et en présence d’un analogue d’ATP (AMPPCP) (E1-AMPPCP).

Tiré de (Toyoshima et Mizutani, 2004).

Les sites pour le Ca2+ se détruisent en libérant le Ca2+ dans la lumière avant que le pore ne se referme et que la pompe n’adopte la conformation E2 qui est possiblement similaire à la conformation cristallisée E2(TG) (voir Figure 1.10).

La séquence de mouvement de la pompe qui est solidement appuyée par les différentes structures 3D montre de façon spectaculaire un mécanisme d’action qui peut avoir des points communs avec les changements de conformation d’un cotransporteur. On note surtout que des changements majeurs ont lieu dans le domaine catalytique cytosolique et que ces ceux-ci entraînent des changements plus modestes dans le domaine membranaire qui font ouvrir et fermer des pores d’accès et qui créent ou défont des sites de liaison.

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