• Aucun résultat trouvé

PARTIE II – CORPS, SPORT ET IDENTITE

CHAPITRE 2. Corps, sport et identité pour soi

La quête identitaire adolescente est intense. A cet âge se faire mal est une manière de prouver son appartenance au monde. Ce n’est cependant pas exclusif aux pratiques mises à la marge. Il y a ces espaces au centre pouvant aussi faire naitre des sensations, comme par exemple l’athlétisme qui génère naturellement des douleurs. C’est ce que nous proposons de discuter dans ce chapitre.

Dans un premier temps, nous verrons une approche générale de la pratique athlétique afin de justifier ce choix d’étude. Cette sélection n’est pas due au hasard, mais bel et bien parce que l’athlétisme est pensé, dans le milieu fédéral mais aussi scolaire, comme une pratique ramenant naturellement à soi. Ce premier point sera également l’occasion de présenter les différentes manières de pratiquer la course en club ainsi que les différentes distances. En effet, courir s’effectue sur plusieurs distances et n’impliquent pas la même peine. D’efforts, il en sera aussi question dans un deuxième temps. Courir implique différentes dépenses physiologiques, mais aussi une certaine mécanique. Présenter ces données permettra de comprendre le lien entre la douleur et la course, mais aussi de voir que courir permet aux adolescents de ressentir une sensation bien particulière. La douleur n’est donc pas fantasmée dans cette pratique, elle s’éprouve scientifiquement. Si effectivement, ce second temps nous permettra de penser que la course peut faire mal, il restera néanmoins à comprendre comment la douleur peut étayer l’identité. C’est ce que nous verrons dans un troisième temps. Nous remettrons en perspective la douleur issue de la course et son rôle dans la construction de soi.

105 A. L’athlétisme : des couloirs menant à soi

En France, l’athlétisme est pratiqué par 301 976 licenciés.1 36 % de ces pratiquants sont des adolescents âgés de 10 à 19 ans. Parmi les Activités Physiques et Sportives (APS) les plus pratiquées par les adolescents, l’athlétisme se classe à la onzième place (Cf. tableau 1).

Tableau 1 : nombres de licenciés par fédération pour les 10-19 ans

Fédérations 10-14 ans 15-19 ans total

FF de football 481 438 303 154 784 592

FF de tennis 244 220 123 241 367 461

FF d'équitation 192 199 121 026 313 225

FF de handball 194 140 79 201 273 341

FF de basketball 163 846 98 864 262 710

FF de judo-jujitsu et disciplines associées

128 488 43 893 172 381

FF de rugby 78 585 60 683 139 268

FF de natation 99 225 38 831 138 056

FF de voile 85 293 32 229 117 522

FF de gymnastique 82 581 28 841 111 422

FF d'athlétisme 68 867 39 880 108 747

1 Ces données sont issues du rapport détaillé de répartition des licences par âge agrées par la Fédération Française en 2016.

106 Elle peut se définir comme « une activité codifiée, individuelle, qui se déroule dans un milieu stable. Elle consiste à déplacer en diminuant le temps et à projeter son corps ou un engin en augmentant l’espace»2. Cette activité est pluridisciplinaire.

D’abord, il y a les sprints. Ce sont des exercices explosifs. Ils symbolisent la « lutte de l’Homme à l’Homme »3. Les sprints engagent l’individu dans un rapport au corps particulier tant l’effort est en puissance. Il faut imaginer cette pratique comme un véritable moment de test de ses capacités. D’après « le manuel de l’animateur » fourni par la Conférence des Ministres de la Jeunesse et des Sports de la Francophonie (CONFEJES), l’entrainement au sprint a d’autres buts que le développement technique ou physique. Il est l’occasion pour le jeune « de prendre conscience de son corps »4. Pour les adolescents, il peut se courir sur 50, 60, 80, 100, 150, 200, 300 et 400 mètres. A noter que les minimes, cadets, juniors ou espoirs n’ont pas tous les mêmes distances à courir en fonction de leurs capacités physiques. Pour pouvoir effectuer de tels efforts, les athlètes s’entrainent selon différentes modalités. Par exemple, l’exercice « sprinter en 12 secondes » permet à un binôme d’athlètes Ŕ observateur et sprinteur Ŕ de s’entrainer en répétant un exercice d’amélioration de l’endurance de vitesse.

Pour définir en quelques mots cet exercice, il s’agit pour le coureur de courir pendant 12 secondes sur 90 mètres. Lors de ce sprint, l’observateur émet un coup de sifflet à 6 secondes.

Cela a pour but d’indiquer la distance restant à parcourir en fonction de la distance parcourue.

En d’autres termes, lorsque le coup de sifflet retentit, l’athlète doit recouvrir la même distance parcourue dans les 6 secondes restantes. L’intensité de l’exercice impose un repos de 8 minutes entre chaque passage. Ce stade permet au corps, dans la phase de récupération, de régénérer des réserves d’énergies nécessaires à la course, mais aussi d’assurer le maintien des fonctions de bases de l’organisme. Reprendre plus rapidement peut entrainer des malaises ou des nausées par exemple.

Ensuite, il y a les courses allant au-delà de 400 mètres : les courses dites de demi-fond.

On trouve le 800 mètres, 1500 mètres et 3 000 mètres steeple5. Il est à noter que toutes ces disciplines ne sont pas courues en compétition par les adolescents pour des raisons physiologiques. En effet, certains de leurs organes n’étant pas encore « mûrs », l’acide lactique est insuffisamment recyclé, créant une augmentation du stress chez les jeunes

2 SENERS Patrick, L’athlétisme en EPS. Didacthlétisme 2¸ Paris, Vigot, 1996, p. 15.

3AUBERT Frédéric & CHOFFIN Thierry, Athlétisme. Les courses, Paris, EPS, 2011, p. 130.

4 Manuel de l’animateur en athlétisme, www.confejes.org/wp-content/uploads/2015/02/manuel-de-lanimateur-en-athletisme.pdf, p.20.

5 Le Steeple est une course de demi-fond comprenant des obstacles et des sauts de « rivières ».

107 individus. Jurgen Weineck6 démontre l’augmentation du stress chez les enfants et adolescents dans les exercices d’anaérobie lactique. Il indique une élévation dix fois plus grande de catécholamine (hormone du stress) chez l’enfant et l’adolescent par rapport à l’adulte. C’est pour cette raison que la fédération interdit le 400 mètres en compétition pour les moins de 16 ans. Par exemple, les minimes (14-15 ans) courent des distances adaptées comme le 1000 ou le 2000 mètres ou encore des distances dites de durée (20 minutes) afin d’éviter des situations d’anaérobie lactique. Toutefois, une « relecture des travaux scientifiques publiés dans les années 1970 et 1980 nous amène à reconsidérer ces conclusions prématurées relatives au développement et à l’entraînabilité de la capacité anaérobie chez l’enfant. De plus, des études récentes contredisent ces conclusions »7.

L’entrainement, quant à lui, est axé sur le développement de l’endurance fondamentale (EF), de la vitesse maximale aérobie (VMA) et de l’endurance maximale aérobie (EMA), c'est-à-dire des qualités nécessaires au maintien de l’effort. Par conséquent, pour s’entrainer à courir un 1000 mètres, l’entraineur programme des distances inférieures mais à une intensité plus grande pour développer la VMA. Par exemple, il peut annoncer des exercices d’intensité entre 100 et 120 % de la VMA pendant 20 minutes (récupération comprise). Dans l’exercice, il s’agit d’alterner récupération et effort en « sur-régime » sur des plus petites distances, c'est-à-dire au-delà de la VMA de l’athlète.

Enfin, il y a les courses de fond. Elles concernent les distances excédant 5000 mètres. On retrouve en compétition des distances telles que le 5000 et le 10000 mètres. Le public adolescent est moins concerné par ces pratiques arrivant généralement plus tard dans la vie d’un athlète Ŕ à partir de 18 ans. Toutes ces distances nécessitent un entrainement particulier car la physiologie de l’effort de la course n’est pas la même en fonction de la distance. Malgré ces différences, elles sont toutes intenses à leur manière et impactent les corps à l’entrainement. Mais ces engagements sont intéressants à étudier car ils « participent Ŕ chez les plus jeunes Ŕ à des rituels (souvent douloureux) censés aider à construire leur identité alors que leurs coordonnées sociales sont encore en construction »8.

Dans son approche, la course est catégorisée comme étant une pratique individuelle, c'est-à-dire un espace où l’interaction sociale serait réduite puisque l’action motrice ne dépend que d’un individu. Mais comme nous l’avons vu, le collectif existe dans la pratique. Pour preuve,

6 WEINECK Jurgen, Biologie du sport, Paris, Vigot, 1998.

7 RATEL Sebastien & MARTIN Vincent, « Les exercices anaérobies lactiques chez les enfants : la fin d’une idée reçue ? », Science & Sports, vol.27, n°4, septembre 2012, p. 197.

8 HEAS Stéphane & ZANNA Omar, « L’exercice sportif : entre douleur et plaisir », Revue des sciences sociales, n°53, 2015, p. 111.

108 cette APS, qui n’est pas seulement présente au niveau fédéral mais aussi dans le milieu scolaire, affiche dans ses programmes des qualités tournées vers l’individu lui permettant de se construire. Dans le cadre scolaire, l’athlétisme se pratique autrement car, à l’Ecole, se pose la question de l’application éducative d’une pratique initialement basée sur des objectifs de performance. C’est donc à partir de ces fondamentaux que l’Education Physique et Sportive (EPS) a fait de l’athlétisme une précieuse alliée en termes d’éducation motrice de l’individu.

Par exemple, les courses aideraient l’« élève à dépasser avec efficience sa motricité usuelle », tandis que les sauts et les lancers seraient des « savoirs faire biomécaniques » importants pour appréhender son corps.9 En d’autres termes, l’athlétisme est une activité complète permettant une certaine forme d’éducation du corps, un apprentissage des plus importants si l’on se réfère aux changements corporels à l’adolescence. En regardant plus précisément la course, puisque celle-ci est au cœur du terrain d’enquête, elle est, selon les enseignants, un moyen de confronter les élèves à la gestion de leurs efforts et de leur corps. Au bout de quelques séances, l’élève doit être capable de connaître ses capacités. Par exemple, en fonction d’un temps donné Ŕ vingt minutes Ŕ, il doit prévoir la distance qu’il pense parcourir. Les efforts fournis, propres à chacun dans ce domaine, sont des connaissances et des savoirs que l’adolescent « doit savoir définir et utiliser correctement »10 pour lui à la fin du cycle d’activité. L’EPS a pour but de construire « la vie personnelle et collective de l’individu »11. Dans cet objectif, l’athlétisme est utilisé comme une pratique permettant aux élèves de construire de « nouveaux repères en soi »12. Dans ce cas, il ne s’agit pas de performer mais de savoir gérer son effort en fonction de ses capacités propres. L’Education Nationale imagine la pratique de course comme éducative car elle permettrait la « connaissance de soi »13. Ce regard extérieur au monde sportif est intéressant à discuter. Ce croisement de perception vient renforcer l’idée selon laquelle l’athlétisme, et surtout la course, permettrait à l’individu de se connaitre intimement et ce quel que soit son lieu de pratique. Ces éléments viennent confirmer les effets intrinsèques de la pratique car peu importe où l’on court, c’est la connaissance de soi et des autres qui se jouent. Autrement dit, faire de l’athlétisme à l’Ecole ou en Club amènerait, différemment certes, toujours à une meilleure connaissance de soi, notamment parce que physiologiquement et mécaniquement la sensation de douleur jaillit naturellement de cette activité.

9AUBERT Frédéric & CHOFFIN Thierry, Op. cit.

10 SENERS Patrick, Op. cit., p. 207.

11 Bulletin Officiel de L’éducation Nationale, n°10, novembre 2015, p. 294.

12 Ibid.

13 AUBERT Frédéric & CHOFFIN Thierry, Op. cit., p. 378.

109 B. Une physiologie et une mécanique de course

La course est une activité particulière. Elle ramène l’Homme à son origine. Mais son originalité se situe aussi dans la manière dont le corps est utilisé car il est « à la fois le but et l’outil »14. La course est non-instrumentalisée Ŕ pas de raquette ou autre prolongement. C’est une pratique appelant le corps et rien que le corps. De fait, lorsque le corps se met en mouvement, il a besoin de carburant, d’autant plus qu’il n’est pas aidé par une mécanique extérieure : un vélo, une planche, un bateau… Dans cette logique, c’est le corps et l’organisme qui subissent tous les contrecoups de l’effort. D’un point de vue physiologique, la course entraine une succession de contractions musculaires et demande au corps de renouveler sans cesse son carburant pour alimenter les muscles. Cet approvisionnement se fait différemment en fonction du type de course Ŕ sprint, demi-fond, fond Ŕ et nécessite une création d’énergie endogène qui n’est pas sans fin, ni sans conséquence. Dès lors, un corps soumis à un effort doit à la fois créer et garder de l’énergie tout en maintenant les autres fonctions vitales.

Ce combustible corporel est fourni par la transformation d’une molécule appelée Adénosine Tri Phosphate (ATP). Elle est stockée dans les muscles et permet de pratiquer différentes activités sportives et physiques comme la course. Cependant, la concentration d’ATP dans les muscles, indispensable au maintien de l’effort, est limitée. Le corps n’en possède pas des réserves infinies, il doit la produire. La quantité présente permet seulement de tenir un exercice pendant 2 à 4 secondes. Il faut donc re-synthétiser cette molécule. C’est pourquoi, afin de remédier à ce manque, trois filières énergétiques vont permettre de poursuivre l’effort durant plusieurs secondes, minutes et heures. Dans l’ordre, il y a la filière anaérobie alactique, anaérobie lactique et la filière aérobie. Toutes ces filières ne s’enclenchent pas au hasard, mais en fonction de l’effort et de la distance parcourue. Ce travail n’est pas sans risque car il crée des déchets et des situations d’acidose musculaire douloureuses. Le produit final du catabolisme est donc source de douleur pour le coureur.

Ces filières peuvent également être conjointement enclenchées pour conserver la poursuite de l’effort (Cf. tableau 2, p.110). Une fois recréée dans l’une de ces trois filières, l’ATP actionne, telle une « bougie d’allumage », le moteur qu’est le muscle.

14 GREUSARD Renée, « Martine Segalen, ethnologue : ”Courir jusqu’à mon dernier souffle” », Rue89.nouvelobs.com, 15 juin 2013.

110 Tableau 2: Résumé des filières énergétiques

Source : Robert Cordelette, la course à pied, Chiron, 2003.

L’ATP est un élément indispensable pour la production du mouvement. Mais en fonction du type d’effort effectué, il ne se synthétise pas de la même manière. En effet, de par sa palette multiple d’activités Ŕ courses, sauts, lancers Ŕ, l’athlétisme convoque différemment la production d’énergie. De fait, l’effort produit n’est pas du tout le même en fonction des particularités des pratiques et des sous-pratiques. L’épuisement du corps est donc, au sortir d’une course ou d’un entrainement, différent de celui ressenti pour les autres pratiques. Bien que les courses soient regroupées dans la même famille d’activités, elles sont aussi distinctes dans leur gestion de l’effort. Elles enclenchent des réponses physiologiques diverses. Cette différence est d’autant plus claire lorsque l’on se penche sur les mécanismes des filières énergétiques. Mais malgré cela, ces filières mènent toutes à leur manière à la douleur. Comme énoncé précédemment, tout mouvement du corps nécessite du carburant : l’ATP. Pour l’athlétisme et comme pour toute activité sportive, l’ATP doit être renouvelée et recréée à tout moment pour pouvoir poursuivre l’effort. Ce faisant, différents systèmes de production d’énergie produisent le carburant nécessaire à la mise en fonction du corps. Le tableau 4 propose le détail de ces mises en fonction (Cf. tableau 3, p.111).

Durées d’utilisation

des filières

PROCESSUS APPELLATION

(TYPE DE COURSES) DISTANCES 3’’ à 10” Anaérobie alactique Sprint court 60-100m 19” à 60” Anaérobie lactique Sprint long 200-400m 40” à 4’ Anaérobie lactique Demi-fond court 800-1500m 20’ à 30’ Anaérobie lactique Demi-fond long 3 à 10 km

+ de 30’ Aérobie Fond-grand fond Semi et marathon

111

Source : Georges Cazorla, Luc Leger, « les filières énergétiques : Quoi de neuf ? », 2004.

L’entrainement à la course est lui aussi basé sur une physiologie particulière ou plutôt sur une préparation physiologique singulière. Afin de permettre au coureur de maintenir son effort, ce dernier doit s’entrainer et développer les différentes voies énergétiques vues précédemment. En course à pied, l’entrainement est spécifique à l’effort escompté, c'est-à-dire que l’entrainement d’un sprint n’est évidemment pas le même que pour un 800 mètres. Pour

112 le sprint, le coureur doit certes s’entrainer sur le placement de son corps, mais il doit aussi et surtout s’entrainer sur le développement de sa puissance, de sa vélocité et sur le maintien de son effort. En d’autres termes, il doit se muscler tout en s’entrainant à bien courir. Par conséquent, les sprinteurs s’adonnent à de nombreux exercices intenses afin de développer leur puissance alactique. Ils répètent des gammes faisant de l’entrainement un moment intense, provoquant certainement des douleurs tant la pratique sollicite naturellement l’organisme.

Il en est de même pour le demi-fond et le fond. Pour s’entrainer sur des distances comme celle du 800 mètres, l’athlète est amené à courir en « fractionné » afin d’améliorer sa performance de manière générale. Dans ce cadre, l’athlète s’entraine à mieux tolérer et gérer ce type d’effort. Le fractionné représente l’une des méthodes pour s’entrainer à la gestion de l’effort. Cet exercice correspond à l’alternance entre courses à allure rapide (plus de 100% de la VMA) et courses à allure modérée (entre 50-60 % de VMA), avec un temps de récupération entre chaque cycle. Un exemple concret de fractionné consisterait à faire 6x400 mètres et 200 mètres de récupération entre chaque 400 mètres. L’entrainement est finalement un moment intense visant l’amélioration de la performance.15 Pour atteindre cet idéal, l’athlète doit courir dans des conditions très soutenues amenant parfois à se faire mal. En effet, la répétition de l’effort dans de telles conditions crée différents types de lésions possibles. On parle alors de troubles musculaires liés à l’effort, connus sous le nom de raideurs ou douleurs musculaires, de crampes, de courbatures. Mais la répétition de l’effort amène aussi à d’autres sensations comme la nausée, le vertige et d’autres impressions d’épuisement. Physiologiquement, la course engage le corps dans ses retranchements. Pour sa mise en action, elle nécessite une création d’énergie aux conséquences directes sur le corps. Par exemple, lorsque l’on effectue un entrainement aux sprints, apparaît une sensation de chaleur puis de douleur. Le coureur a l’impression que son muscle va exploser. « Cette sensation douloureuse est liée à l’hyperacidité provoquée par le manque d’apport en oxygène dans le tissu musculaire.

L’hyperacidité musculaire entraîne aussi un déséquilibre électrique et électrolytique dans le liquide extracellulaire, qui peut devenir irritant pour des récepteurs à la douleur intramusculaire et augmenter la sensation douloureuse. Dès l’arrêt de l’effort, la douleur cesse immédiatement. »16 De fait, lorsque l’athlète s’entraine, il s’inflige de la même manière et de façon répétée ces heurts. C’est en cela que l’on peut admettre un lien naturel, consubstantiel

15BILLAT Véronique, Physiologie & méthodologie de l’entrainement, Paris, De Boeck, 2017.

16 GREMION Gérald, « Douleur dans la pratique sportive », Revue médicale Suisse, n°10, 2014, p. 243.

113 entre course et douleur. Cependant, la dimension physiologique de la course n’est pas la seule à impacter le corps.

La dimension mécanique l’est aussi puisqu’elle peut, dans le cadre d’un entrainement ou même d’une course, être source de douleurs pour le corps. Du point de vue mécanique, la course est une succession de déséquilibres que le corps se doit de rétablir. Cette remise à l’équilibre se fait de manière précise et millimétrée, induisant une proprioception particulière de soi.17 Le rééquilibrage engendré par la course se joue dans la foulée Ŕ l’un des éléments mécaniques permettant de courir. C’est donc parce que la course est « une mécanique de précision »18 qu’elle n’est pas seulement à considérer comme une affaire d’énergie.

La foulée se décompose en quarte phases et se caractérise par des bonds en avant avec des angles spécifiques au sol (Cf. image 1).19

Image 1 : La foulée

Source : Dictionnaire scientifique de l’athlétisme, Revue de l’association des entraineurs français d’athlétisme.

17 La proprioception désigne une sensibilité particulière permettant à notre conscience de percevoir et d’imaginer notre corps.

18LEBOEUF Fabien, ACHARD DE LE LUARDIERE Fabien, &al., « Etude biomécanique de la course à pied », Etude biomécanique de la course à pied, Podologie, vol. 27-020-A-20, 2000.

19CORDELETTE Robert, La course à pied, Paris, Chiron, 2003.

Phase A Phase B Phase C Phase D

114 Une phase de contact nommée « amortissement ». Phase A.

Cette phase débute lors du contact au sol via l’appui de l’athlète jusqu’à sa projection verticale du centre de gravité. Dans l’organisation de la foulée, elle permet la réorientation du centre de gravité et une équilibration du corps. Elle est donc essentielle même si elle ne crée pas de vitesse. Il est à noter également que cette phase d’amortissement est différente chez le coureur débutant et expert. En effet, chez le débutant, elle devient « négative »

Cette phase débute lors du contact au sol via l’appui de l’athlète jusqu’à sa projection verticale du centre de gravité. Dans l’organisation de la foulée, elle permet la réorientation du centre de gravité et une équilibration du corps. Elle est donc essentielle même si elle ne crée pas de vitesse. Il est à noter également que cette phase d’amortissement est différente chez le coureur débutant et expert. En effet, chez le débutant, elle devient « négative »