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Contrôle des indices acoustiques du bruit de plosion, en parole modale et débit normal

de la production des occlusives

1. Classification des stratégies inter-individuelles

2.1. Contrôle des indices acoustiques du bruit de plosion, en parole modale et débit normal

L’ANNEXE 1 énumère et présente les tableaux de relations significatives traduisant le lien entre les variables d’entrée du modèle et les caractéristiques du bruit de plosion, qui sont synthétisées ci-dessous.

2.1.1. Contrôle de l’intensité du bruit de plosion 2.1.1.1. Pertinence des paramètres de contrôle

La première question que l’on se pose est : quels sont les paramètres qui « contrôlent » significativement l’intensité du bruit de plosion ?

Les 6 paramètres suivants montrent une corrélation forte, et avec une relation systématiquement du même signe (i.e. quel que soit le groupe de sujet). Ils semblent pertinents.

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-quel que soit le lieu d’articulation : §Le maximum de pression intra-orale §La durée d’occlusion

-pour les consonnes labiales : §Le degré de compression labiale

§Les vitesses d’ouverture et de fermeture des lèvres

-pour les consonnes palatales :

§La vitesse tangentielle du mouvement d’élévation de la langue (pré-occlusion)

Les paramètres laryngés (DOQ et Df0, définis pour les consonnes voisées), ainsi que les paramètres linguaux position de l’apex et du dos de langue, et vitesse tangentielle du mouvement d’abaissement de la langue (post-occlusion) ne montrent pas de forte corrélation et/ou montrent une relation de signe variable selon les conditions et les groupes de sujets. De là, ils ne semblent pas pertinents dans le contrôle de l’intensité du bruit de plosion (non discutés dans les paragraphes 2.1.1.2 et 2.1.1.3 ci-dessous).

La pertinence des relations liant pression intra-orale et vitesse d’ouverture des lèvres à l’intensité du bruit de plosion est conforme aux connaissances générales sur le contrôle des indices acoustiques du bruit de plosion (cf. CHAPITRE 1).

De plus, dans nos résultats, il s’avère que la durée d’occlusion, le degré de compression et la vitesse de fermeture des lèvres (pour les labiales), sont également pertinents pour la variation de l’intensité du bruit de plosion. Cette influence peut être indirectement liée à l’effet significatif de la pression intra-orale et de la vitesse d’ouverture des lèvres. On pourra discuter cette hypothèse dans la discussion (CHAPITRE 7).

Pour les consonnes linguales, on observe une forte corrélation de l’intensité acoustique du bruit de plosion avec la vitesse d’élévation de la langue, mais pas systématiquement avec la vitesse d’abaissement (i.e. vitesse de relâchement de la langue après l’occlusion). Ce résultat, plus surprenant que ceux présentés ci-dessus, sera discuté dans le CHAPITRE 7.

2.1.1.2. Influence du voisement, de la place d’articulation et du contexte vocalique sur les relations observées

On étudie l’influence des variables conditionnelles sur les relations au niveau de la variabilité des pentes desdites relations (sans remise en cause de la tendance).

De manière générale, lorsque certaines relations sont influencées par une variable conditionnelle donnée, je ne mentionnerais que les cas où l’influence est systématique. Dans l’autre cas, aucune stratégie spécifiques ne sera étudiée en détails dans ces travaux de thèse.

Influence du contexte vocalique

Les relations entre les paramètres suivants et l’intensité du bruit de plosion ne sont pas (ou très peu) influencées par le contexte vocalique :

-Les vitesses d’ouverture et de fermeture des lèvres (pour les consonnes labiales)

-Le degré de compression des lèvres (pour les consonnes labiales)

-La durée d’occlusion

-Les relations entre la vitesse d’élévation de la langue et l’intensité du bruit de plosion sont influencées systématiquement (ou de manière très reproductible) par le contexte vocalique (pour les consonnes linguales) : la corrélation Vit.Elev.Langue<->Iburst est en moyenne plus élevée pour les contextes /i/ que pour les contextes /a/ (p<0.001).

101 Les relations entre le maximum de pression intra-orale et l’intensité du bruit de plosion sont influencées par le contexte vocalique de manière variable selon les autres conditions et groupes de sujets.

Influence du lieu d’articulation (pour les paramètres communs aux consonnes labiales et linguales)

Les relations entre la vitesse d’élévation de la langue et l’intensité du bruit de plosion ne sont pas influencées par le lieu d’articulation.

Les relations entre la durée d’occlusion et l’intensité du bruit de plosion sont influencées de manière systématique (i.e. influence très reproductible) par le lieu d’articulation de la consonne (p<0.001) : les corrélations sont plus élevées pour les consonnes labiales et vélaires que pour les consonnes apicales.

De la même manière que ci-dessus pour l’influence du contexte vocalique, les relations entre le maximum de pression intra-orale et l’intensité du bruit de plosion sont influencées par le contexte vocalique de manière variable selon les autres conditions et groupes de sujets.

Influence du voisement

Le voisement n’a pas (ou très peu) d’influence significative sur les relations liant les 6 paramètres pertinents pour le contrôle de l’intensité du bruit de plosion.

Bilan de l’effet des facteurs expérimentaux sur les relations

L’absence d’effet du voisement sur l’ensemble des relations de contrôle de l’intensité acoustique du bruit de plosion n’est pas surprenante (les ordres de grandeurs de l’intensité et des paramètres d’entrées sont différents selon le voisement, mais pas les stratégies de variation de l’intensité). Tout comme l’est également l’absence d’effet du lieu d’articulation (pour les linguales) et du contexte vocalique sur les relations entre paramètres cinématiques de vitesse des articulateurs et intensité du bruit de plosion (Kuhn 1975).

En revanche, les effets du contexte vocalique sur les relations de contrôle de l’intensité par la vitesse d’élévation de la langue et du lieu d’articulation sur les relations de contrôle de l’intensité par la durée d’occlusion ne sont pas attendus. Ces différents effets, tout comme ceux, variables, du contexte vocalique et du lieu d’articulation sur les relations entre pression intra-orale et intensité du bruit de plosion, seront discutés dans le CHAPITRE 7, à la lumière de nos hypothèses sur le contrôle lingual et labial de la production des occlusives.

2.1.1.3. Stratégies globales et variabilité inter-individuelle

Pour le contrôle des labiales

Labiales G1 G2 G3 Pression intra-orale +++ + ++ Durée d’occlusion ++ ++ + Degré de compression labiale +++ ++ + Vitesse de fermeture labiale ++ +++ +

Vitesse d’ouverture labiale +++ +++ +

Tableau 8 : Différences, selon les groupes de sujets, d’utilisation des paramètres de contrôle pertinents pour manager la variation de l’’intensité du bruit de plosion dans le cas de la production des consonnes labiales ( de

+ à +++ lorsque le groupe Gi augmente le paramètre pour augmenter Iburst, de – à --- lorsque le groupe Gi diminue le paramètre pour augmenter Iburst).

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On observe dans le Tableau 8 une importante différence entre les groupes G3 et G1-G2 : pour un même niveau de recrutement des paramètres d’entrée (i.e. intervention similaire des paramètres de contrôle), le groupe G3 (environ la moitié des sujets) semble atteindre un moindre résultat acoustique que les groupes G1 et G2 (environ la moitié des sujets). Ce résultat fait penser que le groupe G3 présente plus de « sensibilité » que les groupes G1 et G2 pour le contrôle articulatoire et aérodynamique de l’intensité du bruit de plosion.

De plus, on observe différentes stratégies entre les 3 groupes :

-G1 joue sur tous les paramètres (Pio, degré de compression, vitesses articulatoires).

-G2 joue moins sur la Pio mais plus sur les vitesses articulatoires.

-G3 joue principalement sur la Pio et peu sur les autres paramètres.

-Pour le contrôle des apicales et des vélaires

Apicales G1 G2 G3

Pression intra-orale ++ ++ ++

Durée d’occlusion ++ ++ +

Vitesse d’élévation langue +++ + +

Vélaires G1 G2 G3

Pression intra-orale

Durée d’occlusion ++ ++ +

Vitesse d’élévation langue +++ + +

Tableau 9 : Différences, selon les groupes de sujets, d’utilisation des paramètres de contrôle pertinents pour contrôler la variation de l’’intensité du bruit de plosion dans le cas de la production des consonnes linguales (de

+ à +++ lorsque le groupe Gi augmente le paramètre pour augmenter Iburst, de – à --- lorsque le groupe Gi diminue le paramètre pour augmenter Iburst).

Sur le Tableau 9, on observe différentes stratégies entre les 3 groupes :

-G1 joue sur tous les paramètres (Pio, durée d’occlusion, vitesse articulatoire).

-G2 joue sur la Pio et la durée d’occlusion mais peu sur la vitesse articulatoire.

-G3 joue principalement sur la Pio et moins sur les autres paramètres.

-2.1.2. Contrôle du centre de gravité spectral du bruit de plosion (CDG)

Aucun paramètre de contrôle ne montre une corrélation forte et/ou une relation systématiquement de même signe avec le centre de gravité spectral du bruit de plosion pour l’ensemble des conditions expérimentales et l’ensemble des groupes de sujets : aucun paramètre ne semble « contrôler » de manière pertinente le centre de gravité spectral du bruit de plosion.

Il peut être surprenant de ne pas trouver d’influence pertinente des paramètres d’articulation linguale sur le centre de gravité spectral du bruit de plosion. Le contrôle du CDG, théoriquement lié de manière forte au contrôle du moment spectral d’ordre 3 (Skewness), sera discuté avec attention dans le CHAPITRE 7.

2.1.3. Contrôle du Skewness du spectre du bruit de plosion 2.1.3.1. Pour les consonnes labiales

Aucun paramètre ne montre une corrélation forte et/ou une relation systématiquement de même signe avec le Skewness pour l’ensemble des conditions expérimentales et l’ensemble

103 des groupes de sujets. De là, dans le cas des consonnes labiales, aucun paramètre ne semble pertinent pour expliquer les variations du Skewness du spectre du bruit de plosion.

2.1.3.2. Pour les consonnes linguales

La position de l’apex de la langue (coordonnée Xapex) montre une forte corrélation, systématiquement de même signe, avec le Skewness du bruit de plosion. Cette relation de contrôle n’est ni influencée par les conditions expérimentales ni par le groupe de sujets. Comme on peut le constater sur les tableaux de résultats de l’ANNEXE 1.3, de manière systématique reculer la langue d’un millimètre au moment de l’occlusion entraine une augmentation du Skewness du bruit de plosion d’environ 0.05 (moyenne du Skewness : 0.6 et écart-type : 0.8).

L’absence de relation de contrôle pertinente du Skewness pour les consonnes labiales est conforme aux connaissances sur les descripteurs spectraux du bruit de plosion. De la même manière, il est conforme aux connaissances générales sur la relation forte entre la position de l’apex de la langue et le Skewness pour les consonnes linguales : plus la langue est antérieure et plus le Skewness est faible, donc le spectre est aigu (référence).

2.1.4. Contrôle du Kurtosis du spectre du bruit de plosion

Les résultats de l’analyse des paramètres pertinents pour le contrôle du Kurtosis du spectre du bruit de plosion sont similaires à ceux que nous avons décrits ci-dessus pour le contrôle du Skewness.

2.1.4.1. Pour les consonnes labiales

Aucun paramètre ne montre une corrélation forte et/ou une relation systématiquement de même signe avec le Kurtosis pour l’ensemble des conditions expérimentales et l’ensemble des groupes de sujets. Dans le cas des labiales, aucun paramètre ne semble pertinent pour expliquer les variations du Kurtosis.

2.1.4.2. Pour les consonnes linguales

La vitesse d’élévation de la langue (pré-occlusion) montre une forte corrélation, systématiquement de même signe (-), avec le Kurtosis du bruit de plosion.

Les relations entre la vitesse linguale et le Kurtosis sont influencées par le contexte vocalique de manière variable selon les groupes de sujets :

-Pour les groupes de sujets 1 et 2 (i.e. moitié des sujets), il n’y a pas d’effet du contexte vocalique sur les relations entre la vitesse d’élévation de la langue et le Kurtosis du bruit de plosion.

-Pour les groupes de sujets 3 et 4 (i.e. moitié des sujets), il y a un effet systématique du contexte vocalique sur les relations entre la vitesse d’élévation de la langue et le Kurtosis du bruit de plosion : pentes/a/ < pentes/i/.

-Il n’y a pas d’influence du lieu d’articulation et du voisement sur ces relations pertinentes de contrôle entre la vitesse d’élévation de langue et le Kurtosis du bruit de plosion.

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2.1.5. Contrôle de la durée du bruit de plosion 2.1.5.1. Pertinence des paramètres de contrôle

Les trois paramètres suivants montrent une corrélation forte et une relation systématiquement négative avec l’indice acoustique temporel de durée du bruit de plosion. Ils semblent donc pertinents pour le contrôle de la durée du bruit de plosion.

-Quel que soit le lieu d’articulation : Durée d’occlusion (relation négative)

-Pour les labiales : Vitesses d’ouverture et de fermeture des lèvres (relation négative)

-Les paramètres qui ne montrent pas de forte corrélation et/ou une relation de signe variable selon les conditions et groupes de sujets ne semblent pas pertinents, et ils ne seront pas discutés dans les paragraphes suivants 1.5.2 et 1.5.3). Il s’agit des paramètres :

-Pression intra-orale

-Degré de compression labiale (pour les consonnes labiales)

-Position de l’apex et du dos de la langue

-Vitesses d’élévation et d’abaissement de la langue

-La pertinence de la vitesse d’ouverture labiale dans le contrôle de la durée du bruit de plosion est conforme aux connaissances sur le contrôle moteur des indices acoustiques du bruit de plosion (référence).

On aurait pu s’attendre également à un effet significatif de la vitesse d’abaissement de la langue et de la position du dos de la langue sur la variation de la durée du bruit de plosion. On mesure dans ce cas précis la position du dos de la langue en Y (et non en X), ce qui ne permet peut-être pas d’observer cet effet.

De manière systématique, augmenter la durée d’occlusion fait diminuer la durée du bruit de plosion. Ce point sera discuté dans le CHAPITRE 7.

2.1.5.2. Influence des facteurs expérimentaux sur les relations observées

Influence du contexte vocalique

Les relations entre les vitesses d’ouverture et de fermeture des lèvres et la durée du bruit de plosion ne sont pas (ou très peu) influencées par le contexte vocalique.

Les relations entre la durée d’occlusion et la durée du bruit de plosion sont influencées par le contexte vocalique de manière variable selon les autres conditions et groupes de sujets.

Influence du lieu d’articulation

Les relations entre la durée d’occlusion et la durée du bruit de plosion sont influencées par le lieu d’articulation de manière variable selon les autres conditions et groupes de sujets.

Influence du voisement

Les relations entre les vitesses d’ouverture et de fermeture des lèvres et la durée du bruit de plosion ne sont pas (ou très peu) influencées par le voisement.

Les relations entre la durée d’occlusion et la durée du bruit de plosion sont influencées par le voisement de manière variable selon les autres conditions et groupes de sujets.

105 2.1.5.3. Stratégies globales et variabilité inter-individuelle

Pour le contrôle des labiales :

Labiales G1 G2 G3 Durée d’occlusion ++ ++ ++ Vitesse de fermeture labiale + +++ +++ Vitesse d’ouverture labiale + +++ +++

Tableau 10 : Différences, selon les groupes de sujets, d’utilisation des paramètres de contrôle pertinents pour manager la variation de la durée du bruit de plosion dans le cas de la production des consonnes labiales (de + à +++ lorsque le groupe Gi augmente le paramètre pour augmenter DuréeBruit de plosion, de – à --- lorsque le groupe

Gi diminue le paramètre pour augmenter DuréeBruit de plosion).

On observe sur le Tableau 10 seulement deux comportements différents :

- Le groupe G1 (composé d’un seul sujet) joue principalement sur la durée d’occlusion.

- Les groupes G2 et G3 (11 sujets sur 12) jouent principalement sur les vitesses articulatoires.

-Pour le contrôle des apicales et des vélaires :

Uniquement un paramètre est pertinent, il s’agit de la durée d’occlusion, dont les relations avec la durée du bruit de plosion ne montrent pas de différences significatives entre les trois groupes.

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2.2. Influence de l’augmentation du débit de parole sur le contrôle des bruits