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- Revue Bibliographique -

A. Réponse des plantes aux agents pathogènes : les plantes font de la résistance

3 Contournement et Durabilité des résistances

3.1 Le contournement des résistances

Les virus sont des parasites obligatoires caractérisés par leur réplication rapide, leur population de grande taille et leur taux de mutation élevé qui ne comprend pas de système de réparation (~ 10-3 à 10-5 mutations par nucléotide et par cycle de réplication). Tout cela leur confère une grande variabilité génétique qui leur permet de s’adapter rapidement aux différentes contraintes de leurs hôtes et donc de pouvoir contourner les résistances mises en place dans les plantes cultivées (Montarry et al., 2012).

Pour qu’une résistance soit contournée, il faut l’apparition, dans la population virale, d’un variant virulent. Ce sont des substitutions nucléotidiques au sein du gène d’avirulence qui entraînent un changement d’acide aminé à l’origine du variant virulent. Ces variants virulents vont ensuite devoir s’accumuler dans la plante, en compétition avec les variants avirulents. Cette accumulation des variants virulents au sein de la population virale va dépendre de leur valeur adaptative relative et/ou de leur capacité à s’accumuler dans la plante et à être transmis de plante à plante. En effet, les gènes viraux sont multifonctionnels, par conséquent des substitutions nucléotidiques peuvent avoir un effet pléiotropique important : le gain de virulence peut entraîner un coût important pour le virus, le variant virulent ne sera donc pas conservé dans la population. De plus, la transmission puis le mouvement du virus dans la plante constituent des événements de « bottleneck » forts, à l’origine de la dérive génétique. Ce phénomène aura de ce fait un impact important dans la probabilité de dissémination du variant virulent. Cela sera également à l’origine d’une ségrégation spatiale des différents variants du virus qui s’accumuleront de façon différentielle dans la plante (Fig. R.11) (Gómez

et al., 2009)

Figure R.11| Mécanismes du contournement des résistances par les virus (D'après Gomez et al., 2009) (a) Principales étapes que le virus doit franchir afin de pouvoir contourner une résistance (b) Forces évolutives impliquées à chaque étape du contournement

3.2 Durabilité des résistances

D’après Johnson (1981), une résistance est dite durable si elle a conservé son efficacité après avoir été utilisée de manière prolongée sur de grandes surfaces et en présence de l’agent pathogène. De part cette définition, la durabilité d’une résistance ne peut être mesurée qu’a posteriori. L’idéal serait de pouvoir la prédire par avance ce qui implique de connaître les facteurs qui sont susceptibles d’avoir un impact sur cette durabilité. Dans une étude menée par McDonald & Linde (2002) sur un large panel d’agents pathogènes, le facteur déterminant de la durabilité des résistances était le potentiel d’évolution de la population de l’agent pathogène. Ce potentiel d’évolution des populations serait également un élément clé dans la durabilité des résistances aux virus (García-Arenal & McDonald, 2003). Ainsi, en tenant compte d’un certain nombre de traits viraux (taille des populations, capacité de dissémination, mode de transmission, taux de recombinaison) un indice EP pour « Evolutionary Potential » qui corrèle avec la durabilité des résistances a été créé. Plus cet indice est élevé, moins la durabilité de la résistance est importante (García-Arenal & McDonald, 2003; Gómez et al., 2009).

Différents facteurs vont avoir un impact sur la durabilité des résistances, sur lesquels il sera possible d’agir afin de l’améliorer. Un de ces facteurs concerne la nature des résistances utilisées. En effet, plus de 80% des résistances aux virus décrites sont monogéniques. Or, en tenant compte des mécanismes que les virus doivent mettre en place pour assurer le contournement d’une résistance, il semblerait logique de dire que plus les virus ont de modifications à réaliser pour devenir virulents, plus la résistance sera durable. En ce sens, les

résistances quantitatives seraient plus durables en comparaison aux résistances qualitatives largement développées jusqu’à présent car plus faciles à manipuler en sélection (Parlevliet, 2002). Il a également été montré que le fond génétique des plantes est important et va donc avoir un effet sur la durabilité des résistances. Ainsi, dans l’étude de l’interaction piment/Potato virus Y (PVY), la durabilité du gène majeur pvr23 est améliorée lorsque ce gène est introduit dans un fond génétique partiellement résistant par rapport à un fond génétique sensible (Palloix et al., 2009).

Le concept de « gene pyramiding » est en lien avec cette idée de freiner l’apparition dans la population virale de nouveaux variants virulent. Cette stratégie consiste à associer différents types de résistances qui vont cibler différentes protéines virales à différents stades du cycle viral. Cette stratégie a déjà fait ses preuves dans la réponse à des virus que ce soit avec des gènes majeurs (Werner et al., 2005) ou par combinaison d’un gène majeur et de plusieurs résistances quantitatives (Palloix et al., 2009; Quenouille et al., 2016).

L’environnement ainsi que les pratiques culturales constituent d’autres facteurs pouvant avoir un impact sur la durabilité des résistances. Différentes stratégies de gestion peuvent donc être déployées dans le temps et dans l’espace afin d’assurer par ce biais la durabilité des résistances. Par exemple, la rotation des gènes de résistance se base sur une utilisation rationalisée des gènes de résistance de manière à contrôler la pression de sélection exercée par ces gènes sur les populations virales afin d’éviter la fixation dans ces populations de mutations de contournement (Mundt, 2014). Si ce type de stratégies s’applique plutôt à l’échelle d’une parcelle, de plus en plus d’études s’intéressent au développement de

stratégies qui permettrait d’assurer la durabilité des résistances à l’échelle du paysage (Fabre

et al., 2012).

Enfin, le développement de nouvelles approches scientifiques et technologiques va permettre de contribuer à comprendre d’avantage les interactions plantes/virus ce qui permettra par la suite de développer des stratégies optimales permettant de garantir la durabilité d’une résistance (Gómez et al., 2009; Mundt, 2014).

B. Interactions plantes/agents pathogènes en conditions de stress