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Interactions, coopérations, tensions et échanges : le fonctionnement du champ de la course camarguaise

Chapitre 1 - Les positions des principaux acteurs

1.1 Constitution du panel et du guide d’entretien

L’enquête qualitative s’est déroulée de 2011 à 2015. Les objectifs de cette phase d’enquête étaient multiples. En 2011, il s’agissait d’abord de mieux comprendre le milieu de la course camarguaise, ce qui a permis de déboucher sur la découverte d’un champ social. Une fois ce champ social mis en exergue, les entretiens semi-dirigés qui ont suivi avaient ensuite pour but de faire ressortir les enjeux et les difficultés de chaque secteur d’acteurs. Enfin, le dernier objectif de l’enquête qualitative était la préparation d’une enquête quantitative. Saisir le jargon du milieu taurin, s’en imprégner, était primordial pour concevoir un questionnaire pertinent et compréhensible par les publics passionnés ou non de course camarguaise. Une phase de test a été menée afin de permettre de perfectionner la position d’enquêteur et d’acquérir les bons réflexes durant la discussion avec chaque interlocuteur. Le guide d’entretien utilisé comme une base et adapté ensuite en fonction des interlocuteurs est le suivant :

Guide d’entretien

Acteurs de la course camarguaise Texte de présentation

« Bonjour Monsieur / Madame,

Je m’appelle Laure Marchis-Mouren, je suis étudiante en doctorat. J’ai choisi de faire une thèse sur les courses camarguaises. J’ai déjà vu des courses camarguaises et c’est un sujet qui m’a tout de suite

intéressée. Je sais que vous êtes… (Préciser selon l’interlocuteur). Pour commencer, vous

souvenez-vous du jour où, pour la première fois, souvenez-vous avez vu une course camarguaise ? Racontez-moi. » (question d’accroche).

Relance (en réserve) : Selon vous, quelle est la principale caractéristique de la course camarguaise ?

1. Nature de la pratique culturelle ou de la relation (amatrice / professionnelle) avec le

monde de la course camarguaise

- Lien avec les jeux taurins et avec la course camarguaise

- Fréquence de la participation à ce type de spectacle

- Nature du rapport avec le sport ou l’élevage ou les médias ou l’organisation de spectacles

- Rapport entre le professionnel et la pratique de loisir

- Avez-vous écrit des livres ou des articles à ce sujet ? (en fonction de l’entretien)

- Comment vous renseignez-vous sur les courses camarguaises ? Comment vous

tenez-vous au courant de l’actualité de la course camarguaise ? Quel est le moyen d’information le plus consulté par les amateurs de course camarguaise ?

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2. Le contexte de la course camarguaise

- Relance : Quel est le contexte idéal dans lequel on découvre le mieux les qualités

typiques de la course camarguaise ?

- Cadre de l’événement: fêtes votives, feria, seul, en famille, groupe d’amis, etc.

- Dans quels villes ou villages allez-vous ?

3. Représentations de la course camarguaise

- Que pensez-vous de la course en général ?

- La considérez-vous comme un événement traditionnel ? Sportif ? Provençal ?

- Territoire : événement arlésien, nîmois, languedocien ?

- Comparaison avec d’autres sports ou d’autres spectacles

- Quels sont les premiers mots qu’un amateur de courses doit connaître pour goûter ce

spectacle ?

4. Organisation et économie de la course camarguaise

- Comment est structuré le milieu professionnel des courses camarguaises ?

- Qui en sont les protagonistes ? (Éleveurs, organisateurs, sponsors, critiques, raseteurs,

associations ou syndicats, publics, musées, école de raseteurs…)

- La course de taureaux est-elle rentable ? Qui en vit ?

5. Le public de la course camarguaise

- Qui sont les spectateurs des courses camarguaises ?

- Comment devient-on amateur de courses ?

- Pensez-vous qu’un public extérieur à la région (touriste) peut devenir afeciouna ?

- Pensez-vous que les jeux taurins vont perdurer ?

- Pour vous, est-ce un avantage pour la région ? Est-ce un pôle d’attractivité ?

Notons que ce guide d’entretien est axé sur le rapport personnel de chaque interlocuteur à la course camarguaise, quelle que soit sa fonction (professionnelle, amateur, ou spectateur). Le rapport aux autres acteurs de la course camarguaise n’est pas induit par les relances afin de mesurer les relations aux autres sans influence.

Le texte de présentation a été pensé pour instaurer un climat de confiance dans le rapport enquêteur/enquêté. La fin du texte d’introduction est déterminante avec une question d’accroche où nous demandons à notre interlocuteur de raconter son premier souvenir de course camarguaise. La personne interrogée se lance alors dans un récit personnel et se raccroche d’emblée à sa propre pratique spectatorielle. Une difficulté est cependant apparue régulièrement : les spectateurs de courses camarguaises assidus sont souvent allés voir des courses durant leur enfance et ne se souviennent que vaguement de leur toute première expérience, alors qu’ils étaient accompagnés d’un proche plus âgé (un parent dans la majorité des cas). Dans ce cas, nous avons relancé la discussion en demandant de raconter la première course marquante de la carrière de spectateur.

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Les entretiens avec les sportifs ont également demandé une adaptation de la question d’accroche, car nous avons observé que les raseteurs distinguent leur première course camarguaise en tant que spectateur de leur première course camarguaise en tant que sportifs. Il a dans ce cas été demandé de raconter les deux souvenirs. Néanmoins, la première course en tant que raseteur est racontée en premier, ce qui montre un changement de pratique de la course camarguaise. Les raseteurs distinguent leur pratique de spectateur et leur pratique d’acteur, la seconde pratique leur paraissant plus marquante.

Le guide d’entretien a été construit autour de cinq thématiques à aborder durant l’entretien, dans l’ordre de convenance de l’interlocuteur. L’ordre d’apparition des thèmes est en lui -même un résultat puisqu’il permet à l’enquêteur de saisir les sujets qui viennent naturellement à l’esprit de l’interlocuteur, et aussi de voir si des thèmes ne sont pas du tout abordés spontanément. Lorsque la personne interrogée aborde un sujet particulièrement pertinent pour l’enquêteur, celui-ci soutient l’enquêté en lui demandant d’en dire plus : « Ah bon ? », « Pourquoi ? », « Vous venez de dire (…), pouvez-vous m’en dire plus à ce sujet ? ».

Ces éléments de discussion permettent à l’interrogé de s’exprimer plus longuement sur un sujet phare de la recherche et de sortir de propos généralisants sur la course camarguaise. En effet, les interrogés avaient parfois tendance à produire un discours sur l’ensemble de la course camarguaise et son état actuel, mais aussi à se placer en tant que médiateur de cette culture vis-à-vis du chercheur.

Il s’agit ici de la première difficulté identifiée dans le cadre de la phase qualitative. Le rapport enquêteur-enquêté s’est joué dès la phase introductive de l’entretien. Nous avons choisi de nous présenter en tant qu’étudiante. Ce statut, moins intimidant pour le sujet interrogé, nous a permis d’éviter l’écueil d’un possible rapport de domination. Le revers de ce choix est que l’interrogé produisait spontanément un discours pédagogique vis-à-vis de l’enquêteur, dans un rapport de passionné à néophyte. Les interrogés délivraient en premier lieu des informations techniques sur la course camarguaise destinées à favoriser la compréhension du spectacle pour un néophyte.

Afin de ne pas perturber la discussion, notre choix a été de laisser la personne expliquer ce qu’est la course camarguaise pour écouter comment celle-ci s’exprime sur ce sujet et avec quels éléments, permettant ainsi de saisir comment l’interrogé transmet ses savoirs sur la course camarguaise à un néophyte. Prolonger l’entretien sur un discours plus personnel de notre interlocuteur nous a ensuite permis de nous rapprocher des thématiques du guide

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d’entretien, et d’axer l’échange sur la pratique professionnelle, amatrice ou spectatorielle de l’interrogé. Ainsi, pour arriver à mener les entretiens efficacement, celui-ci devait être suffisamment long en durée pour établir un rapport de confiance avec l’enquêté et obtenir un discours paraissant sincère, avec des éléments perçus comme étant pertinents pour l’exploitation des résultats.

La seconde difficulté a été la durée variable de l’entretien. Le format de l’entretien pouvait être long et durer d’une heure à quatre heures avec certains interlocuteurs, permettant ainsi une discussion approfondie. Parfois, l’entretien a été limité par une durée préalablement établie (emploi du temps professionnel ou personnel). Enfin, certains entretiens ont eu lieu parce que l’occasion se présentait, notamment dans les arènes. Ils étaient alors conditionnés par des contraintes temporelles extérieures (entracte de quinze minutes par exemple). Dans ce cas, les idées principales de l’entretien ont été notées sur le journal de terrain, puis ont fait l’objet d’un compte-rendu d’entretien sans retranscription complète.

Nous pointons ici du doigt la dernière difficulté rencontrée dans le cadre de l’enquête qualitative qui est d’ordre technique. Comme annoncé, certains entretiens ont été prévus en amont pour répondre aux exigences d’un panel, tandis que d’autres entretiens ont eu lieu spontanément au gré des rencontres avec des personnalités typiques ou atypiques à interroger, dans et aux abords des arènes, dans le cadre des discussions improvisées. Les premiers avaient lieu dans des cadres préétablis en accord avec l’enquêteur et l’enquêté, le lieu, la date et l’heure, tandis que les autres étaient spontanés et ont fait l’objet d’une prise de note au sein de journal de terrain. Ces deux cadres ont donc été pris en compte dans l’exploitation des données.

Par ailleurs, une méthodologie hybride entre entretien et observation a été utilisée pour le secteur des éleveurs. Des journées d’immersion sur le terrain avec un interlocuteur principal comme référent ont également été réalisées avec les propriétaires de deux manades : la manade 1 et la manade 2, toutes deux situées sur la commune d’Arles. Ces journées ont permis de prendre connaissance du travail de manadier, grâce à l’observation d’activités d’élevage : arribage (action de nourrir les animaux), soins, préparation à la course camarguaise (il s’agissait ici d’aller chercher dans les champs le taureau qui participait à une course camarguaise le jour même, puis d’attacher les attributs à décrocher autour et entre les cornes). Mais ces journées ont aussi permis de rencontrer plusieurs personnes de la manade, des responsables aux employés.

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Plusieurs entretiens ont donc été effectués dans ce cadre, certains semi-dirigés et enregistrés avec un microphone, d’autres, plus improvisés, ont simplement fait l’objet d’une prise de notes pour compte-rendu.

Afin de synthétiser le corpus d’entretiens, nous avons classé les personnes rencontrées par secteur dans le tableau ci-dessous. Le l’abréviation ENR signifie que l’entretien a été enregistré, l’abréviation CR signifie que l’entretien a fait l’objet d’un compte-rendu. Les noms ont été remplacés par la première lettre du secteur suivie d’un numéro afin de rendre les entretiens anonymes.

Tableau 4 - Entretiens réalisés

Secteur Acteurs Interlocuteurs Enregistrement

et/ou compte-rendu Année

Élevages

Manadiers E1, manadier CR 2014

E2, manadier, manade 2 ENR 2015

E3, manadier, manade 2 ENR 2015

E4, manadier toro bravo,

agriculteur, manade 1 CR 2015

E5, manadier, agriculteur, manade 1 CR 2015

E6, manadier taureaux de rue ENR 2012

E7, manadier, vendeur de viande

AOP CR 2014

Éleveur de chevaux E8, éleveuse de chevaux camarguais CR 2013

Organisation

Clubs taurins O1, président d’un club taurin de

corrida ENR 2013

Organisateurs privés O2, directeur d’arènes, ancien

raseteur, ancien journaliste CR 2013

O3, directeur d’arènes, ancien

toréador CR 2013

Financeur privé O4, secrétaire de l’Union des Clubs

Taurins Paul Ricard ENR 2013

Financeur public O5, élu chargé des traditions à

Nîmes Métropole ENR 2013

O6, élu du conseil municipal de

Nîmes ENR 2013

O7, maire d’une petite commune ENR 2013

O8, élu chargé des sports de Nîmes CR 2013

O9, élu municipal de la ville de Milhaud (30), organisateur

d’évènements taurins pour Nîmes

Métropole et gardian amateur.

ENR 2013

FFCC I1, président ENR 2014

I2, directrice de la communication,

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Institutions

I3, secrétaire CR 2012

I4, directeur technique national, entraineur de raseteurs, ancien raseteur

CR 2014 Conservateurs de

musées spécialisés en tauromachie

I5, conservateur du Palais du Roure CR 2012 I6, gérant du Musée des Cultures

taurines (Nîmes), ancien toréador CR 2013

I7, conservateur du Musée du Vieux Nîmes et du Musée des Cultures Taurines (Nîmes)

CR 2013

Ecole taurine I8, tourneur, entraineur de raseteurs CR 2015

Sportifs

Raseteurs S1, écrivain, ancien raseteur,

consultant chez TV Sud ENR 2012

S2, raseteur du Groupe 2,

organisateur ENR 2013

S3, raseteur des As, champion 2015 ENR 2015 S4, raseteur des As, champion 2016 CR 2015

S5, raseteur des As. ENR 2015

S6, raseteur de l’Avenir Échec ENR CR 2015 S7, raseteur stagiaire CR 2012 Médias Presse quotidienne régionale, organisatrice du Trophée taurin

M1, journaliste de La Provence,

co-directrice du Trophée Taurin ENR 2014

M2, journaliste du Midi Libre,

co-directrice du Trophée Taurin ENR 2013

Télévision régionale M3, présentateur de l’émission Noir

et Blanc, journaliste de TV Sud,

ancien raseteur

ENR 2013

Publics

Spectateurs P1, vendeur de chichis CR 2015

P2, spécialiste des corridas,

réalisateur de l’émission Signes du

Toro sur France 3

CR 2012 P3, conservateur (musée

Dauphinois) et fondateur du musée camarguais.

CR 2012

P4, professeur d’espagnol, écrivain,

afeciouna de la course camarguaise

et auteur d’un recueil d’entretiens

autour de cette tradition populaire.

ENR 2012

Collectionneurs P5, collectionneur et artiste ENR 2014

P6, président du club taurin de

Châteaurenard, collectionneur ENR 2014

P7, collectionneur Échec ENR 2014

CR Spectateurs du

journal de terrain Spectateurs interrogés dans les arènes, données récoltées dans le journal de terrain. Certains spectateurs ont été choisis de

manière aléatoire, d’autres ont été choisis pour leur fonction : sponsor,

membre d’association, etc.

2012-2017 CR

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Quarante-trois personnes ont été interrogées pour l’enquête qualitative, entre 2012 et 2017. Il faut ajouter à cet échantillon les courtes discussions improvisées avec les spectateurs dans les arènes. Il faut également noter que, si les interlocuteurs sont classés en fonction de leur secteur d’acteur d’appartenance, plusieurs d’entre eux ont une double casquette. Par exemple, P2 fait à la fois partie des spectateurs et des médias, les deux responsables du Trophée Taurin sont à la fois des médias et des organisatrices, l’ancien raseteur S1 est aussi consultant pour la télévision TV Sud, I6, entraîneur dans une école taurine est aussi sportif (tourneur), etc. Cet aspect de double, voire triple, fonction des interrogés est tout à fait significatif de l’enquête de public qualitative. En effet, la plupart des personnes rencontrées ont une fonction principale professionnelle ou amateur, et ont en plus d’autres activités liées au milieu de la course camarguaise qu’ils pratiquent pour le loisir. Plus important encore, chaque interlocuteur est également spectateur(trice) de la course camarguaise, et pourrait donc figurer dans le secteur des publics. Cependant, des échelles d’assiduité aux arènes pourraient être établies, car certains interrogés sont afeciounas et fréquentent les arènes de très nombreuses fois par an, tandis que d’autres sont des spectateurs récents ou peu assidus. Ces derniers font donc partie de la catégorie des spectateurs néophytes. Tous ces éléments sont volontaires dans cette démarche d’enquête. L’échantillon a soigneusement été choisi pour correspondre à une large frange du public de la course camarguaise et ainsi préparer au mieux l’enquête quantitative.

1.2 Notice d’utilisation des données qualitatives

Les données récoltées dans le cadre de l’enquête qualitative par entretiens et observations sont utilisées dans cette partie pour expliciter le fonctionnement du champ de la course camarguaise. Des verbatims issus de retranscriptions des entretiens (à partir d’enregistrements ou de prises de notes issues du journal de terrain, tenu pendant quatre ans) sont utilisés pour rehausser la réflexion et l’analyse.

Le plan de cette seconde partie de thèse est structuré en fonction des secteurs d’acteurs sociaux du champ, ce qui n’empêche pas une circulation et une mise en relation des données pour expliciter les systèmes de relations et de communications inhérents au champ (et ce, à partir du guide d’analyse du champ établi précédemment).

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Le dernier chapitre de cette partie est consacré aux médias taurins, une catégorie d’acteurs aussi singulière que primordiale dans le champ de la course camarguaise. Le rôle central des médias, comme des publics sera analysé à partir de l’enquête qualitative et des entretiens menés avec les journalistes, consultants et autres contributeurs des médias taurins. Une veille des médias a également été effectuée durant toute la durée de la recherche. Elle consistait à surveiller quasiment quotidiennement la circulation et le contenu des informations concernant les manifestations taurines issues de sources journalistiques ou amatrices sur le Web et dans la presse quotidienne régionale (PQR) numérique et papier. De nombreuses émissions taurines

Noir et Blanc, diffusées sur la chaîne de télévision TV Sud, ont également été visualisées, en

direct ou en replay sur le Web. Ceci rentre dans le cadre de l’enquête qualitative par l’obtention de données grâce à une veille médiatique.

En conclusion, afin de comprendre le champ de la course camarguaise, nous devions nous intéresser à chaque secteur d’acteurs pour comprendre son fonctionnement. Pour cela, nous avons récolté une quantité importante de données qualitatives, qu’il s’agisse d’observations ou d’entretiens pour constituer un corpus d’analyse. L’objectif de cette partie est de donner un bon aperçu du fonctionnement global de chaque secteur d’acteurs. L’analyse se veut synthétique, même si chaque secteur aurait pu faire l’objet d’une thèse. De fait, chacune pourrait être encore plus longuement analysée, mais nous avons dû faire un choix dans les résultats pour en retirer l’essentiel et garder le fil conducteur de cette recherche : le fonctionnement interne du champ.

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Chapitre 2 - Règlementation, danger et passion : rencontre avec

les raseteurs et les institutions

« Il y a la passion pour l’animal, pour le taureau que je vais voir en pays,

et la passion pour le raset, pour le sport où l’objectif est de se faire plaisir. » Un raseteur.

Les raseteurs sont constamment en relation avec des organismes, des institutions qui régissent le milieu sportif. Les institutions de course camarguaises comportent deux sous-catégories distinctes : les écoles taurines, qui comme tout club sportif, dispensent un apprentissage sportif, et la Fédération Française de la Course camarguaise (FFCC), institution émanant du Ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.

Les écoles taurines sont relativement nombreuses sur le territoire : dix-sept au total. Il s’agit, pour les écoles taurines, de transmettre aux jeunes sportifs, nommés « stagiaires », les gestes techniques du raseteur, tout en développant les capacités physiques nécessaires à tout sportif de haut niveau (vitesse, endurance, force). Les écoles taurines sont en relation à la fois avec les jeunes sportifs qu’elles forment et avec la FFCC dont elles dépendent en termes d’assurance (la FFCC délivre les licences sportives).

La FFCC, en tant que fédération sportive, est quant à elle en relation avec le Ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports. Le ministère appartient à ce que nous nommerons le « champ du pouvoir ». Ce dernier est extérieur au champ de la course camarguaise, mais reste lié à la FFCC. La FFCC ou la « fédé » comme la nomment familièrement les acteurs du champ, est aussi en relation avec un bon nombre de secteurs du champ, des organisateurs aux sportifs, en passant le secteur de l’élevage. Seuls les médias et les publics restent en dehors du système relationnel qui s’instaure entre la FFCC et ces secteurs d’acteurs.

Dans ce chapitre, nous commencerons par observer les systèmes de relations entre l’institution unique de la FFCC et les autres catégories d’acteurs, puis nous analyserons les méthodes de formation de nouveaux sportifs par rapport au concept de transmission. Enfin, nous nous introduirons dans le monde des raseteurs pour mieux comprendre les enjeux internes de cette catégorie d’acteurs.

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2.1 Rôle et organisation de la FFCC : faire participer tous les acteurs pour contenter chacun est-il une utopie ?

2.1.1 Enjeux hiérarchiques entre le champ de la course camarguaise et le champ du pouvoir

La FFCC est reconnue par le Ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports depuis 1975. Selon I2, chargée de communication de la FFCC, la fédération est donc placée sous l’autorité de ce ministère, bien qu’elle existe sous la forme juridique d’une association (association Loi 1901). La chargée de communication souligne donc la nécessité pour l’association d’être en