I.4 Physique du contact métal/semi-conducteur
I.4.3 Conséquences pour les contacts des cellules photovoltaïques
Comme cela a été décrit dans la section 1 page 30, selon la théorie Schottky-Mott, il devrait être possible
d’obtenir des contacts ohmiques en choisissant un métal possédant un faible travail de sortie φ
M. Cela
permettrait théoriquement d’obtenir un transport non résistif des électrons grâce à la création d’une faible
barrière de potentiel ou d’une zone d’accumulation à l’interface métal/semi-conducteur. Cependant, en
comparant la variation de la barrière de potentiel en fonction du travail de sortie des différents métaux, il
s’avère que les résultats expérimentaux s’éloignent de la théorie. En pratique, une barrière de potentiel non
négligeable est toujours observée à l’interface du contact. Cette divergence est due à la création de défauts
de surface qui créent un continuum de niveaux électroniques dans le gap du semi-conducteur. Comme cela
a été expliqué dans la section 2 page 34, ces derniers ont pour conséquence d’ancrer le niveau de Fermi
E
f(S C), ce qui se traduit par une quasi-indépendance de la barrière de potentielφ
′b
par rapport àφ
M. Or, le
silicium présentant des liaisons covalentes, il est fortement altéré par les états de surface.
Le modèle à prendre en compte n’est donc plus celui de Schottky-Mott mais celui de Bardeen qui
montre que ces états de surface empêchent la réalisation de contacts ohmiques par le simple choix d’un
métal adapté. Dans le cas de la métallisation des cellules photovoltaïques industrielles, l’influence de ces
états est renforcée par l’utilisation de procédés de dépôt sous air ambiant comme la sérigraphie qui entraine
une oxydation et une contamination rapide de la surface. Ces considérations soulignent la nécessité de
trouver une alternative au choix du métal pour obtenir des contacts ohmiques lors de la métallisation des
cellules photovoltaïques.
En admettant que la conception de contacts ohmiques par choix du métal ne soit pas une solution
réaliste
[66], cette opération se fait grâce à un sur-dopage du silicium. En effet, l’étude des mécanismes de
transport au sein du contact métal/semi-conducteur décrite dans la section 1 page 38 montre que les
élec-trons photogénérés peuvent franchir la barrière de potentiel grâce à trois principaux mécanismes : l’émission
thermoïonique (TE), l’effet tunnel activé thermiquement (TFE) et l’effet tunnel (FE). L’expression théorique
de la résistivité de contact obtenue en unifiant ces trois mécanismes montre que celle-ci diminue fortement
lorsque le régime d’effet tunnel est activé. Dans ce cas, les électrons n’ont plus besoin de posséder une
grande énergie pour passer la barrière et un plus grand nombre de porteurs seront en mesure de
traver-ser l’interface semi-conducteur/métal. Comme l’importance relative de ce régime dépend fortement de la
concentration en donneurs, il est possible de moduler les propriétés électriques du contact en jouant sur le
dopage du matériau. En particulier, un semi-conducteur fortement dopé présentera une faible résistivité de
contact.
La figure I.27 résume les conclusions précédentes en présentant la variation de la résistivité de contact en
fonction du dopage pour différentes barrières de potentiel (qui représentent la majorité des métaux pouvant
être utilisés
[63,66,71,90,94]). D’un côté, si le semi-conducteur est faiblement dopé (N
D< 4,2·10
17cm
−3), la
résistivité de contact dépend fortement de la hauteur de la barrière car les électrons sont extraits par émission
thermoïonique. Dans ce cas, il y a une différence de 7 ordres de grandeur entreρ
c(φ
b= 0,5 eV) etρ
c(φ
b=
0,9 eV) pourN
D= 10
16cm
−3. Au contraire, si le semi-conducteur est fortement dopé (N
D>6,1·10
19cm
−3),
la résistivité du contact est quasi indépendante de la hauteur de la barrière car les électrons sont extraits par
effet tunnel. Dans ce cas, il y a une différence de seulement 1 ordre de grandeur entre ρ
c(φ
b= 0,5 eV) et
ρ
c(φ
b=0,9 eV) pourN
D=10
20cm
−3. Entre ces deux cas, la situation est intermédiaire avec une extraction
par effet tunnel activé thermiquement.
Dans le domaine photovoltaïque, les industriels utilisent donc des émetteurs fortement dopés pour
obte-nir des contacts peu résistifs. Typiquement, ils ont une concentration en phosphore de l’ordre de 10
20cm
−3.
De plus, il est alors possible d’utiliser de l’argent comme métal de contact pour sa bonne conductivité
(né-cessaire pour limiter la résistance de ligne) car le choix du métal n’a alors que peu d’importance sur la
résistivité de contact.
FigureI.27:Résistivité d’un contact métal/semi-conducteur sur du silicium type n en fonction du dopage et
de la barrière de potentiel calculée grâce à l’équation [I.49] page 41. Les lignes en pointillés délimitent la
moyenne du domaine de validité de chacun des mécanismes pour toutes les hauteurs de barrière
considé-rées. La zone grisée représente les valeurs typiques mesurées sur des cellules industrielles (voir le chapitre
suivant).
Néanmoins, l’hétérogénéité du contact déposé par sérigraphie entraine des pertes supplémentaires.
Comme cela est représenté par la zone hachurée sur la figure I.27, la résistivité mesurée sur les cellules
industrielles est 1000 à 10 000 fois supérieure à celle attendue théoriquement
[91,94,95]. Le chapitre suivant
s’intéresse donc à cet aspect clé de la métallisation en face avant. Pour cela, il revient d’une manière plus
détaillée sur le procédé standard, la création de la microstructure du contact et ses conséquences ainsi que
sur l’influence des différents paramètres du procédé. Par la suite, c’est une revue des différentes solutions
alternatives pour limiter les pertes dues à son utilisation qui est exposée.
Chapitre
II
État de l’art de la métallisation en face avant
II.1. Introduction : définition d’un bon contact
Le premier chapitre a mis l’accent sur la nécessité de limiter les pertes technologiques pour maximiser
les performances des cellules photovoltaïques industrielles. Au niveau de la métallisation en face avant,
ce sont principalement les pertes électriques, optiques et les recombinaisons surfaciques qui peuvent être
réduites. En premier lieu, les contacts doivent donc présenter de faibles résistances de ligneR
let de contact
R
c(enΩ).
La résistance de ligneR
l(le long d’un contact) est donnée par :
R
l=ρ
ll
fA
f=ρ
ll
fF
fw
fh
f[II.1]
oùl
f(en m),h
f(en m) etw
f(en m) sont la longueur, la hauteur et la largeur du contact. Pour des contacts
déposés par sérigraphie, la sectionA
f(en m
2) est calculée grâce au produitF
fw
fh
foù le terme correctifF
fprend en compte la forme caractéristique des lignes (pour d’autres types de contactsA
fpeut être différente,
voir la section III.6.5 page 121). Enfin, la résistivité de ligneρ
l(enΩ·m) traduit la qualité intrinsèque du
contact.
En considérant que le courant entre des deux côtés de chaque contact, la résistance de contactR
c(entre un
contact et l’émetteur) est définie par
[66,73]:
R
c=
p
ρ
cR
,cl
fcoth
w
f2
s
R
,cρ
c
[II.2]
oùρ
cest la résistivité de contact (enΩ·m
2) etR
,cest la résistance carrée de la couche sous le contact (en
Ω/). En règle générale, le contact est relativement large (w
f> 1,5p
ρ
c/R
,c) et le terme de droite tend
vers 1. Dans ce cas, l’expression [II.2] peut être approximée par :
R
c≈
p
ρ
cR
,cl
f[II.3]
Sachant que la longueur l
fest généralement fixée par les dimensions de la cellule et la disposition
des barres collectrices, les équations [II.1] et [II.3] montrent que pour limiter les pertes électriques, il
faut d’abord réduireρ
let ρ
c. Ces dernières peuvent donc être vues comme deux facteurs de qualité d’un
contact. Typiquement, les contacts des cellules industrielles sont caractérisés par une résistivité de ligne de
2,5 à 3,5µΩ·cm pour une résistivité de contact allant de 0,1 à 10 mΩ·cm
2. Selon la première expression,
une autre option est d’augmenter la section A
f. Cependant, les pertes optiques sont proportionnelles à la
largeur w
fdu contact. Il en est de même pour les recombinaisons qui sont beaucoup moins nombreuses
sous la surface passivée de la couche antireflet que sous la grille de métallisation. De plus, la nécessité de
trouver un compromis entre les pertes par ombrage et les pertes résistives dans l’émetteur ne permet pas de
déposer des contacts très proches si ces derniers sont trop larges. Par conséquent, il est préférable de réduire
leur largeurw
fet d’augmenter leur hauteurh
fplutôt que l’inverse. Ainsi, une autre figure de mérite de la
métallisation est le ratio AR = h
f/w
fqui s’échelonne entre 0,1 à 0,3 pour les contacts des cellules
indus-trielles. Enfin, il faut noter que la résistance shuntR
S hpeut également être affectée (en moindre mesure) lors
de l’étape de métallisation. Celle-ci doit être aussi élevée que possible pour limiter les fuites de courant et
la perte de puissance associée. Finalement, un contact peut être caractérisé par les quatre figures de mérite
précédemment citées comme cela est résumé sur la figure II.1.
FigureII.1:Schéma simplifié d’un bon contact.
Ce chapitre vise à présenter comment ces objectifs sont atteints à l’échelle industrielle. Dans la première
section, l’accent est mis plus sur la description technologique du procédé standard de métallisation. Dans
un second temps, les principaux résultats des recherches traitant des mécanismes de formation du contact
et d’extraction des électrons photogénérés sont exposés. Cette section revient en détail sur la disparité entre
la résistivité de contact théorique et celle mesurée expérimentalement (voir la figure I.27 page 43). Dans
un troisième temps, c’est une revue des principaux paramètres régissant la qualité de la métallisation qui
est présentée. Enfin, la dernière partie de ce chapitre détaille les motivations pour s’affranchir du procédé
standard avant d’introduire les principales solutions alternatives. Il se conclue par la formulation des
pro-blématiques de cette thèse.
Dans le document
Etude de la métallisation de la face avant des cellules photovoltaïques en silicium
(Page 59-63)