• Aucun résultat trouvé

l’ischémie cérébrale

2. Régulation des fonctions neuromusculaires par les afférences des groupes

2.6 Conséquences d’une ischémie cérébrale au niveau de l’ACM sur le thalamus

Le thalamus est rarement étudié dans les études expérimentales suite à une ischémie cérébrale corticale alors que cette région est fréquemment affectée chez l’Homme (Tamura et

al., 1990). Cette altération du thalamus est régulièrement associée à des déficits

sensorimoteurs et cognitifs (Freret et al., 2006; Briggs & Usrey, 2008). L’atteinte du thalamus du côté ipsilésionnel à la suite d’une ischémie cérébrale corticale (ou d'une occlusion de l'ACM) ne peut pas être la conséquence d’une diminution du débit sanguin dans ce territoire puisque l’artère commune postérieure irriguant le thalamus n’est pas directement affectée (Iizuka et al., 1990; Fujie et al., 1990; Dihné et al., 2002; Wei et al., 2004; Justicia et al.,

2008). Chez le rongeur, il est montré qu’une altération directe ou indirecte du thalamus suite à

sensibilité (e.g. hypersensibilité et/ou une allodynie1) au niveau du membre controlésionnel

(Yang et al., 2014; Matsuura et al., 2016a, 2016b). Plusieurs mécanismes pouvant être à

l’origine de l’altération du thalamus post-ischémique peuvent être proposés.

Dégénérescence neuronale

La dégénérescence neuronale dans le thalamus peut être liée 1) à l’altération d’un neurone (ou axone) induisant une dégradation progressive de l’arborisation terminale et de la gaine de myéline de son axone (dégénérescence antérograde) et 2) à une diminution de l’activité du corps cellulaire, perturbé par l’absence de support trophique lorsque ce dernier est séparé de son axone (dégénérescence rétrograde) (Ross & Ebner, 1990; Iizuka et al., 1990;

Fujie et al., 1990; Dihné et al., 2002; Justicia et al., 2008; Zhang et al., 2012). En accord avec

ces observations, le VPN est particulièrement vulnérable suite à une occlusion de l’ACM puisque de nombreuses connexions existent entre le VPN et le cortex somatosensoriel primaire (Iizuka et al., 1990; Watanabe et al., 1998; Dihné et al., 2002).

Réaction inflammatoire

Chronologiquement, la dégénérescence neuronale est associée à une réponse inflammatoire rapide (premiers jours) mais prolongée contribuant à l’établissement de la lésion secondaire (Acarin et al., 1999). Suite à la lésion ischémique causée par la MCAo-r chez le rongeur, une activation astrocytaire et microgliale est observée dans le VPN formant à terme une cicatrice gliale (Watanabe et al., 1998; Dihné et al., 2002; Block et al., 2005;

Justicia et al., 2008).

Mort neuronale

Le type de mort cellulaire dans le thalamus après une ischémie corticale reste encore controversé. Plusieurs signes indiquent que les neurones affectés présentent des modifications structurelles de type apoptotique (e.g. condensation de la chromatine, fragmentation du noyau avec corps apoptotiques) et/ou l’expression de médiateurs de l’apoptose (e.g. c-Jun, caspase-

3) (Soriano et al., 1996; Wei et al., 2004; Block et al., 2005). Une nécrose liée à

l’excitotoxicité dans la région thalamique est également reportée (Ross & Ebner, 1990).Il a récemment été mis en avant que la perte neuronale dans le thalamus peut être consécutive à une mort neuronale d’ordre « hybride » (i.e. un neurone mourant présente des caractéristiques à la fois de type nécrotique et apoptotique) (Wei et al., 2004) (Figure 2.6).

Figure 2.6 : Exemple de microscopie électronique de cellules suite à une ischémie du cortex. Mise en évidence de l’altération ultrastructurelle de neurones individuels dans le cortex ischémique et le thalamus ipsilésionnel.

(A) Neurone sain avec un noyau large, un volume cytoplasmique petit et des organelles intactes. (B) Neurone

ischémique dans le cortex (3 jours après la lésion) caractérisé par un cytoplasme enflé, des organelles altérées, une membrane détériorée (flèches rouges) et des vacuoles (*). (C) Neurone thalamique altéré (7 jours après la lésion corticale) avec des caractéristiques nécrotiques (vacuoles, organelles enflées, membranes détériorées) et apoptotiques (condensation de la chromatine) [Adaptée de (Wei et al., 2004)].

À partir d’analyses histologiques (e.g. crésyl violet), aucune modification structurelle ni de perte neuronale ne sont mises en évidence dans le thalamus et notamment dans le VPN durant les 3 premiers jours (Iizuka et al., 1990; Watanabe et al., 1999; Dihné et al., 2002). Il faut attendre la fin de la première semaine pour constater une détérioration nucléaire des neurones ainsi qu’une atrophie du cytoplasme (Iizuka et al., 1990; Dihné et al., 2002). Au

même moment, le nombre de neurones thalamiques commence à diminuer dans le thalamus du côté controlésionnel (Watanabe et al., 1999). Une perte neuronale de moitié est atteinte à partir de 2 semaines post-ischémique avec une réduction de 55 % dans le VPN indiquant une mort neuronale retardée des cellules qui se poursuit durant au moins 6 mois (Watanabe et al.,

1999; Dihné et al., 2002; Justicia et al., 2008).

Atrophie thalamique

Plusieurs auteurs confirment chez le rongeur, le primate non-humain et l’Homme, qu’une lésion ischémique du cortex induit inévitablement une atrophie sévère et progressive

de certains noyaux thalamiques (Tamura et al., 1990; Fujie et al., 1990).

Chez le modèle animal, cette atrophie peut débuter au cours des 2 première semaines (-13 %

vs. thalamus controlésionnel) se poursuivant jusqu’à 6 mois (-46 % vs. thalamus

controlésionnel) (Fujie et al., 1990). Chez l’Homme, Tamura et al. (1990) reporte une diminution graduelle de l’aire du thalamus ipsilésionnel de 3 mois à 1 an post-lésionnelle

En résumé, les afférences des groupes III et IV jouent un rôle inhibiteur sur les réflexes somatiques spinaux pendant et après un exercice fatigant chez le sujet sain (Bigland-

Ritchie et al., 1986; Garland & McComas, 1990; Duchateau & Hainaut, 1993). Or leur rôle

pourrait être modifié après une ischémie cérébrale, impactant ainsi la régulation de l’activité motrice. En effet, la perturbation des réflexe spinaux somatiques observée post-exercice à la suite d’une ischémie cérébrale pourrait être liée à une modification de l’action de ces afférences métabosensibles (Pin-Barre et al., 2014). Si l’activité de ces afférences est modifiée, il sera alors possible de le détecter en enregistrant soit la réponse des afférences à leurs stimuli chimiques soit la réponse des réflexes somatiques suite à l’activation spécifique de ces afférences. De plus, les influx nerveux en provenance des afférences des groupes III et IV pourraient aboutir dans le VPL du thalamus, qui semble indirectement affecté par une ischémie cérébrale. Une altération de ce noyau thalamique pourrait se traduire par une activation bilatérale de ce dernier suite à une activation sensorielle, comme cela a déjà été observé pour d’autres types de stimulations sensorielles (Murphy & Corbett, 2009). Il paraît important dans un premier temps, de déterminer si l’activation de ces afférences entraîne une réponse dans le VPL (ce qui sera discuté également chez le sujet sain) afin de pouvoir caractériser dans des conditions in vivo les altérations thalamiques. En effet, le thalamus pourrait être impliqué dans le traitement des informations sensorielles en provenance des afférences musculaires des groupes III et IV, bien qu’à ce jour cette hypothèse n’ait pas été validée expérimentalement (Foreman et al., 1979; Craig, 1995). L’enregistrement de l’activité thalamique au niveau du VPL après une stimulation de ces afférences est donc un moyen utilisé dans l’étude n°2 pour détecter les modifications éventuelles de l’action des afférences métabosensibles au niveau supraspinal suite à une ischémie cérébrale. Ainsi, dans la continuité de l’étude n°1, nous allons tenter de dégager une altération potentielle de l’action des afférences musculaires des groupes III et IV à divers étages après une ischémie cérébrale.

3. Étude n°2