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psychologique, la justice organisationnelle et l’échange leader- leader-membre

3. Le conflit famille→travail

En cohérence avec le choix de mesurer l’ancre de carrière « qualité de vie », il nous paraît intéressant d’utiliser dans notre travail de thèse la variable de conflit famille →travail. En effet, selon Katz et Kahn (1978), l’intrusion d'un rôle (ici le rôle familial) rendant la performance de l'autre rôle plus difficile (le rôle professionnel) peut avoir des conséquences sur l’intention de quitter.

Intégrer le concept de conflit famille→travail (FWC) dans notre travail de thèse permet de mesurer si les managers éprouvent un conflit de rôle entre leurs responsabilités personnelles et professionnelles. Ce conflit peut avoir une incidence sur l’intention de départ notamment parce que le retrait professionnel peut être alors une réaction d’adaptation face à des responsabilités familiales et professionnelles perçues par l’individu comme irréconciliables (Allen & al, 2000 ; Amstad & al, 2011 ; Nohe, 2014).

Les évolutions importantes au cours des dernières années (l’arrivée massive des femmes sur le marché du travail, la mondialisation des économies, l’augmentation du nombre de travailleurs indépendants, la précarisation de l’emploi etc.) ont accentué les tensions de rôle entre la sphère familiale et professionnelle, rendant ainsi parfois difficile leur conciliation. Ainsi, la participation à l'un de ces rôles rend difficile l’implication dans l’autre (Greenhaus & al, 1985).

Le concept de « conflit famille→travail » mesure la perception que les individus ont des conflits qu’ils perçoivent entre leur rôle professionnel et leur rôle personnel et familial. Les exigences générales d'un rôle se réfèrent aux responsabilités, aux attentes, aux devoirs et aux engagements associés à un rôle donné. Le conflit prend naissance lorsque des pressions ou des tensions apparaissent entre les différents rôles joués dans les sphères centrales de la vie sociale, professionnelle et familiale, rendant ces rôles incompatibles entre eux. Ces rôles, parfois en concurrence ou incompatibles, peuvent générer des tensions chez le salarié qui s’accompagne de stress et d’insatisfaction (Netmeyer & al, 1996). Le conflit naît aussi de la perception que l’individu a de ses responsabilités et de la nécessité pour lui de répondre

91 au même moment à des besoins et attentes différents et qui peuvent parfois s’avérer contradictoires (Frone & al, 1997).

3.1. La bidirectionnalité du conflit famille→travail

Dans les premières recherches effectuées sur le sujet, le conflit travail-famille était strictement mesuré de manière unidirectionnelle, c’est-à-dire que l’on s’intéressait seulement à l’interférence du rôle professionnel sur le rôle familial. Les recherches empiriques ont montré qu’il était au contraire pertinent de distinguer les deux types de conflit (Byron, 2005 ; Gutek & al, 1991 ; Mesmer-Magnus & al, 2005).

!! Le conflit travail→famille (WFC) est une forme de conflit inter-rôle dans laquelle les exigences générales, le temps consacré et les contraintes créées par le travail interfèrent avec l'exécution des tâches et responsabilités liées à la vie familiale.

!! A l’inverse, le conflit famille→travail (FWC) est une forme de conflit inter-rôle dans lequel les exigences générales, le temps consacré et les contraintes créées par la famille interfèrent avec la réalisation des responsabilités professionnelles.

A ce jour, les résultats de ces études semblent confirmer que ces deux types de conflit sont distincts malgré le fait qu’ils sont assez fortement corrélés (Netmeyer & al, 1996 ; Mesmer-Magnus & al, 2005). D’autres chercheurs adoptent une perspective multidimensionnelle du conflit en se penchant sur les déterminants ou les effets de divers types ou facettes de conflits potentiellement présents dans la vie des employés comme le conflit « travail → conjoint », le conflit « travail → parent » par exemple (St Onge & al, 1997 ; Aryee 1992 ; Greenhaus & al, 1981 ; Holohan & al, 1979).

Enfin, certains chercheurs privilégient une mesure reconnaissant une ou plusieurs des trois formes de conflit travail-famille identifiées par Greenhaus et Beutell (1985)

!! Le conflit basé sur le temps : le temps accordé à un rôle rend difficile d’accorder du temps pour assumer un autre rôle.

!! Le conflit basé sur les tensions de rôles : les tensions associées à l’exercice d’un rôle interfèrent avec les tensions liées à l’exercice d’un autre rôle.

!! Le conflit basé sur les comportements : les comportements associés à l’exercice d’un rôle s’avèrent incompatibles avec ceux liés à un autre rôle (Netemeyer & al, 1996 ; Carlson & al, 2000 ; Duxbury & al, 1991 ; Higgins & al, 1992).

Greenhaus et Beutell (1985) ont par ailleurs confirmé dans leurs travaux cette distinction entre l’interférence du travail dans la sphère familiale (travail → famille) et l’interférence de la famille dans la sphère professionnelle (famille → travail). Ainsi, le conflit famille → travail peut s’expliquer par le fait qu’un évènement de la sphère familiale rend impossible la présence de l’individu à son travail alors

92 que le conflit travail → famille implique un événement du milieu professionnel qui interfère dans la vie familiale. Ainsi, plusieurs auteurs ont mentionné qu’il existait une distinction cruciale entre le conflit travail → famille et le conflit famille → travail, nécessitant par ce fait même, une étude plus en profondeur de ces types de conflits au travers d’une vérification empirique (Gutek, & al, 1991 ; Byron, 2005).

Ces résultats ont été confirmés dans la méta-analyse de Mesmer- Magnus et Viswesvaran (2005). Les résultats obtenus dans cette étude qui englobe vingt-cinq études indépendantes suggèrent que, malgré un certain chevauchement, le conflit travail → famille et le confit famille → travail ont suffisamment de variance unique pour justifier un examen indépendant ; ces résultats permettent ainsi de renforcer l’idée de différenciation des deux types de conflit.

3.2. Les conséquences du conflit famille→travail

Parmi les conséquences du conflit travail → famille et famille → travail, on retrouve toutes les répercussions reliées à la santé mentale telle que le stress, l’anxiété, la dépression, l’épuisement professionnel et la détresse psychologique (Amstad & al, 2011 ; Grzywacz & al, 2003). Plusieurs études ont montré que le conflit travail-famille était corrélé avec un sentiment d’insatisfaction au travail (Anderson & al, 2002 ; Bruck & al, 2002 ; Parasurman & al, 2001 ; Kossek & al, 1998).

Ces études ont examiné la satisfaction dans son activité professionnelle et dans la vie en générale, la détresse psychologique, l’engagement et la performance au travail et, pour ce qui intéresse plus spécifiquement ce travail de recherche, l’intention de quitter son employeur (Allen & al, 2000 ; Amstad, & al, 2011 ; Kossek & al, 1998).

Ces méta-analyses soulignent donc les effets potentiellement négatifs du conflit travail →famille pour les individus et pour les organisations qui les emploient.

La méta-analyse de Kossek et Oseki (1998) s’est intéressée à plusieurs conséquences professionnelles de ce conflit de rôle, dont la baisse de performance, l’épuisement professionnel, l’absentéisme, le turnover. Les résultats obtenus démontrent que le conflit travail → famille et le conflit famille → travail sont fortement corrélés avec le désir de quitter son employeur. L’impossibilité de mener efficacement l’ensemble de leurs activités de front fait que les travailleurs doivent parfois prendre congé pour pouvoir répondre aux exigences familiales, se démotivent et expriment une volonté de quitter l’entreprise.

Étant donné la bidirectionnalité du concept, on s’attend à ce que les conséquences du conflit travail → famille soient davantage associées à la sphère familiale et que les conséquences du

conflit famille → travail soient liées à la sphère professionnelle. La méta-analyse d’Amstad et ses collègues (2011) montre ainsi que, pour le conflit travail → famille, les conséquences telles que la satisfaction à l’égard de la vie, la santé, le stress général, la tension psychologique, la dépression sont

93 majoritairement corrélées au conflit travail → famille. Les comportements vis-à-vis de l’organisation, la satisfaction professionnelle, le stress et plusieurs autres conséquences liées directement à la sphère professionnelle, sont reliés davantage avec le conflit famille → travail.

Il paraît donc pertinent d’inclure cette dimension dans un travail de recherche qui cherche à affiner notre connaissance des déterminants de l’intention de quitter.

Le choix se porte sur le conflit famille →travail plutôt que sur le conflit travail →famille pour deux raisons : nous cherchons à comprendre comment les perceptions des individus sur leur environnement professionnel peuvent influencer leur intention de quitter. S’attacher au conflit famille →travail permet de mieux appréhender la façon dont la famille peut avoir un impact sur le travail. D’autre part, la méta-analyse récente d’Amstad et ses collègues (2011) a montré, comme nous venons de l’évoquer, qu’il existe des corrélations entre cette dimension et le comportement vis-à-vis de l’organisation (et donc la perception vis-à-vis de cette même organisation) ainsi qu’avec l’intention de quitter, deux variables clés de notre modèle de recherche.

Dernière attitude au travail mesurées dans le cadre de cette recherche : la satisfaction de carrière qui est aussi un indicateur de la perception que l’individu entretient sur sa vie professionnelle.