3.3 Activités nitrifiantes
3.4.3 Conclusions et discussion
L’ajout de solution NB dans des boues activées nitrifiantes entraîne une augmentation de la
vitesse de nitrosation dépendante de la proportion d’ajout et de la concentration en ammonium
dans le milieu. En revanche, la vitesse de nitratation n’est pratiquement pas augmentée.
L’allure des respirogrammes est modifiée lorsque les boues contiennent une fraction de
solution NB : l’OUR
maxest plus élevée et diminue progressivement. Les différentes allures de
respirogrammes sont correctement reproduites par le modèle ASM_N. Ce modèle permet
d’estimer les proportions théoriques de chaque population, mais les vitesses de réaction
obtenues sont inférieures aux vitesses mesurées par analyses chimiques à cause du biais
observé précédemment pour la respirométrie en boues activées (§ 3.3.2.1.3). En revanche, les
constantes d’affinité des populations nitrosantes obtenues par calage semblent correctes.
Les vitesses de nitrosation de la solution NB obtenues en boues activées ou par dilution dans
des eaux de sorties filtrées sont similaires, ce qui indique le maintien de l’activité lors du
mélange avec des boues activées.
Par ailleurs, les tests de décantation réalisés ont montré que la biomasse de la solution NB
ajoutée à des boues activées se retrouve en quasi-totalité dans les boues décantées, d’après
les résultats concordant de l’observation microscopique des bactéries marquées et des mesures
respirométriques.
Les amas de bactéries constituant la biomasse de la solution NB adhèrent aux flocs des boues
activées, ce qui est favorable à leur maintien dans la station d'épuration, et leur confère
également une protection contre les prédateurs (protozoaires et autres macro-organismes).
Cependant, d’après les paramètres cinétiques de la biomasse nitrosante de la solution NB
(X
SA), les conditions normales de fonctionnement des stations d’épuration municipales à
faibles charges seront plutôt favorables aux populations autochtones des boues activées,
principalement en raison de la faible affinité pour l’ammonium des bactéries X
SA. En effet,
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lorsqu’une station d’épuration fonctionne correctement, la concentration en ammonium dans
le bassin d’aération est faible (<2
mgN-NH4/L), et donc favorable aux bactéries nitrosantes de
type –K comme Nitrosomonas oligotropha concurrentes pour le substrat.
L’utilisation des solutions commerciales de bio-augmentation est généralement envisagée en
cas de problèmes de nitrification, donc pour des systèmes dont la concentration en ammonium
est plus élevée que lors de son fonctionnement normal. Ainsi, la population X
SAajoutée dans
une station d’épuration nitrifiant partiellement sera initialement très active, mais sa vitesse de
nitrosation et de croissance diminuera à mesure que les performances de nitrification
s’amélioreront. Les populations autochtones prendront alors probablement le relais.
Dans le cas d'un traitement appliqué en vue d’une augmentation de la charge à traiter d’une
installation fonctionnant normalement (station touristique, unité mobile de déshydratation des
boues, etc.), l’ajout de la solution ne devra pas être effectué longtemps avant l’arrivée de la
surcharge. En effet, la population X
SAintroduite ne se maintiendrait probablement pas dans le
système contenant trop peu d’ammonium, car elle est peu adaptée à ces conditions, en
comparaison des populations autochtones.
En revanche, lors de l’augmentation de la charge et de la concentration, l’activité nitrosante
de cette population (X
SA) pourra suppléer à l’activité des populations autochtones, le temps
que celles-ci se développent. Cependant, la compétition pour l’ammonium avec les
populations autochtones retardera probablement l’installation d’une nouvelle population de
type autochtone en quantité suffisante pour nitrifier la charge reçue. Cette stratégie semble
donc risquée apriori pour maintenir le respect des niveaux de rejet. Dans ce cas de figure, une
autre stratégie peut également être envisagée, consistant à augmenter artificiellement la
population autochtone par des injections contrôlées d’ammonium préalablement à l’arrivée de
la surcharge. Mais cette stratégie est également délicate car le substrat carboné nécessaire à la
dénitrification pourrait alors venir à manquer.
Dans un système discontinu de type SBR (Sequencing Batch Reactor), les concentrations en
ammonium du milieu subissent des variations importantes à chaque cycle, évoluant
progressivement de la concentration d’entrée à la concentration de sortie. Yuan et al. (2008)
ont montré par la simulation que ces variations de concentrations favorisent les bactéries de
stratégies –r par rapport aux bactéries de stratégies-K. Ainsi, l’utilisation de solutions
commerciales pour ensemencer les boues d’un SBR devrait s’avérer plus efficace que pour les
systèmes classiques.
CemOA : archive ouverte d'Irstea / CemagrefCes tendances envisagées apriori devront être confirmées par la modélisation de scénarios de
bio-augmentation, qui permettra également d’évaluer les quantités utiles, les conditions
adéquates (gestion de l’aération, rétention éventuelle de l’effluent en bassin d’orage, etc.), et
l’effet attendu de la bio-augmentation ponctuelle d’un système nitrifiant. Cette modélisation
pourra être réalisée avec un modèle incluant toutes les populations des boues bio-augmentées,
c.à.d. la biomasse hétérotrophe et les quatre populations autotrophes du modèle ASM_N.
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Conclusions générales et perspectives
CemOA : archive ouverte d'Irstea / CemagrefCemOA
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Dans les stations d’épuration municipales nitrifiantes, des évènements ponctuels peuvent
parfois provoquer une diminution momentanée du rendement épuratoire, et affecter
particulièrement l’activité nitrifiante (baisse subite de la température, augmentation brutale de
la charge à traiter, transit d’un toxique, etc.). Or, cette étape transitoire peut perdurer si les
conditions ne sont pas favorables au développement de la biomasse nitrifiante.
La bio-augmentation a été étudiée dans ce cadre, en tant que stratégie visant à assurer une
restauration rapide de l’activité nitrifiante. Ce travail a été plus particulièrement focalisé sur la
capacité d’adaptation d’une population nitrifiante exogène dans une station d’épuration
municipale à très faible charge.
Différents outils issus des domaines de la biologie moléculaire et du génie des procédés ont
été mis en œuvre afin d’étudier les populations nitrifiantes des stations d’épuration
municipales à très faibles charges et de les comparer à une population issue d’une solution
nitrifiante commerciale destinée à la bio-augmentation (appelée solution NB).
13 stations d’épuration municipales nitrifiantes de différentes tailles ont été échantillonnées à
différentes périodes échelonnées sur 20 mois. Les populations nitrifiantes de ces échantillons
ont été analysées selon plusieurs approches permettant de caractériser leur diversité, leur
abondance et leur activité, de même que celles des populations de la solution NB. L’étude
d’un large spectre d’échantillons provenant de systèmes du même type a permis de tirer des
conclusions générales pouvant être étendues à la majorité des stations d’épuration municipales
à très faible charge.
Principaux résultats
Les échantillons ont été analyses suivant trois axes : diversité des communautés nitrosantes,
abondance des biomasses nitrosantes et nitratantes et activité nitrifiante de ces populations.
Diversité
Les communautés nitrosantes ont été analysées par la méthode de typage moléculaire DGGE
permettant d’observer leurs profils sur la base des variations de séquence de l’ADNr-16S.
De ces analyses, il est ressorti que les communautés nitrosantes des boues activées de stations
d’épuration municipales à très faibles charges sont largement dominées par une espèce du
groupe 6a-Nitrosomonas oligotropha, excepté dans le cas d’une seule station parmi les 13
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Dans le document
Bio-augmentation de l'activité nitrifiante des boues activées
(Page 194-200)