1.2 Populations nitrifiantes
1.3.3 Bio-augmentation occasionnelle
La bio-augmentation peut être envisagée comme un moyen de faire face à des situations
problématiques transitoires, comme la perte accidentelle de biomasse nitrifiante (toxique dans
les eaux résiduaires, traitement du foisonnement par chloration, très faible température), ou
l’augmentation brutale de la charge à traiter (stations touristiques, unité mobile de
déshydratation des boues, etc.). Il s’agit dans ces cas de figure d’interventions ponctuelles
visant à limiter les problèmes liés à un évènement perturbateur.
Deux types de biomasse nitrifiante peuvent alors être ajoutés :
• Les biomasses contenues dans des solutions commerciales, proposées par des
entreprises spécialisées dans les produits de bio-augmentation. Ces solutions
renferment des cultures concentrées de souches sélectionnées pour leur activité
nitrifiante.
• Des boues activées, éventuellement enrichies préalablement dans un milieu sélectif.
Il est par ailleurs possible d'augmenter la capacité nitrifiante d'un système en dopant
directement l'influent de la station d’épuration avec de l'urée ou de l'ammonium durant une
certaine période. En augmentant ainsi la charge azotée en entrée (B
V), on augmente la
capacité nitrifiante du système. Cependant, l'application d'une plus forte charge azotée
nécessite un ajustement du fonctionnement de l'installation et probablement un ajout de
carbone organique de source extérieure afin de permettre une dénitrification suffisante.
Cette stratégie a été appliquée sur certains sites, mais aucune documentation précise ne
permet de s'y référer. La modélisation d’un système devrait permettre d’évaluer la faisabilité
de ce type de stratégies en fonction des données du système et de l’augmentation d’activité
souhaitée.
CemOA : archive ouverte d'Irstea / Cemagref1.3.3.1 Objectifs
(Re)démarrage de la nitrification, lors de pertes accidentelles de l'activité nitrifiante, ou
pour des installations ne nitrifiant pas toute l'année (redémarrage annuel de la
nitrification). Dans ces cas, l'objectif sera d'installer une flore nitrifiante active et stable le
plus rapidement possible, afin de réduire la période pendant laquelle les niveaux de rejets
ne sont pas respectés (période pouvant durer plusieurs mois en l'absence d'ajouts). Il s'agit
d'une stratégie curative, visant à palier à un dysfonctionnement du système de traitement.
Augmentation de la capacité nitrifiante, en prévision d'une surcharge, (par exemple dans
les villes touristiques, où l'arrivée des touristes s'accompagne d'une hausse conséquente de
la charge à traiter), la bio-augmentation pourrait être employée pour augmenter la capacité
nitrifiante de l'installation avant l'arrivée de la surcharge. Il s'agit d'une stratégie
préventive, permettant d'anticiper un accroissement de charge à venir.
1.3.3.2 Recensement des expériences existantes
1.3.3.2.1Solutions commerciales
L’introduction d’une solution commerciale contenant des bactéries nitrifiantes dans un
système aux conditions inadaptées à la nitrification (faible température et/ou âge de boues)
permet l’installation de la nitrification de façon transitoire. L'activité nitrifiante ne se
maintient donc pas après arrêt des ajouts (Abeysinghe et al. 2002). De plus, les bactéries
ajoutées présentent une plus grande sensibilité à la température (θ
SA=1,17) que les bactéries
autochtones (θ
BA=1,10).
Par contre, dans un pilote de type SBR (Sequecing Batch Reactor) présentant des conditions
de température et de fonctionnement favorables au maintien de la biomasse nitrifiante, un
ajout de solution commerciale réparti sur une semaine a permis d'augmenter la capacité
nitrifiante d’un facteur 2,0 à 4,5 d’après Fouratt et al. (2003). Mais les pilotes n'ont été suivis
qu’une semaine après augmentation, donc pas assez longtemps pour vérifier le maintien de
l’activité et de la flore ajoutée à long terme.
La documentation fournie par un fabricant de solution nitrifiante fait état de deux
redémarrages de la nitrification dans des stations d'épuration municipales. La première,
traitant 4500 m3/j, (soit environ 20 000 EH) a récupéré la capacité nitrifiante perdue en 6
jours de traitement grâce à 27 kg de solution. L'autre, traitant 11300 m3/j, (soit environ
CemOA
: archive
ouverte
d'Irstea
55 000 EH) redémarre la nitrification chaque année au mois de Mai, en 5 jours, à l'aide de
seulement 16 kg de solution, dont une partie est préalablement acclimatée en présence de
boues activées durant une semaine dans un réacteur annexe au système.
Les études de bio-augmentation utilisant des bactéries d’origine commerciale sont
généralement réalisées par des personnes liées à l’entreprise produisant la solution, et les
exemples reportés sont donc uniquement des exemples de réussite (Parker et Wanner 2007). Il
est donc difficile de proposer un point de vue objectif sur l’efficacité de ces solutions.
Toutefois, il est probable que les bactéries contenues dans ces solutions soient différentes des
bactéries autochtones des boues activées, vu les contraintes de leur production. En effet, la
production des solutions commerciales nitrifiantes vise un rendement élevé (production rapide
de biomasse) et une activité nitrifiante importante. Les espèces sélectionnées sont donc
probablement de stratégie –r, et la production est très certainement réalisée à très forte charge
en ammonium.
1.3.3.2.2Boues enrichies
L'utilisation de boues enrichies permet d'introduire une population nitrifiante intégrée dans
des flocs, ce qui favorise le maintien des ajouts dans le système. Cependant, l'étape
d'enrichissement des boues est problématique pour diverses raisons : elle nécessite une source
d'ammonium et d'alcalinité (HCO
3-), un réacteur de culture doit être conduit et contrôlé
(régulation délicate du pH), et la durée de mise en culture risque d'être longue vu le faible
taux de croissance des bactéries nitrifiantes.
La culture de boues activées avec un substrat azoté, et sans source de carbone dissous conduit
à un enrichissement des boues en bactéries nitrifiantes mais aussi à une perte importante de la
biomasse totale (Kim et al. 2005). On obtient alors une augmentation de la vitesse de
nitrification spécifique (en mg
Nnit.g
MVS-1.h
-1) mais une diminution de l’activité nitrifiante
totale (en mg
Nnit.L
-1.h
-1). L’utilisation de membranes, qui permet de conserver l’intégralité de
la biomasse, peut être envisagée pour réaliser un enrichissement plus efficace.
Cependant, le facteur limitant de cette stratégie est la durée de culture nécessaire. Cette
stratégie n’est donc pas adaptée pour un (re)démarrage non planifié (perte accidentelle de
l’activité nitrifiante). Par contre, elle peut être envisagée dans les cas où l'on peut anticiper
une augmentation de charge en azote de l’installation.
CemOA
: archive
ouverte
d'Irstea
1.3.4 Conclusions
La bio-augmentation de l’activité nitrifiante, comme procédé d’enrichissement continu d’un
système épuratoire a été écartée du champ d’investigation de ce travail, car l’application de
tels procédés en France ne peut être envisagée que pour une minorité de stations dépuration
municipales.
La bio-augmentation ponctuelle est envisagée pour faire face à des évènements transitoires.
L’étude de cette application sur site réel pose un problème d’anticipation, notamment pour le
traitement de problèmes accidentels.
Dans le document
Bio-augmentation de l'activité nitrifiante des boues activées
(Page 62-65)